Blood Crawling Princess T1 : au nom de la vengeance

On voit de plus en plus de récits qui n’hésitent pas à jouer la carte de la brutalité pour porter leur histoire ainsi que les messages souhaités par l’artiste. S’il est évident que cela amène une telle œuvre à être réservée pour un public averti, il est aussi intéressant de voir comment ces histoires peuvent se démarquer et nous interpeller. Derrière le sang, l’effroi et l’horreur propre à la nature humaine, on peut déceler des thématiques aussi importantes que fortes. C’est exactement ce que l’on va voir aujourd’hui en abordant le cas de la nouveauté du jour des éditions Kurokawa : Blood Crawling Princess. Rien que le nom de ce manga nous fait comprendre que l’on sera face à une histoire qui ne fait pas dans la dentelle, mais ça va bien plus loin qu’une simple effusion de sang ou de la violence à outrance. Ici, on va chercher à nous dégoûter et nous faire partager la colère et la détresse d’une jeune femme à l’égard de tout un royaume, mais aussi plus particulièrement de la perversion des hommes ainsi que de la guerre. Préparez-vous à faire la connaissance d’une princesse qui n’est guidée que par son désir de vengeance.

Vivre quoi qu’il arrive

Synopsis

La princesse Evita menait une vie modeste mais heureuse dans son petit royaume jusqu’au jour où le pays voisin attaque sans préavis. Elle assiste, impuissante, au sac de ses terres et au massacre de sa famille. Seule survivante, Evita est vendue à une maison close, où elle devient la prostituée Priscilla. Alors qu’elle semble condamnée à une vie de torture aux mains du troisième fils du souverain, les cloches de la révolte sonnent enfin.

Mangaka : Yuki Azuma

Dès son résumé, Blood Crawling Princess nous fait comprendre qu’il n’est pas tout public au travers de ce terrible destin qui attend cette princesse. Et il suffit de tourner les premières pages pour être témoin de cette violence qui va caractériser ce manga, mais aussi tout ce qui va découler de ce postulat de base. En effet, on va être le témoin de la chute d’une nation et de ses rares survivantes avant d’entrevoir une possible porte de sortie, mais qui ne peut être atteinte qu’après un éprouvant combat. On bascule alors dans une intrigue aussi sombre que tragique où c’est l’arme au poing que notre héroïne décide de lancer ses représailles.

Un récit déchirant

Il ne faut pas longtemps à Blood Crawling Princess pour nous emporter dans la tourmente que va subir Evita. On fait face à l’horreur qu’elle a vécue quand son royaume a chuté et les images traumatisantes dont elle a été témoin. Ce que je trouve marquant, dans un premier temps, vient justement de ce que l’auteur cherche à nous donner comme image de celle-ci. En la voyant devenir une fille de joie à l’opposée de son image de princesse, on nous donne presque l’impression qu’elle a succombé au désespoir et à ce statut qui est maintenant le sien. Tout est pensé pour renforcer ce sentiment autant par la présentation de ce fameux lieu, des autres pensionnaires de cette maison close et de son attitude à l’égard de ces “clients” qui se montrent absolument écoeurants. C’est alors qu’arrive la fameuse scène qui va totalement chambouler le rapport de force. On découvre alors un visage beaucoup plus effrayant et sinistre de celle qui a pris le nom de Priscilla. On se rend compte alors à quel point tous ces traumatismes passés et son état actuel ne l’ont pas détruit, mais ont fini par créer une flamme en elle qui se nourrit de sa soif de vengeance. Un désir de faire payer ceux qui ont détruit sa vie et elle ne plaisante absolument pas. Un contraste très fort et qui va pleinement nous immerger dans cette quête qui est la sienne, mais pas uniquement. On ouvre les yeux sur tout ce qu’elle a préparé et surtout organisé pour atteindre son objectif.

Des années de souffrance pour finalement se rapprocher de ses cibles et notre sentiment de malaise initial de la voir subir autant se transforme en une sorte de volonté de voir si elle parviendra à ses fins. On a beau être ici dans un cercle infernal qui finit inéluctablement par faire souffrir et engendrer plus de morts, il y a un côté presque grisant qu’elle inflige un tel châtiment à ces hommes qui n’ont absolument rien d’humain. Cela me permet d’aborder un autre point très important dans le manga qui est justement cette opposition qui se joue entre les femmes d’un côté et les hommes de l’autre. Dans ce premier volume, on nous montre les seconds comme étant les maîtres incontestés de ce monde qui passent leur temps à se faire la guerre pour finalement profiter ensuite des innocentes qui connaissent un sort pire que la mort entre leurs mains. De l’autre, nous avons des demoiselles qui vont endurer mille supplices et humiliations pour finalement nourrir leur rancœur et leur courroux quand le moment sera venu. On peut y voir un message important sur le patriarcat et sur la lutte de celui-ci à travers des protagonistes qui nous partagent à quel point un tel système est un cauchemar pour elle même s’il y a bien sûr le contexte très médiéval de cette histoire qui joue aussi là-dessus. Tout ça fait que ce début n’est pas uniquement prometteur dans ce désir de voir Priscilla terrasser ses adversaires. Il y a aussi tout un message qui peut se ressentir au travers de ces pages et donne encore plus de profondeur à une épopée qui nous serre le cœur.

Clairement, Blood Crawling Princess est une œuvre à ne pas mettre entre toutes les mains de par ses propos et la brutalité qui en ressort. Mais au-delà de ça, on se laisse happer par cette quête de vengeance qui risque de faire bien des dommages autant du côté de ces hommes effroyables que des alliées de notre héroïne. Un récit qui se veut justement violent et viscéral pour représenter toute l’horreur vécue par ces survivantes qui luttent maintenant dans l’ombre pour chercher réparation et surtout entrevoir un avenir plus radieux. Et cela nous donne envie d’être l’observateur de cette confrontation qui, quoi qu’il arrive, fera couler beaucoup de sang et de larmes.

Blood Crawling Princess lance son plan

J’étais très curieux de découvrir ce que pouvait proposer ce premier volume de Blood Crawling Princess et je ne suis pas déçu. Je l’avoue que je ne m’attendais pas du tout à ce que ce récit soit aussi violent visuellement et je ne parle pas uniquement en matière de brutalité. Il y a aussi des scènes beaucoup plus explicites par rapport à ce que subissent ces jeunes femmes et c’est pour ça que je tiens à indiquer de nouveau que l’on est face à un manga pour public averti. Mais il ne faut pas non plus cloisonner cette histoire à ces passages éprouvants. Ce récit est avant tout celui d’une demoiselle qui vivait tout bonnement en paix avec les siens et qui a tout perdu pour l’ambition et le plaisir de certains. Une représentation réaliste et sinistre de ce que l’homme est capable de faire en temps de guerre et même quand il quitte le champ de bataille. On est pris à la gorge parce que l’on voit à tel point que l’on a juste envie de voir l’entreprise de Priscilla réussir pour qu’enfin elle puisse se débarrasser de ce poids qui pèse sur elle depuis si longtemps. Et finalement, on sait très bien que toute cette histoire ne peut conduire qu’à encore plus de drames, de souffrances et de cicatrices, mais dans ce monde où le seul moyen pour s’en sortir semble être dans le sang, on a cette envie de voir notre protagoniste rendre la monnaie de leur pièce à ceux qui ont lancé ce cercle de la haine. Une épopée qui nous prend aux tripes et qui n’a sûrement pas fini de nous marquer.

C’est donc une belle petite surprise que j’ai eu avec Blood Crawling Princess et que recommande avant tout à un public averti au vu de ce qui est raconté au sein de ces pages. J’ai été facilement immergé dans cette histoire de vengeance où l’on comprend et partage cette colère qui anime notre personnage principal et ceux qui l’entourent. Une oeuvre qui nous conte avec brio le combat de cette femme non seulement pour punir ses tortionnaires que pour forger un nouvel avenir pour celles qui ont aussi connu le même sort qu’elle. Et ce qui est remarquable quand on lit cette introduction, c’est à quel point on se doute que cette aventure va amener beaucoup de souffrance, mais que l’on a envie de croire en elle. Il n’est pas question ici de corriger des torts pour changer le monde, car on a vraiment le sentiment que celui-ci est déjà perdu. C’est surtout une œuvre qui est là pour nous focaliser sur ces demoiselles qui ont connu l’enfer et demande juste maintenant une justice qui ne peut être obtenue qu’en prenant elles-mêmes les armes. Si vous appréciez les intrigues tournant autour de la vengeance avec une protagoniste déterminée et charismatique alors vous devriez être convaincu par ce premier tome. A présent, j’ai tout de même quelques questions pour la suite. Comment va se dérouler la suite de son plan ? Va-t-elle faire face à des imprévus qui pourraient bien lui coûter cher ? Est-il seulement possible pour elle d’approcher ses proies qui font partie de la haute société de ce royaume ennemi ? Je suis curieux de voir ce que donnera le second volume.

N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant ce premier volume de Blood Crawling Princess. Trouvez-vous que le titre arrive à retranscrire le désespoir de ces femmes qui ne sont plus guidées que par la vengeance ? Est-ce que le manga a su vous surprendre dès cette introduction, notamment dans l’écriture de notre protagoniste ? Pensez-vous que l’on aura le droit à d’importants rebondissements au vu de ce qui se passe déjà entre ces pages ? Etes-vous intrigué de voir comment notre princesse peut parvenir à atteindre son objectif sanglant ? Qu’attendez-vous pour la suite de la licence ? Je reste à votre disposition pour échanger, discuter et débattre autour de ce sujet.