Horizon tome 1 : peu de mots pour beaucoup d’émotions

Ce qui est fascinant quand on se penche sur le monde du manga, du webtoon ou de la bande dessinée de façon plus large, c’est à quel point on peut tomber sur des œuvres frappantes. Des histoires qui nous surprennent totalement et qui vont alors se présenter comme des expériences à part entière dans notre vie de lecteur. Si je parle de ça en introduction, c’est parce que j’ai pu connaître ça très récemment avec la dernière licence en date de Nazca. Il s’agit d’Horizon, une série en trois volumes, venant juste de faire ses débuts dans leur catalogue. Si j’avais pu lire brièvement le résumé, je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre. Mais en m’aventurant au cœur de ces pages, j’ai pris une baffe autant en matière d’écriture que de travail visuel à travers des planches aussi impressionnantes que terrifiantes. On se retrouve face à une épopée où l’ombre de la mort est permanente autour des protagonistes qui veulent juste survivre le plus longtemps possible. La quête de deux âmes perdues qui va nous donner des frissons. L’heure est donc venue de se poser et de suivre le parcours de ce tandem au sein de cet enfer.

Le destin de deux enfants

Horizon, imaginé par Jung Ji Hun, nous emmène dans un monde qui connaît un véritable chaos. La guerre frappe l’ensemble de ces terres et les morts se comptent par milliers. C’est là que l’on fait la rencontre d’un jeune garçon qui vient tout juste de perdre sa mère. Se retrouvant totalement seul au sein de cet enfer, il se demande bien s’il va réussir à survivre au vu de tout ce qui l’entoure. Les cadavres pullulent et il se dit que ce n’est qu’une question de temps avant qu’il ne finisse comme eux. Malgré tout, il se dit qu’il doit continuer sa route même si cela implique de connaître bien des tourments. Il est très loin d’imaginer que son futur va être bouleversé du jour au lendemain alors qu’il trouve refuge dans un bus abandonné. N’arrivant pas à s’imaginer ce qui peut l’attendre prochainement, il cherche juste à profiter d’un moment de paix après tout ce qu’il a vu. C’est alors qu’il fait la connaissance d’une jeune fille de son âge se mettant aussi à l’abri au sein de ce véhicule. S’ils ignorent comment réagir à la présence de l’autre, ils ne vont malheureusement pas avoir trop le temps de faire connaissance. Une explosion éclate tout près d’eux et c’est une foule en panique qui fuit un peu partout. Sans même réfléchir une seule seconde, le garçon décide de saisir la main de sa nouvelle camarade et de foncer au cœur de cette cohue pour éviter de finir par disparaître sous les bombes.

Ce n’est que grâce à son geste qu’ils parviennent à échapper à un possible drame, mais ils sont une fois de plus témoin d’un véritable massacre. Bien trop horrible pour deux enfants, ce tandem va alors décider de partir à la recherche d’un endroit où ils pourraient enfin connaître la paix. Ils ignorent totalement si un tel lieu existe, mais ils préfèrent croire en ce maigre espoir que de disparaître comme toutes ces malheureuses victimes. Main dans la main, ils décident d’avancer vers l’horizon. Le duo ne sait absolument pas où il va, mais cela ne peut pas être pire que ce qu’il vit déjà au quotidien. Ils vont cependant devoir faire bien attention sur la route. Survivre est une chose difficile dans un tel climat de terreur. S’il s’annonce déjà compliqué de trouver des vivres et de l’eau pour se sustenter, le véritable danger est ailleurs. Les adultes ne sont plus là pour les protéger et ils ne peuvent compter que sur eux-mêmes pour s’en sortir. Le plus grand danger pour l’Homme est souvent l’Homme lui-même et c’est ce que risque d’apprendre ces deux gamins livrés à cet enfer. Mais malgré tout, alors qu’il pensait n’avoir plus de raisons de vivre, le garçon a pu trouver en son amie une personne à protéger. Peu importe ce qu’il devra faire, il jure qu’il veillera sur elle. Ainsi débute leur longue épopée à travers des paysages déformés par la guerre et le sang. Une virée avec un but final bien nébuleux et qui les conduira inévitablement à surmonter bien des obstacles.

Rien qu’en lisant son synopsis, on sait que Horizon ne veut pas se montrer tendre à l’égard du spectateur et de ses protagonistes. Il ne faut que quelques secondes au titre pour nous faire comprendre le chaos et l’horreur de ce monde où deux êtres vont se retrouver et faire de leur mieux pour survivre. Une expérience qui joue la carte du minimalisme dans ses propos, mais pour avoir encore plus d’impact à travers les visuels. On va alors être transporté dans une sinistre odyssée où la moindre escale peut amener bon nombre de défis à surmonter pour ces enfants autant secoués physiquement que psychologiquement.

Une aventure minimaliste bluffante

Ce qui va rapidement dénoter à la lecture de Horizon, c’est la manière dont l’auteur joue sur le visuel plutôt que sur les paroles. Autant le dire tout de suite, le récit se veut assez avare en textes mis à part le narrateur et quelques échanges entre les personnages. Ce parti-pris n’est pas anodin, car on sent rapidement que tout ça est voulu. Notre regard se concentre avant tout sur le trait de l’artiste et ce qu’il véhicule à travers celui-ci. Cela nous amène au premier gros point fort de la série. Il s’agit tout bonnement de sa mise en scène qui est tout simplement bluffante. Prenant le temps de dessiner des planches aussi impressionnantes que dérangeantes, le titre va réussir à nous faire totalement comprendre ce qui se passe sans avoir à nous expliquer quoi que ce soit. D’entrée de jeu, on est témoin de l’horreur propre à cet univers où la guerre est partout et où ce garçon, qui nous est inconnu, se retrouve devant le cadavre méconnaissable de sa propre mère. En seulement une case, on ressent tout l’effroi de ce passage et l’incompréhension de cet enfant qui vient de tout perdre. De même, il y a aussi un formidable travail qui est fait sur l’utilisation du silence et du vide. Certains passages du récit vont appuyer sur le sentiment que nos deux protagonistes semblent être seuls dans ce paysage si calme. Cela donne presque un sentiment de sécurité et aussi une inquiétude de voir une apparition venant chambouler cette quiétude.

L’horreur ne vient pas tant du paysage que des autres êtres vivants qui vont être la principale menace comme on peut le voir de manière très réussie pendant une bonne partie du tome. Mais l’autre point qui rend ce premier acte aussi saisissant, c’est bel et bien tout ce qui se construit autour de ce garçon et de cette fille dont on ignore quasiment tout. Lâchés dans un monde où le moindre faux pas peut être le dernier, ils vont devoir se montrer particulièrement prudents. S’il y a une bonne alchimie qui naît au sein de ce tandem, il va aussi être captivant par la manière dont ces deux personnages vont être opposés. Il est évident que dans un tel environnement, l’innocence propre à la figure de l’enfant éclate en mille morceaux. Cela s’exprime avec brio au travers de notre protagoniste masculin qui est conscient de l’horreur qui l’entoure et qui comprend que pour survivre, il sera possiblement nécessaire de se salir les mains. Sa partenaire de voyage, quant à elle, véhicule ce maigre espoir pouvant sembler utopique concernant la bonté se trouvant en chacun. Pourtant, cette petite lueur est importante, car elle nous permet de ne pas tomber pleinement dans le désespoir. Ainsi, ils sont autant complémentaires qu’opposés et c’est ce qui rend ce duo aussi efficace et attachant. C’est encore plus vrai lorsque l’on assiste à leur première épreuve conjointe qui va les amener à comprendre et à hésiter concernant la nature humaine dans un tel contexte. De ce fait, cette œuvre se veut autant captivante sur ce que les dessins nous racontent que sur le travail apporté aux changements qui s’opèrent chez l’Homme en temps de crise.

Horizon est une œuvre qui m’a profondément chamboulée dans ce qu’il nous raconte. Une aventure à la fois dramatique, humaine et macabre où la mort accompagne chaque pas de ces deux enfants. On progresse dans le récit avec la gorge nouée tant on a le sentiment que le pire peut arriver à tout moment. Cela entraîne aussi un traitement à la fois brutal et convaincant autour de l’enfance qui se voit brisée dans un tel environnement. Sans réellement avoir de but précis si ce n’est celui de vivre, ces personnages arrivent à capter toute notre attention et à nous bouleverser.

Horizon nous assène un violent coup

Autant le dire tout de suite, Horizon a été une excellente surprise. Comme dit en introduction, je ne savais pas du tout à quoi m’attendre et ce fut à la fois un récit aussi déchirant qu’émouvant que l’on a pu vivre. Il suffit d’observer la première rencontre importante de nos protagonistes pour discerner toutes les qualités de cette série. Mais ce qui m’a le plus bluffé, c’est à quel point le dessin est imaginé ici pour écrire l’histoire. Prenant le temps de nous délivrer des planches sublimes et des doubles pages chargées en émotions, on ne peut détourner le regard de ce que l’on voit. Une parfaite et déroutante description de ce monde en ruines où certains paysages laissent presque un sentiment de paix au milieu de ce chaos. En fait, j’ai énormément de scènes qui me reviennent à l’esprit quand je repense à ce que je viens de vivre au sein de cette aventure. En plus de ça, l’auteur a su créer un binôme qui fonctionne très bien et qui est porteur d’un message très fort. Dans leur quête pour trouver un lieu loin de toute cette violence, on va être constamment au contact de la terreur de ce monde, de ce qu’il transforme chez l’être humain y compris chez nos protagonistes. Une expérience littéraire qui joue brillamment sur l’émotion transmise afin que l’on soit happé par le destin de ces enfants qui doivent grandir dans un environnement détruisant à jamais l’innocence qu’ils devraient avoir. Tout bonnement une lecture bouleversante.

Ce fut donc, comme vous l’aurez compris en lisant ces quelques lignes, un énorme coup de cœur pour Horizon. Nazca a su trouver une petite pépite autant dans sa manière de narrer une histoire que dans l’ascenseur émotionnel que l’on va vivre. On s’inquiète pour le futur de ces deux protagonistes et en étant témoin de cette première partie de leur voyage, on comprend totalement pourquoi. Même si on nous montre de quoi ils sont capables pour subsister, ils restent des enfants dans un monde où l’on ne peut faire confiance à personne. Mais c’est aussi une œuvre qui veut être une ode à la vie, car c’est par l’apparition de cette fille dans son existence que ce jeune garçon va retrouver l’envie d’avancer. Des personnages dont on ignore le nom et qui pourtant semblent si proches de nous. Le fait d’ignorer tout ce qui fait leur identité contribue à cette transposition que l’on peut ressentir à leur égard. Voilà une aventure qui pourra séduire tous ceux qui veulent un récit choc et véhiculant des messages forts sur l’humanité et le fait de lutter pour connaître de meilleurs lendemains. Bien évidemment, j’ai plusieurs questions qui me viennent en tête maintenant que je referme ce premier volume. Est-ce que nos deux amis vont réussir à trouver ce petit paradis qu’ils désirent ? Vont-ils être totalement transformés par la cruauté des autres survivants ? Quels sont les prochains obstacles qui se dresseront sur leur route ? J’ai juste envie de croire en leur futur et cela me donne envie de lire la suite.

N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant ce premier volume d’Horizon. Trouvez-vous que l’auteur a su faire un travail remarquable concernant la mise en scène, la narration et les visuels ? Avez-vous ressenti beaucoup d’émotions à la lecture de ce premier acte et de ce qu’il traite comme thématiques ? Etes-vous attaché à ces deux protagonistes qui font de leur mieux pour survivre dans un monde en proie au chaos ? Est-ce que vous trouvez le fait que le récit joue habilement sur le mystère appuie fortement l’impact qu’il a sur le lecteur ? Qu’attendez-vous pour la suite de la licence ? On reste à votre disposition pour échanger, discuter et débattre autour de ce sujet.