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Gaming Horror Show : Ruvik et son esprit torturé

Il est grand temps d’entamer ce mois spécial horreur avec notre première chronique “Gaming Horror Show” où je vais vous parler de tout un tas de sujets différents autour de ce genre dans l’univers vidéoludique. S’il y a un survival-horror que j’apprécie beaucoup, c’est The Evil Within. Un opus qui, même si on sent ses nombreuses inspirations notamment dans les précédents travaux de son créateur, a énormément de qualités concernant son lore. Une œuvre qui arrive à être autant marquante sur la thématique de l’effroi que symbolique dans tout ce qui constitue cet univers déformé et sinistre. Et quoi de mieux pour commencer notre découverte de cette histoire en s’attardant sur le principal antagoniste de ce premier opus : Ruvik. Cet être, qui réussit habilement son entrée dans l’aventure, va être autant terrifiant dans son aspect omnipotent et omniscient que tragique dans le destin qui fut le sien. Un antagoniste bien loin d’être uniquement un tueur cherchant à faire souffrir les héros, mais un individu qui ne peut compter que sur son esprit rongé par la haine. L’heure est venue de découvrir le récit de cet homme dont l’existence est partie en cendres.

Une enfance engloutie dans les flammes

Avant de s’attarder sur l’ennemi de notre héros Castellanos, il est important de se focaliser sur la jeunesse de Ruvik ou plutôt de Ruben Victoriano. Né dans une famille particulièrement riche et pieuse, il a eu le droit à une éducation stricte. Si son père n’a eu de cesse de vouloir le façonner selon son bon vouloir, il pouvait au moins compter sur le soutien de sa grande soeur Laura. C’est sa relation très fusionnelle avec cette dernière qui lui a permis de trouver du réconfort dans cette jeunesse éprouvante. En dehors de ça, Ruben s’est toujours montré comme un fervent opposant à la piété de son père qui désirait qu’il suive la même voie. De son côté, sa mère, Beatriz, a toujours été là pour ses enfants et fut une présence rassurante pour eux. Mais Ruben commença à montrer des signes inquiétants concernant ses recherches scientifiques. En effet, dès son plus jeune âge il fait preuve d’un esprit brillant et surtout d’une insatiable soif de savoir concernant l’esprit humain. Dans l’espoir d’enrichir ses connaissances, il va se mettre à étudier et surtout à effectuer de sinistres expérimentations sur des cadavres d’animaux. Mais tout bascula le jour où sa seule lumière va lui être arrachée. Un beau jour, alors qu’il part jouer avec Laura dans une grange où ils ont l’habitude d’aller, des villageois se rapprochent du lieu. Ces derniers, en colère contre le symbole de richesse que représente Ernesto Victoriano et sa famille, ont décidé de brûler cet endroit leur appartenant. Allant même jusqu’à faire semblant de ne pas entendre les deux enfants à l’intérieur, ils répandent l’essence avant d’y mettre le feu. Ruben et Laura se retrouvent encerclés par les flammes et notre garçon est le premier à voir sa peau être la victime de ces dernières.

Voulant absolument sauver son petit frère, Laura va réussir à le faire sortir par une petite fenêtre, mais ses blessures étaient déjà profondes. Alors que Ruben, épuisé et souffrant le martyre tente de s’extirper de cet enfer, sa sœur reste prisonnière de ce cercle de feu. Finalement, Ruben se retrouve avec des brûlures l’ayant totalement défiguré et qui ont aussi provoqué un dérèglement de son corps faisant qu’il n’arrive plus à réguler sa température. De son côté, Laura est finalement extirpée de l’incendie, mais son état est bien trop grave. Elle finit par se retrouver à l’hôpital dans un état végétatif. Pour ne rien arranger, leur père préfère annoncer que ses enfants sont morts plutôt que de s’occuper d’eux. A ses yeux, Ruben vient de perdre ce qui lui était le plus précieux, à savoir ce lien qui l’unissait à sa sœur. La seule personne avec laquelle il pouvait se sentir libre et heureux. A présent, son esprit est rongé par la haine à l’égard de ces villageois, mais aussi de sa propre famille qui a contribué à cette situation. Les années qui passèrent ensuite furent un véritable calvaire pour le jeune garçon dont les stigmates de ce jour le faisaient souffrir constamment. A ses yeux, la vie n’était plus qu’un enchaînement de douleurs, de colère et de tristesse. Quand on apprend cette partie de son passé dans le jeu, cela amène quelque chose de fort à l’égard de cet antagoniste. Il est évidemment une personne néfaste, n’hésitant plus à tuer et à torturer pour atteindre son but. Mais en nous faisant entrevoir les raisons de son état et surtout son sordide passé, on nous montre aussi que ce cauchemar qu’il représente n’est pas uniquement dû à sa propre personne. S’il avait une part sombre qui commençait à se développer gamin au travers de ses macabres recherches, les événements qui ont frappé sa famille et surtout la noirceur corrompant son entourage n’a fait que nourrir la créature qu’il allait devenir. Et s’il semble avoir déjà beaucoup souffert, ce n’est encore rien quand on se penche sur ce qui s’est passé ensuite. Un adversaire qui a beaucoup de choses à nous raconter.

Ruvik

La naissance du mal

C’est durant son adolescence que Ruben va pleinement se lancer dans ses recherches scientifiques notamment celles autour de la conscience et du cerveau humain. Enfermé par son père à cause de son instabilité mentale et oublié par le reste du monde qui le croit mort, cette situation a beau nourrir sa haine, elle lui donne aussi le champ libre pour poursuivre ses macabres expériences. Il sait pertinemment que ce qu’il fait est contraire à l’éthique, mais cela lui importe peu tant qu’il peut avancer dans son projet. Un beau jour, il finit par tuer ses deux parents et récupère ainsi toute la fortune familiale. C’est à ce moment qu’un visage familier revient le voir. Il s’agit du professeur Jimenez, un éminent scientifique, qui avait déjà pu entrevoir son génie et son potentiel alors qu’il n’était qu’un gamin. A l’époque déjà, cet homme avait tout fait pour prendre ce prodige sous son aile pour qu’il puisse se donner corps et âme à ses travaux. Il fut même l’individu qui toléra ses expériences sur des cobayes animaux et humains en prétextant que la science doit parfois s’extraire de notion telle que la justice ou l’éthique pour avancer. Un homme loin d’être un saint et qui a contribué au développement de cette sinistre graine qui était implantée depuis l’enfance à Ruben. Mais quand il retrouve son cher disciple bien des années plus tard, il voit un être brisé qui se rattache à cette souffrance qui l’anime et à son envie de se réunir de nouveau avec la Laura qu’il a connu. Si, dans un premier temps, Jimenez se montre distant du fait qu’il utilise des êtres humains pour ses tests, il va finalement lui tendre la main. Il promet qu’en échange des ressources financières de sa famille, il pourra lui fournir le matériel, mais aussi les sujets parfaits pour qu’il s’adonne à ses sinistres études.

Pour cet homme brûlé et dévasté, cette proposition sonne comme une aubaine afin qu’il puisse atteindre son but. Il ignore alors totalement que cette main tendue cache en réalité un poignard qui s’abattra sur lui dès qu’il aura le dos tourné. Tandis qu’il progresse dans son objectif, celui qui deviendra Ruvik n’image pas un seul instant que le véritable but de son mécène est de mettre la main sur le fruit de ses recherches. Ce n’est finalement que trop tard qu’il va découvrir cette trahison. Une fois de plus, il est seul face à la noirceur des gens et va connaître un sort pire que la mort tandis que les hommes de main de Jimenez s’emparent de lui et font disparaître toutes les preuves de son existence. Comme un souvenir tragique de son passé, tout est emporté dans les flammes et Ruben devient à son tour un sujet d’expérience qui va être charcuté. Il ne reste alors plus rien de son corps si ce n’est son cerveau qui sera au cœur de la machine STEM qui synchronise les gens choisis à l’esprit de cet homme qui est devenu Ruvik. Mais même sans une enveloppe physique, cette victime de l’avidité humaine existe toujours sous cette forme rapiécée qui hante et torture ceux qui entrent dans son territoire psychique. Désireux de retrouver le monde réel, il cherche à présent un hôte pouvant être parfaitement compatible avec son esprit tordu. Plus on progresse dans le jeu et plus on prend conscience à quel point notre antagoniste est très loin de l’image du simple méchant à abattre. Comme dit précédemment, il reste un monstre qui n’hésite pas à faire souffrir les autres. Mais on se rend compte que la plupart du temps, cela fait écho à ce qu’il a vécu. Une existence faite de cauchemars, de trahisons et de tragiques souvenirs qui va façonner en grande partie ce terrain de jeu qui est le sien maintenant. Une virée dans sa psychée qui marquera à jamais Sebastian et le joueur.

Le monstre à la recherche d’une humanité

A présent, il est temps de parler de Ruvik en tant qu’antagoniste en lui-même. Il faut tout d’abord reconnaître qu’il sait faire une entrée marquante. En le voyant sur les caméras de surveillance se débarrasser en quelques secondes de trois policiers avant d’apparaître d’un coup derrière Sebastian, on prend conscience qu’il n’est pas humain. Sans même savoir à cet instant que l’on est déjà dans son esprit, l’image de cet être brûlé et rapiécé pouvant se téléporter et n’ayant aucun mal à tuer façonne un ennemi mémorable. Le travail fait pour lui donner une aura funeste sans même qu’il dise le moindre mot est remarquable tant on voit à quel point un simple visuel suffit à instiller la peur en nous. D’ailleurs, Ruvik en lui-même n’aura que très peu de lignes de dialogue, préférant laisser Ruben raconter son histoire au travers d’enregistrements ou de souvenirs. En plus de ça, notre cher antagoniste réduit ses apparitions au minimum pour que chacune d’entre elles ait un impact sur le joueur et Castellanos. On comprend que malgré tous nos efforts et les combats que l’on mène, on reste une petite souris dans le labyrinthe mental qu’il a construit et dont il est le maître. Il est le dieu de son monde où chaque élément fait partie intégrante de sa personne. On a même le sentiment que nous ne sommes que des jouets entre ses mains et qu’il s’amuse à nous torturer psychologiquement sans pour autant en finir directement avec Sebastian. C’est un des éléments les plus intéressants du personnage, car même s’il semble tout-puissant dans cette vision déformée du monde qui est la sienne, il semble se sentir proche de notre héros. Après tout, on apprend autant au fil de l’aventure le passé de Ruvik que celui de notre policier et on remarque des similitudes.

Sebastian, flic évoluant dans une ville rongée par le crime, se questionne sur la portée de ses actes en voyant que même en arrêtant une personne, dix autres franchissent la ligne rouge. Ce n’est qu’en rencontrant celle qui deviendrait sa femme et la naissance de leur fille qu’il trouve du réconfort. Une joie qui va être de courte durée étant donné que son enfant et sa nourrice vont périr dans un incendie. Un événement qui n’est pas sans rappeler notre antagoniste qui ressent un rapprochement avec celui qui deviendra son pire opposant. Et plus on progresse au fil des chapitres et plus on se rend compte que Ruben et Ruvik sont la même personne, ils sont aussi deux entités très différentes. Le second n’est qu’une représentation de toute la colère pouvant animer le premier et qui cherche à se défaire de cette prison dans laquelle on l’a enfermé pour enfin reprendre tout ce qu’il avait commencé dans sa précédente vie. Mais en devenant aussi cette créature s’étant affranchi des limites de l’être humain, il est devenu encore plus menaçant et dangereux. A l’image du passage où l’on explore le manoir de sa famille où il est la principale menace. C’est d’ailleurs l’unique chapitre où il est présent constamment et s’attaque directement au protagoniste mise à part le final du jeu. Un ennemi qui, à cet instant précis de l’aventure, est impossible à vaincre et qu’il vaut mieux fuir jusqu’à ce qu’il disparaisse. Un jeu du chat et de la souris qui a commencé dès les premières minutes de notre périple et qui ici se veut encore plus oppressant. Tel un fantôme qui hante chacun de nos pas, Ruvik sait exactement où l’on est et va nous tourmenter jusqu’au moment où il espère enfin mettre la main sur Leslie qui représente le parfait corps de substitution.

Ruvik - apparition

Ruvik embrase son esprit

Ce qui est captivant à analyser avec le personnage de Ruvik, c’est à quel point il est un antagoniste loin de se limiter à une simple écriture de méchant classique que l’on peut voir dans certains titres horrifiques. Au contraire, on sent l’envie de Shinji Mikami et du studio de créer un antagoniste qui soit terrifiant, marquant tout en y insufflant une touche d’humanité dans son comportement. S’il est présenté initialement comme un monstre pouvant être n’importe où et qui joue constamment avec nous, on apprend progressivement à connaître l’homme qu’il était avant d’en arriver là. Un garçon qui commençait déjà à avoir des idées malsaines autour de ses recherches, mais qui a aussi connu l’enfer. Cela n’enlève rien à la cruauté de cet être ni même à ce que l’on peut ressentir à son égard. Mais cela permet d’aborder des thèmes forts soulignant l’impact que peuvent avoir de tels événements et surtout comportements envers un enfant qui a subi un terrible drame l’ayant marqué jusque dans sa chair. On garde notre envie de se défaire de Ruvik, tout en partageant une partie de sa colère envers son père, les villageois ou Jimenez qui ont tous contribué, d’une manière ou d’une autre, à créer celui qu’il est actuellement quand on le rencontre dans son esprit. De plus, nous ne sommes pas dans le schéma habituel de l’ennemi cherchant à en finir le plus vite possible avec le héros.

Au contraire, il ne va que très rarement s’impliquer physiquement contre lui, préférant faire appel à ses pouvoirs ou aux autres monstres de ce monde distordu pour s’occuper du joueur. Sans oublier cette forte dualité qui va se créer entre lui et Sebastian et qui ne se limite pas à un simple rapport de héros à méchant. Voilà l’une des raisons qui font que j’apprécie énormément le premier opus de The Evil Within. Un titre horrifique qui n’est pas sans défauts, mais où on sent l’envie d’aller au-delà d’un simple survival-horror. Cela devient même un réel plaisir que de décortiquer tout ce qui compose ce cauchemar éveillé que l’on vit et qui est le parfait reflet du mal qui ronge l’esprit de Ruben. Un antagoniste qui est rapidement devenu mémorable à mes yeux dans le genre et qui surtout a un profond impact sur notre manière de percevoir cette expérience. Une personne qui a perdu un être cher, fut rongée par la haine, abandonnée par son père et trahie par son “mentor” avant de n’être plus qu’un cerveau prisonnier de ses pires songes. Quand on ouvre les yeux sur tout ça, on comprend que Ruvik est autant le geôlier que le principal captif de cette prison qui évolue au fil de ses macabres pensées. J’espère en tout cas que cette première chronique portant sur ce titre vous aura plu. N’hésitez pas à me dire dans les commentaires ce que vous avez pensé de cet antagoniste, de son parcours et de sa confrontation avec Sebastian. On se retrouve très vite pour d’autres escapades vidéoludiques !

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