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La forêt maudite : le joueur tombe dans l’horreur

Après avoir dédié toute une chronique à la ville d’Alexandrie, il était évident que je n’allais pas m’arrêter en si bon chemin. Je me suis donc mis à réfléchir au lieu qui pourrait servir de sujet juste après cette impressionnante capitale. Il faut dire qu’elle avait déjà su placer la barre bien haute, mais les grandes cités ne manquent pas dans l’univers de Final Fantasy IX. Pourtant, ce n’est pas du tout vers un lieu grouillant d’habitants que l’on va se tourner aujourd’hui. En fait, je me suis remémoré dans ma tête le chemin que l’on faisait depuis le début de cette épopée. Et je me suis donc dit qu’il serait pertinent de se pencher sur l’endroit venant juste après notre fuite du royaume de Branet. Voilà pourquoi notre sujet du jour n’est nulle autre que la terrifiante forêt maudite. Alors oui, on pourrait se demander s’il y a beaucoup à dire sur ce lieu servant de premier donjon au joueur. Mais plus je me rappelais ce passage du jeu et plus je me suis rendu compte qu’il y avait en réalité énormément de choses à dire dessus. J’espère donc que vous avez le cœur bien accroché, car aujourd’hui on va retourner au sein de ces sinistres bois.

Un atterrissage compliqué

Pour rappeler un peu le contexte, ce passage se situe juste après que les Tantalas ont réussi à kidnapper la princesse Grenat. Malheureusement, l’aérothéâtre se retrouve en piteux état à la suite des attaques de Branet et ses hommes. C’est ainsi que le groupe s’écrase en plein cœur de bois luxuriant et flippant où le brouillard semble avoir aussi son emprise. Première chose importante à signaler concernant la forêt maudite est le changement de ton que l’on peut avoir par rapport au début de l’histoire. Comme j’avais pu l’évoquer dans ma précédente chronique sur Alexandrie, les premiers pas du joueur se font dans la bonne ambiance, l’humour et un côté théâtral. Mais en arrivant finalement dans cette zone, c’est une toute autre ambiance qui va se jouer. Il est fini le temps des rires et de l’insouciance. On a beau ignorer au départ ce qui peut résider dans cette forêt, le malaise est pourtant là. Le fait d’être entouré d’une nature impressionnante et pourtant assez terne ne rassure pas le joueur qui comprend vite que ce lieu est loin d’être amical. En plus de ça, l’urgence de la situation ne fait qu’accentuer cette oppression que va pratiquer la forêt maudite à notre encontre. Mais c’est en avançant un peu que l’on va réellement prendre conscience du danger qui rôde ici. On fait face à un ennemi qui a pris en otage Grenat et que l’on doit tenter de secourir. Le monstre devant nous apporte un sentiment de malaise du fait de sa nature à la fois végétale et organique. D’ailleurs, même si on arrive à le vaincre, il finira par emporter l’héritière de Branet tout en empoisonnant au passage Steiner et Bibi. Une victoire qui sonne comme une défaite cuisante pour nous au vu de ce qu’il se passe et surtout du fait que le temps est compté pour sauver Grenat.

Et donc, comme si cela ne suffisait pas, on a dans notre esprit ce chrono qui tourne même si tout est scripté. Tout est pensé pour que le joueur ait le sentiment qu’il faut se dépêcher sous peine que le pire arrive. Là encore, cela montre bien à quel point la forêt maudite n’est pas uniquement un lieu que l’on va explorer comme ça. Cette zone a un véritable impact sur les personnages et le joueur qui se retrouvent à devoir faire des choix pour espérer s’en sortir. Ce passage va ainsi symboliser le départ de Djidane des Tantalas et son alliance avec ses futurs compagnons de route. Au milieu de ces bois, c’est un nouveau départ qui s’opère pour le héros et qui sonne un peu comme le véritable début de son aventure personnelle. C’est ainsi que l’on va chercher à s’engouffrer au cœur de la forêt maudite dans le but de secourir cette demoiselle en détresse. Mais là où on pourrait avoir le sentiment d’être un héros sans peur et sans reproches, on ne peut se détacher de cette crainte de ce qui nous attend. Ainsi, avant même que l’on soit prêt à explorer les lieux, on est déjà totalement imprégné de cette atmosphère lugubre qui nous entoure. La musique joue aussi un rôle essentiel ici, car même si elle ne se veut pas pleinement effrayante, elle donne ce sentiment d’être seul au monde. Trois individus qui s’aventurent dans un environnement qui leur est hostile et qui symbolise surtout une bulle où la nature a tous les droits. La seule chose que l’on sait et qui va nourrir un peu plus notre angoisse sur ce qui nous attend est cette petite scène que l’on va assister au loin. Alors que l’on progresse, la caméra s’éloigne de nous et nous amène au cœur de ces bois où l’on peut observer une étrange et inquiétante lueur rouge au milieu de nombreuses racines. Un avertissement pour le joueur qui devra lutter contre la peur pour arriver jusqu’ici.

Forêt maudite FF9

Une atmosphère pesante

Avant d’attaquer pleinement le principal obstacle à venir dans la forêt maudite, il est crucial de parler de cette dernière de façon plus globale. Quand on y pense, ce type de lieu a souvent un double visage. Dans la vie, des bois peuvent autant être source de dépaysement que d’un profond sentiment d’isolement. En effet, en journée nous pouvons aisément nous aventurer au milieu d’une telle zone tandis que la nuit, ce qui nous semblait paisible se transforme en cauchemar. Le moindre bruit ou sifflement du vent vient nous glacer le sang. Le fait de se sentir coupé de tout est à double tranchant, car on se sent dépaysé, mais aussi sans défense si quelque chose devait arriver. Un sentiment que nous fait rapidement ressentir notre sujet du jour. Pour cela, il faut tout d’abord comprendre que l’on est plongé dans cette forêt au beau milieu de la nuit. Sans savoir où fuir ni où se cacher, nous sommes directement projetés dans une situation tendue renforcée par ce sombre voile qui recouvre la zone. Voilà pourquoi, quand on avance dans ce donjon, il y a toujours une crainte qui noue l’estomac du joueur. Et c’est encore plus remarquable de ressentir ça alors que ce lieu n’est découpé finalement qu’en très peu de secteurs. La nature que l’on peut observer ici et là dans le jeu arrive à nous procurer un petit sentiment d’émerveillement. Mais cela est très vite rattrapé par les combats qui déboulent et qui vont mettre à l’honneur des ennemis lambdas et qui pourtant vont donner un peu plus de vie à cet environnement. Une certaine manière de briser le silence de la région tout en montrant l’hostilité de ce monde. Mention spéciale au Nélombo, cette fleur géante volante qui se présente comme le second ennemi végétal que l’on affronte après le Maton et qui continue de créer le malaise propre à ce lieu.

En fait, si la forêt maudite est bien sûr victime de la brume qui assaille une bonne partie du continent, elle symbolise aussi autre chose. Elle nous montre une nature qui a repris ses droits et qui chasse tous ceux qui osent s’en prendre à elle. Ici, l’homme n’a pas sa place face à la puissance de cette entité qui régit tout ce qui anime cette forêt. Un changement radical après avoir visité Alexandrie qui représente bien la victoire de l’être humain sur la nature. Cependant, entre ces arbres, c’est une toute autre histoire. La proie c’est nous et on a juste envie de récupérer au plus vite Grenat pour fuir, car on sait pertinemment que plus le temps passe et plus il sera impossible d’échapper aux forces qui gouvernent ce lieu. D’ailleurs, je tiens aussi à m’attarder sur une zone un peu singulière de la forêt maudite et qui apporte un peu de réconfort au milieu de cet enfer. Il s’agit de ce petit havre de paix où repose une source d’eau revigorante au sein d’un tronc en son centre. Un lieu où les combats n’ont pas lieu et qui permet de se reposer tout en récupérant ses points de vie. En plus de ça, la présence d’un mog dans cet endroit spécifique vient encore plus appuyer le cocon que représente cette partie du donjon. Un petit instant de calme où l’on peut souffler avant de reprendre la route. Il est aussi très intéressant de noter que cette source réparatrice fait l’objet d’un véritable travail de mise en scène de la part des développeurs. Située en plein centre de la scène et entourée par la lumière de la lune, on sait instinctivement qu’il est possible d’interagir avec en plus de représenter habilement un petit espoir au milieu de cette sombre forêt. Une pause salvatrice et qui vient contrebalancer toute l’oppression que l’on pouvait ressentir avant.

Le réel danger de ce lieu

On arrive maintenant à un moment fatidique dans l’exploration de la forêt maudite et surtout de l’impact qu’elle va avoir sur le joueur. En effet, on finit par arriver face au boss de ce lieu qui se présente encore comme une fleur géante mutante qui va nous attaquer avec ses longues racines comme si c’étaient des fouets. Derrière elle, on voit Grenat complètement ligoté et impuissante tandis que l’on doit se confronter à cet ennemi. Petit fait important, il s’agit réellement de notre premier vrai boss du jeu et on peut dire que l’effet est réussi. On a vraiment ce côté malsain qui ressort face à cette créature qui pousse d’étranges cris et qui semble si imposante par rapport au groupe. L’être qui se présente comme le seigneur de cette région et qui ne laisse personne échapper à son emprise. Là encore, le décor joue un rôle crucial dans notre immersion du moment. Dans cette antre où l’on est entourée de racines et lianes donnant l’impression d’être cerné de toutes parts par une myriade de tentacules, on se sent mis au dos du mur. Ce n’est qu’au bout de plusieurs efforts, et l’arrivée de Frank, que l’on pourra réellement venir à bout de cette monstruosité. On pourrait alors croire que tout s’arrange. Après tout, on vient de secourir notre nouvelle camarade et on a terrassé ce qui semblait être le chef de cette forêt maudite. Pourtant, c’est réellement là que le cauchemar commence. Là où se trouvait le boss apparaît un trou d’où vont sortir les arachnées. Des monstres qui ressemblent à un croisement entre des insectes et une fleur. Et franchement, la première fois que j’y ai joué, ces créatures m’ont donné bien des frissons. Elles caractérisent ce qu’il y a de plus effrayant dans ce lieu, et cela, bien plus que Blambourine, l’immense plante organique que l’on venait de battre. 

De par leur design, leur gestuelle ou même leur vivacité, le joueur et les personnages comprennent rapidement l’effroi qu’elles cherchent à nous faire ressentir. C’est d’ailleurs bien pour ça qu’il n’est pas question de les vaincre, mais de fuir le plus vite possible. En nous poussant à ça, le studio voulait justement appuyer le fait qu’il est techniquement impossible de réellement vaincre ce lieu et sa faune. Alors que le groupe ne compte que quatre combattants et une princesse encore inconsciente, en face se trouve une vague inarrêtable d’adversaires prêts à entraîner de nouvelles victimes dans les entrailles de la forêt maudite. On remarquera aisément aussi l’inspiration à Starship Troopers autant dans le style de ces monstres que dans le sentiment de faire face à une horde qui ne faiblit jamais. Ce n’est pas pour rien qu’il est impossible de vaincre toutes les arachnées qui nous poursuivent. C’est un flot continu d’ennemis qui rattrape les héros tant que l’on ne décide pas de quitter ces bois. Si cela est un vrai petit bonheur pour les farmeurs en herbe, cela permet aussi d’appuyer le fait de courir le plus vite possible. On nous montre clairement, à travers cette représentation de la colère de ce lieu, qu’il n’y a absolument aucune chance de victoire. L’unique moyen de s’en sortir est de quitter cette zone. Ainsi, cette course-poursuite effrénée nous prouve que ce monde a aussi des endroits où l’homme n’a tout simplement pas sa place. Un environnement hostile autant par sa faune et sa flore et qui n’appartient qu’à cette nature sauvage et féroce. Si cette angoisse monte de plusieurs crans dans cette course-poursuite, ce n’est rien par rapport à la façon dont la forêt maudite va tirer sa révérence. Une cinématique qui va glacer le sang de bon nombre de joueurs au vu de ce qui se passe.

FF9 - Forêt maudite roi

La forêt maudite laisse sa marque

Le passage que l’on va aborder ici est le point culminant de notre virée au sein de la forêt maudite et surtout une parfaite manière de faire nos adieux à ce lieu cauchemardesque. En fait, la scène qui vient conclure cette partie de l’histoire représente très bien tout ce que l’on a pu dire un peu plus haut et surtout nous délivrer un dernier moment d’effroi avant que l’on ne quitte à jamais cet endroit. C’est en finissant de parcourir la dernière zone de ces bois que va se déclencher une cinématique où Djidane va nous dire un message très intéressant. Il dit qu’en dehors des monstres qui les poursuivent, c’est toute la forêt qui semble se dresser contre eux. Un sentiment qui va se confirmer dès lors qu’ils arrivent dans la dernière ligne droite. Là, en plus de la myriade d’arachnées qui les poursuivent, il y a aussi d’impressionnantes ronces qui prennent vie et qui cherchent à leur barrer la route. N’ayant réellement aucune origine propre ou de monstre dédié à ces attaques, ces dernières sont en réalité une manière terrifiante et réussie de montrer que c’est la nature elle-même qui cherche à les retenir. Le danger n’a alors jamais été aussi pesant tandis que l’on touche du bout des doigts notre porte de sortie. En plus de ça, le joueur est ici purement spectateur et ne peut en rien influencer le destin des personnages. Un sentiment d’impuissance qui nous fait juste espérer que tout finisse par s’arranger. Et pourtant, si nos héros vont s’en sortir, ce ne sera pas sans heurts. On observe, terrifié, une arachnée qui rattrape Djidane. Et avant que celui-ci ne soit attrapé, c’est Frank qui prend sa place. Cette image du jeune homme retenu prisonnier dans les pinces du monstre, cherchant à se débattre, avant de finalement se résigner en jetant la carte est incroyablement forte. 

Dans l’esprit du joueur, voilà le point culminant de ce voyage dans la forêt maudite. Un sacrifice qui permettra à nos héros de s’en sortir, mais qui montre aussi le côté impitoyable de cette zone où il est impossible de venir aider ce compagnon pour le moment. Djidane réussit alors à s’enfuir à temps et tout le monde observe la forêt se pétrifier comme si elle entrait dans une longue phase de repos après toute cette agitation. Notre périple ici se termine sur l’image d’un Frank entièrement fait de pierre, toujours coincé entre les mandibules de la créature, et qui attend désespérément le jour où il reviendra parmi les vivants. Quand on y pense, cette entrée en matière dans l’univers de FFIX est particulièrement marquante d’un point de vue horrifique. Tandis que l’on venait de quitter une ville splendide avec tout un tas de choses à faire, on se retrouve dans un environnement infernal où chaque pas serre un peu plus notre cœur. Un donjon qui va finalement montrer que même en vainquant le boss, il est impossible de réellement mettre un terme au danger que représente la forêt maudite. Sûrement l’une des premières zones les plus impactantes de la série tant on va être témoin d’une sorte d’échec de la part des protagonistes en n’ayant pas pu sauver Frank ou même en n’ayant pu terrasser tous ces ennemis. En s’aventurant dans ces bois, c’est le joueur lui-même qui est confronté à la dangerosité de ce monde et surtout au fait que même les héros ne peuvent pas forcément tout accomplir. J’espère en tout cas que cette chronique vous aura plu et qu’elle sera parvenue à souligner au mieux tout ce qui fait la force de ce lieu emblématique de ce neuvième opus. N’hésitez pas à me dire dans les commentaires votre propre ressenti par rapport à ce passage. On se retrouve très vite pour de nouvelles virées vidéoludiques.