Pourquoi j’aime #49 : Capeta
Avec la sortie prochaine des nouveaux tomes de Capeta, je me suis dit que ce serait l’occasion parfaite pour vous proposer un nouveau numéro de “Pourquoi j’aime”. Il faut dire que cette œuvre sportive est fascinante à plus d’un titre. Rien que par son thème, nous sommes déjà dans une aventure originale même au sein de l’univers des mangas de sports. Mais surtout, l’auteur nous offre une aventure à la fois spectaculaire et humaine qui va nous tenir en haleine tout au long des chapitres. Et surtout, il y a beaucoup à dire sur ce protagoniste que l’on va suivre durant toutes ces années et à quel point un déclic peut changer une vie. C’est pour tout ça que je ne pouvais pas ne pas offrir à cette incroyable série cette petite estrade pour la faire briller. Et même si vous n’êtes pas fan de sports automobiles, il est très facile de succomber à l’appel de cette série tant il y a plus que l’aspect compétitif. Un récit qui va vous prendre aux tripes dès les premières cases pour ne plus vous lâcher après. Il est grand temps d’aller sur le circuit et de voir notre jeune champion nous faire une démonstration.
Au cœur de la course
Pour ma part, il est impossible d’évoquer Capeta sans parler de l’un de ses éléments les plus essentiels : le sport automobile. Dès le départ, on sait vers quoi on va se tourner, mais c’est réellement quand on entre sur le circuit que l’on comprend toute la portée de cette thématique. L’auteur nous montre ici toute l’étendue de sa passion pour ce type de compétition. Avec un remarquable sens du détail, il va nous totalement nous plonger dans ces courses effrénées où le talent du pilote se combine avec une connaissance approfondie de son véhicule. Mais surtout, ce qui est intéressant est que l’on ne va pas se focaliser uniquement sur de la F3. De par le postulat de départ, le mangaka prend un pari intéressant qui est de commencer par le karting pour progressivement nous emmener, au fur et à mesure que son protagoniste grandit, sur cette autre discipline. De ce fait, on va autant s’attarder sur l’un que sur l’autre, voir les liens qui peuvent exister, mais aussi les nombreux changements qui vont s’opérer. Ce qui est aussi génial, c’est que même un néophyte en la matière va réussir à s’intéresser à de telles activités alors qu’il n’est pas forcément plus intéressé que ça. La raison à cela est que l’artiste a su mêler un côté instructif détaillé sans être trop envahissant à une pratique qui va servir de point final à bon nombre de leçons. On ouvre les yeux sur tout ce qui entoure le devoir d’un pilote et l’importance de connaître par cœur son véhicule pour réussir à l’emporter sur les autres concurrents. Tout cela donne un réalisme fou au récit qui nous donne le sentiment d’avoir devant nous de véritables sportifs donnant tout ce qu’ils ont pour l’emporter et aussi nous en apprendre plus sur leur métier. Une technicité d’une précision folle qui donne un cachet incroyable à l’ensemble de la série.
Le rêve d’un gosse
Un autre point qui constitue l’âme du manga concerne évidemment son protagoniste. Capeta Taira est un personnage absolument fabuleux à suivre, notamment du fait que l’on va l’accompagner sur une bonne période de sa vie. On passe de son enfance à son adolescence pour entrer progressivement vers sa carrière professionnelle. Cette croissance, à laquelle on assiste, est d’une cohérence rare tant on va avoir le sentiment de suivre le parcours d’une personne bien réelle qui cherche simplement à se faire une place dans le sport automobile. On le voit apprendre et progresser au fil de chaque chapitre. Incapable de tenir un kart droit au départ, il va franchir chaque étape de son rêve de grandeur avec une détermination inspirante. Chaque nouvelle victoire est gagnée à la sueur de son front et de l’apprentissage de ses erreurs pour s’améliorer constamment. Dans Capeta, on ne nous présente pas un protagoniste qui a un don inné pour ce sport. Au contraire, ce qui fait toute la puissance de son écriture vient du fait qu’il va galérer fréquemment et se confronter à des murs qui semblent impossibles à franchir. Mais c’est à force d’apprendre, de s’adapter et de se relever sans cesse qu’il va réussir à devenir un sérieux concurrent pour le titre. D’ailleurs, son évolution sur le terrain n’est pas la seule chose qui le rend aussi captivant. Sa psychologie est tout aussi travaillée : du gamin timide et complexé, parfois même brutal, il va devenir un jeune adulte responsable qui sait peser le pour et le contre de chacune de ses décisions. En réalité, on a presque le sentiment de grandir avec lui et assister à cet épanouissement qu’il va connaître grâce à cette voie est tout bonnement fantastique. Il est un personnage que l’on veut soutenir et surtout qui nous donne une pure leçon de courage et de détermination.
Une galerie de personnages remarquable
Quand on parle de Capeta, on pense très souvent à son protagoniste et c’est normal. Il faut dire qu’il accapare une bonne partie de notre attention étant donné que c’est à travers ses yeux que l’on va vivre cette histoire. Cependant, cela ne signifie pas que les autres figures du récit sont mises de côté. Bien au contraire, ils vont tous apporter quelque chose d’important à leur manière. Un très bon exemple de ça est le père de notre héros. Un ouvrier veuf qui fait de son mieux pour s’occuper de son fils et qui va tout donner en voyant la passion qui anime son fils pour l’aider à payer ses pièces. On nous dépeint ici une figure paternelle qui peut parfois être maladroite, mais qui sait à quel point la vie de son fils peut être difficile. Il donne tout ce qu’il a pour permettre à celui-ci de retrouver le sourire et surtout de faire ses débuts dans une voie incertaine, mais qui arrive à mettre des étoiles dans les yeux de ce gamin. Une relation touchante qui va frapper fort dès les premiers tomes. Et ça, on peut l’appliquer à bon nombre d’autres personnages du manga qui vont tous avoir leur importance dans le développement de l’histoire ou de Capeta directement. Entre les divers rivaux qui vont se dresser devant lui aux diverses étapes de son ascension, son amie d’enfance qui va être un soutien important dès le départ ou ceux qui vont lui permettre de réaliser son rêve, cette série n’est pas le récit d’une seule âme. En fait, si l’on est happé par cette envie de foncer et décrocher la première place de ce jeune garçon, il va aussi nous montrer que ce sport n’est pas uniquement solo. Il y a tout un travail d’équipe, mais aussi un soutien moral de ses proches lui permettant d’avancer malgré les obstacles. Aucune fausse note dans l’écriture de tous ces acteurs et actrices qui contribuent à donner de la sincérité à cette œuvre.
Un trait au service de l’immersion
Un autre élément qui joue grandement sur la qualité de l’œuvre réside bien sûr dans son trait. Le style de Masahito Soda est identifiable entre mille tant celui-ci est unique en son genre. Ce que je trouve justement fascinant quand on observe celui-ci tout au long de Capeta, c’est qu’il évolue au même titre que les personnages grandissent. On voit à quel point il y a un travail remarquable qui est fait pour représenter l’enfance, mais aussi tout ce qui va entourer ce côté dramatique propre à cette histoire. On avance en ressentant les rêves de ce gamin sans même qu’il dise le moindre mot à travers le dessin. Pareil pour ses failles, ses peurs et les défis qu’il doit affronter. Ici, les planches représentent à merveille tout ça et sont vecteurs de bien des émotions avant même que l’on se focalise sur les dialogues. Et plus on avance dans les chapitres et plus on se rend compte que le trait s’affine et devient plus détaillé comme pour souligner ce temps qui passe et l’entrée dans le monde professionnel. Mais là où le style graphique de l’auteur nous met une claque, c’est dans la conception des karts et F3 qui vont parsemer le récit. Il y a une finesse et une précision dans la représentation de ces machines que l’on sent totalement le travail de recherche et les connaissances du mangaka en la matière. Toute son expérience dans le domaine transpire à chaque case et appuie encore plus l’immersion du lecteur. Un trait qui nous montre l’impact que ces dessins peuvent avoir non seulement sur le visuel d’une œuvre que sur son écriture. Un énorme point fort qui permet au récit de briller de mille feux et de nous emporter dans ces courses frénétiques qui vont rythmer la vie de ce garçon devenu un pilote d’exception.
Des thèmes universels
Il est déjà grand temps de s’attaquer au dernier élément qui, selon moi, vient mettre la cerise sur le gâteau que représente ce manga. Il s’agit tout bonnement des qualités d’écriture de Capeta. A travers les thèmes qui vont être traités par le prisme de notre protagoniste, on va faire face à des sujets souvent compliqués, mais ô combien importants. Sous ses airs de titre sportif classique, Capeta a aussi un message social très important. En effet, il suffit de voir les premiers chapitres pour comprendre qu’il est question d’inégalité, d’argent et de la difficulté de réaliser de tels rêves par rapport à notre classe sociale. Notre protagoniste vient d’un milieu modeste : son père est ouvrier, sa mère est morte et ils vivent dans un petit appartement qui n’a rien de luxueux. De ce fait, souhaiter faire sa place dans le milieu de la course automobile est déjà un énorme défi physique, mais aussi financier pour cette famille. Le manga montre sans filtre comment le talent seul ne suffit pas : il faut de l’argent, mais aussi des contacts et les bonnes pièces pour réussir à se différencier des autres. Malgré toutes ces épreuves qui peuvent briser un rêve avant même que celui-ci ne puisse exister, le manga souhaite aussi être porteur d’espoir. La passion finit toujours par ouvrir des portes, même minuscules. Ce discours réaliste d’une discipline difficile d’accès rend le récit d’autant plus impactant et touchant, car on a envie de voir ce gamin réussir à prouver au reste du monde de quoi il est capable. Et pour ça, cette série mérite énormément de louanges tant elle nous montre que oui il y a des murs qui peuvent paraître infranchissables et qu’il y a des échecs, mais qu’il ne faut jamais perdre cette flamme qui brûle en nous, car elle est capable de déplacer des montagnes.

