L’Enfant et le Maudit tome 1 : une fable magistrale
Dans l’univers du manga, nombreuses sont les oeuvres qui nous charment de par leur scénario des plus complexes. L’Enfant et le Maudit, édité par Komikku est totalement différent. Son scénario peut paraître assez simple et pourtant, on est face à un manga qui nous émerveille de par la magie qu’il dégage. Cette oeuvre est une fable onirique qui nous fait voyager au cœur d’une histoire féerique. Ce shonen arrive à nous toucher d’une manière rarement atteinte dans le monde otaku. Il est temps de s’aventurer dans un récit où deux êtres s’unissent malgré leurs différences.
Deux êtres qui n’auraient jamais dû se croiser
L’Enfant et le Maudit, créé par NAGABE, nous plongent dans un monde divisé entre deux pays. Le premier est appelé “L’intérieur” et est l’habitat des humains. Le deuxième surnommé “L’extérieur” est l’antre de créatures monstrueuses. Il est dit que si par malheur, un humain entre en contact avec un de ces êtres, il subira une terrible malédiction. Cette dernière provoquerait la transformation des gens de “L’intérieur” en monstre de “L’extérieur”. Malgré ce conflit qui oppose ces deux camps, dans une forêt non loin réside deux individus coexistant paisiblement. Peu importe leur différence, les personnages principaux de ce récit continuent d’exister loin de la haine et de la violence du reste de l’humanité. C’est ainsi que l’on nous décrit la vie de Sheeva vivant aux côtés d’une des créatures maudites qu’elle surnomme “Professeur”.
Cette jeune fille innocente est sous la protection de cet être obscur qui fait de son mieux pour lui offrir un quotidien des plus paisibles. Notre jeune héroïne cherche pourtant à découvrir le reste du monde malgré les mises en garde de son protecteur. Elle se demande pourquoi il lui est interdit de toucher le Professeur et ne comprend pas la haine ressentie à l’égard de ces êtres différents. Elle reste aux côtés de son tuteur, attendant patiemment le retour de sa tante. C’est ce quotidien entre ces deux êtres qui n’auraient jamais dû se croiser qui nous est conté. Cependant, que cache vraiment le Professeur à sa petite protégée ? Les différences entre eux ne risquent-elles pas de mettre en danger le fragile équilibre qui s’est construit autour d’eux ?
L’Enfant et le Maudit est avant tout l’histoire de la relation qui lie nos deux héros. Le premier symbole de cette fraternité réside dans les mains de la jeune Sheeva. Cette petite fille qui découvre encore le monde est un personnage des plus incroyables.
Sheeva, l’innocence incarnée
Cette enfant qui trône au cœur de cette histoire est des plus attachantes en de nombreux aspects. Elle symbolise parfaitement ce qu’une fille de son âge représente, c’est-à-dire l’innocence, la curiosité et l’apprentissage. A travers son regard, elle ne perçoit nullement le monde comme les adultes peuvent le voir. Pour elle, le Professeur n’est pas un monstre immonde qu’il ne faut pas approcher. Il s’agit d’un être vivant comme un autre qui prend soin d’elle. C’est avec un regard plein d’innocence qu’elle contemple cet individu qui lui apprend des choses et qui symbolise la figure paternelle. En effet, étant totalement abandonné à son sort, cette jeune fille se raccroche à la seule personne qui l’a pris sous son aile. Tout ce que souhaite Sheeva, c’est de s’amuser et de vivre avec les gens qu’elle aime. Elle agit comme une vraie petite fille et cela ne fait que nous attacher encore plus à ce personnage.
Dans ce monde très sombre où la haine de l’autre est ancrée, Sheeva représente une lueur d’espoir. Le chemin qu’elle suit est jonché de questions aussi drôles que parfois très profondes. On ne peut que sourire et rire devant sa simplicité et ses réactions parfois exagérés. Il s’agit d’une fille qui pourrait être la petite sœur que l’on pourrait avoir et que l’on veut protéger. D’ailleurs, la crainte nous envahit aussi pour Sheeva. En effet, la terreur et l’animosité des uns envers les autres sont enracinées bien profondément sur ces terres. Elles pourraient détruire la vision attendrissante de notre héroïne. On enchaîne donc les pages en souriant, mais en gardant une certaine boule au ventre pour cette petite héroïne au grand cœur. On s’attache facilement à elle et on espère de tout cœur la voir continuer de vivre sa paisible existence.
Pour assurer que rien ne lui sera fait de mal, on peut compter sur le Professeur. Cet être maudit sert d’ange gardien à Sheeva. Il est prêt à tout pour la protéger du reste du monde et pour la préserver des autres.
La protection du Professeur
Dans ce premier tome de L’Enfant et le Maudit, le personnage du Professeur reste très mystérieux. D’ailleurs, on ne sait que peu de chose concernant la rencontre entre lui et sa protégée. Malgré tout, on sent vraiment l’amour qu’il lui porte. Il a beau être une créature de “L’extérieur”, les liens qui l’unissent à Sheeva nous donnent l’impression que l’on est face à une personne très humaine. Contrairement à la petite fille, le Professeur sait ce que cache vraiment le reste du monde. Il est la voie de la sagesse et à une vision très réaliste de ce qui l’entoure. On a ici deux personnes totalement opposées, l’une représentant la curiosité tandis que l’autre est la connaissance. Malheureusement, ce savoir lui fait comprendre que cette fillette serait anéantie si elle se rendait compte de la tristesse et de la violence qui gouverne le monde. D’ailleurs, il est le seul à connaître la vérité concernant le passé de Sheeva.
Cependant, son rôle ne s’arrête pas à celui de gardien et protecteur. Comme son surnom l’indique, il est avant tout un enseignant pour sa jeune élève. C’est lui qui lui apprend de se méfier des gens de “L’extérieur” mais qui répond aussi à toutes les questions qu’elle se pose. On se retrouve donc face à des scènes aussi touchantes que comiques. Pour lui, Sheeva est une source de bonheur qui lui fait oublier la tristesse de ces terres. C’est donc un tourbillon d’émotions qui relient ces deux êtres totalement différents. Pourtant, tout au long de ce tome, on peut ressentir la tourmente dans laquelle se trouve notre créature maudite. Il souffre en silence de ne pas pouvoir dire la vérité à sa protégée. Malgré tout, cette dernière arrive à lui offrir une joie si précieuse à ses yeux qu’il est prêt à lui cacher cette vérité.
La relation de nos deux protagonistes repose autant dans leurs échanges que dans l’univers qui est dépeint. L’opposition et le mélange de l’ombre et de la lumière provoquent une expérience visuelle totalement bluffante.
Un jeu d’ombres et de lumières
La féerie de L’Enfant et le Maudit s’accompagne autant dans son histoire que dans les dessins. On est totalement subjugué par le coup de crayon de l’artiste derrière ce manga. En plus de proposer des paysages magnifiques, sa patte graphique ajoute encore plus d’impact à l’univers du titre. Tout d’abord dans notre couple de héros, Sheeva est une lumière qui évolue parmi les ombres. Cette pureté qui se dégage de ce personnage ne fait qu’accroître l’innocence qui caractérise cet enfant. A contrario, le Professeur est une créature sombre qui fait opposition à la lumière de sa protégée. Cependant, les ombres qui le définissent sont accentuées au côté de Sheeva qui rend son gardien plus grand et plus humain. Ce mélange des deux mondes offre un tableau magistral qui captive autant notre regard que notre esprit.
Le reste de l’univers n’est pas oublié et offre des paysages somptueux emplie d’une certaine mélancolie. Tout le quotidien de nos héros est baigné dans une lumière chaleureuse définissant parfaitement l’importance de ces moments. Cela est encore plus flagrant lorsque la narration se penche au-delà de nos héros. Ce sont les ténèbres qui gouvernent les terres. Les deux pays sont ancrés dans une obscurité insufflant un sentiment de frayeur et de chagrin au lecteur. Même si “L’intérieur” est représenté par une lueur beaucoup plus moribonde et froide. Le dégoût qu’on les humains pour les maudits est aussi travaillé dans le dessin de ces hommes. On se retrouve totalement embarqué par cette oeuvre qui mélange habilement l’ombre et la lumière.
Il reste cependant un point à étudier. Cela concerne le message véhiculé par L’Enfant et le Maudit. Même si l’œuvre traite de nombreux sujets, il y en a un qui saute aux yeux assez rapidement. Cela concerne la peur envers les autres.
La peur des autres
Ce point est très travaillé dans ce volume. Tout d’abord, concernant notre duo de héros. Il y a beau avoir des liens forts qui unissent nos deux êtres, le Professeur refuse que Sheeva entre en contact avec lui. Si cela est avant tout pour la protéger de la malédiction, cela peut aussi insuffler une certaine peur envers son statut d’être maudit. Le danger qu’il représente n’est jamais loin. Pourtant, la jeune fille montre tout au long du volume son envie de braver cet interdit. Même s’il lui explique les risques, elle veut franchir la frontière qui sépare leur deux mondes. On retrouve encore une fois cette symbolique de l’espoir qui est entre les mains de Sheeva. Au final, on ne sait que peu de chose sur les origines de cette malédiction qui ronge les humains et les transforme en monstres. A force de vivre dans cette terreur constante, les humains se sont totalement isolés.
Ils sont arrivés à un point où le simple fait de croiser un inconnu en dehors de leurs frontières est symbole de menace. Même s’il s’agit d’un de leur semblable, ils ne veulent plus prendre de risques et préfère éliminer toutes personnes venant de l’extérieur. L’humanité ne cherche plus à comprendre, mais seulement à se protéger. A part Sheeva, chaque personnage de l’histoire cherche avant tout à se défendre des autres et de l’inconnu. Cette thématique peut parler à tout le monde et reste d’actualité peu importe la situation. L’Enfant et le Maudit offre un récit aussi merveilleux que réfléchi. La magie de ce volume n’oublie pas de provoquer une réflexion chez le lecteur et d’aller plus loin que le simple divertissement.
Ce shonen est emplie d’une très grande poésie qui arrive aisément à nous charmer. On se laisse emporter par le récit de nos deux héros avec grand plaisir. C’est un voyage onirique que nous offre le titre.
L’Enfant et le Maudit, un voyage magique d’une grande tristesse
Il est très difficile de ne pas se laisser envoûter par la féerie qui se dégage de ce shonen. L’Enfant et le Maudit peut parler à n’importe qui et saura plaire autant aux enfants qu’au plus grand. Dans un sens, on a l’impression de se retrouver face un conte que l’on pouvait nous raconter enfant pour nous endormir. Ce premier tome apporte ce qu’il faut pour séduire et nous donner envie de connaitre la suite. Peu sont les mangas arrivant à insuffler autant de vies et d’émotions à un couple de personnages. On s’attache à Sheeva dès les premières secondes et on rit avec elle. Le Professeur, quant à lui, nous ramène à la dure réalité que cache ce monde. Cette fable onirique provoque en nous, un raz-de-marée d’émotions que l’on ne peut contenir.
Un shonen d’une très grande beauté dont il serait dommage de ne pas lire ses pages. Esprit Otaku vous conseille fortement de vous laissez happé par cette oeuvre magistrale qui nous fait retomber en enfance. De plus, elle arrive à offrir une histoire des plus intéressantes notamment sur les derniers chapitres. On nous laisse sur un suspense des plus intéressants et c’est avec impatience que l’on souhaite découvrir la suite. Les aventures de Sheeva et du Professeur promettent de sublimes moments et c’est avec beaucoup d’attentes et d’espoir que l’on attend le second volume.
N’hésitez pas à partager votre opinion sur le titre et votre avis sur la suite des aventures de ce duo magique 🙂
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