Katagi Modoshi T1 : le nettoyeur de yakuzas
L’univers des yakuzas a toujours été propice à la création de multiples histoires en tout genre. Que l’on soit sur une approche réaliste de ce milieu ou sur quelque chose de beaucoup plus fantastique, on a eu le droit à un peu de tout. C’est toujours intéressant de voir la perception que les auteurs peuvent avoir d’un tel sujet. Et si j’évoque ça, c’est parce que le titre dont je vais vous parler aujourd’hui est un très bon exemple, à mon sens, d’utilisation de la culture yakuza et des légendes autour pour ensuite y insuffler une bonne part de fiction. Je parle ici de Katagi Modoshi chez Crunchyroll. Cette œuvre m’a surtout intrigué, dans un premier temps, à travers sa cover et j’étais curieux de voir ce qui pouvait se cacher derrière. Et c’est quand j’ai lu le synopsis que je me suis finalement dit que j’allais franchir le pas. J’ai alors pu me lancer dans une aventure prometteuse qui est déjà finie au Japon en cinq volumes. Avec ce premier volume, on découvre une introduction efficace et bien rythmée qui va rapidement trouver un équilibre entre grand spectacle, action frénétique, drame et un peu d’humour. Je vous invite donc à faire la rencontre de yakuzas dont les tatouages ne sont pas uniquement là pour en mettre plein la vue.
Une famille détruite
Synopsis
Une nouvelle légende urbaine circule : des criminels aux capacités surnaturelles viennent d’apparaître. Pour Aizawa, leur existence ne fait aucun doute puisque son père a été assassiné dix ans auparavant par l’un de ces “Gokudô“, qui tirent leurs pouvoirs de leur tatouage. En quête de vengeance et de puissance, ce jeune lycéen n’a cessé de traquer le coupable en récoltant des informations sur ces fameux yakuzas, pour le compte de l’un d’eux… Mais son destin bascule le jour où une mystérieuse personne le sauve d’une mort imminente. Serait-ce le Katagi Modoshi, le mythique nettoyeur de Gokudô ?
Mangaka : Kiyoto Shitara
Il y a quelque chose qui nous interpelle tout de suite quand on lit le synopsis de Katagi Modoshi. Cela concerne l’interprétation des tatouages, élément bien connu du monde des yakuzas. En effet, ils sont présentés ici comme la source d’un redoutable pouvoir pour ceux qui en abordent certains. Ainsi, on nous prépare déjà au fait que l’on va être face à une histoire qui va totalement amener du fantastique dans un quotidien pourtant très contemporain. Et c’est justement dans cette appropriation de certains codes et coutumes de ce milieu criminel que l’artiste va briller pour ensuite y insuffler cette dose de fiction qui va servir à créer l’épine dorsale de son scénario.
Mafieux et pouvoirs
Ce que je trouve rapidement intéressant dans ce premier volume de Katagi Modoshi est l’ambiance que l’auteur cherche à mettre en place. Il ne faut pas longtemps pour que l’on sente tout le drame propre à cette histoire et notamment autour de ce gamin qui semble avoir tout perdu du jour au lendemain. Il suffit de le voir adolescent et d’observer son regard pour comprendre qu’il a tiré un trait sur une vie normale pour se concentrer sur son désir de vengeance et tout ce qui est en lien au terrible incident ayant frappé les siens. C’est à partir de cet instant que l’on va pleinement basculer dans le milieu criminel. Dès ce moment, on va totalement être immergé dans cet environnement où le moindre faux pas peut causer la mort. Surtout que l’on va être rapidement témoin des terrifiantes capacités extraordinaires de certains de ces chefs de clan. Cela me permet de rebondir sur un premier point qui est pour moi très important dans l’identité de cette série. Il s’agit tout bonnement de ces fameux tatouages qui sont la source des facultés exceptionnelles de ces individus. Il est connu maintenant que ces symboles et dessins font partie intégrante de l’identité des yakuzas. C’est tellement ancré dans leur passé et histoire que les tatouages ont longtemps été représentés comme néfastes, car ils étaient avant tout portés par les membres de ces clans. L’auteur va intelligemment s’approprier cette célèbre partie du “costume” d’un yakuza pour en faire un levier afin d’amener cette dose de surnaturel.
Il va alors en découler des aptitudes extraordinaires amenant inéluctablement à des confrontations qui se montrent particulièrement intenses. Si l’on est clairement qu’au début de l’œuvre, on peut déjà avoir un bon aperçu de ce qui nous attend en matière de show. Si cela amène énormément de belles promesses pour la suite et surtout une utilisation intéressante de l’imagerie autour des tatouages, un autre point va aussi retenir l’attention. Il s’agit du fameux personnage que notre protagoniste va rencontrer et qui va finalement partager le devant de la scène avec lui. S’il fait beaucoup rire initialement de par son attitude et son besoin compulsif de tout nettoyer, on se rend compte que c’est en fait une manière brillante d’en faire le prédateur ultime de ces mafieux. Entre son côté comique et presque adorable dans l’enceinte de l’école et son changement de regard quand l’action prend le pas sur tout le reste, on a un personnage à deux visages dont l’écriture est soignée. On est autant fasciné par son histoire et les mystères qui planent autour de lui que par la symbolique de son pouvoir. Cela assure le spectacle tout en amenant une opposition captivante entre les deux camps. Tout ça nous amène à un résultat qui fonctionne très bien où l’on est avant tout devant un récit bien nerveux avec des enjeux définis rapidement et qui vont assurer le divertissement. De même, je trouve que la réflexion autour de cette fameuse ligne à ne pas franchir est pertinente concernant notre protagoniste. Il a beau avoir plongé la tête la première dans ce milieu, il n’a jamais dépassé cette fameuse ligne qui le conduirait à dire adieu à toute forme de retour à la normale. Cela peut donner une évolution intéressante du personnage sur toute la durée du manga.
Oui, Katagi Modoshi se présente avant tout comme un assez gros défouloir avec des scènes d’action remarquables et des échanges bien musclés. Mais au-delà de ça, je trouve que l’on est face à un manga qui brille dans sa manière de réinterpréter des codes maintenant bien connus des gens autour des yakuzas pour y insuffler sa propre vision. A travers ses coups de crayon, il donne vie à des criminels encore plus terrifiants et impressionnants pour une quête que l’on a envie de suivre et qui va nous en mettre plein la vue. Une utilisation intelligente de tout ça au service du divertissement pour le plus grand nombre.
Katagi Modoshi ne laisse aucune tâche
Finalement, Katagi Modoshi est un titre que j’ai trouvé très prometteur et surtout qui a su me divertir de bout en bout. Je trouve que l’on est face à un manga qui montre à quel point il est possible de créer des histoires captivantes ou simplement funs à travers des petits éléments pouvant devenir les moteurs de ces récits. C’est exactement le cas ici avec l’auteur qui réussit à s’emparer d’un sujet classique autour de la mafia et d’en faire ressortir un élément aussi emblématique de celle-ci avec les tatouages pour finir par y insuffler sa touche personnelle. Un peu comme s’il créait son propre tatouage avec toutes les nuances et les symboliques voulues. C’est ce qui est palpitant à suivre dans ce premier volume, car on a envie de voir jusqu’où ira l’imagination de l’artiste dans les facultés procurées par ces toiles humaines. En dehors de ça, le titre se veut aussi efficace autant dans le fond que la forme. On sent que l’on n’est pas forcément dans une œuvre qui se veut complexe ou souhaite traiter de sujets particulièrement difficiles. Après tout, on est sur une série courte dont la principale volonté est de nous divertir. Et le mangaka y arrive très bien surtout que l’on peut compter sur un trait soulignant à merveille chaque impact découlant de l’action devant nous. En plus de ça, on a aussi le droit à un impressionnant travail pour que le tout soit lisible et fluide. La lecture en est alors encore plus satisfaisante, car on est totalement plongé dans la mêlée. Une épopée sur fond de vengeance, mais aussi d’espoir de sauver ce qui peut l’être.
En conclusion, Katagi Modoshi est un titre qui arrive à offrir un bon divertissement dès ce premier volume. En plus de tout ce que j’ai pu citer durant cette chronique, d’autres facettes de cette histoire valent aussi le coup. Je peux par exemple évoquer tout ce qui touche à l’origine du pouvoir lié aux tatouages. On peut aussi s’attarder sur la quête de chacun de nos deux protagonistes qui les poussent à travailler ensemble. Cela amène son lot de mystères que l’on a envie de résoudre, mais aussi de questions concernant leur passé. Sans oublier aussi le simple plaisir de s’imaginer les prochains affrontements qui vont rythmer le périple de notre tandem. On a de très bons ingrédients pour que la série puisse fonctionner tout au long des quatre autres volumes à venir pour l’amener jusqu’à sa conclusion. Si vous cherchez une œuvre sans prise de tête et qui amène une approche singulière du thème des yakuzas alors vous devriez trouver votre bonheur. A présent, j’ai tout de même quelques questions qui me viennent à l’esprit pour la suite de cette épopée. Est-ce qu’il est vraiment possible pour notre protagoniste de s’extirper de ce milieu qui a déjà laissé une terrible empreinte en lui ? Quel est le passé qui a pu conduire son nouveau partenaire à partir en chasse de ces yakuzas ? Est-ce qu’ils vont réussir, à eux deux, à faire face aux ennemis qui les attendent ? Je suis curieux de voir le destin qui attend ces deux étudiants.
N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant ce premier volume de Katagi Modoshi. Trouvez-vous l’idée de base intéressante autour des pouvoirs de ces yakuzas liés à leurs tatouages ? Etes-vous curieux d’en apprendre plus sur ce mystérieux individu que notre protagoniste va suivre ? Avez-vous apprécié la dynamique proposée tout au long de cette lecture, notamment dans les scènes d’action ?
KATAGIMODOSHI © 2022 by Kiyoto Shitara/SHUEISHA Inc.