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Manga Horror Show : le syndrome PTSD Radio

Nous voilà déjà au troisième “Manga Horror Show” de ce mois et une fois de plus je vais me tourner vers un manga en particulier. Sans plus de surprises, il s’agit de PTSD Radio qui vient de faire ses débuts chez Mangetsu. On le sait, l’éditeur a toujours eu un fort catalogue au niveau de l’horreur et cette nouveauté vient renforcer cette partie. Mais contrairement à Smile qui est sorti aussi en octobre, cette série va prendre une toute autre direction. Dès le départ, on pouvait sentir que l’expérience proposée serait assez unique. Mais c’est réellement quand je me suis plongé dedans que j’ai réellement pris conscience de ce qui était délivré au sein de cet ouvrage. Un récit aussi surprenant que terrifiant et qui peut être assez complexe à appréhender au départ. Voilà pourquoi je me suis dit qu’il serait intéressant de se focaliser sur cette aventure inédite qui délivre aussi sa propre vision de l’effroi. Un titre qui se joue de nous et qui nous fait réellement prendre conscience de la menace qui s’abat sur les personnages qu’une fois que l’on a toutes les pièces du puzzle en main. J’espère que vous êtes parés pour faire face à une rencontre qui va laisser des marques.

Un problème de cheveux

Le moins que l’on puisse dire, c’est que le synopsis de PTSD Radio est particulièrement étrange. On ne sait pas vraiment dans quoi on embarque et je confirme que les premières pages de l’œuvre peuvent être déroutantes. Mais c’est quand on décide d’aller plus loin dans le récit que l’on commence à entrevoir tout le processus de narration mis en place et la manière d’instiller la peur. Une œuvre qui joue un peu sur l’effet domino et qui va nous faire passer de la réflexion à l’inquiétude en passant par un profond malaise avant que tout s’éclaire. Et ce n’est pas pour rien que la brume dans laquelle on est projeté est un élément important de cette angoisse.

L’incompréhension comme source d’effroi

PTSD Radio - VisiteTout d’abord, il faut comprendre une chose concernant PTSD Radio. Ce manga propose, à travers ce premier volume, une narration très déstructurée. On s’en rend très vite compte lors des premiers chapitres, car on a l’impression d’être parfois perdu. En fait, mise à part parfois une certaine similarité ou un lien entre deux d’entre eux, on a l’impression de passer constamment à une autre histoire avec, pour fond, le même thème. Cela désoriente et on se sent perdu lors de ce premier contact. Mais cela est totalement voulu. En effet, plus on avance dans le récit et plus on se rend compte que tout ça fait en réalité partie d’un ensemble bien plus grand. Tout est semblable à un immense puzzle et ce n’est qu’en se rapprochant de la fin que l’on peut entrevoir le dessin final. Le genre de lecture où l’on sort peu à peu du brouillard au fil de notre avancée et ça donne presque un sentiment d’enquête de la part du lecteur qui cherche à tout remettre dans le bon ordre pour avoir la frise chronologique parfaite des événements. Et si cette proposition est intéressante dans la manière de raconter une histoire, elle va aussi avoir un autre effet. L’incompréhension peut être un excellent moteur pour susciter l’angoisse chez l’être humain. Fonctionnant avant tout avec un esprit rationnel, ce manga prend justement celui-ci à contrepied pour nous perturber. Si cela peut être une épée à double tranchant en provoquant la mise à l’écart du lecteur qui a du mal à rentrer dans l’histoire. Mais ici, le tout est largement maîtrisé pour que l’on ait envie de comprendre ce qui se passe et de continuer l’aventure.

Et c’est en réussissant à nous appâter à travers cette sorte d’esprit qui hante bon nombre de personnes que la magie horrifique du titre va s’exercer. Ne pas avoir ce qu’il faut comme outils pour appréhender pleinement la menace qui se tient devant nous va avoir deux impacts. Le premier est de nous partager la panique des victimes qui ne savent pas du tout comment se défendre face à de tels phénomènes surnaturels. Nous sommes simplement le témoin impuissant de ce qui se passe et les quelques actions étranges au début finissent par se transformer en un véritable cauchemar. L’autre conséquence est que l’on va être tétanisé face à ces événements qui ne vont faire que prendre de plus en plus d’ampleur. On cherche à tout prix une solution pour que cet enfer puisse s’éloigner au plus vite. Mais même en arrivant à retracer l’origine de tout ça, nous n’avons pas les clés nécessaires pour comprendre comment stopper ça. Ainsi, nous restons sans défense face à cette menace qui semble non seulement s’en prendre aux personnages qu’au lecteur. Car oui, même la mise en scène en dehors de l’intrigue est importante, car entre chaque chapitre, on peut voir quelque chose qui évolue et qui semble s’adresser directement à nous. Et cela appuie ce sentiment de partager l’horreur vécue par ces gens comme si cette entité pouvait s’extraire des pages pour s’en prendre à nous. Et c’est totalement voulu par l’auteur qui ne veut pas que l’on soit uniquement un spectateur passif. Il veut aussi que l’on soit profondément marqué par ce qu’il nous montre à tel point que cela nous donne aussi le sentiment d’être observé. On bascule alors dans quelque chose de très intéressant et qui va résonner fortement en chacun de nous.

Une menace invisible

Quand on se lance dans PTSD Radio, on se concentre avant tout sur le côté surnaturel du titre et c’est tout à fait normal. Cependant, il y a un élément que l’on peut oublier et qui a pourtant son importance dans le récit. Il s’agit tout bonnement de la partie PTSD (stress post-traumatique) qui, si on prend du recul, est omniprésent dans cette lecture. Et là, on s’attaque à un thème bien plus concret et réel que la partie horrifique en lien avec ces esprits. Mais cela ne signifie pas pour autant que l’un n’est pas lié à l’autre. Pour ceux qui l’ignorent, le stress post-traumatique est un trouble qui survient souvent après un événement qui nous a profondément traumatisés. Cela peut être la perte d’un être cher, un accident, une agression ou bien d’autres raisons comme ceux que peuvent subir les militaires en revenant du champ de bataille. Et ce n’est pas anodin si le titre évoque ce trouble, car cela fait partie intégrante du sujet proposé. On a beau être face à des phénomènes paranormaux, cela n’empêche pas ces derniers de laisser leur empreinte sur nous et les personnages. En réalité, une bonne partie de la lecture va s’axer sur les conséquences de cette rencontre avec le surnaturel. Dès l’instant où l’on entre en contact avec ce cauchemar, nous tombons dans l’engrenage de cette panique qui va s’installer et se réveiller à tout instant. Même si c’est à un niveau moindre sur le lecteur que sur les personnages ou ceux ayant un vrai PTSD, l’impact est là. Il suffit qu’un bruit singulier retentisse pendant notre lecture pour que l’on se mette à sursauter.

Inconsciemment, une ombre banale peut se transformer en une déformation de la réalité. Et l’auteur réussit à raconter ça avec brio tout au long de ce premier volume. On nous montre des gens qui vont, d’une manière ou d’une autre, être victime d’un stress intense suite à cette rencontre avec l’irréel. Et cela va les pousser à agir ou bien à se comporter différemment par la suite. La petite brute du lycée va peu à peu être terrifié par une certaine entité et va crier à qui veut l’entendre qu’elle arrive. Une femme va se rappeler de la mise en garde de sa grand-mère concernant ses cheveux et va tout faire pour échapper à cette menace invisible qui semble la poursuivre. Et un homme ne va avoir de cesse d’être terrifié à l’idée que sa petite amie l’observe quand il dort. Tous ces exemples nous montrent des gens qui sont à la frontière entre le conscient et l’inconscient. Ils évoluent bien dans le monde réel, mais tout ce qu’ils ont vécu ou vivent actuellement va peu à peu transformer leur quotidien en un véritable enfer. Et au-delà de l’aspect purement fictif et imaginaire de ce fantôme, on se demande par moment si tout ça est bien réel ou un fruit de leur imagination découlant justement d’une première expérience horrifique. C’est là aussi que je trouve que le manga frappe fort. Il utilise l’imaginaire et le surnaturel pour créer une expérience terrifiante ayant un impact bien concret sur les personnages et nous-même. On nous questionne sur ce qui nous paraît vrai ou non et c’est une autre forme de peur qui s’installe en nous. Un traumatisme découlant d’une fiction ou même d’un cauchemar peut avoir de réelles répercussions par la suite. Une œuvre bien plus complexe qu’il n’y paraît et qui a encore beaucoup à raconter par la suite.

PTSD Radio envahit les ondes

Je trouve que Mangetsu a su trouver de belles pépites niveau horreur pour leur catalogue. Nous ne sommes pas forcément dans des récits qui peuvent facilement convaincre le grand public, mais qui ont cette faculté à jouer avec nos peurs. Des œuvres qui savent comment créer des expériences bien différentes, mais tout autant saisissantes. PTSD Radio est clairement une expérience à part de par son thème, mais surtout de par sa construction narrative. S’il faut un petit temps d’adaptation pour comprendre où veut nous guider l’auteur, on peut ensuite être pleinement emporté par ce récit qui ne cherche pas uniquement à créer un sentiment d’angoisse. Nous sommes devant une histoire qui sert autant de témoignage pour ces gens qui ne peuvent plus trouver la paix que d’un reflet déformé de nous-même, car on pourrait très bien être dans le même état d’esprit que ces personnages. Il suffit parfois d’un seul incident ou bien d’une forte frayeur pour que notre esprit soit à jamais marqué et blessé. Et il faut reconnaître l’incroyable talent de ce mangaka pour réussir à nous transmettre ça tout en parvenant à jouer la carte du mystère. Plus on avance vers la réponse à toutes nos questions et plus on sent un frisson nous parcourir l’échine. Comme si le fait de réunir toutes les pièces du puzzle seraient autant la clé qu’un sens unique vers un abîme dont on aurait du mal à en sortir. Réussir à provoquer ça est remarquable et voilà pourquoi je trouve que cette série est clairement un très bon sujet pour le “Manga Horror Show”.

J’espère en tout cas que ce nouveau numéro de ce rendez-vous d’octobre vous aura plu. Il me tenait à cœur de montrer à quel point l’horreur peut prendre bien des formes à travers le manga et PTSD Radio en est un très bon représentant. Si l’imaginaire peut être sans limite, il y a aussi une émotion qui sera toujours présente et que l’on peut tous ressentir de manière différente. Il s’agit de la peur et c’est une source inépuisable d’idées pour les artistes désireux de nous faire frissonner à travers leurs histoires. Sans pour autant chercher uniquement à nous divertir, ce thème est aussi l’occasion d’aborder des sujets bien concrets. On est alors encore plus marqué par ce que l’on découvre au sein de ces pages, car cela peut résonner en nous. Évidemment, concernant cette série, il est clair que l’on est face à une œuvre qui divisera sûrement du fait de sa narration. Mais au-delà de ça, je trouve surtout captivant la façon dont l’auteur a su créer son récit et surtout construire un squelette solide autour de celui-ci. Une structure qui va nous amener à réfléchir, nous questionner et à nous terrifier au fur et à mesure de notre progression. Si vous décidez de franchir le pas, je serais très curieux de connaître votre propre ressenti concernant ce premier volume et ce qu’il a pu vous offrir comme sensations. On se retrouve très vite pour encore plus d’articles à venir.

 

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