Oneira

Oneira : lumière et cauchemar

Très souvent, je m’attarde sur les premiers tomes d’un manga pour écrire une chronique afin de voir en quoi une série peut être tentante. Mais j’aime aussi prendre le temps de revenir sur des séries quand celles-ci franchissent un cap ou qu’elles ont le droit à de grosses évolutions. Cela permet de voir comment une histoire évolue, et cela, sur les divers éléments constituant son univers. Voilà pourquoi j’étais très content de savoir que le très bon Oneira allait conclure son premier arc narratif avec son quatrième volume. Une occasion parfaite de faire le point sur ce que celle-ci a su nous raconter et la manière dont elle compte évoluer par la suite. Il faut dire que cette série de chez Kana a su rapidement montrer ses qualités par le biais de son dessin, mais aussi du décor qui nous était proposé. Un récit qui joue à merveille avec la notion de cauchemar pour créer un monde à la fois envoûtant et terrifiant. Un voyage dans un univers fantastique qui laisse aussi beaucoup de place au développement de ses protagonistes et de leur combat constant. L’heure est donc venue de faire le bilan de ces premières traques de la part de notre chasseuse de cauchemars.

Le combat d’une mère

Oneira Vol. 1La première chose sur laquelle je souhaitais me concentrer dans ce bilan du premier arc de Oneira, c’est à quel point le travail réalisé autour du personnage d’Arane est remarquable. Avant toute chose, il faut remettre en place le contexte dans lequel se passe cette histoire. Scénarisé par CAB et dessinée par Federica Di Meon, Oneira nous plonge dans monde fantastique où un mal puissant plane sur celui-ci. Il ne s’agit pas d’un ennemi aux commandes d’une nation redoutable, mais de créatures beaucoup plus sournoises et redoutables. Il s’agit des cauchemars, des entités qui se nourrissent des peurs de leurs hôtes et qui finissent par dévorer ou s’emparer entièrement de ces derniers. Face à ce danger, la caste des Épeires fut désignée pour combattre ce fléau au nom de l’Eglise. Parmi ce groupe, il y a une femme qui a su façonner sa légende et dont le simple nom suffit à donner des frissons. Il s’agit de Arane Heos, une guerrière à qui on a donné le surnom de “Croque-mitaine”. A travers ses nombreux voyages, elle a combattu de multiples créatures des songes en compagnie de son fidèle partenaire de route. Mais l’horizon semble bien funeste pour la jeune femme alors que sa caste et l’Eglise semblent secouées par de sérieux bouleversements. Des changements qui pourraient bien nuire à sa propre vie et à celle de son enfant dont le secret est bien gardé.

Ainsi va débuter sa longue et éprouvante lutte pour protéger sa famille tout en faisant face à cette ombre grandissante qui se nourrit des craintes du cœur humain. Vous l’aurez donc compris, nous sommes dans un récit de fantasy qui peut même, par moment, basculer dans la dark-fantasy notamment au niveau de ces êtres néfastes et de la brutalité de ce monde. Si je tenais, en premier lieu, à faire un petit bilan concernant notre protagoniste, c’est parce qu’elle est au cœur de cette histoire et est surtout celle qui va le plus évoluer au fil de ces quatre tomes. Ce que j’apprécie justement avec ce début de la série, c’est que l’on est face à un protagoniste qui va d’abord nous être présenté comme redoutable. Même face à des entités aussi néfastes que ces cauchemars, elle se transforme en une véritable chasseresse qui ne lâche jamais sa proie. On a beau ne pas être trop en contact avec les autres membres de sa caste, elle est un formidable porte-étendard de celle-ci en montrant son sérieux et son efficacité. Une jeune femme qui est avant tout montrée comme une guerrière et qui va peu à peu changer au fur et à mesure que l’on progresse dans le récit. En réalité, ce premier arc va surtout être là pour que l’on puisse entrevoir ce qu’il y a au-delà de cette apparence. On a beau la voir combattre quasiment tout au long de cette partie et être admiratif de ses prouesses martiales, notre regard impressionné se teinte au fur et à mesure d’une profonde sympathie pour elle. Au fil des chapitres, on voit surtout une mère qui lutte bec et ongles pour la sauvegarde de sa fille et qui doit faire face aux fantômes de son passé. On est ainsi dans le schéma où une guerrière qui nous semblait totalement surhumaine dévoile peu à peu ses failles, son humanité, ses peurs, mais aussi une détermination venant de son envie de protéger et non de détruire. Une figure centrale pour laquelle on va avoir énormément d’empathie et qui va être l’un des éléments-clés de cet arc narratif pour nous faire pleinement apprécier cette histoire.

Il est très intéressant de voir comment Oneira s’est construit. En effet, on peut remarquer que cette histoire va tout d’abord s’axer sur le quotidien de notre chasseuse de cauchemars avant d’attaquer pleinement l’intrigue qui gravite autour d’elle et de sa fille. Une manière pertinente de nous imprégner de cet univers affichant bon nombre de menaces avant de réellement s’attarder sur le combat personnel de cette remarquable guerrière ayant été profondément marquée par la vie. Cela amène un très bon équilibre entre notre désir d’en découvrir plus sur ce monde et l’intérêt que l’on porte sur l’ensemble des personnages qui nous sont présentés.

La création d’un univers envoûtant

L’autre élément qui va grandement contribuer à la force de cette première partie tout en étant le principal chantier de celui-ci concerne l’univers que l’on va découvrir. Oneira a quelque chose d’envoûtant dans le décor qu’il nous présente avec de nombreux environnements séduisants et une volonté de créer une toile de fond propice à créer beaucoup d’histoires. Si les tomes 3 et 4 vont grandement s’axer sur l’intrigue autour de nos protagonistes, les deux premiers volumes vont réussir à mettre en place tout ce qui gravite autour d’eux. Voilà pourquoi le fait de suivre Arane en premier lieu dans son quotidien de chasseuse de cauchemars fut une bonne idée. C’est un excellent moyen de nous faire voyager et ainsi être en contact avec les multiples facettes de ce monde. On va admirer de sublimes paysages, mais être aussi en contact avec l’effroi qui ronge ces terres. Et là on touche à quelque chose de très important à mes yeux. En effet, les monstres et tout le lore qui va se dessiner autour d’eux va nourrir notre intérêt pour ce récit. A la fois terrifié et captivé par toutes ces créatures qui ont chacune leurs particularités, on a constamment envie d’en voir plus. D’ailleurs, le fait que chaque affrontement soit différent étant donné que chaque ennemi a le droit à sa propre stratégie renforce l’attrait que l’on a pour enrichir nos connaissances concernant cette menace. Au même titre qu’un The Witcher qui nous conte autant l’histoire de Geralt en tant qu’individu que son parcours de sorceleur, Oneira nous invite à parcourir ces contrées au fil des confrontations.

C’est en cela que les premiers chapitres de cette série jouent à merveille leur rôle afin de placer les fondations de cet univers qui déborde de possibilités. Mais si notre périple se veut déjà prenant en partageant le quotidien de notre chère Epeire, il va redoubler d’intensité une fois que l’on entre dans le vif du sujet. En effet, si l’on avait une vision globale jusqu’ici du potentiel de ce monde et de son lore, le fait de se recentrer sur l’histoire de notre héroïne et de sa fille va avoir un effet très important. Cela va nous montrer que l’aspect fantastique du manga n’est pas l’unique point venant enrichir ce monde. En levant le voile sur les secrets d’Arane, on entre dans une dimension beaucoup plus politique, personnelle et religieuse. Ainsi, si l’on était avant tout concentré sur la menace que représentent les cauchemars, on va ouvrir les yeux sur le danger qu’il peut aussi y avoir chez les hommes. Entre intérêts privés, quête de puissance ou désirs plus profonds, Oneira se présente, à travers cet arc narratif, comme une exposition de tout ce qui peut guider le cœur humain. Les cauchemars ne sont après tout que des êtres se nourrissant des peurs de chacun, tout découle finalement jusqu’à cette opposition entre le souhait de nos protagonistes et les sinistres objectifs d’autres membres de leur propre camp. A travers ce monde, on nous invite à une plongée pertinente dans la psychologie de l’être humain, les traumas qu’il peut connaître et l’impact que cela peut avoir sur ces terres où le mal attend patiemment de s’engouffrer dans la moindre petite faille qu’il trouve.

En seulement quatre tomes, Cab et Federica ont su créer une série qui arrive à nous tenir en haleine en plus d’offrir un pur dépaysement. Oneira est autant fascinant par tout ce qui entoure son lore, ses monstres et ses nations que par le développement pertinent de chaque personnage. On passe de l’admiration au niveau du dynamisme des combats à une profonde émotion en découvrant le passé et les stigmates propres à chacun de nos héros. Un récit qui arrive à nous amener là où il désire et surtout à créer une voie qui s’annonce prometteuse pour la suite de la licence. Voilà une aventure qui nous a déjà beaucoup donné et qui n’en est pourtant qu’à ses débuts.

Oneira et son premier arc réussi

Oneira - L'enfant cauchemar Vol.4Concernant le bilan autour de ce premier arc narratif, celui-ci est plus que positif. On sent, au travers de ces quatre tomes, que l’on a déjà vécu beaucoup de choses et que pourtant nous n’en sommes qu’au début de ce long périple. De même, il est vraiment génial de voir tout ce qui a été imaginé autour de la licence pour enrichir l’histoire propre à cette épopée. Tout cela fait que l’on n’a pas uniquement le sentiment d’avoir devant nous une aventure cherchant simplement à nous divertir. On ressent toute la passion de CAB et Federica pour créer un univers qui soit prenant et que l’on a envie d’explorer. Que ce soit autant dans le fond que dans la forme, Oneira est une franche réussite et qui utilise avec brio diverses inspirations pour finalement créer sa propre identité. Sans oublier bien sûr l’élégance des dessins qui apporte une touche de ravissement à cette épopée tout en soulignant au bon moment l’éprouvant quotidien des gens qui vivent sur ces terres. On peut donc dire que cette toute première partie de cette épopée littéraire remplit à merveille son rôle qui est de nous présenter cet univers tout en proposant déjà un travail de fond concernant le développement et l’écriture des personnages que l’on peut rencontrer. On a alors envie de voir jusqu’où tout ça ira tout en s’imaginant les défis qui seront à relever pour ce trio que l’on tient en sympathie. Ce qui commença comme une traque impitoyable s’est transformer en une quête personnelle et familiale qui amène notre héroïne et son enfant à faire face à une puissance implacable.

J’aime beaucoup tout ce que nous délivre cette nouvelle vague d’œuvres européennes qui arrive à se démarquer par bon nombre d’aspects à ce que l’on peut lire d’habitude. Oneira a cette capacité à nous émerveiller et à nous surprendre dès cet arc introductif. Sans oublier aussi qu’il y a une réflexion intéressante qui découle de cette intrigue et qui nous fait réfléchir sur la nature humaine et ses multiples facettes. Ce qui est sûr, c’est que l’on finit par avoir un profond attachement pour les protagonistes qui luttent vaillamment pour simplement espérer un quotidien paisible. Alors que les cauchemars nous paraissaient terrifiants lors de nos premiers pas sur ces terres, c’est finalement l’homme qui se présente comme le plus dangereux des monstres quand il est guidé par une avidité débordante. A présent, j’ai évidemment beaucoup de questions qui me viennent à l’esprit concernant le futur de la série. Mais difficile d’évoquer ça sans spoiler une bonne partie de l’histoire. Mais en tout cas, je ne peux que vous recommander cette très belle découverte qu’est ce manga qui arrive à tirer son épingle du jeu et à proposer un premier pan scénaristique bien ficelé et qui se veut spectaculaire sur le plan visuel. Quand le “Croque-mitaine” décide de prendre en chasse une proie, il devient alors le plus grand cauchemar qui soit pour ses ennemis.

N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant ce premier arc de Oneira. Trouvez-vous que le récit a su mettre en place un univers accrocheur et ayant beaucoup de potentiel ? Appréciez-vous les protagonistes de cette histoire et la manière dont ils luttent contre leurs démons ? Etes-vous intrigué de voir ce que donnera le futur arc narratif au vu de ce que laisse supposer la fin de ce quatrième volume ? Avez-vous été intrigué par tout ce qui s’est construit autour de cette saga à travers les divers éléments venant enrichir son lore ? Qu’attendez-vous pour la suite de cette licence ? Je reste à votre disposition pour échanger, discuter et débattre autour de ce sujet.

© Di Meo – Cab – Kana

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