Sous un rayon de soleil : une autre facette du maître
Quand on évoque le nom de Tsukasa Hojo, les premiers titres qui nous viennent à l’esprit sont évidemment Cat’s Eye et City Hunter. On peut aussi citer Family Compo, une autre de ses œuvres qui a marqué bon nombre de lecteurs. Mais il faut aussi voir au-delà de ces séries mythiques pour admirer l’ensemble du travail d’un tel auteur qui a su évoluer au fil de ses histoires. C’est encore plus fascinant quand on s’attarde sur tout ce qu’il a pu proposer après les plus gros succès ayant fait sa légende et qui découlent aussi beaucoup des courtes histoires qu’il a pu imaginer au fil des années. Heureusement, on peut aujourd’hui découvrir bon nombre d’entre elles chez Panini Manga et je vais m’attarder aujourd’hui sur une licence qui revient en France. Il s’agit de Sous un rayon de soleil dont les deux volumes le composant sortent cette semaine. J’avais très à cœur de parler de cette petite licence qui est pour moi importante afin de voir toute la richesse dont fait preuve le mangaka qui ne se limite pas à l’humour ou l’action. Il est donc grand temps d’abandonner l’air oppressant de Shinjuku pour prendre un bon bol d’air frais.
La jeune fille qui parlait aux plantes
Synopsis
Alors que Tatsuya veut abattre un arbre qu’il juge responsable de l’infirmité de sa petite soeur Satsuki, une fille mystérieuse nommée Sara intervient pour l’en empêcher. Vivant seule avec son père, celle-ci gère un petit magasin de fleurs itinérant. Malgré son jeune âge, cette amoureuse des plantes dégage une étrange impression de maturité. Que lourd secret cache-t-elle ?
Mangaka : Tsukasa Hojo
Il est vrai que quand on est habitué aux classiques de Tsukasa Hojo, le synopsis de Sous un rayon de soleil peut étonner. Cependant, c’est quand on se plonge pleinement dans cette histoire que l’on va découvrir l’habileté de cet artiste pour changer totalement de registre. Nous sommes face à une tranche de vie beaucoup plus douce, chaleureuse et bienveillante que ce que l’on a pu lire auparavant. Une œuvre qui veut nous amener sur un terrain assez inattendu et pourtant important dans le rapport entre l’homme et la nature. Quelques chapitres qui vont nous montrer l’importance de s’attarder sur ce qui nous entoure.
Une ode à la nature
Ce qui va rapidement se démarquer quand on se lance dans la lecture de Sous un rayon de soleil, c’est le thème principal lié à l’œuvre. En effet, il ne faut pas longtemps pour que l’on découvre la particularité de notre protagoniste et ce que cela va amener comme situations étranges. En fait, il est très intéressant de se pencher sur deux points importants du manga. La première concerne évidemment cette demoiselle qui débarque du jour au lendemain dans cette ville en compagnie de son père pour ouvrir une boutique de fleurs. Au-delà du pouvoir qui lui est propre, cette jeune fille va rapidement se démarquer par son attitude qui ne semble pas correspondre à son âge. Préférant passer son temps en compagnie des plantes et arbres qui gravitent autour d’elle que d’aller à l’école, on va progressivement comprendre ses secrets. En plus d’apporter une touche de mystère et de fantastique, cet élément est loin d’être anodin. En effet, nous faisons face à une gamine qui, en réalité, enchaîne des sortes de cycles de vie au même titre que cette nature qu’elle aime tant. A l’image d’un arbre qui grandit et disparaît avant de finalement revenir, elle ne reste jamais au même endroit. Apportant ses bienfaits et son soutien à ceux qui sont dans le besoin, humains comme flore, elle finit inlassablement par s’envoler pour entamer un voyage ailleurs. Une présence qui touche tous ceux qui font sa connaissance et qui ne peuvent oublier le souvenir de cette enfant même après tant d’années.
Tsukasa Hojo a justement pensé à ça pour qu’elle soit encore plus proche de l’autre facette importante de son récit, à savoir la nature elle-même. Une symbiose qui va permettre de sublimer les puissants messages qui vont être véhiculés tout au long des deux tomes. Car oui, cette série va être porteuse de propos forts autour de cet environnement que l’humanité cherche à maîtriser sans pour autant chercher à la comprendre. Tout au long de cette lecture, on va rencontrer des gens de tous horizons qui, au contact de notre personnage principal, vont s’ouvrir à cette végétation qui les accompagne constamment dans leur quotidien. Elle nous montre l’importance d’écouter et surtout de s’arrêter quelques instants pour simplement apprécier ce que la nature peut offrir. De même, on va être devant des petits arcs qui vont démontrer à quel point le lien entre l’homme et la nature peut avoir de fabuleuses conséquences et permettre à certains d’avancer. Bien sûr, tout est sublimé par cet aspect fantastique qui se dégage, mais cela n’empêche pas le titre d’avoir un réel et crucial message écologique tout en développant une histoire mettant à l’honneur le bonheur lié aux petits plaisirs de la vie. Cette lecture nous embarque avec elle dans cette bulle que l’on peut avoir au quotidien, mais que l’on quitte souvent trop vite sans prendre le temps de profiter de ces instants où l’on se laisse bercer par cette végétation qui nous entoure. Avec ses personnages pouvant être semblables à n’importe qui, Hojo veut faire écho aux gens qui liront cette œuvre afin qu’ils s’identifient à eux et aient envie, le temps de quelques minutes, de redresser la tête et de contempler cette beauté naturelle qui compose ce monde.
Si l’on peut retrouver quelques petits éléments que l’on peut souvent voir dans les récits de l’auteur, Sous un rayon de soleil arrive tout de même à se différencier grandement par tout le reste. A travers sa mise en avant de la flore environnante, son héroïne qui semble être prise dans un cycle éternel de recommencement et les situations proposées, cette histoire souligne l’intérêt que l’on doit avoir pour cette nature qui accompagne chacun de nos pas. Une lettre d’amour à cette cohabitation qui peut et doit exister entre les deux parties et surtout le lien pouvant les unir.
Sous un rayon de soleil éblouit notre regard
Il est vrai que les auteurs ou autrices sont toujours intéressants à découvrir à travers leurs sagas les plus connues. Cependant, il est tout aussi pertinent de s’attarder sur tout ce qu’ils ont pu faire autour et qui contribue à montrer la diversité qu’ils peuvent avoir dans leur écriture et imaginaire. C’est exactement le cas ici pour Tsukasa Hojo avec Sous un rayon de soleil. Tout comme ses histoires courtes, ce mangaka a su montrer plusieurs facettes qui ne sont pas forcément celles que l’on connaît de prime abord et qui sont malgré tout captivantes à découvrir. Avec ce titre, on observe cet artiste nous montrer son désir de parler d’un sujet qui lui tient à cœur tout en y amenant une délicatesse et une élégance remarquables. Là où l’on ne cesse, dans bon nombre de ses autres récits, de côtoyer la nuit et ses criminels, ici on est ébloui par ce soleil que l’on a souvent tendance à oublier. D’ailleurs, ce n’est pas pour rien que l’on retrouve des visages connus même s’ils n’ont pas les mêmes noms. Un peu comme si on pouvait entrevoir entre ces pages ce que leur vie aurait pu être s’ils n’avaient pas été plongés dans l’environnement que l’on peut leur connaître. On a, quoi qu’il arrive, un profond attachement qui se tisse entre nous et ces personnages qui n’ont d’autre but ici que d’apprécier ces quelques moments de partage, de compréhension et d’entraide à l’égard d’amis, d’inconnus, mais aussi de végétaux. On pourrait presque fermer les yeux et s’imaginer à leur côté en profitant de cette brise agréable sous l’ombre de ces majestueux arbres.
Sous un rayon de soleil a clairement été un coup de cœur pour moi autant dans le ressenti personnel que dans ce qu’il apporte à l’ensemble des travaux de Tsukasa Hojo. Un récit qui n’a nullement besoin de durer plus longtemps tant il se suffit à lui-même avec ces deux volumes. En plus de ça, l’éditeur a su proposer une édition tout à fait qualitative à l’image de tout ce qui a été fait autour de la collection de ce maître. Nous voilà face à une petite série qui brille justement par sa simplicité et surtout son envie d’offrir un moment de réconfort et de tendresse tout en nous faisant ouvrir les yeux. Alors que l’on a souvent l’habitude d’opposer humanité et nature par rapport à la propension du premier à écraser le second, ici on se veut avant tout tourner vers la cohabitation. Une entente mutuelle pouvant apporter de nombreux bienfaits et surtout créer de sublimes histoires comme nous le montre si bien ces quelques cases. Si vous appréciez Tsukasa Hojo, que vous souhaitez élargir vos connaissances sur ses divers travaux ou si vous désirez simplement une lecture reposante et bienveillante alors celle-ci est faite pour vous. Il n’y a évidemment aucune question à se poser étant donné que tout se termine déjà. Malgré tout, on peut se remémorer avec joie ces doux souvenirs que l’on a pu se forger en compagnie de ces quelques personnages attachants et profondément humains. Le type de séries qui réconforte et nous permet d’apprécier un peu plus ce monde qui gravite autour de nous.
N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant Sous un rayon de soleil. Trouvez-vous que ces deux tomes arrivent à proposer de petites histoires touchantes et fortes ? Est-ce que le manga est, selon vous, un bel hommage à cette nature qui nous entoure et avec qui on doit apprendre à vivre ? Appréciez-vous le fait de voir ce grand mangaka changer autant de registres et d’approches dans sa manière de narrer une histoire ? Est-ce que vous avez tout simplement apprécié ces quelques moments en compagnie de ces personnages ? Je reste à votre disposition pour échanger, discuter et débattre autour de ce sujet.
© 1993 Hojo Tsukasa, Shueisha