Valse des nouveautés : Oreco Tachibana
Comme à chaque fois qu’il y a beaucoup de nouvelles licences, je me dis qu’il est crucial de pouvoir parler d’un maximum d’entre elles. Même si cela peut être compliqué, c’est l’occasion de proposer un article se focalisant sur plusieurs séries inédites. Voilà pourquoi je vous propose aujourd’hui un nouveau numéro de “Valse des nouveautés” qui va nous emmener cette fois-ci du côté de chez Glénat. L’éditeur a en effet proposé plusieurs nouveautés récemment que j’avais très hâte de découvrir. Et ce qui est encore plus génial, c’est que les deux titres dont je vais vous parler sont imaginés par la même mangaka : Oreco Tachibana. Une décision idéale pour se focaliser sur le travail de cette artiste par le biais de ces deux histoires. Voilà pourquoi je m’attarde cette fois sur le lancement des “Noces des Lucioles” et de “Promise Cinderella”. Deux récits que j’étais curieux de découvrir et qui vont tous les deux nous proposer, à leur manière, une relation qui sort des sentiers battus pour amener des intrigues loin d’être convenues. On se pose donc tranquillement, car je vais vous parler de ces deux séries tranche de vie.
Les Noces des Lucioles
Les Noces des Lucioles, de Oreco Tachibana, nous plonge à la fin du 19e siècle où l’on fait la connaissance de Satoko Kirigaya. Cette fille de bonne famille semble avoir tout pour elle et attire les nombreuses demandes en mariage. Pour elle, rien n’est plus important que de faire honneur à sa famille. Mais cela cache un lourd secret concernant l’état de santé de la demoiselle. En réalité, elle est atteinte d’une maladie du cœur et tous les médecins qui l’ont examinée disent qu’il ne lui reste que peu de temps à vivre. Afin de ne pas décevoir sa riche famille, elle veut à tout prix trouver un époux qui puisse permettre d’assurer l’avenir de ses proches. Surtout qu’elle sait très bien qu’elle n’a pas tant d’alliés au sein de son entourage entre sa belle-sœur et sa belle-mère qui ne cherchent qu’à l’éloigner pour être vraiment au centre de l’attention. Seul son père se présente comme un véritable soutien et c’est pour lui qu’elle souhaite faire de son mieux pour sa famille. Mais alors qu’elle décide de sortir en ville pour se changer un peu les idées, elle va être enlevée par des brigands qui obéissent aux ordres d’un commanditaire inconnu. Terrifiée et ligotée, elle se sent impuissante face à ces hommes qui pourraient l’éliminer en une fraction de secondes. C’est en proie au désespoir qu’elle fait la rencontre dans ce groupe d’un mystérieux assassin qui s’apprête à l’éliminer sous peu. N’ayant plus rien à perdre, elle lui propose un marché qui va totalement chambouler son existence. Elle jure de devenir son épouse afin qu’il ne manque plus de rien et ainsi lui permettre de s’échapper de cet enfer. Si cette proposition semble être son unique porte de sortie, elle risque aussi de la conduire sur une voie qui l’amènera à faire face à bien d’autres défis.
Cette première œuvre que je chronique est intéressante sur plusieurs points. En fait, Les Noces des Lucioles nous offre un récit où l’on nous met au contact d’une demoiselle enfermée dans le rôle qu’on lui incombe de par sa naissance, l’époque et les mœurs de cette période dans les familles aisées. Si l’on nous la montre initialement comme étant heureuse de pouvoir être utile aux siens, on se rend rapidement compte que la réalité est tout autre. Si elle veut autant briller auprès de son père et ne pas faire honte à ses proches, c’est parce qu’elle est tenue en étau par plusieurs choses. Comme évoqué plus tôt, il y a son statut de femme et d’héritière. Mais il y a aussi cette maladie qui l’assaille et qui fait qu’elle ne trouve un réel but au peu de temps qui lui reste qu’en étant un pion sur l’échiquier du pouvoir entre les grandes familles de la région. Finalement, à aucun moment on a le sentiment qu’elle se sent vraiment libre et heureuse. Et si le kidnapping qu’elle va subir est terrible, cela va aussi être l’occasion pour elle de faire cette rencontre qui va changer son existence. Et on se rend compte, en lisant ces deux nouvelles séries, qu’il y a un schéma que l’autrice semble affectionner afin de proposer des héroïnes fortes, poignantes et touchantes, mais qui doivent aussi se confronter à une société qui ne les considère quasiment pas à leur juste valeur. Ici, c’est en rencontrant cet assassin au double visage que Satoko va découvrir un milieu qui la terrifie, mais où elle va aussi se sentir vivante du fait qu’elle est seule maîtresse de son destin. C’est auprès de cet homme qu’elle oscille entre l’envie de retrouver les siens et l’envie de prolonger ce moment où rien n’a plus d’importance que l’instant présent. Sans pour autant nous indiquer que cette rencontre est une bonne ou mauvaise chose, la mangaka veut justement brouiller la frontière entre le bien et le mal pour que l’on se concentre avant tout sur le couple qui est en train de se former. Une relation poussée par le danger immédiat qui frappait notre protagoniste, mais qui l’amène aussi à poser un autre regard sur elle-même, sa condition et son entourage.
Promise Cinderella
Promise Cinderella, imaginée par Oreco Tachibana, nous fait suivre Hayame, une jeune femme au foyer qui semble mener une vie paisible. Ayant un mari dévoué et un quotidien sans histoire, elle ne demande rien de plus que de continuer ainsi. Malheureusement, elle découvre une triste vérité le jour où elle déniche un rouge à lèvres qui n’est pas le sien dans les affaires de son mari. Le mettant devant le fait accompli, il finit par avouer et même s’il est prête à le pardonner, ce dernier demande le divorce pour être avec cette nouvelle femme qu’il aime. Un choc pour Hayame qui décide de claquer la porte et se retrouve livrée à elle-même. Pour ne rien arranger, elle se fait voler le peu d’argent qui lui reste et doit donc vivre dans la rue le temps qu’elle trouve de quoi recommencer une nouvelle vie. Mais malgré toute sa bonne volonté, personne ne semble pouvoir l’aider ou lui donner une chance de faire ses preuves. Le temps passe et tout semble s’effondrer jusqu’au jour où elle tombe sur Issei, un lycéen provenant d’une famille aisée et qui va lui proposer un marché. L’ayant rencontré quand elle était encore mariée, elle avait pu découvrir un jeune homme qui n’hésitait pas à se moquer des autres et semblait prendre un malin plaisir à étaler sa supériorité. Malgré son attitude, Hayame n’a jamais craqué jusqu’à ce que la faim finisse par lui faire accepter de venir chez lui. Elle ignore alors que c’est le début d’une étrange relation entre les deux. Les masques tombent tandis que la jeune femme va tout faire pour rester fidèle à ses principes dans cet environnement où tout n’est que mensonge, tromperie et faux-semblant. Peut-être que sa présence serait ce que cet étudiant cherchait depuis si longtemps… Ce qui est sûr, c’est que ces deux individus vont être profondément bouleversés par la situation.
Comme j’ai pu l’évoquer dans Les Noces des Lucioles, on sent un schéma assez similaire dans Promise Cinderella sans pour autant qu’il s’agisse d’une redite entre les histoires. Il faut dire que cet autre récit nous plonge dans un contexte beaucoup plus contemporain et qui amène forcément d’autres thématiques qui vont fortement résonner en nous. Ce qui est similaire est de justement proposer une héroïne qui semble s’acclimater à une vie convenue ou en accord avec les règles du monde qui l’entoure avant qu’un événement vienne tout chambouler. Ici, Hayame nous est rapidement montrée comme une jeune femme qui n’hésite pas à se confronter aux autres quand elle assiste à une injustice. Un personnage dont les principes donnent du baume au cœur au vu de ce que l’on va assister et surtout de l’autre protagoniste du récit. En fait, on va rapidement avoir de la sympathie et de l’attachement pour elle. On ne va qu’être écoeuré en voyant tout ce qu’elle subit sans que personne ne vienne lui tendre la main alors qu’elle serait la première à aider les autres. Malgré tout ça, on continue d’admirer sa détermination et son courage surtout face à Issei qui, même s’il lui offre une porte de sortie, se montre effroyable sur de nombreux points. Si cet étudiant se montre bien plus complexe au fil des chapitres et que l’on commence à entrevoir un autre visage de sa part, on est aussi face à un adolescent qui se croit tout permis. C’est en étant face à Hayame qu’il va ouvrir les yeux sur le fait qu’il n’a pas l’emprise espérée sur tous ceux qui croisent sa route. On assiste alors à une relation qui va nous amener dans les hautes sphères de la société, mais aussi amener ces deux personnages à se dévoiler progressivement. Deux séries surprenantes et fort intéressantes qui m’ont conquis dans le traitement des personnages et le potentiel qui s’en dégage pour la suite.