Kingdom tome 15 & 16 : la fin d’une ère
Alors que l’on débute un nouveau mois, on n’oublie pas nos traditionnels rendez-vous. Même si l’on a eu un peu de retard, on ne pouvait pas ne pas parler d’une saga qui vient de franchir un incroyable cap. On parle bien sûr de notre exploration du monde de Kingdom qui est arrivé chez nous grâce à Meian. Cette fois, on va s’attarder sur les tomes 15 et 16 qui prouvent encore une fois que l’auteur réussit perpétuellement à renouveler et à faire grandir son récit. Si on a déjà pu dire par le passé qu’un volume était génial ou qu’il apportait énormément à l’ensemble de l’œuvre, cela n’a jamais été aussi vrai qu’à travers ces pages. C’est un immense tournant qu’est en train de franchir cette licence alors qu’un évènement sans précédent va chambouler l’ensemble de la Chine. On vous le dit tout de suite, on a été conquis du début jusqu’à la fin tant par son aspect épique que par toute la symbolique de cette lecture et le futur qui est en train de se préparer. Même en plein milieu de la mêlée, on ne peut que rester figé et observer silencieusement ce qui est en train de se passer. Un duel qui va avoir de très grandes conséquences pour l’avenir. L’heure n’est donc plus à l’introduction, mais à l’analyse de ce passage clé.
L’héritage d’un homme
Pour rappel, Kingdom a été imaginé par Hara Yasuhisa et nous avait laissés alors que l’on venait d’assister à l’arrivée mortelle d’Houken sur le champ de bataille. Suite à son entrée en scène, de nombreux soldats ont perdu la vie en essayant de l’arrêter. L’unité Hi Shin ne fait pas exception à la règle et tous souffrent de ceux qui ne sont plus là. Alors qu’une partie de l’armée de Qin fuyait pour échapper à ce monstre et à leurs poursuivants, le sol ne mit pas longtemps à trembler. Le bruit de milliers de cavaliers résonnait au sein de ces montagnes. Cependant, il ne s’agissait nullement de la faucheuse venue chercher notre jeune officier et le reste de ses subordonnés. L’homme à la tête de cette troupe était plutôt celui qui sèmerait la mort dans les rangs de Zhao. Un oiseau colossal qui ne cesse de se repaître du champ de bataille et dont le regard acéré ne laisse rien passer. En effet, cet individu n’est autre qu’Ouki en personne qui a quitté son QG pour se mettre en première ligne. Même si cela signifie être au-devant du danger, le général de cette armée est prêt à en découdre pour décrocher la victoire et sauver ces hommes. De plus, l’appel de celui qui lui a enlevé ce qu’il avait de plus précieux ne peut être refusé selon lui.
Il fait alors la jonction avec le groupe de Shin et fonce alors en direction du chef ennemi. Cependant, une autre personne est sur les talons d’Houken. Il ne s’agit nul autre que de Moubu qui est déterminé à ramener sa tête afin de montrer de quoi il est capable. Cet affrontement entre alors dans sa dernière phase tandis que la force brute s’apprête à se confronter à une violente stratégie. Dispersés à travers ce massif montagneux, chaque troupe se bat pour permettre à leur officier en chef de plonger sur sa proie. Malheureusement, cette avancée bien trop rapide et les quelques signes qu’il a pu percevoir ne rassurent nullement Ouki sur le futur de cette confrontation. Quelque chose dans l’air lui fait comprendre qu’un terrible danger pourrait surgir d’un moment à l’autre. C’est donc à présent une course contre la montre pour les siens qui semblent poursuivis par un adversaire invisible. Le talent, le discernement et la puissance du dernier grand général de Qin seront-ils suffisants pour contrer cette invasion ? Il est fort possible qu’un opposant bien plus terrifiant qu’Ouki et Houken fasse son apparition. Si un tel homme devait exister, il pourrait bien ouvrir le pays vers une toute nouvelle ère. Le rideau s’apprête à se lever sur l’ultime acte de cette scène aux enjeux bien plus grands qu’il n’y paraît.
Il serait difficile de décrire l’émotion que l’on ressent tout au long de la lecture de ces deux volumes de Kingdom. Un important passage qui va démontrer une fois de plus que le plus terrifiant dans la guerre n’est pas forcément l’armée adverse, mais celui qui la dirige dans l’ombre. Si les guerriers sont là pour mener les hommes au combat, il y a un tout autre type d’individu bien plus redoutable. La stratégie montre ici à quel point elle peut faire trembler tout un pays.
L’efficacité d’un stratège
Auparavant, on a déjà pu voir à quel point l’esprit pouvait l’emporter sur l’épée. En effet, depuis maintenant plusieurs tomes, on peut admirer à quel point une bonne stratégie peut valoir des milliers d’hommes. Cependant, la plupart de ces exemples proviennent d’officiers ayant un sens tactique fort développé, mais qui ne peuvent être nommé des stratèges. On a eu l’occasion d’en voir certains, mais c’était toujours en dehors du champ de bataille ou de simples apprentis. Pourtant, à travers ces deux excursions, on se retrouve nez à nez avec l’un de ces êtres que l’on espérait tant voir en action. Le résultat est tout simplement au-delà de toutes nos espérances. Bien évidemment, on taira le nom de ce personnage pour ne pas spoiler, mais il est très intéressant et pertinent de voir ce qu’il apporte à l’ensemble de cette guerre. Jusque-là, la force brute et l’intellect se valaient. Cela était dû notamment aux efforts de soldats tels que Moubu pour prouver que ces quelques tours ne pouvaient venir à bout de leur courage et de leur détermination. Malheureusement pour eux, un nouveau facteur est entré en jeu et va prouver à quel point une victoire peut se décider bien avant qu’une armée ne soit levée.
A travers les agissements de cet homme, on a l’impression que tout était déjà réglé depuis le départ. C’est là que réside le véritable pouvoir d’un stratège. Son but n’est pas de charger pour briser les lignes ennemies, mais d’imaginer tous les scénarios possibles. L’information devient alors la plus tranchante des armes et la dissimuler est aussi efficace que la plus sournoise des embuscades. On ressent, face à ce génie, un sentiment bien différent de ce que l’on a eu l’habitude d’éprouver au fil de nos pérégrinations au sein de cette époque. Celui-ci pourrait presque s’apparenter à une peur qui est à l’opposé exacte de ce que peut insuffler un homme tel que Houken. Alors que face à un tel monstre, la seule pensée que l’on peut avoir est de fuir, la crainte que l’on a face à cet esprit acéré est bien plus complexe. Échapper à son regard est presque une chose impossible alors que toute tentative semble vouée à l’échec. On se rend alors compte qu’un tel individu peut facilement créer une cage autour de sa proie qui se referme peu à peu sur elle avant de l’étouffer et de la faire disparaître pour toujours. Une fabuleuse maîtrise de l’écriture qui prouve le talent de l’auteur ainsi que sa capacité à retranscrire parfaitement ce que doit insuffler un tel maître de la stratégie dans le camp adverse.
Si la ruse et les stratagèmes sont les armes les plus efficaces au sein de ces cases, il y a tout de même une personne qui reste au centre de l’attention. Lui qui a laissé son empreinte depuis des années sur ce monde reste toujours debout face à son opposant. Ouki est clairement l’acteur principal de cette scène de Kingdom qui lui permet d’exprimer toute l’étendue de son talent, mais aussi toute l’importance de ce qu’il pourrait laisser derrière lui.
L’oiseau prend son envol
On avait déjà eu l’occasion de parler de lui longuement dans un précédent article, mais il était impossible de ne pas le faire de nouveau à travers ces lignes. Ouki est sans nul doute celui qui illumine cette lecture de par sa prestance et tout ce qu’il parvient à nous raconter de par ses paroles, ses actes, et même son attitude. Tout d’abord, le voir se lancer au combat est déjà quelque chose d’enivrant. Cette aura imposante qui nous donne l’impression de n’être qu’une fourmi à côté de lui explose face à l’ennemi alors qu’il balaye les soldats devant lui comme si ces derniers n’étaient rien. On avait beau savoir qu’il était un guerrier accompli, les exploits qu’il réalise devant nos yeux parviennent quand même à nous surprendre et à nous faire frissonner. Cette force surhumaine prend encore plus d’impact alors qu’il se tient devant sa némésis. Houken nous a été présenté comme un dieu de la guerre que rien ne peut arrêter. C’est alors que l’oiseau colossal de Qin se jette sur lui sans jamais lui laisser le temps de respirer. On reste estomaquer devant Ouki qui parvient à rivaliser et à mettre à mal ce général qui nous avait tant terrifier.
Cependant, si les prouesses martiales de notre officier sont déjà éblouissantes, cela n’est rien en comparaison de toute la symbolique et du message transmis à travers ce combat. Alors qu’ils sont entourés par Zhao et que la peur s’installe dans le cœur de chacun, Ouki n’a besoin que de quelques mots pour redonner courage aux siens. Ce passage montre la parfaite représentation de ce que doit être un grand général ainsi que le fardeau qui pèse sur un tel homme. Même au cœur de la mêlée, un officier de cette trempe se doit de voir l’ensemble du champ de bataille. Le dernier membre des six grands généraux de Qin prouve sans conteste qu’il répond et surpasse tous ces critères. Alors que la situation peut sembler désespérée, il continue de se tourner vers Shin et de lui transmettre son savoir et de lui montrer le chemin à accomplir. Ce démon a beau avoir donné la mort et fait trembler l’ensemble des autres royaumes, cela n’enlève en rien au poids que symbolise son nom. Le destin qui lui est réservé le conduira forcément auprès de tous ses compagnons disparus ainsi que ceux qu’il a mené lui-même aux portes des enfers. Une fin d’arc qui nous montre les conséquences que cela pourrait avoir d’assister à un tel départ et ce qu’il laisserait derrière lui en tant qu’héritage. Le tome 16 est entièrement consacré à cet homme qui a tant de fois guerroyé et qui a totalement changé la face de ce pays. On assiste alors ému au dernier envol de celui qui fut tant d’années l’épée et le bouclier de Qin. Le rideau se baisse alors tandis que l’on ne peut retenir une larme en voyant à quel point le mangaka est parvenu à sublimer ce personnage tout au long de ces pages.
Comme on l’a déjà dit à de maintes reprises, Kingdom est une œuvre phénoménale. En plongeant à travers ces chapitres et en découvrant chacun de ces conflits, on ne peut que rester bouche bée devant cette fresque à la fois d’une grande beauté et d’une effroyable tristesse. Ces hommes et ces femmes que l’on accompagne ne cessent de nous émouvoir et de marquer notre esprit à jamais. C’est encore plus vrai ici avec ce général qui montre ce que c’est que de voir le monde à travers ce grade.
Kingdom chamboule tout
On ne le dira jamais assez, mais Kingdom ne cesse de nous surprendre et de nous épater. Qu’il s’agisse du travail d’écriture, de l’esthétique propre à chaque bataille, de tout ce qui peut être raconté à travers les simples mimiques de certains protagonistes. La liste est longue et il faudrait de nombreuses lignes pour pouvoir analyser chaque plan en détail. Outre cela, ces deux nouvelles excursions ont sans doute été l’une des plus belles et surtout l’une des plus bouleversantes depuis le début du manga. On sent vraiment que l’on s’apprête à franchir un nouveau cap alors que l’ensemble des royaumes combattants se tournent vers Qin. Un véritable coup de maître de la part de Hara Yasuhisa qui continue d’éblouir notre regard à travers ces sublimes et éprouvantes peintures. Une fresque qui s’étend toujours plus et que l’on observe sans jamais ressentir le moindre ennui. Bien au contraire, le plaisir ne cesse de grandir et l’on ressent maintenant une profonde proximité à l’égard de tous ces individus qui luttent désespérément pour laisser leur nom dans l’Histoire. Une claque autant graphique qu’au niveau des émotions transmises et qui donne une saveur toute particulière à ces deux lectures inoubliables.
Après tout ce temps, on pense que vous avez compris que notre amour pour la licence Kingdom ne faiblit pas. C’est donc avec toujours autant de joie que l’on recommande cette épopée qui est une expérience littéraire à vivre absolument. Encore une fois, cette œuvre montre pour quelle raison elle mérite d’être au sommet et à quel point cet univers nous emporte. Après avoir fini le tome 16, il est impensable de ne pas avoir de multiples questions qui se retrouvent sans réponses. On sait juste que l’avenir promet d’être incertain pour l’ensemble des habitants de cette contrée qui se retrouvent au centre de l’attention. La nouvelle génération s’apprête à rejoindre le front tandis qu’une nouvelle page se tourne au sein de ces chroniques où la paix n’a pas sa place. Comme toujours, on sera là pour traiter de la suite et il ne va pas falloir attendre trop longtemps pour voir débarquer notre prochain article sur le sujet. En attendant, on laisse nos soldats retrouver le chemin de leur foyer afin de se reposer un peu avant le grand choc qui s’annonce.
N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre opinion ainsi que votre propre ressenti concernant ces deux volumes de Kingdom. Pensez-vous que l’on vient de vivre l’un des moments les plus importants de la saga ? Croyez-vous que Shin ressortira plus grand de cette expérience ? Qu’attendez-vous maintenant pour l’avenir de cette licence ? Qu’est-ce qui vous a le plus marqué dans ces pages concernant ce cher Ouki ? On est impatient de pouvoir discuter avec vous concernant cette série qui propose une aventure littéraire unique et fabuleuse. 🙂
© Hara Yasuhisa / Shueisha