Uramishi

Leçons de vie avec grand-frère Uramichi T1 : un enseignement drôle et cynique

Quand on se penche un peu sur la question, il est assez rare finalement qu’un manga cherche à traiter, par le biais de l’humour, des nombreux malheurs qui peuvent rythmer une vie. Soit il est souvent question de présenter directement le sujet en question d’un point de vue dénonciateur ou bien de l’amener de façon plus nuancée ou discrète. Mais qu’est-ce que donnerait une série qui traiterait de telles thématiques d’un point de vue plus cynique et humoristique ? C’est exactement à cette question que répond la dernière licence en date de Mana Books : Leçons de vie avec grand-frère Uramichi. Ce titre avait déjà eu le droit à une adaptation en 2021 et est disponible sur Crunchyroll. Je n’avais pas eu l’occasion de me pencher sur celle-ci et voilà pourquoi je me suis dit que ce serait intéressant de se pencher maintenant sur le matériau de base. On m’avait un peu annoncé ce qui allait m’attendre au sein de cette histoire, mais j’ai trouvé que le titre était particulièrement intéressant dans sa proposition et surtout sa manière de la raconter. Soyez donc prêts à faire la connaissance d’un présentateur qui en a gros sur le cœur.

Un homme au sourire bien triste

Dès la lecture de ce synopsis, “Leçons de vie avec grand-frère Uramichi” veut clairement nous faire comprendre dans quelle direction l’auteur veut nous emmener. Un manga qui va confronter le regard innocent d’enfants au vécu d’un homme qui ne supporte plus tout ce qui l’entoure. Avec ce besoin d’extérioriser ce qu’il éprouve, cette histoire va créer un décalage qui donne à sourire initialement, mais qui va finalement être un reflet particulièrement réaliste et triste du côté éprouvant de la vie. Une sorte de cri du cœur venant de ce personnage qui ne supporte plus de devoir faire semblant devant les autres.

Un programme pour les enfants et adultes

Il est vrai que quand on se lance pour la première fois dans “Leçons de vie avec grand-frère Uramichi”, on peut se demander où veut se diriger le récit. Mais plus on enchaîne les pages et plus on se rend compte que l’on est face à un ouvrage très singulier. En effet, nous sommes ici dans un récit qui joue à fond la carte du cynisme à travers son protagoniste en le confrontant au regard innocent d’enfant. Tout va être pensé pour jouer sur ce contraste entre l’âge adulte et l’enfance qui sont aux antipodes l’un de l’autre. Notre cher présentateur a beau se montrer avec un grand sourire chaleureux et réconfortant, ses paroles ne vont pas du tout avec ce visage. En fait, on nous dépeint un trentenaire épuisé par la vie et qui profite de son émission pour déverser en toute discrétion des piques à l’égard de tout ce qui l’énerve. Et si cela peut paraître étrange d’avoir un personnage principal aussi défaitiste et peu enclin à l’espoir, on finit par se rendre compte que cette idée est brillante pour traiter du cœur du problème. En fait, ce manga est avant tout une opposition et une mise en garde de ce que la vie peut provoquer comme défis quotidiens et comme épuisement dès l’instant où l’on entre dans la vie active. Alors que la cible de son émission est à destination des plus petits, celle-ci est finalement une scène où il peut mettre en garde contre tout ce qui peut nous fatiguer au quotidien. Si certaines références ou critiques sont très ancrées dans la société japonaise, elles peuvent aussi facilement faire écho à ce que l’on connaît chez nous.

Cela peut aller de tout ce qui est droit d’auteur à des sujets beaucoup plus personnels comme la solitude. Et il est finalement captivant de voir un protagoniste parvenir à traiter de tout ce qui le ronge sous couvert d’une tranche d’humour et de cynisme. Oui, le titre a beau avoir une dimension sociétale, sociale et humaine très forte ainsi qu’une approche assez sombre de la vie, il n’en reste pas moins divertissant. Cela est dû à l’excellent travail qui est fait au niveau de cet équilibre entre la critique et la comédie. Ainsi, on ne peut s’empêcher de rire en voyant Uramichi faire de son mieux pour garder le sourire même s’il a envie de tout casser. Et même l’incompréhension des enfants face à ses propos va autant accentuer l’écart qu’il y a entre ces deux périodes de la vie que nous donner de quoi sourire. Pareil pour les interactions qu’a notre présentateur avec certains de ses collègues qui sont délirants. Je trouve que l’on a devant nous une œuvre brillante sur ce double jeu qui s’opère devant nous. On peut s’amuser facilement face à cette opposition désespoir et innocence, mais aussi être profondément touché quand on prend du recul. Après tout, nous sommes face à un récit qui met en avant un personnage qui n’en peut plus de son quotidien et se raccroche juste à ce qu’il fait pour ne pas succomber. Il y a finalement une facette même assez dramatique dans cette lecture qui permet à cette expérience d’afficher de multiples nuances. Une découverte qui m’a vraiment donné le sentiment d’être face à une proposition assez unique, réfléchie et efficace.

C’est pour ça que je trouve que ce premier volume de “Leçons de vie avec grand-frère Uramichi” est une lecture plus que captivante. Très loin de s’arrêter à ce que l’on peut connaître ailleurs, l’artiste va aller au bout de son idée initiale pour créer un dialogue à double-sens tout au long de cet ouvrage. S’adressant autant à son jeune public pour les prévenir de ce qui les attend, ce protagoniste semble aussi s’adresser directement à nous en exposant des choses que l’on a pu connaître ou que l’on peut avoir été témoin de ça. Ainsi, on se retrouve malgré nous parmi ces spectateurs qui suivent son programme afin de voir quelle sera la prochaine leçon qu’il donnera.

Leçons de vie avec grand-frère Uramichi débute son cours

Il est clair que “Leçons de vie avec grand-frère Uramichi” est une œuvre qui peut diviser dans ce qu’elle propose comme expérience littéraire. Pour ma part, j’ai grandement apprécié ce parti-pris qui change de ce que l’on peut voir dans ce style de manga et qui surtout n’hésite pas à aborder avec cynisme les aléas de la vie. On peut tout à fait voir Uramichi comme un personnage blasé qui déverse sa colère de cette société et de cette existence qui ne font que le piétiner. Il est loin d’être attachant de prime abord et ce n’est pas ce qui est voulu. En fait, je trouve justement qu’avoir un tel protagoniste est très fort dans ce qu’il symbolise. On peut tous connaître une période où l’on a le sentiment d’étouffer et que rien ne va plus. Sans le moindre soutien, perdu ou bien désemparé face à la détresse que l’on peut ressentir, cette lecture peut nous parler à tous. On peut s’identifier, d’une façon ou d’une autre, à ce protagoniste et ce n’est pas pour autant que l’on est face à une œuvre qui cherche absolument à nous saper le moral face aux réalités de la vie. Comme j’ai pu l’évoquer un peu plus haut, je trouve que l’équilibre est finement trouvé pour que l’on puisse autant rire et sourire qu’être profondément touché par ce qui nous est raconté. Une série qui utilise avec brio le prisme du cynisme pour créer une comédie aussi plaisante que frappante. C’est, en tout cas, ce que l’on peut ressentir au sein de ce premier volume qui donne clairement le ton de ce que l’on va avoir par la suite.

J’ai donc beaucoup apprécié cette lecture de “Leçons de vie avec grand-frère Uramichi” qui a su me parler et me rappeler beaucoup de choses. Sans oublier aussi que j’ai été bluffé par l’excellent contraste qui est représenté tout au long de ces chapitres. Évidemment, nous ne sommes pas dans un récit qui cherche à avoir un réel fil rouge si ce n’est enchaîner les émissions de notre protagoniste pour qu’il dévoile ce qu’il a sur le cœur. Mais ce n’est pas son but, car nous sommes ici face à une sorte de tranche de vie qui exprime tout bonnement ces nombreux tracas de la vie de tous les jours qui peuvent nous bouffer de l’intérieur. Il est vrai qu’il est important d’avoir des histoires qui nous donnent de l’espoir ou nous permettent de nous évader, mais il est aussi crucial d’avoir des ouvrages de ce style qui vont mettre sur la table des sujets que l’on garde trop souvent enfoui en nous. Si vous appréciez les mangas qui utilisent l’humour et le cynisme pour porter leur message et que vous souhaitez une lecture qui change alors vous devriez largement être convaincu par ce premier volume. Et même si je me doute un peu de la forme que prendra le futur de la licence, j’ai tout de même quelques questions qui me viennent à l’esprit. Est-ce que Uramichi va réussir à remonter la pente ? Parviendra-t-il à traiter de sujets qui donnent un peu de lumière ? Va-t-on garder cet équilibre jusqu’au bout ou basculer dans un tout autre style ? Je serais en tout cas de la partie pour ne rien rater de la prochaine émission !

N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant ce premier volume de “Leçons de vie avec grand-frère Uramichi”. Trouvez-vous que l’idée de base est bien trouvée et permet de confronter deux périodes très différentes de la vie ? Est-ce que vous avez le sentiment que l’auteur parvient à trouver un juste milieu entre dénonciation, cynisme et humour ? Ce titre est-il, selon vous, capable d’amener sur la table des sujets difficiles tout en les exposant de façon divertissante ? Vous êtes-vous retrouvé un tant soit peu dans le personnage d’Uramichi ? Qu’attendez-vous pour la suite de la licence ? Je reste à votre disposition pour échanger, discuter et débattre autour de ce sujet.