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Gachiakuta T1 & 2 : une âme au milieu des déchets

Parmi toute la flopée de titres qui sont sortis en cette première moitié d’année, il y a quelques séries qui étaient particulièrement attendues. Des œuvres qui ont déjà une aura avant même de franchir nos frontières pour débarquer en librairie. Il est alors pertinent de voir ce qui se cache réellement derrière un tel manga et surtout ce qui fait qu’il attire les regards de nombreux fans. C’est exactement le cas pour la licence dont on va parler aujourd’hui et qui a fait ses débuts la semaine dernière chez Pika. Il s’agit de Gachiakuta qui a fait ses débuts au travers de ses deux premiers volumes. Il est clair que dès son annonce, cette série avait déjà attiré l’attention d’une partie des lecteurs ayant déjà connaissance du succès de celle-ci au Japon. Pour ma part, j’avoue que je m’étais gardé la surprise pour voir ce qu’il en était réellement de l’histoire et de l’écriture même si j’avais pu apercevoir de temps en temps certains dessins spectaculaires. En me plongeant dans ce nouvel univers, j’ai surtout pu découvrir une excellente promesse autant en matière d’action que de sujets traités. L’heure est donc venue de voir les trésors pouvant se dissimuler sous une montagne d’ordures.

La chute d’un garçon

Gachiakuta - RudoGachiakuta, imaginée par Kei Urana, nous amène à la rencontre de Rudo. Ce jeune garçon est loin de mener une vie de rêve étant donné qu’il est un garçon de la peuplade qui vit dans les bidonvilles de la nation. C’est dans ce lieu que sont réunis tous les descendants de criminels qui n’ont plus le droit d’intégrer la société prestigieuse. Cette dernière est réservée à l’élite qui profite du luxe et n’hésite pas à se défaire de tout bien matériel n’ayant plus aucune utilité à leurs yeux. Cette facilité avec laquelle ils rejettent n’importe quel objet a le don d’agacer Rudo qui est convaincu que ces affaires peuvent encore largement servir. C’est d’ailleurs pour ça qu’il n’hésite pas à braver les interdits et à se rendre dans l’usine de traitement des déchets pour récupérer ce qui lui semble réparable ou encore utile. Ses excursions ont le don d’agacer les gens au sommet de leur tour d’ivoire, mais pas uniquement. Même ses compatriotes des bidonvilles décident de le marginaliser du fait qu’il préfère être au milieu des ordures qu’avec de véritables personnes. En plus de ça, il est harcelé du fait que son père fut connu pour être un effroyable tueur en série ayant commis bon nombre de meurtres avant d’être finalement arrêté. Il finit par être envoyé dans l’abîme où finissent tous ceux qui se sont rendus coupables de crimes. Pour n’importe qui, ce châtiment est le signe d’une fin atroce même si personne ne sait ce qu’il peut y avoir au fond de ce sinistre fossé qui semble sans fond. 

Malgré ce passé douloureux, Rudo peut au moins compter sur la présence de son père adoptif qui est toujours là pour le réconforter et l’encourager. Une lueur d’espoir dans une vie loin d’être paisible. Mais il semblerait que le bonheur ne puisse durer éternellement autour de ce jeune garçon dont le quotidien va prendre une tournure encore plus dramatique. Il va être accusé du meurtre de celui qui l’a élevé comme son fils alors qu’il est innocent. Persuadé d’avoir vu qui est le vrai criminel, il ne cesse de clamer haut et fort qu’il n’y est pour rien. Mais personne n’écoute ses propos comme s’il n’attendait que de voir la sentence être appliquée. C’est ainsi qu’il s’apprête lui aussi à être envoyé dans l’abîme comme son père autrefois. Il contemple une dernière fois tous ces gens qui semblent se délecter de son sort et se fait une promesse. Il jure de se venger un jour de tous ceux qui l’ont condamné sans l’ombre d’un remords et qu’il fera tout pour survivre peu importe les défis à venir. Sa chute commence et il ignore totalement où cela va le conduire. Il ne lui faudra que peu de temps pour ouvrir les yeux et se rendre compte qu’il est dans une gigantesque décharge où se trouve des montagnes de détritus. Alors qu’il tente de reprendre ses esprits et de comprendre ce qu’il se passe, il va très vite se rendre compte que ce lieu est loin d’être rassurant. Entre l’air intoxiqué pouvant aisément nuire à sa santé et les prédateurs qui rôdent dans l’ombre, il doit rapidement s’acclimater à ce nouvel environnement. Pour cela, il va devoir maîtriser le pouvoir qui sommeille dans ses gants. Jeté comme un simple détritus, il est bien décidé à retrouver son ancien monde pour lui faire payer.

Si l’on peut rapidement se douter que l’on fait face à un manga qui va utiliser des codes bien connus propres à ce genre de récit, Gachiakuta va pourtant frapper un grand coup. Celui-ci va tout simplement provenir de tout le lore et de ce monde que l’on va découvrir au fil de notre avancée dans l’histoire. Alors que l’on lit des premières pages qui nous interpellent sur la voie que va prendre cette aventure, on finit par être témoin d’un changement important qui va tout renverser. On bascule à ce moment dans une toute nouvelle épopée encore plus grandiose et propice à de multiples péripéties.

Aventure époustouflante et thématique originale

En lisant ces deux premiers volumes de Gachiakuta, je comprends totalement ce qui fait l’attrait de cette série. Si l’on est sur certaines bases avec lesquelles on peut être familier, la véritable force de ce manga réside dans l’univers proposé et tout ce qui en découle. En fait, les premières pages nous donnent le sentiment de vivre une aventure bien précise avant que finalement tout bascule pour réellement lancer le début de cette épopée où la vengeance est le maître-mot. On va alors rapidement être témoin des différences opposant les deux mondes que l’on nous propose. Quand on parle de la terre natale de notre protagoniste, on a vraiment une image néfaste de ce peuple où tout est une question de statut et où l’on préfère se débarrasser des gêneurs sans réellement chercher à comprendre la vérité. Un environnement toxique et qui joue très bien le contraste avec l’image dépeinte de ceux qui vivent dans l’opulence. Dès le départ, la mangaka nous montre l’absence de considération de ces gens pour tout bien qui s’avère cassé ou inutile. Des gens nageant dans le luxe et qui préfèrent se séparer de leurs possessions obsolètes pour en reprendre d’autres plutôt que de s’attacher à ces objets. On touche alors à une autre force de la licence qui est l’utilisation de la surconsommation et de l’écologie. Des thèmes forts et que l’on n’a pas forcément l’habitude de voir dans une œuvre de ce genre. 

Pourtant, ici cela va prendre tout son sens et autant se refléter dans le rapport qu’ont ces gens avec leurs objets qu’avec ceux qu’ils considèrent comme inférieurs. Tout ici est rattaché au domaine des déchets, mais à travers deux points de vue différents. D’un côté, on a ceux qui jettent sans le moindre scrupule et sans penser un seul instant à ce qu’ils laissent derrière eux. De l’autre, on a notre héros qui voit en ces montagnes de détritus des objets abandonnés qui peuvent encore servir et qui ont aussi une âme. Des outils de la vie de tous les jours qui peuvent porter le souvenir de leurs propriétaires. A travers toutes ces thématiques introduites dès la première partie du récit, l’autrice va faire un remarquable travail pour en faire un élément omniprésent dans tout le reste de l’aventure. Cela va autant être symbolique comme dans cette représentation du sort qui attend ceux qui osent enfreindre les règles et se retrouvent jetés dans l’abîme. Mais c’est aussi à la source des pouvoirs de nos protagonistes que l’on va découvrir au fur et à mesure. Une série qui a bien sûr un côté spectaculaire et un rythme efficace, mais qui brille justement dans sa faculté à utiliser chaque élément pour nourrir le message porté par l’ensemble du manga. Derrière cette histoire de vengeance, il est aussi question de notre propre rapport aux objets qui nous entourent, l’attachement que l’on peut avoir pour certains et ce qu’ils nous rappellent même au moment où ils arrivent à la fin de leur vie. Comme si on avait le droit à une personnification de ces derniers qui se manifeste par le biais de ces capacités que nos combattants vont maîtriser.

Gachiakuta n’est pas uniquement un très bon divertissement. C’est aussi une épopée qui arrive à proposer un univers loin d’être identique à d’autres récits du même genre. On est autant attiré par tout ce qui gravite autour de notre héros que le développement de ce dernier. C’est justement cette faculté à être autant happé par le fond et la forme qui rend, selon moi, ce début plus que prometteur. Une œuvre qui sait comment créer du grand spectacle tout en travaillant ses multiples thématiques pertinentes au fil de l’intrigue et des découvertes que l’on fait.

Gachiakuta réussit son atterrissage

Que dire donc sur Gachiakuta pour conclure cette chronique si ce n’est que le manga réussit à répondre à toutes nos attentes tout en allant sur des terrains auxquels on ne s’attendait pas forcément. Comme j’ai pu le mentionner auparavant, on sent l’inspiration d’autres œuvres du même genre, mais la mangaka réussit à transformer tout ça pour y insuffler son propre style. Cela fonctionne autant au niveau du dessin que de l’écriture. Le lecteur se retrouve face à des pages sublimes et puissantes avant d’être saisi par la profondeur de certaines facettes de cette aventure. Rien que l’idée d’axer le récit autour de la notion d’ordures et d’en dégager autant une quête de vengeance qu’une dénonciation de cette surconsommation liée à la société est brillante. Tout s’emboîte à merveille pour nous délivrer une œuvre qui ne cesse jamais de nous surprendre et où surtout tout est cohérent dans la diégèse de cet univers. Sans oublier aussi que l’on avance sur des terres qui nous sont inconnues et qui regorgent de mystères. Cela nous pousse à approfondir l’expérience afin de voir tout ce que peut exprimer le potentiel de cette série. Et bien sûr, cette nouvelle licence propose aussi son lot de combats dantesques qui nous en mettent plein la vue tout en collant à ce monde où un objet banal peut cacher un grand pouvoir. Nous voilà donc face à une épopée qui arrive autant à être divertissante qu’à nous faire réfléchir sur notre propre rapport aux objets et notre mode de consommation.

C’est donc un très beau coup de cœur que j’ai eu pour ces deux premiers volumes de Gachiakuta. Une série qui a déjà le potentiel pour créer quelque chose de grand et dont la forme se mélange à merveille avec le fond. J’ai vraiment beaucoup apprécié cette créativité dont fait preuve l’artiste pour aller au bout de son idée afin de l’incorporer dans chaque facette de son histoire. Une ingéniosité remarquable qui ne fait que nourrir notre envie de voir comment l’autrice va développer son récit par la suite. Et puis il y a aussi tout ce qui se construit autour de ce groupe qui se forme progressivement et qui amène encore plus d’intérêt pour le lore. Des personnages qui débordent de charisme et qui vont tout faire pour survivre dans un environnement où l’air est aussi dangereux que les monstres pouvant apparaître à tout instant. Une œuvre qui plaira facilement aux amateurs de récit d’action, mais aussi à ceux souhaitant une aventure qui parvient à dépasser le simple cadre du divertissement pour faire réfléchir sur un sujet précis et important. A présent, j’ai bien sûr énormément de questions qui me viennent à l’esprit pour clore cette chronique. Est-ce que Rudo va réussir à maîtriser le pouvoir qu’il a entre les mains ? Parviendra-t-il à revenir là où il a vu le jour et à se venger ? Fera-t-il la connaissance d’autres alliés pour l’aider à survivre dans ce milieu hostile ? Quels seront les prochains défis qu’il devra relever ? J’ai déjà hâte d’être au tome 3 !

N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant ces deux premiers volumes de Gachiakuta. Est-ce que vous trouvez que la série peut proposer un développement intéressant sur le long terme au travers de ces deux mondes opposés ? Appréciez-vous tout ce qui s’installe autour de nos nettoyeurs et de leurs incroyables capacités ? Trouvez-vous que ce début réussit déjà à donner une dimension spectaculaire à ce récit ? Est-ce que le lore qui s’installe au travers de ces premiers chapitres vous interpelle ? Qu’attendez-vous pour la suite de la licence ? On reste à votre disposition pour échanger, discuter et débattre autour de ce sujet.

Gachiakuta - chute

© 2022 Urana Kei, Kodansha

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