Le dit du Genji 1

Le Dit du Genji T1 : un amour impossible

Il y a des mangas qui ont une forte symbolique les amenant à dépasser le cadre de leur medium pour atteindre de nouveaux sommets. C’est notamment le cas des grandes œuvres qui ont façonné une partie de cet art ou bien qui ont un impact considérable autour d’elles. Quand on pense à ce type de récit, beaucoup de noms peuvent venir en tête, mais il y en a un plus précisément qui a parfaitement fait la jonction entre le manga et l’un des monuments de la littérature japonaise. Je parle bien sûr du “Dit du Genji” de Waki Yamato qui vient de débuter aux éditions Panini. Dès son annonce, ce titre a fait beaucoup de bruit au vu de ce que le roman d’origine a eu comme impact sur le monde littéraire de façon globale et dans la culture japonaise. En effet, celui-ci est considéré comme le premier roman historique s’attardant autant sur la psychologie de ses personnages. Ici, nous avons ainsi le droit à la version imaginée par Waki Yamato qui est devenue plus qu’un simple manga au vu du nombre de ses ventes et de son utilisation en tant qu’outil pédagogique. Au vu d’un tel titre, je me suis dit qu’il serait intéressant de se pencher sur ce premier volume, car il y a énormément à dire sur ce petit bijou. Préparez-vous donc à faire la connaissance d’une œuvre culte.

L’histoire d’un prince frivole

Quand on se penche sur le synopsis en lui-même, on se dit que “Le Dit du Genji” est surtout une œuvre se présentant comme une tranche de vie historique narrant les déboires amoureux d’un jeune prince. Mais la réalité est bien plus complexe que ça. En effet, ce récit utilise ce contexte pour que l’on s’attarde sur le ressenti et la psychologie de ces personnages au sein de cette époque où chacun ne peut se défaire du rôle qui lui a été attribué. Des responsabilités qui confrontent le devoir au cœur et qui vont amener notre protagoniste et son entourage à connaître bien des malheurs. Un voyage dans le temps où l’humain est au centre de tout.

Une oeuvre capitale

Quand je parle d’œuvre capitale, je n’évoque pas juste l’importance que revêt Le Dit du Genji dans la littérature et la culture japonaises. Je souhaite avant tout m’attarder sur ce qui fait l’attrait et la force de ce manga qui reposent sur la psychologie des personnages. En plus de nous dépeindre une magnifique fresque historique, la mangaka va surtout mettre l’accent sur ceux qui vont servir d’acteurs à son récit. Au même titre qu’une pièce de théâtre où l’on se focalise avant tout devant les personnes qui se tiennent devant nous, ce titre reprend beaucoup de ces codes. C’est justement pour souligner le propos du récit qui concerne le destin, souvent tragique, des individus de cette époque. En effet, on est projeté à une période et surtout un lieu extrêmement codifié avec la cour Heian. On va ainsi prendre le temps de se familiariser avec les us et coutumes de celle-ci tout en nous retrouvant mêlés aux affaires de l’Empereur et de ceux qui se battent dans son entourage pour un peu de pouvoir. Ceci est le premier élément très intéressant de cette histoire qui construit un décor où les manigances et jeux de dupes sont innombrables. C’est notamment le cas autour des différentes épouses et concubines de l’empereur qui cherchent toutes à mettre en avant leur héritier. Et cela nous amène alors à l’épine dorsale de ce manga avec l’apparition du prince Genji. De par son statut particulier, sa naissance, mais aussi sa défunte mère, il retient rapidement l’attention et va devenir le principal protagoniste.

On va alors le suivre durant une bonne partie de sa vie. Ce qui se profilait initialement comme un récit historique où l’on allait assister à une lutte pour le trône finit par se transformer en une tranche de vie qui va raconter bien plus de choses sur cette cour et cette époque. En suivant ce personnage, on va rapidement se rendre compte de l’amour interdit qu’il ressent et de sa manière d’oublier celui-ci en allant à droite et à gauche pour enchaîner les conquêtes. Là où l’on peut voir un noble frivole se cache en réalité un enfant perdu qui a grandi sans le repère qu’il espérait et qui doit maintenant refouler ses sentiments pour être digne de son statut. Mais la mangaka ne va pas uniquement s’attarder sur lui, mais aussi sur l’ensemble des personnages qui vont graviter autour de sa personne. Cela passe aussi par un focus sur ces femmes qui vont rythmer son existence et qui vont, elles aussi, se battre contre ce qu’elles peuvent ressentir. Alors que l’on a l’image d’un environnement faste et luxueux où tout semble possible, on finit par avoir l’impression que c’est surtout une cage dorée pour ces gens qui ne peuvent aller à l’encontre des codes instaurés. Une œuvre finalement très dramatique dans ce qu’elle nous montre et qui brille justement par cette capacité à capter toute la détresse émotionnelle de ces personnages pour qui la vie est loin d’être rose. Avec seulement ce premier volume, on nous plante un décor parfait pour justement mettre à l’honneur toutes ces pensées, inquiétudes, vices et autres actes guidés par le cœur et qui se confrontent à une raison dictée par le statut social de chacun.

Il y aurait encore tant à dire sur “Le Dit du Genji” au vu de tout ce qu’il nous transmet dès ce premier volume. Mais il faut surtout voir en ce manga un fabuleux reflet des tourments de ces gens qui ont pu vivre à cette période et qui prônaient le devoir plutôt que le cœur. Avec cette lecture, on se plonge dans leur détresse émotionnelle et l’on partage leur désir de liberté qui, malheureusement, n’arrivera jamais sans de terribles conséquences. Et c’est en faisant face à ça et tout ce qui gravite autour de cette cour que l’on ressent toute la force de cette œuvre culte.

Le Dit du Genji nous fait voyager

Evidemment, Le Dit du Genji est une institution notamment par rapport à tout ce qui touche au manga patrimoine. Mais au-delà de ça, je tiens surtout à souligner le travail de cette mangaka qui s’est étalé sur une quinzaine d’années pour réussir à retranscrire au mieux cette période à travers ses dessins. On sent toutes les recherches qui ont été faites tout au long de cette écriture afin de coller au mieux à la réalité historique et au roman qui en a découlé. Des efforts titanesques qui ont totalement payés de par le succès du manga au Japon, mais aussi la renommée toujours plus grande de ce titre. Mais surtout, je trouve que l’on a devant nous une remarquable fresque historique qui ne cherche pas à autant partir dans les complots ou les rebondissements constants. En fait, on est face à un slice of life qui cherche à représenter au mieux la vie de ceux qui ont existé durant l’ère Heian et ce qu’ils ont pu vivre au quotidien dans un tel environnement. Une histoire qui se centre avec brio sur leur état d’esprit, leurs interactions avec les autres, mais aussi le poids du devoir et du fait qu’ils ne peuvent réellement être heureux. Finalement, ce récit nous montre des gens qui ont beau avoir un statut élevé ou faire partie de la noblesse et qui ne sont pas heureux pour autant. Un reflet de cette difficulté à être soi-même et à devoir rentrer dans des cases qui empêchent toute forme de liberté. Avec le personnage de Genji, on plonge alors dans les histoires amoureuses qui rythment cette cour et qui peuvent faire bien plus mal que le plus aiguisé des poignards.

Oui, Le Dit du Genji est un incontournable qui est intéressant et même important à lire. Cependant, il faut aussi comprendre que l’on n’est sur un récit qui prend clairement tout son temps et dont la narration et le rythme se veulent particulièrement lents. Tout ici est pensé avant tout pour poser le décor et nous immerger dans le quotidien de ce prince qui ne peut prétendre au trône et qui doit pourtant suivre à la lettre les directives dictées par son statut. Un titre que je recommande fortement pour sa dimension psychologique et historique, mais surtout pour tout ce qu’il parvient à traiter autour des mœurs de l’époque. C’est un voyage dans le passé que l’on effectue autant sur le plan visuel que sur l’écriture et qui va nous faire profondément réfléchir sur cette absence de liberté que pouvaient avoir de telles figures. En plus de ça, Panini a mis les petits plats dans les grands en proposant une très belle édition pour l’occasion avec aussi une préface et une postface donnant un regard captivant sur l’oeuvre et la portée de celle-ci. A présent, j’ai pas mal de questions qui me viennent en tête concernant la suite de cette épopée humaine. Est-ce que l’on va continuer de suivre Genji dans cette course aux ébats amoureux dans l’unique but d’oublier celle qu’il aime réellement ? Est-ce que l’on va assister à plus d’impact de la part des manigances qui ont lieu en coulisses ? Va-t-on assister à un impressionnant revirement concernant le rôle de Genji et sa place au sein de cette cour ? Je serais de la partie pour poursuivre cette épopée.

N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant ce premier volume du “Dit du Genji”. Trouvez-vous que le titre a beaucoup de choses à nous raconter au travers de ce voyage dans le temps ? Est-ce que vous avez apprécié tout le soin apporté par la mangaka pour refléter tout ce qui pouvait faire cette époque ? Avez-vous été intrigué par le développement des personnages et notamment ce prince qui cherche à cacher sa souffrance derrière ses nombreuses conquêtes ? Etes-vous curieux de voir comment son histoire va évoluer ? Qu’attendez-vous pour la suite ? Je reste à votre disposition pour échanger, discuter et débattre autour de ce sujet.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *