La valse des nouveautés : A Tail’s Tale – Hôtel Voynich – Wakusei Closet
Vous le savez certainement, mais la crise de matière première qui frappe le monde de l’impression a retardé et empêche encore des titres de sortir aux dates initialement prévues. Une situation compliquée, mais où il faut juste prendre son mal en patience pour enfin avoir entre les mains les mangas que l’on attend. C’est ainsi que l’on a pu voir en deux semaines, l’arrivée de trois nouvelles licences chez Noeve Grafx. On s’est donc dit que ce serait l’occasion idéale de faire un article regroupant notre analyse de ces lancements et ainsi voir ce qu’elles peuvent proposer. En plus de ça, deux de ces séries collent assez bien à la période d’Halloween, donc c’est un décor idéal pour parler d’elles. Au programme, on a du slice of life, de l’étrange et aussi de l’effroi. Trois récits diamétralement différents et qui ont su offrir une expérience assez spéciale pour chacun. Il y a donc largement de quoi faire surtout qu’il y a beaucoup d’éléments intéressants à analyser par rapport à ce qui nous est conté et surtout ce qui peut nous attendre pour le futur de ces sagas. L’heure est donc venue de se poser pour vivre de nouvelles aventures.
A Tail’s Tale tome 1
A Tail’s Tale, imaginée par Mizu Sahara, nous plonge dans un monde contemporain où l’on fait la connaissance de Nachi. Cette collégienne et membre du club de soft-ball semble souffrir de ne pas être comme les autres. Alors que toutes ses amies bronzent au moindre rayon de soleil, elle reste imperméable à cette chaleur qui la frappe. Tout ce qu’elle désire, c’est pouvoir se conformer aux autres pour ne pas avoir le sentiment d’être une anomalie au sein de sa classe et de ses camarades. Elle ignore alors que sa rencontre avec un garçon va considérablement changer sa vision du monde et de sa propre vie. Répondant au nom de Utsumi, ce dernier pourrait bien lui montrer l’importance de s’accepter tel que l’on est. Après tout, il est lui aussi très différent des autres étudiants qui vaquent tranquillement à leurs occupations. A travers leurs échanges, ils risquent fort de comprendre que ce n’est pas à eux de changer pour se conformer aux normes sociales, mais d’être simplement comme ils sont. Cependant, la réalité est parfois bien plus compliquée que le rêve et il est souvent compliqué d’apprécier ce que l’on est quand les regards qui sont braqués sur nous disent le contraire. C’est donc un long combat qui va débuter pour ce duo qui ne s’étalera pas uniquement sur cette période scolaire, mais bel et bien sur des années. Une quête de tolérance qui passera forcément par des réussites et des échecs en marquant à jamais l’existence de ces deux êtres qui façonnent petit à petit ce chemin menant à un futur qui leur est propre. Ils doivent maintenant être conscients que leur existence ne fait que débuter et qu’elle sera forgée par les moments de joie, mais aussi de tristesse face à ce monde pour qui les différences ne sont pas acceptables.
Ce premier volume de A Tail’s Tale fut aussi étrange qu’envoûtant. Partant sur un postulat de base qui semble classique de prime abord, le récit va ensuite évoluer vers un horizon assez inattendu. Si l’on se questionne énormément concernant la particularité propre à ce personnage qui va être au cœur de l’histoire, on est avant tout captivé par la manière dont la mangaka va amener son principal message. En effet, tout ce premier acte que l’on observe va se concentrer sur ce problème de société que l’on connaît tous qui est le regard des autres. Nos deux protagonistes sont des adolescents qui évoluent un peu en marge de ces cheminements classiques que suivent leurs camarades de classe. Ils font de leur mieux pour s’intégrer et donner un faux visage de ce qu’ils sont réellement. Les normes leur sont imposées et les étouffent petit à petit en les empêchant d’être eux-mêmes. Un constat qui va beaucoup nous marquer tout au long de cette lecture et qui va être magnifiquement développé au fil des chapitres par rapport à leur rencontre. C’est en étant en contact l’un avec l’autre que ces deux êtres parviennent enfin à briser cette carapace qu’ils s’étaient forgée. D’ailleurs, il est important de noter que cela ne se fait pas de manière brusque. Tout ça s’exprime à travers des paroles, attentions et interactions qui peuvent sembler banales, mais qui sont une libération pour eux. Cependant, l’auteure ne s’arrête pas simplement à ça dans son ouvrage. Elle veut nous montrer à quel point la peur de l’inconnu peut pousser les gens à commettre des agissements pouvant être terribles. Un violent retour à la réalité au sein de cette romance qui exprime aussi bien la douleur d’être rejeté. On est alors pris dans une violente spirale infernale où l’on a juste envie de voir ce duo vivre comme il l’entend. Une introduction qui utilise remarquablement bien son élément un peu surnaturel pour évoquer un problème bien réel et important.
Hôtel Voynich tome 1
Hôtel Voynich, imaginé par Douman Seiman, nous fait atterrir sur une petite île à l’abri des regards portant le nom de Blefuscu. Perdu en plein océan Pacifique, ce lieu vit du tourisme même si les affaires ne sont pas si florissantes actuellement. Avec son climat tropical, ses magnifiques plages et un cadre époustouflant, cette région a pourtant tout pour plaire. Malheureusement, elle est aussi connue pour de nombreuses légendes locales pouvant faire fuir les gens sensibles. En plus de ça, il n’est pas rare qu’il se passe des événements étranges au sein de cette île. Malgré tout, les quelques courageux ou curieux qui décident de faire une escale ici peuvent profiter des bienfaits de l’hôtel Voynich. Un établissement qui semble aussi agréable qu’ordinaire, mais dont le personnel peut avoir un comportement singulier. Cela n’empêche pas Taizô Kuzuki de débarquer un beau jour dans cette bâtisse histoire de profiter de quelques jours de repos. Préférant ne pas s’étendre sur les raisons de sa venue en ces lieux, il décide de profiter de son séjour pour en apprendre plus sur la culture locale et surtout de faire plus ample connaissance avec les employés de cet hôtel. Si tout semble aller pour le mieux alors qu’on lui présente tout ce qui fait le charme de Blefuscu, il va finir par ouvrir la boîte de pandore. Le voilà au cœur d’une région dont les origines obscures semblent refaire surface et qui sert de toile de fond à bien des activités douteuses. Ici, chacun a ses secrets et mieux vaut ne pas trop fouiller sous peine de subir le courroux des principaux intéressés. C’est encore plus vrai quand le passé de l’île refait surface et qu’il n’hésite pas à engloutir tous ceux qui viennent nuire à la tranquillité de cette région. C’est parfois dans les mythes que l’on trouve certaines vérités.
Parmi les nouveautés de Noeve Grafx, Hôtel Voynich était un titre que l’on avait hâte de découvrir. Que ce soit par rapport à son synopsis ou même l’ambiance qui s’en dégageait, il y avait un attrait pour cette licence. Cependant, on ne s’attendait pas du tout à ce que l’on allait découvrir une fois la première page tournée. A la fois macabre et délirant, ce premier volume nous emmène dans un voyage particulièrement atypique sur cette île où les problèmes semblent être le quotidien des habitants. Ce qui est étrange avec ce récit, c’est qu’il n’y a pas de réel fil rouge qui se dégage de ce scénario. On est avant tout au cœur de multiples petits mystères concernant chaque personnage que l’on rencontre. En fait, on comprend qu’il n’y a personne dans ce récit qui n’a pas des secrets à cacher. Cela procure un sentiment tout particulier chez le lecteur qui est de vouloir justement faire la lumière sur chacun d’entre eux afin de mieux cerner ce qui se passe devant ses yeux. Parfois vulgaire, jouant sur de l’humour noir et offrant une narration singulière, ce premier volume de Hôtel Voynich se présente comme un petit ovni. Un moment où l’on ne cesse de s’interroger sur tout ce qui se passe au sein de cet endroit et des pensionnaires qui y séjournent. Une curiosité qui va guider nos pas à chaque chapitre et nous conduire autant à des moments calmes et drôles qu’à des découvertes bien plus sinistres. On se demande alors où va vouloir nous mener l’auteur via les deux volumes restants et si tout ce qui se mettait en place ne serait pas pour amener un enjeu bien plus grand. Une œuvre si spéciale que chaque lecteur peut avoir un ressenti bien différent en la lisant. On est face à une série qui nous décontenance autant qu’elle nous attire par sa culture du mystère.
Wakusei Closet tome 1
Wakusei Closet, imaginé par Tsubana, nous fait faire la rencontre de la jeune Aimi. Cette demoiselle tout à fait ordinaire a un problème qui la ronge. A chaque fois que ses paupières se ferment et que le sommeil la gagne, une terreur sans nom s’empare d’elle. En effet, au lieu de tomber dans les bras de Morphée, elle se retrouve projetée dans un autre monde terrifiant. Affichant des formes étranges et surtout une atmosphère pesante, ce lieu est isolé de tout le reste et les seuls êtres présents sur ces terres désolées sont des monstres cherchant à s’emparer des victimes qui tomberaient entre leurs griffes. Totalement désemparée, Aimi fait de son mieux pour survivre le temps qu’elle reprenne ses esprits afin de quitter ce cauchemar si réel. Heureusement, elle peut quand même compter sur la présence d’une autre jeune fille du même âge qu’elle. Ce duo redouble d’efforts pour comprendre cet univers alternatif afin d’accentuer leur chance de vivre ne serait-ce qu’une nuit de plus. Au départ, Aimi pense que tout ceci n’est que le fruit de son imagination, mais elle va très vite comprendre que cet enfer est bien concret. C’est en retournant sur Terre, qu’elle va assister à un événement qui va lui ouvrir les yeux sur toute cette affaire. L’un de ses camarades de classe va mystérieusement disparaître et elle va retrouver sa trace dans cet autre monde qui n’a rien de fictif. Ce n’est plus qu’une question de temps avant que les ombres de ce lieu ne se rapprochent d’elle et de sa comparse. Il faut alors réussir pour ces deux demoiselles à s’adapter à cet environnement hostile afin de trouver un moyen de briser cette malédiction qui s’abat sur ces jeunes qui se font engloutir. L’horreur fait maintenant partie de leur quotidien et elles doivent surmonter leurs peurs pour avancer.
Des trois mangas que l’on aborde aujourd’hui, Wakusei Closet était peut-être celui qui avait le moins éveillé notre curiosité. Cependant, il est celui qui nous a le plus surpris tant on a été happé par ce qui nous était conté. Si l’on s’est attardé un petit peu sur le synopsis pour imaginer ce que cette épopée donnerait, on fut profondément marqué par l’excellente utilisation de l’effroi au sein de cette oeuvre. Si celle-ci se présente avant tout comme une virée dans le surnaturel, le mangaka utilise habilement les codes du genre horrifique pour nous partager le cauchemar que vit Aimi. De ce fait, on a le droit tout au long de cette introduction à des moments où le silence devient pesant. Comme si le moindre bruit réveillerait un mal terrible qui s’en prendrait directement à nos deux protagonistes. De même, une bonne partie du récit se montre assez épurée afin que le regard du lecteur ressente un malaise devant cette absence de vie et que son regard se concentre sur ce que le mangaka veut nous montrer. Ainsi, on ne peut échapper à ces confrontations terribles avec ces êtres difformes et ces transformations macabres. On retrouve une ambiance hypnotique et terrifiante misant aussi énormément sur l’aspect visuel de ces déformations charnelles qui nous écœurent et accentuent ce sentiment d’épouvante. Une incompréhension qui permet de se transposer à la place de l’héroïne et de ressentir le calvaire qu’elle subit. En plus de ça, l’intrigue est bien ficelée et nous donne envie de surmonter cette peur latente pour comprendre ce qu’il se passe réellement. Un premier volume qui donne le ton et maîtrise suffisamment tous ses éléments pour créer l’attente chez le lecteur. Un coup de cœur pour ce lancement qui, on l’espère, sera toujours aussi bon pour la suite.