Derrière la cover #02 : Oshi no Ko T14
Comme vous avez été au rendez-vous du premier numéro de “Derrière la cover”, je me suis dit qu’il serait intéressant de continuer. Voilà pourquoi on se retrouve aujourd’hui pour parler d’un nouveau tome et plus particulièrement de sa couverture. Au vu du nombre de séries qui sont présentes dans nos librairies, il peut être difficile d’accrocher le lecteur et c’est souvent là que la première impression est la plus importante. Et dans ce domaine, il y a un manga qui a su proposer des covers fabuleuses et souvent en adéquation avec ce qui pouvait être raconté tout au long du récit. Je parle bien sûr de Oshi no Ko chez Kurokawa. Si le manga en lui même est déjà excellent, il est aussi important de noter qu’elle propose aussi des illustrations loin d’être uniquement là pour attirer notre regard. En effet, il y a un élément en particulier que l’on peut parfois zapper alors qu’il est omniprésent tout au long de l’œuvre. Jouant admirablement bien sur la dualité qui va être constamment au centre de son histoire, ce titre va frapper fort et voilà pourquoi j’avais envie de me concentrer sur l’un de ces volumes. Et c’est en posant mon regard sur la quatorzième couverture que j’ai eu le déclic tant elle affiche un symbolisme fort. Evidemment, je vais être obligé de spoiler certains éléments de l’intrigue pour bien comprendre ce qu’il en retourne. Soyez donc prêts pour décortiquer avec moi ce visuel aussi magnifique que poignant.
Un magnifique jeu de couleurs
Avant toute chose, oui le tome n’est pas encore sorti et il s’agit donc d’une analyse qui va surtout se baser sur tout ce qu’il y a eu et ce qui pourrait advenir au sein de ce volume. C’est un exercice intéressant, car cela peut indiquer si cette cover réussit à être le reflet du contenu de l’ouvrage ou bien s’il s’agit plus d’une symbolique propre à l’ensemble de la série. Pour commencer, il y a un élément que je tiens à souligner et qui n’est pas unique à cette illustration. En effet, depuis le tout début, les covers de Oshi no Ko ont la particularité de jouer énormément sur des fonds souvent monochromes. Ainsi, il n’est pas rare d’avoir soit un arrière-plan entièrement blan ou noir si ce n’est sur certaines où l’on fait cohabiter les deux ou bien que l’on invite une autre couleur. Si je tiens à évoquer ça, ce n’est pas pour rien. En effet, le manga a toujours joué sur cette opposition entre lumière et obscurité de par les événements dramatiques qu’il y a eus au début du récit et le monde dans lequel évoluent nos protagonistes. Alors que l’on voit nos personnages dans le monde du showbizz en train de faire bonne impression pour capter le public, la réalité en coulisses est beaucoup plus terne. D’un côté, le spectacle se doit d’être époustouflant et rayonnant tandis que de l’autre, il est question de manipulations, vengeance et même meurtre quand le rideau se baisse. Cela va même jouer énormément sur l’écriture de notre tandem qui va constamment flirter entre ténèbres et lumière.
Il suffit de voir au début que Aqua représente cette noirceur du fait de son désir de représailles tandis que Ruby est plus éclatante en désirant poursuivre le rêve d’Aï. Toute la série se construit autour de cette dualité qui s’exprime à travers tout un tas d’éléments, de niveaux d’écriture et de personnages. C’est donc bien pensé de jouer sur ces deux principales couleurs pour retranscrire le ton du manga et ce conflit qui va être omniprésent. Mais concernant notre sujet du jour, on voit que le fond est parfaitement divisé entre le noir à gauche et le blanc à droite. Si cela donne une esthétique léchée qui va même impacter le logo Kurokawa et d’autres petits éléments de cette cover, cela signifie aussi une autre chose particulièrement importante. En fait, ce n’est pas pour rien que Ruby est présente sur cette illustration. Dans l’arc narratif qu’il y a eu précédemment, on avait pu assister à changement de personnalité de sa part après avoir découvert la vérité sur Aï et son décès. Elle était devenue froide, calculatrice et remplaça même Aqua dans ce rôle de vengeresse quand ce dernier retrouvait goût à la vie. Mais après le tome 13 et les révélations de son frère, un poids énorme semble avoir disparu des épaules de l’adolescente. Une manière de tirer un trait sur tout ce qui la ronge depuis tout ce temps pour enfin montrer de nouveau un visage sincère et doux. Voilà pourquoi elle se retrouve du côté immaculé de cette cover. Cela représente son envie d’avancer et d’enfin créer sa propre histoire malgré ce passé douloureux qu’elle partage avec son frère. Si cette cover représente ce changement chez notre protagoniste, c’est très loin d’être l’unique chose qui nous est racontée.
Un passage de flambeau
Et oui, cette cover de Oshi no Ko n’est traitée qu’à moitié étant donné qu’il nous reste la partie gauche à analyser. Sur celle-ci, on peut justement voir Aï qui se tient du côté gauche et sombre de cette illustration. Un élément intéressant, car on sait à travers le récit que si elle se montrait souvent joyeuse en public, elle était très loin d’être aussi heureuse qu’elle le montrait. Encore une fois, on est dans ce principe de dualité qui forme le cœur de cette série. Mais ce qui est le plus intéressant dans cette cover est le fait que Aï et Ruby ont une interaction très forte sur la cover. Elles se regardent et se touchent la main avant de partir chacune de leur côté. Je trouve cette idée brillante de mise en scène car elle joue sur tout un tas d’éléments scénaristiques. Après tout, nous avons devant nous une mère et sa fille dont la première fut un vrai modèle pour la seconde. Mais c’est aussi elle qui a été la source des nombreuses souffrances vécues de par le meurtre dont elle a été victime. A la fois idole et prison pour les deux enfants qu’elle a laissés, on ressent pourtant dans cette cover qu’une page se tourne pour Ruby. Après avoir enfin compris la vérité autant sur Aqua que sur ce qui entoure ce drame, elle affiche une nouvelle détermination. Et pour souligner encore plus ce lien qui l’unit à Aï tout en montrant sa volonté d’avancer, elle est aussi celle qui incarnera le rôle de sa mère défunte dans le film imaginé par son frère.
Un projet qui a ouvert de vieilles blessures, mais qui peut maintenant signifier un nouveau départ pour cette fratrie. Et c’est ça que je trouve brillant à travers cette illustration, car elle rassemble tout ce qui s’est construit autour de ces deux personnages pour finalement appuyer le fait qu’il est maintenant temps pour la jeune femme de tracer sa propre route. Et cela ne signifie pas pour autant qu’elle doit oublier Aï. Au contraire, elle cherche maintenant à garder de cette figure maternelle le meilleur et à reprendre ce flambeau en illuminant le quotidien des spectateurs. C’était le rêve initial de l’ancienne star et c’est pour ça qu’on les voit aussi partager ce rapprochement dans ce visuel. Un peu comme si Aï laissait enfin la place à sa fille sur scène pour se retirer définitivement et laisser son héritage à cette dernière. Elle qui a connu une fin tragique et tant de souffrances semble enfin trouver le repos tandis que sa fille affiche une nouvelle sérénité. Mais on peut aussi voir ce visuel comme la représentation de ce film et le reflet de Ruby qui doit jouer avec les deux faces d’une même pièce. Tout comme il est aussi question de passé et de futur au sein de cette illustration où Aï part en arrière tandis que Ruby avance. Il y a de multiples interprétations qui se dégagent de ce visuel et c’est justement brillant d’être parvenu à créer ceux-ci. J’espère en tout cas que cette chronique vous aura plu et n’hésitez pas à me dire en commentaires ce que vous pensez de cette cover ! On se retrouve très vite pour encore plus d’articles en tout genre.