Carnet de voyage d’un otaku spécial Ki-oon chapitre 1
Il n’y a pas à dire, depuis le début d’année on a le droit à une myriade de titres provenant de tous les éditeurs. Si l’on peut rapidement se perdre parmi toutes ces sorties, nouvelles licences et lectures à découvrir, cela permet aussi de vivre une telle diversité d’expériences littéraires. C’est pour cela qu’aujourd’hui, on a décidé d’écrire un nouveau chapitre de notre carnet de voyage qui sera centré cette fois-ci sur les différentes sagas parues il y a peu chez Ki-oon. Au programme, quatre titres qui nous ont fait vibrer et surtout de façon bien singulière et propre à chacune de ces histoires. Entre apaisement, intrigue, récit terrifiant et voyage dans le temps, il y a largement eu de quoi faire. C’est en nous attardant sur toutes ces oeuvres que l’on se rend compte à quel point le monde du manga peut nous faire vivre une infinité d’expériences et ainsi montrer toute la créativité et le talent des gens se trouvant derrière ces dessins. Un long et fabuleux périple nous attend et on espère que vous êtes prêts pour ces quatre escales dans des univers ayant leur propre charme. On est donc reparti pour faire le point sur ces séries.
ARIA tome 2
ARIA, imaginé par Amano Kozue, nous avait laissés alors que l’on avait fait la connaissance d’Akari. Cette jeune femme ayant quitté sa planète natale pour s’installer sur Aqua. Ayant toujours rêvé de venir sur ce lieu semblant presque idyllique, son arrivée va largement combler toutes ses attentes. En débarquant à Néo-Venise, elle découvre une cité absolument magnifique et où la vie semble s’écouler paisiblement. Désireuse de réaliser son rêve de devenir ondine, elle va réussir à intégrer l’agence ARIA où elle va être accueillie par le directeur qui n’est autre qu’un chat doué d’intelligence et de la ravissante Alicia. Après de nombreux efforts, la jeune femme a finalement pu passer l’examen pour devenir aspirante ondine. Un premier pas effectué avec brio jusqu’à l’accomplissement de son rêve et qui lui permet d’accueillir des clients sur sa gondole. La seule condition pour qu’elle puisse effectuer son travail est qu’elle soit constamment accompagnée par son mentor. Une contrepartie qui ne gêne nullement Akari qui profite pleinement de chaque instant qu’elle passe sur son embarcation. Chaque jour est l’occasion de faire de nombreuses découvertes pour elle et de partager son amour des lieux à ceux qui décident de l’engager. Les saisons défilent et avec elles de nombreuses situations atypiques pour cette demoiselle qui conserve à chaque fois des étoiles plein les yeux. La vie a beau s’écouler lentement sur Aqua, cette quiétude ne dérange aucunement tous ces gens qui prennent un grand plaisir à retrousser leurs manches pour que tout se passe à merveille. Un quotidien où chacun doit mettre la main à la pâte et qui sublime tous ces petits moments de bonheur que peut procurer la vie et qui peuvent sembler anecdotiques pour certains.
Que dire sur ce titre si ce n’est que l’on a devant nous ce qui se fait sûrement de mieux en terme d’histoires apaisantes. Le simple fait de parcourir Neo-Venise en compagnie de notre jeune héroïne est déjà une aventure dépaysante. On se laisse subjuguer par tous ces décors, ces paysages et ces visuels qui se figent dans le temps pour notre plus grand plaisir. On se surprend même à rester plusieurs secondes sur une case tellement celle-ci parvient à nous hypnotiser. Notre regard se porte alors sur le moindre petit détail et il est presque impossible de ne pas être conquis par ces tableaux naturels que propose ce monde où chacun de nos pas nous guident vers des trésors. Si cet aspect contemplatif est toujours la poutre maîtresse de cette oeuvre, elle ne serait pas aussi plaisante sans notre guide dont le sourire est communicatif. Le simple fait de la côtoyer, de la voir s’extasier devant toutes ces petites merveilles qui accompagnent son quotidien ou bien ses réactions fait que l’on a déjà devant nous une lecture qui nous fait du bien. Un petit vent de fraîcheur qui ne faiblit jamais et nous coupe totalement du reste du monde. En un claquement de doigts, on a la sensation d’être l’un des clients privilégiés de notre apprentie ondine. On l’écoute alors attentivement tandis qu’elle nous fait visiter les moindres recoins de cette ville inoubliable. Un morceau de paradis qui n’affiche aucune ombre et qui souhaite juste montrer que l’on peut embarquer le lecteur dans une oeuvre, et cela, dans la joie et la bonne humeur. Ce manga a beau ne pas s’étaler en longues phases de dialogues ou d’intrigues complexes, on pourrait aisément en parler pendant des heures tant l’ensemble est pensé pour nous immerger dans une expérience hors du commun. Une lecture douce, apaisante et chaleureuse qui nous permet de renouer avec cet émerveillement que l’on peut éprouver face à de toutes petites choses.
© KOZUE AMANO / MAG Garden
Beastars tome 9
Beastars, imaginé par Paru Itagaki, nous avait laissés alors que Louis avait tout bonnement quitté l’école après avoir convaincu son père adoptif de le laisser partir. Le but de ce jeune cerf était maintenant de renforcer son autorité au sein du gang des Lions dont il était devenu la tête pensante. De ce fait, il se mit à tourner le dos à tout ce qui constituait son ancienne vie. Que ce soit son rêve de devenir Beastars ou tous ses amis, il s’était totalement détaché de cela pour embrasser la carrière qui est la sienne à présent. Un revirement de situation qui fit de nombreuses vagues et qui n’était que le prélude a encore plus de bouleversements. De son côté, Legoshi continue de suivre son entraînement et d’aider à arrêter les carnivores qui laisseraient leur faim les guider et leur faire massacrer des herbivores innocents. Sans même s’en rendre compte, le marché noir était devenu comme un second foyer pour lui où il pouvait exercer ces talents de chasseurs tout en peaufinant ses compétences guerrières. Ayant réussi à faire totalement abstraction de son désir de viande, ce changement avait aussi opérer une profonde modification chez lui. Ses crocs avaient largement perdu de leur puissance étant donné qu’il reposait sa force sur ses pattes. Le destin de ces deux adolescents est sur le point d’être à nouveau chamboulé alors que de nombreuses révélations sont sur le point d’éclater au grand jour. La terrible catastrophe ayant débuté toute cette histoire pourrait bien revenir sur le devant de la scène alors que la société elle-même s’apprête à prendre des mesures drastiques pour régler ces incidents.
A travers ce volume de Beastars, on a surtout été bluffé par la façon qu’ont les différents protagonistes d’exprimer leur nouveau caractère. Cela concerne autant Legoshi que Louis et tous ceux qui les entourent. On sent vraiment que tout ce qui est arrivé en si peu de temps à profondément bousculé les habitudes de chacun et va même avoir une influence sur cette société. Ainsi, on est sans cesse ballotté entre les multiples questions que peuvent se poser les herbivores ainsi que les carnivores. La plupart ont beau essayer de conserver le fragile équilibre mis en place, on sent que l’on se rapproche lentement d’un tournant majeur. On peut le dire clairement, cette neuvième escapade est sans nul doute la plus réussie de tous de par tout ce que l’on apprend sur les divers mystères qui existaient depuis le début de la série. De même, les interactions entre nos amis sont si criantes de sincérité que l’on ne peut que ressentir notre coeur se serrer en observant les chemins opposés que certains choisissent. Une tranche de vie dont les enjeux ne cessent de grandir et qui a parfaitement su retranscrire l’humanité dont font preuve ces animaux et surtout les écarts pouvant entraîner une telle cohabitation. Les sujets traités sont toujours évoqués avec un très grand soin et fait qu’il est impossible pour le lecteur de ne pas se mettre à réfléchir et d’éprouver une certaine tristesse en voyant vers où mène toute cette histoire. Un récit qui dévoile toute sa richesse et surtout sa profondeur au fur et à mesure que son intrigue avance. On est alors ébahi par le talent de l’auteur à rendre son univers aussi crédible que bien pensé et surtout de donner naissance à des acteurs de premier ordre dont la représentation est inoubliable. Un spectacle dont on ne peut détacher le regard et dont chaque acte offre un florilège de surprises.
La couleur tombée du ciel
La couleur tombée du ciel, dessinée par Gou Tanabe, nous plonge en plein coeur d’une vallée reculée de la campagne américaine. C’est en ce lieu qu’un projet de barrage est sur le point d’être lancé pour engloutir cette zone afin de fournir plus de ressources aux habitations environnantes. L’homme en charge de vérifier que tout est parfait pour la mise en place d’un tel projet va aller à la rencontre du dernier habitant de ces terres. Lui racontant la raison de sa venue, l’homme semble se réjouir de voir le lieu disparaître sous les flots à jamais. C’est surtout la parcelle juste à côté qui l’inquiète grandement au vu de ce qui s’est passé ici il y a quelques années. Afin de le mettre en garde sur ce qui réside en cet endroit, le vieillard décide de lui raconter une anecdote pour la moins troublante et inquiétante. A l’époque, les Gardner y vivaient paisiblement. Un foyer qui était dans leur famille depuis de nombreuses générations et que rien ne semblait pouvoir troubler la quiétude. C’était jusqu’à la chute d’une météorite non loin de cette demeure. A la vue de cet événement extraordinaire, le patriarche des Gardner fit appel à des scientifiques afin d’étudier cette étrange roche. Malheureusement, leurs recherches ne menèrent à rien et il semblait impossible d’analyser ce roc venant de l’espace et dont la couleur de sa matière était inexistante sur Terre. Peu de temps après, c’est la faune et la flore environnante qui se mit à être altéré et à provoquer des situations surnaturelles. Sans le savoir, tout cela n’est que le début du cauchemar pour cette famille qui va tomber dans une spirale infernale où le malheur est constant.
Avec les deux premières adaptations de Lovecraft, l’auteur a parfaitement su montrer qu’il était capable de retranscrire tout ce qui fait la force de ces œuvres. Que cela soit par les dessins grandioses que l’on peut observer ou bien l’atmosphère macabre de ces univers, tout était là pour nous faire frissonner. On n’a eu de cesse de flirter entre le cauchemar et la réalité en se demandant ce qui était sincère ou non. C’est le plus grand atout de ces ouvrages et La couleur tombée du ciel ne déroge pas à la règle. Ce qui est à noter avant tout, c’est à quel point le récit prend son temps pour nous faire monter crescendo dans l’horreur. Ce qui pouvait sembler être un phénomène scientifique et astrologique surprenant va très vite basculer nos personnages dans une histoire où la curiosité laisse place à l’effroi. Rien que cet aspect joue grandement sur notre ressenti et surtout sur l’immersion que l’on peut avoir concernant cette aventure. Ici, c’est avant tout le travail sur la narration qui fait en grande partie le charme de ce titre. On a beau savoir qu’il ne s’agit que des dires d’un vieil homme et que rien ne prouve la véracité de tout cela, ceci ne nous empêche pas de nous laisser envoûter par ce conte. Tout s’estompe alors autour de nous tandis que l’on se met à côtoyer ces gens qui vont peu à peu tomber dans la folie et le désespoir. D’ailleurs, il est intéressant de noter qu’il y a toujours une certaine fatalité dans ces oeuvres. Comme s’il était impossible de pouvoir échapper à ces phénomènes qui exerceraient un contrôle bien supérieur à la compréhension humaine. Une lecture qui s’empare de nous et ne nous lâche plus même lorsque l’on tourne la dernière page. Une oppressante lecture qui sait comment combler notre manque de frissons sans pour autant aller dans le sanglant. Une terreur bien plus profonde et intense.
Reine d’Egypte tome 7
Reine d’Egypte, imaginée par Chie Inudoh, s’était arrêté alors que l’on avait pu voir notre chère pharaon prendre une terrible décision. Hatchepsout, en voyant la statue qu’avait fait Senmout, ne put retenir sa colère et décida de l’éloigner du palais en l’exilant dans la Vallée des morts afin qu’il finisse le travail d’architecture de cette terre sacrée. Suite à cela, l’arrivée de l’ingénieux Panéhésy apporta énormément au commerce. Se hissant à une place des plus confortables, il pouvait profiter des nombreux avantages qu’avaient les hauts fonctionnaires. Un premier pas réussi pour cette suzeraine qui souhaitait ardemment renforcer son pays de l’intérieur. Cependant, les menaces rebelles et les incursions barbares l’obligèrent à se salir les mains. Se montrant aussi attentionnée envers les siens que intransigeante avec ses ennemis, la reine continuait de faire grandir sa renommée. Pourtant, toutes ces tensions naissantes remettent en cause l’autorité de cette redoutable femme qui doit sans cesse être sur le qui-vive. Que ce soit sur le champ de bataille ou bien au sein même de son palais, les dangers ne manquent pas au vu du nombre d’individus rêvant de la faire chuter de son piédestal. Un destin bien loin d’être facile et qui rappelle à Hatchepsout à quel point son rêve sera compliquée à concrétiser. De plus, Thoutmosis III continue de son côté à réunir plus de partisans. Le jeune homme, bien déterminé à prouver de quoi il est capable, se prépare à prendre les armes et à gravir les échelons de l’armée. Une famille royale dont les querelles pourraient bien engendrer une nouvelle crise au sein de ce pays florissant.
Ce que l’on aime avec Reine d’Egypte, c’est la manière dont la mangaka parvient à retranscrire avec soin le combat de cette jeune femme. Un défi qui ne cesse de se complexifier alors qu’elle a déjà tant accomplie. On reste donc constamment en haleine en voyant tout ce qui lui reste à faire pour espérer atteindre son objectif et surtout les nombreux obstacles qui se dressent devant elle. En tant que lecteur, on a vraiment envie de l’encourager, mais surtout de la voir heureuse. Le bonheur qu’elle avait alors il y a quelques tomes s’est finalement estompé pour ne laisser que le rôle de pharaon. Ainsi, on a presque cette sensation que plus elle se rapproche de son but et plus elle creuse son propre malheur. Cela ajoute une certaine tristesse à cette lecture en plus d’être toujours aussi enrichissante. De par tous les personnages qui tourbillonnent autour de notre héroïne, on est sans cesse interpellé à se demander s’il est vraiment possible de faire confiance à tel individu. Ce qui était autrefois un sublime rêve s’est transformé en une inquiétude constante de voir notre dirigeante recevoir un coup de poignard dans le dos. En réalité, si ce septième volume nous montre de nombreux exploits et surtout des choses pertinentes concernant l’évolution de l’Egypte, il y règne surtout une profonde mélancolie. On contemple tous ces acteurs qui montent sur l’estrade et on ne peut nier voir dans leurs yeux une impressionnante solitude et surtout des ambitions prenant le pas sur tout le reste. Une formidable fresque qui ne nous épargne rien et parvient à nous tenir en haleine de bout en bout sans le moindre temps mort.