Clair Obscur : Expedition 33 – Un jeu exceptionnel que j’aurais adoré aimer
Oui, le titre peut faire un choc au vu de l’engouement qu’il y a eu et qu’il y a encore autour de Clair Obscur : Expedition 33. Si j’en ai déjà parlé sur les réseaux, j’avais envie de faire une chronique détaillée pour vous parler de mon expérience sur le jeu tout en comprenant que je n’enlève en rien les qualités de celui-ci, mais que c’est beaucoup plus en rapport avec ce qu’il y a eu autour. Car en effet, le titre de Sandfall est vraiment exceptionnel sur énormément de points. Et je ne vais pas me priver d’en parler tout au long de cette chronique pour finalement aborder en dernier ce qui a entaché mon périple au sein de cette fresque. Donc, mettons les choses au clair directement, j’ai énormément apprécié ce que cette aventure avait à offrir durant ces heures de jeu. Que ce soit dans l’écriture, les décors, la musique, cette épopée frappe juste à quasiment tous les niveaux. Et surtout, nous sommes face à un récit qui va nous faire passer par bon nombre d’émotions. Pour ma part, je l’ai terminé en live et il fallait que je mette des mots sur tout ce que j’ai pu ressentir, ou non, durant mon périple. Je vous invite donc à me rejoindre à Lumière pour partir pour la plus grande des expéditions.
Un RPG aux nombreuses qualités
Tout d’abord, il faut comprendre que Clair Obscur : Expedition 33 avait tout pour me plaire. On parle ici d’un RPG au tour par tour qui renoue avec tout ce que l’on pouvait connaître à l’époque de la grande période JRPG. D’ailleurs, le studio le dit clairement qu’ils ont été grandement inspirés par des classiques du genre. Et il suffit de plonger dans le prologue pour avoir le droit à une remarquable scène d’exposition. En seulement quelques minutes, on va autant être intrigué par ce qui se passe qu’être profondément impacté par ce que vivent les personnages au quotidien. Cette introduction est une très belle leçon de narration, mais aussi de mise en place de l’intrigue, car en peu de temps, on cerne facilement l’objectif à atteindre tout en vivant un événement qui va totalement nous motiver à aller au bout de cette quête. On touche alors à la première grande qualité de ce récit qui concerne pour moi sa mise en scène qui se veut très cinématographique sur bien des aspects. Que ce soit par le travail de motion-capture ou même l’ambiance générale, le titre arrive à nous raconter des choses sans forcément mettre des mots dessus. Un simple regard suffit à voir la transformation de Gustave qui passe d’une tristesse déchirante à une détermination de vaincre la Peintresse. Et cela joue grandement sur l’immersion du joueur qui se retrouve au sein de ce monde où la mort est omniprésente. Et que dire aussi de la bande originale qui ne va pas uniquement être un régal pour les oreilles. En plus de donner à chaque chanson une symbolique bien particulière quand on s’attarde sur les paroles, toutes ces compositions ne sont pas là uniquement pour donner un fond sonore. Chaque morceau va sublimer toutes les scènes que l’on va observer.
L’équipe a parfaitement su cerner l’importance de la musique dans une œuvre vidéoludique. Et tout ça, on le ressent dès le prologue pour ensuite aller de surprise en surprise à chaque nouveau chapitre. Et concernant le gameplay en lui-même, le studio a su trouver une excellente cohabitation entre un système classique et des mécaniques apportant du dynamisme à chaque affrontement. Cela permet d’amener du challenge à travers le système d’esquive et de parade qui devient rapidement essentiel pour faire face aux boss les plus retors du jeu. De même, les pictos et luminas proposent une large personnalisation des compétences passives permettant à chacun de créer sa propre stratégie pour venir à bout des défis à venir. Le seul petit bémol que je trouve sur ce dernier est que l’on est rapidement noyé sous un nombre très conséquent de pictos et qu’il peut être difficile, surtout pour les joueurs peu habitués à ce genre de mécaniques, de s’y retrouver au milieu de tout ça. Mais le résultat est quand même efficace et permet de tester constamment de nouvelles combinaisons tout au long de notre aventure. En outre, je trouve aussi que le jeu a une bonne durée de vie qui ne cherche pas du tout à étendre celle-ci de façon artificielle. La trame principale se savoure sans problème tandis que le end-game permet aux gamers aguerris de relever les plus impressionnants des défis. Si je n’ai pas encore évoqué pleinement l’histoire, c’est parce que je vais dédier une partie entière à celle-ci tant il y a de choses à dire. Mais en tout cas, tout ce qui va constituer le coeur de l’expérience utilisateur fonctionne très bien et fait que l’on va être constamment poussé à aller plus loin au fur et à mesure que l’on maîtrise le gameplay.
Un scénario riche et détaillé
Evidemment, je ne peux pas parler de Clair Obscur : Expedition 33 sans évoquer son scénario. Après tout, c’est une composante essentielle, à mes yeux, et un élément que je recherche souvent dans le jeu vidéo. Et ici, on est clairement servi avec une histoire qui, dès le départ, va nous prendre aux tripes. J’ai déjà dit un peu plus haut à quel point l’introduction du jeu est une très bonne leçon de narration pour poser les bases de l’aventure que l’on va suivre. Mais même en sachant pertinemment quel va être notre objectif, le titre veut nous mettre dans une position où l’on veut vaincre la Peintresse, mais en même temps on souhaite en savoir plus sur les nombreuses zones d’ombre. Car oui, toutes les réponses ne sont pas données d’entrée de jeu et vont servir à créer ce brouillard dans lequel on progresse. En donnant un objectif clair à atteindre dès les premières minutes, le studio s’assure que le joueur aura toujours un but à atteindre même quand il semble perdu au même titre que les protagonistes. Mais il y a aussi cette volonté de chercher à comprendre ce qui peut bien être à l’origine de cette entité, de cette fameuse fracture et de tout ce qui semble exister sur ce continent. Ce qui fait que si l’on part avec un objectif bien en tête, tout ce que l’on va vivre durant cette expédition va progressivement élargir notre horizon pour voir cette toile dans son ensemble et non sur un point précis. Evidemment, l’histoire sait quand frapper au bon moment pour jouer sur notre corde sensible et nous faire verser des larmes. Même les petites scènes et échanges durant les phases de campement sont là pour renforcer notre attachement et notre empathie à l’égard de ces personnages qui forment notre équipe.
Dans un sens, le titre sait jouer habilement de la mort ambiante qui règne sur ce monde pour donner encore plus d’importance à l’instant présent et à la vie sans que ce soit forcément la nôtre. Tout ici est axé autour de ce combat qui n’est pas tant pour ceux qui se battent, mais pour les générations futures. Mais plus on avance dans le récit et plus on se rend compte que tout ce que l’on croyait vrai est dépeint finalement comme une sorte de fiction au travers d’un autre prisme. Je ne rentrerais pas trop dans les détails pour ne pas spoiler, mais il y aurait beaucoup à dire sur ce revirement qui va totalement changer notre regard sur ces personnages que l’on accompagne depuis le début et sur la finalité de cette quête. Car on se rend compte que si la mort est le thème principal du jeu, il est finalement centré sur celle d’un individu en particulier qui va être à la source de tout ça. On nous questionne sur le deuil et sur cette incapacité que l’on a parfois d’avancer sans l’être aimé. Tout ça donne à cette épopée une saveur toute particulière où il n’y a finalement pas de bon ou mauvais choix, mais juste des personnes qui, à leur manière, expriment leur souffrance d’avoir perdu quelqu’un. De même, j’ai trouvé vraiment réussie le fait que l’on joue aussi sur les deux faces de ce monde pour montrer que tout ici a une symbolique pour ceux qui sont au cœur de cette histoire. Une idée intéressante qui est une évolution plus que réussie de certaines histoires que l’on a pu rencontrer par le passé, que ce soit dans le jeu vidéo ou même le monde du cinéma. Cela permet à Clair Obscur : Expedition 33 d’offrir une expérience où le joueur ne peut rester indifférent sur ce qui est réellement traité derrière tous ces combats. Plusieurs niveaux de lecture qui peuvent nous retourner le cerveau ou bien parler directement à notre cœur.
Des inspirations rafraîchissantes
Là encore, je trouve que Clair Obscur : Expedition 33 aborde le sujet des inspirations et références de manière intelligente. En effet, le jeu montre clairement qu’il veut rendre hommage à tout un pan du jeu vidéo, notamment du JRPG, mais va aussi piocher des idées et autres influences dans d’autres genres ou même d’autres médiums. Et ce que j’aime avant tout, c’est que l’équipe ne s’en cache pas et va justement montrer qu’ils ne sont pas là pour faire du simple copier-coller. Au contraire, il y a une volonté de nous rappeler des choses que l’on a pu connaître, mais tout en ayant une certaine originalité dans ce qui se construit. Et ce qui est remarquable avec ce jeu, c’est que l’on a tous des œuvres différentes qui nous viennent à l’esprit quand on parle de ce que cette aventure nous rappelle. Pour ma part, je pourrais bien sûr citer énormément de jeux de rôle, notamment FFX, qui est très présent dans Clair Obscur autant dans certaines thématiques que dans le gameplay qui est aussi mélangée à du Sea of Stars. Mais, par exemple, je me suis surpris moi-même à ce que mon épopée à travers Lumière, et surtout le rebondissement de fin, me remémore un film comme Labyrinthe de 1986. Si cela peut faire sourire au premier abord, je trouve qu’il y a une utilisation assez similaire de l’imaginaire, mais aussi de l’utilisation d’un autre monde comme sorte de refuge.
Et cela m’a fait me dire qu’à travers toute sa narration, Clair Obscur : Expedition 33 est un jeu qui s’adresse aussi directement au joueur. C’est aussi ça qui fait que beaucoup de personnes ont adhéré au jeu. On nous questionne sur l’imaginaire et ce qu’il permet d’offrir, mais aussi la contrepartie que cela peut avoir. Et finalement, cela nous fait réfléchir sur notre propre rapport à la fiction, peu importe le moyen de l’exprimer. En faisant ça, le studio rend hommage à bon nombre d’autres licences, films ou séries, mais va aussi éveiller des souvenirs dans un jeu que l’on va pourtant découvrir manette en main. Une forme de mélancolie qui nous touche et qui fait partie intégrante de l’identité de cette histoire. Je suis vraiment admiratif de ce que cette aventure arrive à raconter au-delà de sa trame narrative. On s’attarde sur le moindre petit élément du décor pour y dénicher un indice ou bien simplement un easter egg. Cela donne une autre dimension au récit qui peut autant s’apprécier comme une forme de regard externe de tous ces mondes imaginaires que l’on découvre au quotidien et pour lesquels on a une profonde tendresse. D’ailleurs, le grand final de l’intrigue nous met aussi face à ça. Et c’est là que j’ai apprécié le fait que l’équipe derrière ce titre nous pousse à réfléchir sur notre perception de toutes ces aventures vécues et le côté précieux que l’on a de tous ces souvenirs. Une expérience qui dépasse le cadre du simple divertissement pour amener bon nombre de réactions chez le lecteur.
Une expérience gâchée par le spoil
Et oui, il est maintenant d’évoquer cette dernière partie qui donne aussi son sens au titre. Car en lisant ce que j’ai écrit tout du long de cette chronique, on peut se dire que j’ai pleinement apprécié ce que proposait Clair Obscur : Expedition 33. Et là, il faut dissocier quelque chose d’important. On peut tout à fait être conscient des qualités d’un jeu tout en voyant son périple être entaché par quelque chose. Et ici, cela prend la forme de spoils. En très peu de temps après la sortie du jeu, j’ai été, malgré moi, victime de ces révélations de la part d’autres personnes, que ce soit sur les réseaux ou même en dehors. Je sais très bien ce que diront certains en disant qu’il fallait masquer des mots ou bien s’éloigner des réseaux. Malheureusement, je me dois d’être dessus pour le travail et surtout, très peu de gens auraient pu se douter du raz-de-marée qu’allait être ce jeu à sa sortie. Ce qui fait que je tenais à aborder quelque chose qui, pour moi, est un peu frustrant. Je suis très heureux pour le studio d’avoir eu un tel succès, car le jeu mérite amplement. Cependant, cela a aussi transformé la découverte de ce titre en une sorte de course contre la montre si l’on ne veut pas être spoilé. Je trouve que c’est extrêmement dommage, car cela fait totalement fi de ceux qui n’ont pas forcément l’occasion d’y jouer day one ou qui préfère attendre. De ce fait, j’ai été au courant de quasiment toutes les grosses révélations avant même d’avoir fini le prologue.
Ce qui fait que toute mon aventure, je n’étais pas dans le sentiment de découverte, mais d’anticipation. Sachant que telle scène marquante allait arriver, je n’étais plus surpris par son arrivée. L’émotion du moment était évidemment bien moindre que ce qu’elle aurait pu être si je n’en savais rien. Et c’est quelque chose qui m’attriste, car comme je le dis, je sais que j’aurais adoré vivre ça. Clair Obscur : Expedition 33 regroupe tout ce que j’aime dans le JRPG, mais à cause de ça, l’expérience, malgré toute la bonne volonté du monde, n’est plus la même. Ce constat peut être fait pour tout type de jeux et aussi médiums. J’avais besoin d’exprimer ce que j’avais sur le cœur, car c’est bien l’une des rares fois que cela m’arrive. Peut-être que quand je referais le jeu plus tard, j’aurais une autre approche, mais ce ne sera jamais la même chose que si j’avais été ignorant de tout ce qui allait suivre dans l’histoire. L’impact émotionnel joue grandement sur ce que l’on peut retenir et ressentir d’une aventure vidéoludique. Cela n’enlève rien à tout le travail établi par le studio et je suis heureux de voir un tel succès. C’est juste d’un point de vue personnel que j’aurais aimé que ce soit différent. Nous sommes dans une culture de l’immédiat et cela montre que la patience, pour certains, n’existe plus. Un constat bien dommage et qui peut dénaturer ce que certains veulent vivre pleinement. Pensez aux autres afin que tout le monde puisse profiter tranquillement de ce que le jeu vidéo peut offrir. Si jamais vous n’avez pas eu l’occasion de vous lancer dans Clair Obscur : Expedition 33 je ne peux que vous le recommander, car on a là une belle pépite qui mérite le coup d’œil.