Pourquoi j’aime – PJ #08 : Blue Giant
A peine le dernier numéro en date de “Pourquoi j’aime” publié que voici déjà le nouveau qui arrive. La huitième chronique de ce rendez-vous va s’attarder sur l’un des mangas sur le thème de la musique qui m’a le plus bluffé. Je pense même qu’il s’est facilement hissé parmi mes plus découvertes dans le domaine. Je parle bien sûr de Blue Giant, édité chez Glénat, et qui en est déjà à trois parties avec en plus Supreme et Explorer (une quatrième partie est en cours au Japon intitulé Momentum). Si je parle de Blue Giant dans cet article, cela englobe l’ensemble de ces trois actes disponibles en France tant ils vont tous construire cette fabuleuse saga. Car oui, nous sommes ici devant un titre qui aborde un thème pas forcément le plus populaire avec le jazz et qui va pourtant nous délivrer une aventure humaine et musicale de haute volée. On va ainsi découvrir l’histoire d’un adolescent qui va trouver sa voie dans cet art et va tout donner pour devenir le numéro un. Un parcours qui va nous tenir en haleine à chaque nouveau tome. Préparez-vous donc à assister à un show que vous n’oublierez pas de sitôt.
Un protagoniste inspirant
La première chose qui fait toute la force de Blue Giant est son protagoniste. Dai est un personnage d’une telle sincérité dans son amour du jazz. Il découvre par hasard ce style et cela devient autant une passion qu’une obsession pour lui et qui va la guider vers un avenir incertain, mais où il sent qu’il a trouvé sa place. Et dès cet instant, on va découvrir un jeune musicien qui débute de zéro, mais dont la détermination va être une véritable leçon de vie. Pendant tout ce temps, on va le voir s’entraîner comme un fou chaque jour pour devenir le meilleur saxophoniste. Il fait face à toutes les épreuves sans jamais baisser les bras et chaque échec devient un tremplin pour aller encore plus haut. Et quand je dis dans le titre qu’il est inspirant, ce n’est pas pour rien. Oui, il va quasiment tout abandonner pour suivre son rêve et il nous montre qu’un tel choix n’est pas sans conséquences. L’incertitude liée à ce rêve et la difficulté de celui-ci peuvent être terrifiantes. Et pourtant, il ne recule jamais et va être une véritable leçon de courage, de volonté et de travail. Quand on commence l’aventure, on ne s’attend pas un seul instant au parcours qui nous attend. On va voir Dai débuté difficilement au Japon puis partir en voyage en Europe pour finalement se retrouver aux Etats-Unis. Chaque tome est ainsi l’occasion d’admirer ses progrès et surtout l’écriture de sa légende dans ce milieu. En plus de ça, le héros de cette histoire va aussi se confronter aux barrières culturelles et linguistiques sans être effrayé. Il fait de son mieux et nous montre que si l’on veut vraiment quelque chose alors il faut tout donner pour y arriver. Oui, on peut échouer, mais il ne faut surtout pas avoir de regrets. Et quand on voit ce garçon japonais se lancer dans l’inconnu avec seulement son instrument, on se dit qu’il est capable de toucher le cœur de n’importe qui à travers le monde.
Une ode au jazz
Evidemment, impossible de parler de Blue Giant sans évoquer le sujet principal qui est le jazz. Comme je l’ai évoqué un peu plus tôt, ce genre musical n’est clairement pas celui qui est le plus mis en avant aujourd’hui. Et d’ailleurs, c’est très bien représenté dans le manga notamment par rapport au Japon où il est surtout connu des passionnés. Et c’est donc assez curieux de voir à quel point cette série va pourtant nous captiver dans sa manière de parler et de traiter ce sujet. En effet, pour ma part, même si je connaissais un peu le jazz, je restais tout de même assez néophyte sur celui-ci. Au même titre que Dai, j’ai pu redécouvrir ce courant musical et tout ce qu’il a su apporter et peut encore offrir aujourd’hui. Et c’est là que le manga va briller dans sa retranscription du jazz. Il n’est pas uniquement question ici de connaître un peu l’histoire de ce style et de citer des grands artistes ayant construit la renommée de celui-ci. On veut que l’on s’imprègne totalement de ce milieu qui gravite autour de cet art et ainsi être totalement captivé par la manière dont le jazz s’est inscrit dans le quotidien de nombreuses personnes. Si la première partie du manga est là pour lancer réellement Dai dans cette ascension pour devenir le numéro un, c’est avec les autres parties que l’on va totalement vivre à travers le jazz. Entre les différentes tournées, les clubs, les stars que l’on rencontre et aussi l’impact que peut avoir cette musique sur les gens, nous allons constamment être entourés par ces notes et cette émotion qui forment ce style. Si l’on peut avoir le sentiment que le jazz appartient à une époque précise, cette lecture nous montre qu’elle a aussi sa place aujourd’hui et qu’elle peut autant nous toucher que n’importe quelle autre courant musical. Une œuvre qui nous fait vibrer et nous donne envie de nous intéresser à cet art qui lui sert de cœur.
Des représentations vibrantes
Et si je vous parle de Blue Giant, il y a un autre élément dont je ne peux bien sûr pas zapper. Il s’agit des représentations sur scène de Dai et des autres artistes qui vont l’accompagner dans son périple. J’ai déjà eu l’occasion d’évoquer par le passé à quel point cette série brillait dans son trait. Shinichi Ishizuka est un artiste remarquable qui a un coup de crayon absolument magique. Et cela se ressent totalement dans les phases où la musique prend le pas sur les paroles. Ces quelques moments sont un peu le moment de vérité pour notre protagoniste qui donne tout ce qu’il a. Et cela s’exprime à merveille par le biais des dessins. On a beau être sur un manga où il n’y a aucun son qui s’échappe, on a pourtant le sentiment d’être soufflé par la puissance des notes qui sortent du saxophone de Dai. Notre regard est subjugué, au même titre que les spectateurs dans la salle qui restent sans voix pendant le show de ces musiciens. Et c’est juste prenant de voir qu’il n’y a pas besoin du moindre mot pour qu’une œuvre puisse nous transporter totalement dans ce qu’elle raconte. Chacune de ces prestations est là pour montrer le chemin parcouru par notre protagoniste et ce qu’il est capable de donner. Et on pourrait croire que l’effet spectaculaire s’estomperait avec le temps et c’est pourtant l’inverse qui se passe. Car en plus de donner davantage d’impact aux notes que joue Dai, on ressent l’expérience qu’il accumule. Ce qui était déjà stupéfiant dans les premiers volumes se transforme en un spectacle inoubliable par la suite. On voit à quel point, pendant ces passages, qu’il semble impossible à arrêter. Visant toujours plus haut, le lecteur est son fan le plus fidèle, car nous sommes ceux qui allons assister à l’ensemble de ces représentations. Et l’admiration que l’on a pour l’être humain derrière l’instrument se combine avec l’émotion de ce qu’il nous offre sur scène.
Un road-trip enrichissant
Il faut aussi comprendre que Blue Giant, de par son envie de nous faire découvrir le jazz, va aussi se présenter comme un impressionnant road-trip. Avant même de savoir qu’il y aurait d’autres parties qui allaient nous faire quitter les frontières du Japon, le regard que l’on pouvait avoir sur ce manga était celle d’un jeune japonais qui allait se lancer dans un projet qui serait difficile à concrétiser dans son pays natal. Et si la première série se focalise sur son apprentissage du jazz et du saxophone, on comprend très vite qu’il ne peut rester uniquement au sein de l’archipel nippone. Et c’est là qu’arrive la suite qui nous embarque alors pour l’Europe pour finir par les Etats-Unis dans le troisième arc narratif. On accompagne alors Dai dans ce périple à travers bon nombre de pays et régions pour retracer un peu le parcours de cet art qui fait maintenant partie de sa vie. Ce qui est génial, c’est que cet aspect est grandement développé tout au long de la série. Il va autant être question d’aller d’un endroit à l’autre que d’en apprendre plus sur le mode de vie des habitants, leurs préférences en matière de musique, mais aussi tout bonnement découvrir comment ils sont. Ce périple devient alors un voyage avant tout humain où la musique sert à se rapprocher des autres. Chaque arrêt devient une aventure à part entière avec son lot de rencontres mémorables, de défis à relever et d’expériences à retenir. Et au final, si Dai ne va jamais cesser de s’entraîner pour devenir le musicien accompli que l’on connaît aujourd’hui, il est aussi devenu un artiste talentueux hors des salles à travers les contacts qu’il a eu avec ce monde dont il ignorait encore tant de choses il y a peu. Une ode au voyage et au fait de s’ouvrir aux autres.
Quand la musique rassemble
Il est temps de clôturer ce nouveau numéro de “Pourquoi j’aime” et quoi de mieux comme dernier point que d’évoquer à quel point Blue Giant est une œuvre qui rassemble. En effet, on dit très souvent que la musique est un art parfait pour unir les gens alors même que l’on ne parle pas forcément la même langue ou que l’on vient de pays éloignés. La série le montre à merveille, car nous sommes devant un étudiant japonais qui part à la découverte du monde pour s’exprimer à travers sa musique. Et s’il a beau avoir du mal à échanger en temps normal du fait de la barrière de la langue, il suffit qu’il aille sur scène pour que tout le monde l’écoute. Sa musique devient alors sa voix et se transforme alors en langage universel. Et d’ailleurs, même si Dai désire atteindre le sommet en tant qu’artiste, cela ne veut pas dire qu’il va forcément être seul dans son périple. On va le voir, depuis le Japon en passant par l’Europe et les Etats-Unis, et travailler avec d’autres artistes. Si certains vont comprendre qu’ils font pâle figure face à la détermination de leur camarade, d’autres vont aussi se donner à corps perdu dans leur art. Et cela donne par exemple une toute autre dimension au voyage personnel de ce saxophoniste. Il suffit de voir Blue Giant Supreme pour le comprendre. Pendant quasiment toute la seconde partie, Dai va faire partie d’un groupe et découvrir ce que cela signifie que de partager l’affiche avec d’autres. Beaucoup de querelles, de différents, mais aussi des moments de joie et de partages qui vont pousser chaque musicien à tirer le meilleur de lui-même. S’il se destine à une carrière solo, notre protagoniste va aussi comprendre qu’il a beaucoup à apprendre des autres et qu’ils peuvent devenir un vrai moteur pour aller de l’avant. Une oeuvre qui a tant à nous transmettre.