Baki

Baki tome 9 à 12 : dans la gueule de l’ogre

Quand on parle de mangas de baston, il y a des noms qui résonnent forcément dans l’esprit de la plupart des lecteurs. Parmi eux, Baki revêt une place importante et c’est actuellement grâce à Meian que l’on peut découvrir les débuts de cette incroyable licence. Aujourd’hui, je me suis donc dit qu’il faudrait se pencher sur les tomes 9 à 12 de ce titre. Venant de sortir il n’y a pas si longtemps, je me suis rapidement jeté dessus afin de voir quel avenir attendait notre jeune prodige des arts martiaux. Ce que l’on peut souvent craindre dans ce type de récit, c’est le fait qu’il puisse y avoir une redondance étant donné que tout s’axe sur l’action et des duels frénétiques. Mais c’était sans compter sur l’incroyable talent de l’auteur qui a su nous montrer ici un tout autre visage de son histoire. Avec ces volumes, c’est une grande page qui se tourne pour la série, mais aussi pour le développement de ce personnage qui n’a eu de cesse de nous en mettre plein les yeux. Il y a alors de quoi faire au vu de ce que propose cet acte qui va autant nous délivrer notre dose de combats que nous faire ressentir bon nombre d’émotions. L’heure est venue de replonger dans l’arène pour une bataille aux terribles conséquences.

L’heure de l’entraînement

Baki T9Baki the Grappler, imaginé par Keisuke Itagaki, s’était arrêté alors que l’on était en train de découvrir le passé de notre petit prodige du combat. Alors qu’il n’était encore qu’un jeune adolescent, il était déterminé à surpasser l’homme qui le servait de père et qui était considéré comme le plus fort au monde. Après avoir suivi un entraînement particulièrement brutal face à une créature aussi impressionnante que menaçante, il s’était confronté à celui qui était considéré comme le roi de la bagarre. Des défis qu’il était parvenu à relever haut la main non sans subir de multiples blessures. Malgré la douleur, la joie prenait le pas et il se sentait prêt à affronter Yûjirô une bonne fois pour toutes. Il ne suffit pas plus pour que le monstre fasse une entrée fracassante face à sa progéniture. Si ses retrouvailles furent loin d’être réjouissantes, elles montrèrent aussi que le fossé entre les deux combattants était encore loin de s’être réduit. Après avoir pris le temps d’aiguiser le désir de vengeance de son fils, l’ogre déclara que cette querelle familiale prendrait fin dans un mois. Le temps est à présent compté pour Baki qui ignore totalement ce qu’il doit faire pour réduire l’écart avec celui qui est autant un ennemi à abattre qu’un objectif à atteindre. Totalement désemparé face à sa propre faiblesse, il n’en reste pas moins déterminé et compte bien profiter du temps imparti pour se renforcer autant physiquement que mentalement. 

C’est pour atteindre son but qu’il va prendre une décision importante. Afin de faire face à ce mur qu’est son père, Baki est prêt à suivre les traces de ce dernier. Il désire vivre les mêmes épreuves que lui et ainsi voir ce qui fait de cet homme un être à part entière. Mais par où commencer au vu de l’immense expérience qu’a accumulée Yûjirô au fil des années ? Le seul homme à pouvoir donner une réponse à cette question n’est autre que l’officier qui l’a accompagné une bonne partie de sa vie. Il s’agit de Strydum, un militaire qui était sûr que le fils de cette bête allait venir lui rendre visite un beau jour. Il lui annonce alors qu’il existe bien un moyen pour lui de se tenir au même niveau que son paternel. Pour cela, il doit cesser ses petites querelles face à des gangs et autres brutes que l’on trouve à chaque coin de rue. Il doit faire l’expérience d’une mort imminente et pour cela, il va devoir se confronter à un commando redoutable. On dit que chacun des hommes composant cette équipe est capable de rivaliser avec tout un régiment. Des combattants dont la force n’est plus à prouver et qui passe le plus clair de leur temps dans les zones hostiles du Japon pour rester dans leur élément. A ses mots, Baki ne peut retenir son excitation à l’idée de se frotter à ces gens. Mais à cet instant précis, ni lui ni Strydum imaginent que l’un de ces soldats n’est autre que le légendaire Gaia. Si peu de gens savent qui est cet individu, ceux qui connaissent la vérité ne peuvent que craindre la puissance de cet autre monstre. Quoi de mieux alors pour terrasser une bête que de se frotter à un dieu.

Il est grand temps pour Baki, à travers ces quatre volumes, de revenir progressivement vers le présent. En effet, l’impressionnant flash-back entamé précédemment va continuer de nous faire vivre de grands moments avant de finalement renouer avec les premiers chapitres du manga. L’occasion de vivre un événement qui va profondément bouleverser notre jeune protagoniste ainsi que le lecteur. Ce fut une totale surprise que de voir comment allait se dérouler la confrontation entre le père et le fils. Le mangaka est parvenu à rendre ce duel encore plus symbolique et monstrueux.

Une surprenante part d’émotions

Si une grande partie de ces quatre volumes se concentre sur l’entraînement de Baki et le retour au présent, il y a un moment qui va afficher une importante symbolique pour l’ensemble de l’œuvre. En effet, cette saga s’est toujours concentrée sur l’action pour porter son histoire et les divers messages que l’auteur cherche à véhiculer. On avait pu être témoin auparavant à quel point la différence entre notre jeune combattant et son père pouvait amener à des situations tragiques. Cependant, le titre va franchir ici un nouveau cap en faisant entrer en scène la mère de Baki. Ce personnage a déjà eu le droit à quelques instants sur le devant de la scène, mais c’est réellement au sein de ces pages qu’elle va pleinement montrer ce qui la ronge, sa relation difficile avec son fils et son rapport conflictuel avec le père de ce dernier. On ne s’attendait pas du tout à ce que la série puisse nous raconter avec autant de maestria un drame familial qui ne se compose pas uniquement de deux acteurs. Quand j’écris ces lignes, je revois encore bon nombre de scènes mettant en avant cette femme qui, en très peu de temps, a su proposer certains des moments les plus marquants depuis le début de cette aventure. Cela peut paraître étonnant, mais c’est ce qui montre aussi la force de ce manga qui arrive à rendre une figure que l’on pensait secondaire comme un acteur majeur dans l’évolution des protagonistes. Il faut donc prendre conscience de ce qu’amène cette femme qui est totalement obnibulée par cet ogre et qui en vient à s’éloigner de son propre fils. 

On pouvait déjà remarqué un peu plus tôt qu’elle utilisait Baki comme un moyen de se rapprocher et de renouer avec Yûjirô alors que celui-ci semble avoir totalement mis de côté cette femme qui a pourtant partagé une partie de sa vie. En fait, c’est une relation particulièrement toxique que l’on nous présente et qui va impacter le rapport entre elle et ce petit garçon qui a pourtant toujours cherché son approbation. Alors que l’on a l’habitude de voir Baki toujours prêt à en découdre, il fait preuve dans ces rares instants d’une grande douceur dans le regard. On ressent pleinement son envie d’avoir enfin l’amour de cette mère qui l’a pourtant toujours considéré comme un outil pour atteindre cet ogre qui lui sert de père. Elle va même jusqu’à avoir des mots très durs à son égard et cela vaut le pire des coups reçus pour notre protagoniste. Mais pourtant, plus on va avancer en direction du combat fatidique et plus on se rend compte du conflit interne qui se joue chez cette épouse et mère. Elle parvient alors à faire preuve d’une tendresse aussi surprenante que bienveillante qui va sublimer une scène qui va s’inscrire dans notre tête. Un passage où le côté brutal et grisant de cette oeuvre va aussi montrer une partie bien plus sombre. On voit alors que là où il était question de dépassement de soi, cet ogre lui ne pense qu’à la destruction la plus totale. En un claquement de doigts, tout s’écroule et va alors amener à montrer toute la beauté de ce lien qui ne demandait qu’à s’éveiller entre cette mère et son fils. Une relation qui va finalement être source d’une tristesse sans nom et être le principal moteur poussant un petit garçon à devenir le bourreau de ce monstre qui lui sert de géniteur.

Il est vrai que Baki avait déjà su nous émouvoir un petit peu par le passé, mais ce n’était rien face à ce moment. Une partie du récit qui va avoir un profond impact pour la suite et donner encore plus de poids à cette quête pour devenir le meilleur. Dans un sens, avoir pris le temps de construire tout ça via ce flash-back a permis de mieux cerner les intentions du protagoniste et ainsi nous rendre compte qu’il n’est pas uniquement question de force. C’est alors que s’opère le raccord entre passé et présent pour nous amener à une nouvelle compétition qui s’annonce déjà plus que saisissante.

Le retour à la compétition

Baki T12Bien évidemment, il est impossible de parler de Baki sans évoquer toute la partie action et spectacle du manga. Si l’on aurait pu s’attarder sur toute la phase d’entraînement du tome 9 et 10, j’ai préféré me pencher sur la suite. En effet, la première partie de cette sélection revêt une grande importance dans le développement de notre protagoniste et sa compréhension de son corps ainsi que ses forces. Cependant, c’est réellement quand on renoue avec le début de la série que l’on peut enfin se projeter vers l’avenir. Jusqu’ici, on était avant tout dans un immense flash-back permettant de mieux cerner le parcours de Baki l’ayant conduit jusque dans la légendaire arène souterraine. A présent, il est grand temps d’assister à un événement majeur prenant la forme d’une compétition où les participants sont loin d’être des inconnus. En fait, la série nous propose ici son premier gros tournoi et il est donc toujours important de voir comment cela est mis en scène et surtout ce qui peut être raconté au travers de celui-ci. Ce qui saute rapidement aux yeux, c’est que même si Baki est présenté comme le champion, il n’est pas le seul à être sous le feu des projecteurs. Plusieurs noms réussissent à se démarquer et vont lui faire de l’ombre. L’occasion aussi de voir s’affronter divers styles d’arts martiaux et ainsi être devant une grande variété de combats. On trouve alors de tout au sein de ce colisée avec des duels qui se finissent en un éclair et d’autres qui vont prendre leur temps pour nous faire douter sur l’issue du combat. 

On pourrait alors presque prendre ce premier tour comme un échauffement pour les participants qui sont là avant tout pour se présenter au lecteur. Concernant notre figure centrale, il va parfaitement se servir de cet événement comme d’une scène pour montrer de quoi il est réellement capable. Cela nous fait prendre conscience du chemin qu’il a parcouru entre le début des souvenirs que l’on a pu voir et ce moment où il s’est hissé au sommet de cet endroit. Une voie sinueuse et où il semble en constante progression. Mais surtout, ce tournoi est aussi une chance pour le spectateur que l’on est de se laisser aller à son envie de parier sur le futur de ce spectacle. Notre regard se porte inéluctablement sur les autres compétiteurs et on se met à discerner plusieurs visages qui méritent l’attention. Avec un tel arc narratif, l’auteur s’assure d’avoir notre attention tout en faisant étalage de son savoir-faire en matière de scènes d’action. Avec ça, la série prend une tout autre dimension et entre pleinement dans l’aspect rivalité et la volonté de faire ressortir un grand gagnant de la mêlée. Même si tout ça est un moyen comme un autre de rattraper Yûjirô, nous en venons presque à oublier sa présence tant on est concentré sur l’enchaînement de duels auquel on assiste. Baki renoue ainsi avec son côté très show tout en faisant de ce tournoi un parfait terrain de jeu pour ces experts dans leur domaine respectif. Le spectacle commence et il est déjà très convaincant.

Nous en sommes déjà au douzième tome et Baki maîtrise toujours aussi bien son rythme, son écriture, mais aussi la force qui se dégage de chaque confrontation. La fin de cet arc narratif et le lancement du prochain vont être particulièrement importants pour l’image que l’on a du fils de l’ogre qui n’est pas uniquement un bagarreur rêvant de toujours plus de force. Il nous dévoile ici bon nombre de failles, mais aussi de blessures qui vont l’encourager à aller de l’avant. Cela nous amène alors jusqu’à ce tournoi qui se présente déjà comme un excellent tremplin pour réveiller le monstre qui a déjà fait tant de dégâts.

Baki frappe dans le mille

Ce que j’aime tellement avec Baki, c’est à quel point cette série montre que l’utilisation de la baston n’est pas uniquement là pour nous offrir une forme de défouloir. A travers ces quelques tomes, Keisuke Itagaki nous prouve qu’il veut autant nous faire vivre une aventure digne de ce nom où les coups pleuvent qu’un titre pouvant aussi nous amener sur d’autres terrains. Ce passage en est un très bon exemple avec un Baki qui nous dévoile ses failles, une certaine fragilité et surtout une âme d’enfant n’ayant pas pu grandir comme les autres personnes de son âge. On en est même venu à être profondément bouleversé en voyant ce qui se passe au sein de ces pages. Le lecteur partage aisément la souffrance qui l’habite et surtout à quel point il a tout perdu. A présent, c’est l’ascension de ce jeune garçon à laquelle on assiste et qui l’amène à se confronter contre des adversaires toujours plus talentueux. Le lecteur est alors toujours autant admiratif de sa force, mais encore plus de cette détermination qui brûle en lui et qui est le fruit de nombreuses blessures et drames. Tout cela se mêle alors parfaitement aux affrontements épiques que l’on va vivre et qui vont autant nous faire vibrer qu’être porteur de la volonté de ceux qui combattent. Nous n’en sommes encore qu’aux balbutiements de ce tournoi, mais cela suffit amplement pour accrocher notre regard et voir qui sortira son épingle du jeu. Le fils de l’ogre n’est plus seul sur scène et c’est au milieu d’artistes martiaux de son calibre qu’il peut exprimer toute l’étendue de son talent.

Ainsi, je suis toujours aussi conquis par ce que propose Baki et qui sera parvenu, par le biais de ces quatre tomes, à renforcer notre attachement pour ce jeune homme et à consolider le rôle d’antagoniste à ce père qui a tout d’une bête. De plus, il est pertinent d’avoir enrichi le casting avec d’autres combattants prometteurs afin d’apporter encore plus de dynamisme et d’incertitude concernant le futur de notre héros. Même s’il a beaucoup changé entre ce qu’il a vécu plus jeune et le champion qu’il est maintenant, on ne peut s’empêcher de ressentir l’ombre de cet ogre qui plane sur lui. Un cauchemar duquel il reste emprisonné jusqu’à ce qu’il puisse enfin le chasser d’un revers de la main. Ce titre n’est pas uniquement un manga de baston. C’est avant tout le récit d’un jeune homme pour atteindre les sommets et régler ses comptes avec la seule famille qui lui reste. Un drame familial qui se nourrit du sang des gladiateurs de cette arène pour attiser les foules et nous préparer au grand show à venir. La série maintient son cap et prouve qu’elle peut aussi toucher ceux qui ne sont pas forcément attirés uniquement par l’action pure et dure. Evidemment, je ne peux conclure sans les éventuelles questions qui me trottent dans la tête. Est-ce que Baki a seulement une chance de battre le monstre ? Va-t-il rencontrer d’autres rivaux pouvant lui mettre des bâtons dans les roues ? Que va donner ce tournoi comme résultats surprenants ? Qui sortira réellement vainqueur de celui-ci ? J’ai hâte de la suite !

N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant les tomes 9 à 12 de Baki. Trouvez-vous que la série parvient à maintenir ses qualités et à proposer aussi d’autres éléments intéressants ? Appréciez-vous l’évolution de notre jeune combattant au fil de ses défis ? Avez-vous été marqué par l’événement majeur qui se passe au sein de ces quatre volumes ? Etes-vous toujours autant emporté par la brutalité de ces combats ainsi que la détermination de ces gladiateurs ? Qu’attendez-vous pour la suite de la licence et de cette compétition ? On reste à votre disposition pour échanger, discuter et débattre autour de ce sujet.

© 1991 Itagaki Keisuke, Akita Shoten

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