Pourquoi j’aime – PJ #02 : Wind Breaker
Après vous avoir proposé un premier numéro de “Pourquoi j’aime”, je me suis dit qu’il était temps de revenir pour une seconde chronique. Cette fois, nous allons revenir vers une série un peu plus récente et qui est aussi dans l’actualité. Provenant tout droit du catalogue de chez Pika et ayant le droit à une adaptation anime sur Crunchyroll, ce manga m’avait largement comblé dès ses premiers tomes. Il s’agit de Wind Breaker, un titre furyô qui était loin de faire l’unanimité par beaucoup concernant certains points assez classiques au début. Pourtant, il n’aura fallu, pour moi, que quelques pages pour me séduire et je me suis dit qu’il serait donc intéressant de se pencher sur ce qui fait, à mes yeux, l’attrait de cette série. Car oui, si cette histoire peut sembler simpliste, elle possède aussi d’excellentes qualités qui font que je passe toujours un formidable moment à chaque volume. Une série qui met en avant des valeurs fortes et importantes tout en offrant un divertissement qui fonctionne à fond. Plus qu’une œuvre enchaînant juste les combats, on fait face à un titre très axé sur ses personnages et leur évolution.
De l’action maîtrisée
Bien évidemment, je ne peux pas évoquer Wind Breaker sans parler de ses nombreuses scènes de confrontation. Ce qui est important à noter tout d’abord, c’est que ces dernières sont particulièrement fluides et lisibles. Même quand c’est le chaos général entre plusieurs groupes, on ne perd pas une miette de ce qui se passe. Mais surtout, les affrontements présentés vont tout contribuer à deux choses. La première est de nourrir l’aspect divertissant et spectaculaire de cette œuvre. Sur ce point, on est clairement servi étant donné que l’on va être tenu en haleine durant ces bastons où chaque camp se rend coup pour coup. L’autre point est qu’il s’agit d’un des principaux leviers du manga pour enrichir et développer l’écriture de nos protagonistes. Ainsi, il n’est pas rare que les duels de nos nouveaux amis vont les aider à se surpasser ou bien montrer une nouvelle facette de leur personnalité. C’est par exemple le cas avec Sakura qui va radicalement changer dans sa manière de combattre entre le premier volume et les tomes plus actuels. A cela s’ajoute aussi le fait que si l’on est dans des batailles opposant divers gangs, on n’a jamais le sentiment de regarder la même chose d’une confrontation à l’autre. Il y a toujours plusieurs éléments qui vont rendre chaque face-à-face marquant. Cela permet d’appuyer la singularité propre à chaque combattant sur le devant de la scène et d’amener ainsi une grande diversité dans les situations proposées. Mais surtout, l’action fait partie intégrante de l’ADN de cette série. S’il y a beaucoup de choses qui se passent par les paroles, c’est encore plus vrai par rapport aux actes. Nous sommes face à des adolescents pour qui se battre est aussi une forme d’expression et il faut donc réussir à représenter ça dans le manga. Un parti-pris toujours complexe à réaliser, mais qui fonctionne à merveille ici.
Un protagoniste luttant contre lui-même
S’il y a un élément qui, pour moi, a fait mouche d’entrée de jeu dans Wind Breaker, c’est son personnage principal. Sakura est un jeune homme qui semble classique de prime abord. Un adolescent qui cherche juste à se battre pour imposer sa supériorité. C’est d’ailleurs pour ça qu’il débarque dans cette nouvelle ville afin de se mesurer aux pires voyous du pays. Mais là où on peut avoir le sentiment qu’il n’est qu’une brute sans cervelle, on se rend compte que son écriture est bien plus profonde que ça. En réalité, on se retrouve devant un protagoniste qui n’a eu de cesse d’être mis à l’écart par les autres uniquement à cause de ses particularités physiques. On l’a traité comme un paria alors qu’il n’était même pas enclin à se battre constamment. C’est justement en étant constamment rejeté qu’il a fini par se construire ce mur le rendant froid et violent. Il s’agit avant tout pour lui d’un moyen pour se défendre du regard des autres tout en trouvant une autre façon d’exister. Ce manga est donc le récit d’un jeune homme qui ne trouve pas sa place et dont l’unique moyen pour communiquer est maintenant par la force de ses poings. Et si cela aurait pu donner un personnage assez badass au départ, cette histoire va justement l’amener à faire face à ce qu’il n’a jamais connu. Alors qu’il s’attendait à se battre contre tous les élèves de son nouveau bahut, il découvre finalement une nouvelle famille. Et c’est ça qui est brillant, car Sakura ne va pas changer du jour au lendemain. Au contraire, il est très loin d’accepter cette main tendue dès les premiers chapitres. Il est méfiant et Wind Breaker va ainsi nous raconter autant des affrontements spectaculaires qu’une lutte bien plus personnelle pour que ce jeune homme puisse de nouveau faire confiance aux autres. Une confrontation qui va aussi être renforcée par l’évolution de Sakura au sein de ce groupe. Cela lui amène aussi des responsabilités qu’il n’aurait jamais cru endosser un jour. Et c’est formidable de le voir s’épanouir progressivement pour devenir une personne en qui les autres peuvent avoir confiance et qui peut aussi être fier de ce qu’il est.
Des personnages charismatiques
Si j’ai pu parler en détails de Sakura un peu plus haut, il ne faut pas croire qu’il est le seul à mériter l’attention du lecteur. Au contraire, c’est justement parce que les autres personnages sont tout aussi intéressants à suivre que notre héros peut autant se développer. Il ne faut pas longtemps pour que l’on se rende compte de la grande diversité des profils au sein de Wind Breaker. On a beau être dans un récit où il est avant tout question de combats de groupes, cela ne signifie pas pour autant que l’on a des individus qui se ressemblent. C’est même l’exact opposé qui se passe, car chaque individu que l’on nous présente va avoir sa propre personnalité, mais aussi son style unique pour combattre. On va ainsi rapidement trouver des personnages qui vont nous parler plus que d’autre et que l’on a envie d’encourager au-delà de Sakura. Cette proposition permet d’enrichir le récit de nombreuses situations différentes en adéquation avec chacun de ces lycéens. Et d’ailleurs, cela ne se limite pas uniquement aux compagnons de notre nouveau venu. Les antagonistes aussi vont réussir à avoir de quoi briller ou bien marquer les esprits par leur philosophie de vie, leur brutalité ou bien ce qu’ils ont pu vivre par le passé. L’auteur parvient à renouveler l’expérience de son histoire à chaque nouvelle rencontre pour que l’on ait jamais le sentiment d’avoir deux fois la même situation. Mais surtout, tous ces individus distincts ont beau avoir par moment des querelles ou bien des affinités peu développées, ils vont tous contribuer à nourrir l’un des autres points forts de cette série. Si au centre se trouve Sakura, tous ceux qui vont l’entourer au fil des chapitres vont permettre la création d’une équipe au sein de ce groupe que l’on a envie de soutenir. La naissance d’une team qui peut faire des étincelles et qui résonne à merveille avec la philosophie de celui qui a su mettre tout le monde d’accord au sein de cette école.
Un véritable sens de la camaraderie
Concernant cet autre élément, on pourrait croire que cela se répète avec les précédents, mais c’est tout le contraire. C’est justement parce que Wind Breaker réussit à proposer un héros torturé et finalement touchant ainsi que des camarades attachants que va naître cette autre qualité. Je parle bien sûr de l’esprit de camaraderie qui va se dégager de ces pages. Alors que l’on a toujours tendance, dans ce genre de récit, d’avoir un protagoniste qui va se battre un moment seul, c’est l’inverse qui se passe ici. Alors qu’il pensait justement devoir lutter face à tous ces autres délinquants, Sakura se retrouve à devoir collaborer avec les autres étudiants de son lycée. Il se retrouve ainsi à faire partie, malgré lui, d’un groupe qui va se frotter à d’autres gangs tout au long des divers arcs narratifs. Et toute cette aventure va être là pour mettre à l’honneur l’importance de s’entraider pour avancer. On peut être le plus fort du monde, on ira toujours plus loin entouré d’amis qui nous poussent à donner le meilleur de nous-même. Voilà ce qui va alimenter la force de cette classe dans laquelle se retrouve Sakura. En plus de gravir, au fil des chapitres, les échelons de cette bande, il va ouvrir les yeux sur son devoir et le fait d’être là les uns pour les autres. En prenant comme figure centrale un individu ayant perdu toute foi en l’être humain et en l’amenant à la rencontre de gens qui vont l’accepter, l’auteur souhaite nous montrer à quel point une main tendue peut sauver une vie. On ne va plus alors suivre uniquement le récit de ce nouveau venu. Il fait maintenant partie d’un groupe où s’en prendre à une personne, c’est s’attaquer à l’ensemble de ces camarades. Cela va d’ailleurs donner une scène particulièrement forte dans les premiers volumes symbolisant cette entraide et ce sens de la camaraderie. Une oeuvre qui raconte avec brio cette leçon de vie qui est malheureusement si facilement oubliée par certains.
Wind Breaker et son sens de la justice
Pour conclure ce “Pourquoi j’aime” dédié à Wind Breaker, je me devais d’évoquer la notion de justice propre à ce groupe qui est au centre de l’histoire. Il est vrai que quand on se dit que l’on suit des voyous qui passent le plus clair de leur temps à se battre, on est très loin de l’image que l’on peut avoir d’une “justice”. Pourtant, l’œuvre veut nous montrer que cette bande que va rejoindre Sakura n’est pas là pour se battre uniquement parce que ses membres aiment se battre. S’ils font face aux adversaires qui se dressent devant eux, c’est autant pour protéger les leurs que préserver la quiétude de ce quartier. Voilà pourquoi ils sont dépeints non pas comme des délinquants, mais des protecteurs qui sont appréciés par l’ensemble des habitants. On reste ainsi dans cette optique de montrer l’importance de venir en aide aux autres sans chercher une contrepartie à ce soutien. Des jeunes gens qui cherchent juste à tenir ce petit havre de paix loin de tout conflit. Et plus on avance dans la série et plus on va se rendre compte que l’auteur cherche aussi à étendre ce désir de protéger à d’autres zones. Le désir d’être le plus fort de Sakura s’efface progressivement pour laisser place à quelque chose de bien plus important. Il ne lutte plus pour lui-même, mais pour les autres, notamment ceux qui ne peuvent se défendre. Wind Breaker n’est pas une aventure qui se targue d’être complexe ou bien qui souhaite avoir un ton particulièrement sérieux. Mais en parvenant à trouver un juste équilibre entre action frénétique, création d’un gang attachant et développement des personnages, le mangaka assure un divertissement simple, efficace et porteur de valeurs importantes. Peu importe qu’il s’agisse d’un furyô ou d’un manga qui est assez classique dans sa construction, le plus crucial est ce que l’on ressent au contact de ces personnages fictifs. Et force est de constater que cela fonctionne à merveille ici.