Le rideau se baisse : The One
Cela fait un moment que je me fais une réflexion concernant les chroniques mangas, car s’il est toujours plaisant d’aborder une nouvelle série, cela n’est pas forcément représentatif de ce qu’elle peut donner sur la durée. On apprécie un premier acte en se demandant si oui ou non le bonheur va se prolonger à chaque nouveau tome. Et je comprends tout à fait les personnes qui souhaitent avoir un avis global sur l’ensemble d’une série finie afin de savoir s’ils peuvent se lancer pleinement dedans. C’est pourquoi j’ai envie, en plus des licences inédites qui arrivent, de vous proposer plus régulièrement des articles sur des titres totalement finis. Et je commence dès aujourd’hui avec un manga qui m’a énormément plu tout au long de sa parution et qui a aussi résonné fortement en moi par rapport à un autre titre. Je veux parler de The One chez Meian qui s’est conclu en septembre avec son tome 18. Une aventure nous plongeant dans l’univers souvent impitoyable de la mode et des podiums à travers les yeux d’une adolescente qui va gravir les échelons du mannequinat. Il est grand temps d’analyser cette licence et ce qu’elle a su offrir.
D’adolescente à reine de la mode
Pour bien cerner tout ce qui fait l’attrait de The One, je tiens d’abord à me concentrer sur celle qui va être notre protagoniste : Teng Lele. Cette adolescente, qui ne désirait pas du tout entrer dans ce monde, va finalement atteindre des sommets et tout ça uniquement guidé au début par son coup de cœur pour la star du moment. Et ce qui est bien avec ce postulat de départ, c’est que l’on cherche à confronter rapidement notre héroïne à la réalité du métier de mannequin. Il ne suffit pas d’avoir un physique de rêve pour être désignée comme la nouvelle idole des grands créateurs. Même en faisant des efforts incroyables pour que rien ne puisse être reproché, il suffit d’un tout petit détail pour qu’une potentielle étoile soit finalement mise au placard. Et même jusqu’au dernier volume, on va avoir cet impact de cet environnement sur le destin des personnages. Que ce soit dans les débuts difficiles de cette demoiselle que son quotidien une fois faisant partie de cette “élite” ce métier va jouer un rôle important dans toutes les décisions prises par ceux qui en sont le visage. Et en plus de ça, toute la série va aussi se présenter comme l’ascension de Lele dans ce milieu où les requins sont légion. On va ainsi la suivre autant dans les premiers castings, les soirées mondaines que les moments d’échecs ou les refus de la part de grands noms. Il y a une réelle évolution qui se passe à ce niveau et qui va avoir une réelle répercussion sur le développement des personnages.
C’est en côtoyant le monde du mannequinat que l’on ouvre les yeux sur tous les scandales qu’il peut y avoir, mais aussi sur ce qu’il peut y avoir comme effroyable proposition de la part de certains pour profiter du rêve de nouvelles venues. Même Lele, avec son tempérament fort, va se confronter à ce genre de demande. C’est là aussi qu’elle va briller le plus, car tandis que l’on est témoin des actes immoraux qui se tiennent devant nous, notre héroïne est un peu le symbole d’une tornade parmi ces gens. Si elle doit s’adapter à son nouvel environnement, elle ne veut surtout pas sacrifier sa dignité et ses principes pour réaliser son souhait. C’est au cœur de toute cette luxure et ces abus qu’elle est présentée comme une figure presque angélique qui ne va pas se laisser marcher sur les pieds tout en montrant qu’elle est capable d’accomplir de grandes choses. Ce contraste fait beaucoup de bien et va justement lui permettre de secouer la vie de celui qui fait battre son cœur et de son frère jumeau. Quand on prend conscience de ça, on remarque très facilement que tous ceux qui ont croisé sa route lui ont donné des leçons sur le fonctionnement de ce métier, mais elle leur a transmis des valeurs que beaucoup avaient perdues. Une jeune femme que l’on a envie d’encourager tout du long et qui est la première à donner du baume au coeur et un vent de fraîcheur dans un domaine où beaucoup ont perdu leur âme. Le genre de figure qui fait du bien sans pour autant stagner au même niveau.
Et si le monde du mannequinat est l’un des fils conducteurs de ce récit, ce n’est pas uniquement ce qui fait l’âme de The One. Comme évoqué un peu plus haut, le développement de Lele est une preuve du talent de la mangaka pour nous proposer des personnages à la fois attachants et assez dramatiques. Et c’est là-dessus que je veux rebondir maintenant étant donné que ce titre est aussi une fresque humaine mettant en avant le meilleur, mais aussi le pire qui peut exister en matière de relations. Alors que tout brille sur scène, la réalité en coulisses est bien plus triste.
De nombreux défis à relever
Si j’ai pu évoquer longuement l’importance du monde du mannequinat sur ce récit, cela ne signifie pas pour autant que The One va uniquement s’attarder là-dessus. Il s’agit aussi d’un décor pour ensuite faire réellement connaissance avec les personnages qui vont rythmer cette aventure. J’ai parlé précédemment de Lele qui doit surmonter bon nombre d’obstacles, mais elle est loin d’être la seule à devoir faire face à des défis personnels. En réalité, chaque acteur de cette pièce va, à notre contact, laisser progressivement tomber son masque pour nous montrer leur vrai visage. Et on se rend compte que derrière la célébrité, la gloire ou bien l’argent peut se dissimuler un mal-être profond. Quand on prend le temps d’analyser les blessures de chacun, on se rend rapidement compte qu’il s’agit souvent de stigmates laissés par des relations souvent toxiques découlant du statut de certains ou bien des actes ignobles pouvant être commis au nom d’une plus grande renommée. Le meilleur exemple de ça concerne nos deux jumeaux qui sont les autres stars de la série. En plus de la nouvelle relation qu’il va y avoir avec Lele, on a le droit à tout un travail d’écriture pour démontrer à quel point l’existence de cette fratrie est loin d’être un long fleuve tranquille. Au contraire, plus on fait leur connaissance et plus on ouvre les yeux sur l’enfer que fut leur vie et à quel point leurs liens familiaux ont été des fers dont ils ne pouvaient se défaire même après avoir pris leur indépendance.
Quand je parlais plus tôt de relation toxique, il ne s’agissait pas uniquement d’amour, mais aussi paternel. En fait, la série va constamment confronter ce qui nous semble normal dans n’importe quelle relation à une réalité bien plus affreuse pour que l’on soit encore plus impacté par ce qui se passe. On va totalement partager les souffrances de ces gens qui sont considérés par certains de leurs proches comme de vulgaires outils entre leurs mains dont ils peuvent disposer à loisir. Cela donne lieu à des scènes qui nous serrent la gorge. Cette aventure se présente alors comme un drame humain où il est avant tout question de réussir à tourner la page et se débarrasser de ces fantômes qui continuent de s’accrocher à l’âme des vivants. Plus les chapitres avancent et plus on entrevoit la difficulté de ces personnages à simplement accepter une main tendue tant ils vivent dans un environnement où la bonté n’existe pas et où toute aide est synonyme d’une affreuse contrepartie. Et c’est justement là que Lele vient briser ce cycle de colère en faisant de son mieux pour apporter ce qui semble pourtant si vital à l’élu de son cœur et ceux qui gravitent autour d’elle. Dans un milieu où tout semble factice, elle apporte des sentiments réels qui vont permettre à ses nouveaux amis de faire face à leurs plus profondes blessures ou traumatismes. Je retiens notamment un moment en particulier où elle et Angus vont lutter ensemble pour faire face à une terrible addiction. Tout ça permet à cette œuvre de ne pas être uniquement une critique du monde de la mode, mais aussi une épopée humaine de haute volée.
On compare souvent The One a Nana dans son traitement de l’être humain en plus de proposer une toile de fond qui cache une certaine tristesse derrière le feu des projecteurs. C’est tout à fait juste et on sent même que l’autrice s’inspire beaucoup de ce classique même dans son dessin. Mais cela ne signifie pas qu’il s’agit d’une envie de copier, mais de s’inspirer pour créer une fresque dont on ne peut détacher le regard. On va alors autant rire que verser des larmes en suivant ces stars qui ne cessent de porter des masques pour finalement se montrer à coeur ouvert après bien des épreuves.
The One fait son show
Nous sommes déjà à la conclusion de cette chronique et je dois dire que j’ai été totalement bluffé par ma lecture de The One. Une série qui, à chaque nouveau tome, fut l’occasion de s’attacher un peu plus à l’ensemble de cette galerie de personnages. Des protagonistes qui sont loin d’être purement manichéens et qui cherchent, pour une grande majorité, à survivre dans ce domaine où les requins prolifèrent. En suivant Lele dans son parcours vers les sommets, on assiste à la désillusion d’une jeune fille pleine de rêve et guidée avant tout par l’amour et l’admiration à l’égard d’un top-modèle. Et malgré ça, elle ne va pourtant pas suivre le même destin que les autres et devenir une star parmi tant d’autres. Elle va s’adapter à cet environnement non pas pour en faire partie, mais pour l’influencer et montrer que même dans cet univers impitoyable, il est possible d’avoir une lueur d’espoir. Elle n’est pas uniquement une future étoile montante de ce métier, elle est aussi une personne remarquable qui va apporter de la lumière dans la vie de ceux qui sont bloqués par le passé ou la part sombre de cette industrie. Sans compter aussi que la mangaka a aussi un autre atout en poche. Il s’agit tout bonnement de son trait qui peut à la fois être fin et délicat que nous proposer des passages beaucoup plus cartoonesque et hilarants. Une artiste qui jongle habilement avec ces divers styles afin de créer une histoire aux multiples facettes. Il est alors très difficile d’oublier ce casting réussi de bout en bout et dont certains participants vont nous émouvoir tandis que d’autres éveillent en nous une profonde colère.
Je tenais énormément à parler de The One pour ce numéro du “Rideau se baisse”, car c’est une œuvre qui, à mes yeux, a énormément de qualités à faire valoir. Et surtout, on a le droit à une conclusion qui se veut maîtrisée et largement suffisante sur tous les plans. Personne n’est laissé de côté et jusqu’à la dernière minute on en vient à s’inquiéter de l’avenir de nos protagonistes. Une réussite qui fait que j’aime tout particulièrement cette série qui, en plus de ça, n’est pas si longue avec ses 18 tomes. D’ailleurs, il est très facile de trouver une partie de la série en occasion sur le site anime-store ce qui est une chance pour se lancer pleinement dans cette aventure. Et si l’on aborde très régulièrement les titres qui font la une ou bien qui sont ceux qui portent le plus, je trouve qu’il est dommage de se limiter à ça. Il y a tellement de récits qui sortent chaque semaine et qui se terminent qu’il est aussi pertinent de se focaliser sur celles-ci. Surtout que l’on est face à une intrigue qui peut plaire à beaucoup de monde et dont la pertinence résonne encore fortement aujourd’hui. C’est donc une grosse recommandation de ma part et qui, je l’espère, vous donnera envie de la découvrir. Si vous avez apprécié des mangas comme Nana ou que vous souhaitez une formidable tranche de vie dans le milieu du mannequinat alors n’hésitez plus.
N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre ressenti ainsi que votre appréciation de The One. Trouvez-vous que cette série a su aller pleinement au bout de ses idées ? Avez-vous apprécié le périple de Teng Lele et de tous ceux qui vont graviter autour d’elle dans ce milieu ? Est-ce que la critique de cet environnement souvent éprouvant et difficile fut bien menée selon vous ? Avez-vous été touché plus d’une fois par la romance qui s’est installée ainsi que le destin parfois brisé de certains protagonistes ? L’évolution de notre héroïne est-elle parvenue à vous convaincre tout au long du manga ? Je reste à votre disposition pour échanger, discuter et débattre autour de ce sujet.