Derrière les codes #6 : les chats
Pour cette journée, je me suis dit qu’on allait prendre un peu de temps autour d’un sujet assez léger et pourtant bien présent dans l’univers manga. Il s’agit de nos amis félins qui ont de très nombreux titres à leur actif et cela depuis bien des années. C’est en constatant ça que j’ai décidé de réserver un numéro de “Derrière les codes” pour vous parler un peu de cette thématique. Car oui, il ne faut pas croire que si nos amis les chats sont présents dans une œuvre, cela serait forcément redondant avec tout ce qui tourne autour de ces animaux. Au contraire, on peut facilement se rendre compte qu’il existe une multitude d’idées différentes afin de les mettre en scène. Cela peut autant partir dans une direction réaliste que, à l’inverse, vers un horizon beaucoup plus fantastique. Et en plus de ça, il ne faut pas résumer ces aventures à de simples tranche de vie se focalisant sur la vie de ces petites bêtes. Il peut y avoir des thèmes très forts qui viennent se rattacher à ça et c’est ce que l’on va voir aujourd’hui avec trois titres en particulier. J’espère que vous êtes prêts à fondre face à ces petites boules de poil.
Hachi & Maruru

On commence directement avec un assez gros morceau concernant un manga pourtant pas si vieux. Il s’agit de Hachi & Maruru – chat des rues, édité chez Doki-Doki. Ici, on est dans l’exemple du récit félin qui se veut justement réaliste dans la description de la vie de ces animaux. On va suivre nos deux petits animaux dans leur quotidien pour survivre dans le monde extérieur. Le premier gros intérêt vient du fait que l’on a ici un chat qui est un vétéran dans ce domaine et le second qui s’est retrouvé perdu loin de son foyer. Cela donne forcément un tandem assez explosif, mais pour lequel on va avoir un profond attachement. Il y a une telle complémentarité entre les deux que l’on fond autant pour l’un que pour l’autre. Mais surtout, le titre ne nous épargne rien en nous montrant la dure réalité qui rythme l’existence de ces chats de gouttière. Toute la première partie du manga est là pour nous en apprendre plus sur les guerres de territoire entre félins, la recherche active de nourriture, mais aussi les ravages que le climat peut faire quand celui-ci se dégrade. Et si cela suffit déjà à nous impliquer fortement derrière nos deux amis, le manga ne s’arrête pas là. En fait, plus on avance dans le récit et plus on va assister à d’importants événements qui vont chambouler le mode de vie de nos protagonistes. C’est notamment le cas depuis quelques tomes où l’on change totalement de cadre et où l’on aborde d’autres sujets toujours en lien avec ce que peuvent connaître ces animaux quand ils sont récupérés. Dégageant un profond amour pour les chats et voulant aussi éveiller les consciences sur ce qu’ils peuvent subir loin d’un foyer chaleureux, l’artiste a parfaitement su insuffler cette sincérité qui fait mouche à chaque volume. Tout ça est couplé à une écriture vraiment touchante de Hachi, Maruru et de tous les autres félins qui vont les entourer. On craque pour eux et surtout on a envie de les voir enfin heureux auprès de gens qui les aiment.
Nyaight of the Living Cat

Alors là, on a un très bon exemple d’une oeuvre sur les chats qui va partir dans une direction totalement folle et surtout très parodique. Je parle bien sûr de Nyaight of the Living Cat chez Mangetsu qui fait le pari osé de créer une comédie horrifique autour de ces félins. En fait, le postulat de départ reprend l’idée de l’apocalypse zombie, mais en remplaçant les morts-vivants par des chats toujours plus nombreux. Et malheur à ceux qui se font attraper ou qui craquent devant ces petites bêtes adorables. On peut clairement se dire que c’est un synopsis assez idiot, mais l’auteur joue justement à merveille là-dessus. En quelques pages, on voit que celui-ci s’est fait plaisir en insufflant son amour du cinéma et particulièrement celui de genre pour mettre en scène son histoire. En lisant ce titre, on va tellement sourire face à l’absurdité de la situation et par rapport au comportement de certains survivants. C’est justement ça qui fait l’intérêt de ce manga qui ne se prend pas au sérieux et montre que l’on peut tout à fait mettre en scène ces animaux sous un angle bien différent, fun et surprenant. Surtout que le trait du mangaka réussit à amener des scènes vraiment impressionnantes tout en gardant cet aspect loufoque propre à ce scénario. Je me suis surpris à rigoler de bon cœur en voyant ces humains fuir ces félins pour finalement craquer et avoir juste envie de les caresser. Cela met aussi en scène ce rapport que l’on peut avoir avec nos compagnons poilus en temps normal. Une appropriation et transformation de tout ce qui façonne nos relations avec les chats dans un contexte “horrifique” pour mieux nous faire rire. Une lecture étonnante à plus d’un titre et qui est la preuve que l’absurde peut aussi très bien fonctionner avec un thème initial que l’on ne verrait absolument pas dans ce registre.
Le Gros Chat et la sorcière Grincheuse

Il est déjà temps d’attaquer la dernière partie de cette chronique et je vais vous parler sûrement de l’un de mes plus gros coups de cœur dans le domaine des mangas de chat. Je parle bien sûr du “Gros Chat et la sorcière grincheuse” édité chez Doki-Doki qui m’a vraiment touché en plein cœur. Cette fois, on part du côté de la fantasy et même de l’isekai avec un chat qui se retrouve transporté dans un autre monde suite à l’invocation d’une vieille femme cherchant un nouveau familier pour lui tenir compagnie. Alors qu’elle pensait avoir une bête majestueuse et impressionnante, elle va se retrouver face à ce félin qui va avoir énormément grossi dans le processus. Ainsi débute leur quotidien mouvementé où magie, amitié et soutien sont les maîtres-mots. Que dire sur ce manga si ce n’est qu’il m’a profondément touché. Si l’intervention du fantastique vient amener ici une dose de surnaturel et la possibilité de créer des situations inattendues pour un chat, la véritable force du titre vient d’ailleurs pour moi. Il est question ici de parler d’une personne âgée qui a été ostracisée par le monde et contrainte à vivre loin dans la forêt pour ne pas subir leur courroux. Isolée et vivant dans une profonde solitude, son rituel d’invocation n’est pas uniquement fait pour le prétexte du familier. Il s’agit aussi pour elle de briser ce vide qui est en elle et son nouveau compagnon a beau être encombrant, il va tant lui apporter. Quand on s’attarde sur ce que raconte vraiment ce manga, on peut y voir cette solitude qui peut frapper les vieilles personnes qui sont mises de côté par leurs amis, proches et famille ou même par le monde dans sa globalité. Cela peut aussi concerner ceux qui ont le sentiment d’être seuls et d’avoir cette boule au ventre. Et là, on nous montre de façon brio à quel point la présence d’un animal peut sauver une vie. Un compagnon qui est là pour nous quand on va mal et avec qui on a le sentiment de briser ce silence qui peut nous hanter au quotidien. Une œuvre de fantasy qui touche la corde sensible et fait bien plus écho à la réalité que ce que l’on pourrait croire au départ. Derrière l’humour et la magie de cette série se cache une douleur bien plus personnelle pouvant frapper n’importe qui et où un animal de compagnie peut vraiment sauver une vie.

