Kill Blue T1 : un tueur de retour à l’école
Il est toujours très surprenant de voir un mangaka que l’on associe à un genre précis partir dans un tout autre type d’histoire. C’est l’occasion de voir ce qu’il peut offrir sur un tout autre terrain et ainsi être agréablement surpris quand on découvre ce nouveau projet. On peut alors trouver des propositions intéressantes pouvant nous amener à observer d’autres facettes de ces artistes dont la créativité peut se montrer débordante. Si j’évoque ça, c’est parce que le manga d’aujourd’hui est un peu dans ce cas-là. Il s’agit de Kill Blue qui vient de débarquer aux éditions Crunchyroll et qui compte actuellement six volumes au Japon. Le fait est que derrière cette œuvre se trouve Tadatoshi Fujimaki qui n’est autre que l’auteur de Kuroko’s Basket. Mais cette fois, nous ne sommes pas du tout dans du sport, mais dans un récit mêlant tueur, action et comédie pour un cocktail étonnant. Si l’on retrouve aisément le style de cet artiste, j’étais très curieux de voir ce qu’il pourrait donner en partant dans une direction bien différente de l’œuvre qui la fait connaître en France. Soyez donc prêts, car on retourne sur les bancs de l’école en compagnie d’un assassin qui fait bien plus jeune qu’il ne l’est.
Une piqûre aux lourdes conséquences
Synopsis
Jûzô Ôgami, divorcé, un enfant, est un tueur renommé et redouté dans le milieu de la pègre. Or, un jour, au cours d’une mission, il se fait piquer par une guêpe génétiquement modifiée et se réveille dans un corps d’adolescent ! À la recherche de réponses et d’un antidote, le voilà envoyé en mission sous couverture… dans un collège ! Découvrez la descente aux enfers de ce pro de la gâchette, quasi quadra désabusé, qui se retrouve inscrit à l’école au milieu d’adolescents de l’âge de sa fille. Pour lui qui n’a jamais été à l’aise avec les jeunes, c’est un peu comme entrer dans la cage aux lions !
Mangaka : Tadatoshi Fujimaki
Avec ce synopsis, Kill Blue nous donne rapidement le ton de ce que l’on va lire. En effet, on comprend très vite que l’on part sur une basse assez loufoque dans l’idée, mais qui va amener des sujets intéressants par la suite. S’il est avant tout question d’action et d’un peu d’humour, le fait d’avoir un homme d’âge mûr qui retrouve son corps d’adolescent et est obligé d’aller en cours amène plusieurs sujets prometteurs. Tout en étant focalisé sur sa quête pour retrouver son état normal, Jûzô va se confronter à une réalité qu’il n’a pas connue et qui va lui ouvrir les yeux sur une toute autre manière de vivre.
Pas facile d’être un ado
Quand on se lance dans Kill Blue, on a vraiment le sentiment d’avoir devant nous une œuvre assez classique qui cherche avant tout à nous divertir. Après tout, on retrouve certains schémas assez connus, mais toujours avec une certaine originalité de la part de l’auteur. Et ce qui est bien, c’est que ce dernier arrive à proposer une histoire simple, efficace et qui va rapidement nous amuser. On apprécie de voir ce tueur quasiment quadragénaire se retrouver dans ce corps d’adolescent et de faire face à des situations qu’il n’a jamais connues. Un contraste qui n’est jamais là pour créer un certain malaise par rapport aux autres élèves de sa classe. Au contraire, je trouve justement que le récit parvient à créer quelque chose de très intéressant autour de ce rajeunissement. S’il y a plusieurs moments où l’on peut admirer Ôgami faire étalage de ses capacités d’assassin d’élite, je trouve que la plus grande force de ce premier volume réside ailleurs. En fait, j’ai beaucoup apprécié de mettre en avant cet écart de génération entre notre protagoniste et ce nouvel environnement qui est le sien. Si cela permet d’appuyer l’aspect comique lié à cet écart, cela permet aussi d’aborder d’autres sujets prometteurs. On nous dépeint un personnage principal qui a été élevé depuis son plus jeune âge à devenir une véritable machine à tuer. Un individu qui n’a connu que la primaire avant d’entamer cette vie où il n’a pas eu un instant pour souffler. Ainsi, il ne sait pas du tout ce que c’est que d’avoir une adolescence banale.
En allant sur les bancs du collège, il ne va avoir de cesse de vivre des expériences inédites à ses yeux. Et cela le mène à avoir des réactions surprenantes, mais finalement en totale adéquation avec son vécu. Il prend plaisir à apprendre et à simplement mener cette vie lambda où la tranquillité est la plus belle des choses. Cet enthousiasme amène une certaine tendresse dans son écriture, car on se rend compte que tout ce qui peut nous paraître acquis et parfois même ennuyant peut être un rêve éveillé pour d’autres. Il y a même une volonté de montrer l’importance de croire en ce que l’on souhaite accomplir plutôt que de se plier à ceux qui pensent tout savoir de cette société. Des messages forts qui apportent une belle lueur d’espoir et d’importantes leçons. De même, tout ce qui est lié aux études, aux relations avec les autres étudiants et à cette envie de créer son propre avenir font de cette histoire un récit bien plus touchant que je ne l’aurais cru initialement. Et tout ça est saupoudré d’une dose d’action qui amène du rythme et une bonne dose de spectacle. C’est remarquable d’être parvenu à trouver cet équilibre entre tous ces éléments afin de donner vie à une épopée qui flirte avec plein de genres différents. Un titre qui peut donc paraître classique dans sa forme, mais qui brille remarquablement bien dans son fond. J’ai rapidement eu de la sympathie pour l’ensemble de ces personnages qui gravitent autour d’un protagoniste qui voit d’autres possibilités que cette voie qu’il n’a jamais choisie.
Ainsi, je trouve que Kill Blue est très loin d’être une œuvre uniquement axée sur une épopée amusante et palpitante. En dehors des quelques scènes d’action et de tout ce qui va graviter autour de cette intrigue, ce récit regorge de bonnes idées dans l’écriture de son protagoniste et son rapport à son nouvel environnement. Loin de tomber dans certains tropes bien connus du genre, le tout est fait avec beaucoup de finesse afin que l’on puisse autant passer un bon moment qu’être interpellé par tout ce qui se présente à nous. Un manga qui regorge de qualités et qui doit maintenant pleinement s’épanouir.
Kill Blue relaxe
Quand j’évoque le fait de se relaxer dans ce titre de partie, c’est pour une bonne raison. Kill Blue est un manga qui, dès ce premier volume, réussit à créer une atmosphère singulière. Oui, nous sommes au contact d’un protagoniste qui est un tueur expérimenté. Mais quasiment à aucun moment du récit, on ne sent une volonté de basculer dans un récit sombre ou particulièrement brutal. Au contraire, toute cette introduction s’axe sur l’importance d’apprécier l’instant présent et la banalité de la vie. On nous fait comprendre que ce qui nous est classique peut devenir exceptionnel aux yeux d’un autre qui n’a jamais pu savourer cette quiétude. Et en plus de ça, j’adore tout ce qui va être amené comme thématique autour de notre personnage principal. J’ai pu évoquer un peu plus haut le choc des générations, mais celle-ci est vraiment très bien amenée. Que ce soit dans la difficulté de certaines technologies ou même dans cette vision du passé qui se confronte aux changements positifs qu’il y a eu aujourd’hui, le mangaka réussit à aborder tout ça avec brio. On voit progressivement Jûzô changer de regard sur le monde, la vie et les gens qui l’entourent. D’ailleurs, il y a un passage en particulier que j’ai trouvé très poignant et qui vient nous rappeler que cet homme à l’apparence d’enfant peut aussi être un père au-delà d’être un combattant professionnel. Et c’est sûrement pour tout ça que je trouve ce premier contact particulièrement réussi.
Vous l’aurez compris à travers ces quelques lignes, mais Kill Blue fut une aventure qui m’a beaucoup plu. Pourtant, j’ai été assez perturbé au départ par le rythme assez lent du récit. Je m’attendais à une histoire beaucoup plus dynamique et ce n’est qu’en progressant dans le scénario que j’ai vraiment pu percevoir tout ce qui faisait le charme de cette histoire. Une œuvre qui traite avec habileté de nombreux sujets qui peuvent nous parler tout en saupoudrant tout ça d’une dose d’action et de comédie. De même, je trouve que l’autre personnage principal qui apparaît plus tard arrive déjà à s’imposer comme une figure captivante de cette aventure. Finalement, ce manga se présente avant tout comme une ode à la normalité et à l’envie de réaliser ses rêves même si ceux-ci peuvent paraître simples. Si vous appréciez les tranches de vie efficaces et qui sont accompagnées d’une dose de combats alors vous serez sûrement convaincu par cette lecture. Et comme à chaque fois, j’ai pas mal de questions qui me trottent dans la tête suite à cette introduction. Est-ce que l’on va assister à une montée en puissance de l’action ? Ce rajeunissement va-t-il radicalement changer ce professionnel ? Assisterons-nous à une évolution de la relation entre certains personnages ? Est-ce que l’on va continuer à aborder des thèmes aussi importants ? Je suis très enthousiaste à l’idée de découvrir le second volume.
N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant ce premier volume de Kill Blue. Avez-vous trouvé que le titre parvenait à offrir une bonne comédie d’action ? Êtes-vous intrigué de voir comment ce protagoniste va évoluer au sein de cet environnement qui est loin de ce qu’il a connu jusqu’ici ? Trouvez-vous que l’auteur s’en sort bien dans ce genre très différent de ce qu’il a fait auparavant ? La série parvient-elle à proposer, selon vous, un bon équilibre entre ses divers éléments pour assurer le divertissement ? Qu’attendez-vous pour la suite de la licence ? Je reste à votre disposition pour échanger, discuter et débattre autour de ce sujet.
© by Tadatoshi FUJIMAKI / Shûeisha