Gannibal

Gannibal tome 1 : une quiétude inquiétante

C’est une toute nouvelle semaine d’articles qui commence et celle-ci va avoir une saveur spécifique. En effet, c’est durant les prochains jours que l’on va pouvoir reprendre notre voyage au sein des multiples univers que l’on découvrira dans nos futures lectures. Cependant, cela ne veut pas dire que l’on n’a pas eu le droit à quelques nouveautés. Bien au contraire, on a pu se lancer récemment dans une nouvelle licence provenant tout droit du catalogue de Meian. Changeant drastiquement de répertoire par rapport aux autres œuvres de l’éditeur, ce titre a su nous donner de nombreux frissons. Il ne s’agit nul autre que de Gannibal dont le premier volume est sorti il y a peu. C’est avec une grande curiosité que l’on s’est penché sur cette épopée inédite qui nous faisait de l’œil depuis son annonce. On a été littéralement bluffé par la force avec laquelle l’auteur nous plonge dans ce conte angoissant et oppressant. Une virée au sein d’un petit village paisible, mais dont on ne peut s’empêcher de ressentir une vive inquiétude à l’égard de ses habitants. Il est donc grand temps de prendre son courage à deux mains pour mener l’enquête.

Vivre loin de la ville

Gannibal-paix

Un village paisible et accueillant.

Gannibal, imaginé par Masaaki Ninomiya, nous présente Daigo Agawa, policier de son état, qui vient tout juste d’être muté à Kuge. Ce petit village, perdu dans les montagnes, semble être l’endroit idéal pour se ressourcer et oublier la folie des grandes villes. Pour un agent des forces de l’ordre, venir ici peut paraître comme une aubaine étant donné que les quelques soucis à résoudre se cantonne à de petites disputes de voisinages. Mise à part cela, l’ensemble des habitants de cette bourgade accueille à bras ouverts ce nouveau membre de la communauté ainsi que toute sa petite famille. Rien ne semble pouvoir aller contre la quiétude ressentie par Daigo à part un élément qu’il ne peut s’empêcher de ressasser. Il s’agit de l’histoire concernant son prédécesseur. En effet, celui-ci semblait avoir perdu les pédales et criait à tout-va que les gens habitant sur ces terres se consacraient à des actes absolument inhumains. Malheureusement, rien n’avait pu confirmer les soupçons de cet homme et Daigo souhaitait vraiment croire en la bonté et la quiétude propre à ce lieu. Pour lui, cet environnement pourrait être propice à l’épanouissement de sa petite famille qui semble avoir grand besoin de repartir de zéro. Malgré cette volonté de se forger une nouvelle vie, un incident va subvenir et changer peu à peu la vision de notre policier à l’égard de ce petit monde qui l’entoure.

C’est alors qu’il est appelé pour venir sur une scène de crime qu’il va découvrir le corps sans vie d’une vieille femme faisant partie des anciens du village. Horriblement mutilé, le cadavre de cette pauvre victime semble avoir été la victime d’un ours des environs selon les dires de l’amicale des chasseurs. Cependant, Daigo ne peut s’empêcher de voir en cette situation quelque chose d’anormal. Les autres ont beau étayer l’hypothèse de l’animal sauvage, l’agent de la paix semble convaincu qu’il y a autre chose derrière tout cela. D’un coup, il va ressentir une profonde oppression dans le regard des autres habitants et une étrange atmosphère va recouvrir le village. Il y a parfois des secrets qu’il vaut mieux éviter de révéler et c’est une leçon que ce cher policier ferait mieux d’apprendre rapidement. Les sourires laissent peu à peu place à des messes-basses et une tension omniprésente. La paix régnant en cet endroit pourrait bien n’être qu’une façade pour dissimuler un mal bien plus grand. La question est maintenant de savoir si ce nouveau venu va oser creuser en profondeur ou décidé de faire comme si de rien n’était. l’enfer peut revêtir bien des formes et les gens de Kuge n’apprécient pas trop qu’un nouveau venu se mette à trop fouiner. La chasse peut à présent débuter.

Gannibal est clairement un titre qui captive de par son atmosphère. Si l’on est bien sûr interpellé par son scénario et tous les mystères entourant cette zone, c’est avant tout de par l’ambiance qui s’en dégage que l’on est complètement happé par cette lecture. Un lieu qui nous montre avec efficacité son double visage et parvient à transformer un sentiment de sécurité en une paranoïa s’emparant autant de cette famille que du spectateur. On a alors presque la sensation de faire face à une force implacable dont il est impossible d’aller contre sa volonté. Un petit bijou pour ce qui est de l’immersion.

Une ambiance absolument captivante

Lorsque l’on a vu pour la première fois l’annonce autour de Gannibal, on se demandait si l’on allait rapidement plonger dans l’effroi au cours de notre périple. C’est justement tout le contraire qui va se passer et qui va permettre à ce premier contact d’être aussi pertinent. En effet, il est assez rare de nos jours d’avoir des récits qui parviennent à instaurer un climat prenant et pesant sans avoir à passer par un côté très gore. Ce titre ne va clairement pas dans cette direction et cherche, dès la première minute, à poser les bases de cette angoisse qui va s’éveiller au fil des pages. Le fait de commencer véritablement en étant au contact de la bienveillance des habitants permet de consolider cet aspect paisible et de donner cette impression que toutes ces rumeurs sont infondées. C’est à cet instant précis que le génie de l’auteur se fait ressentir, car il va réussir à créer un malaise chez son personnage central et le lecteur dès lors que l’on tombe sur le cadavre de cette vieille femme. Dès que l’on fait face à cet effroyable spectacle, on est rappelé à cette réalité que l’on souhaitait à tout prix esquiver. De plus, les quelques paroles et actes des autres personnes présentes dans la scène ne vont faire qu’appuyer nos doutes et inquiétudes. Pourtant, il y a constamment cette volonté de dissimuler cela par le changement de caractère des gens entourant notre policier qui ne cessent de clamer haut et fort que tout ce qu’ils font ne sont que des farces pour accueillir leur nouvel ami.

Comme s’ils essayaient de nous convaincre que tout cela n’a rien d’anormal et qu’il faudrait passer à autre chose. C’est finalement dans ces sourires de façade et ces rires peu francs que va se jouer le plus puissant des écoeurements. En voyant cette volonté de cacher la vérité, cela ne fait que renforcer notre suspicion envers ces quelques habitants qui agissent différemment des autres. On sent alors la menace planer sur Daigo et toute sa famille, mais sans jamais qu’elle ne se concrétise. Le lecteur est donc constamment dans l’attente de voir le couperet tomber et l’on passe alors d’une paisible existence à un quotidien où l’on craint à chaque fois le pire. Cette ignorance de savoir quand le récit va basculer dans l’effroi permet ainsi à l’auteur de garder la mainmise sur cette ambiance et ainsi pouvoir frapper au moment où l’on s’y attend le moins. Gannibal parvient donc, en seulement un tome, à nous donner une incroyable leçon d’horreur qui s’exprime non pas par des actes, mais par des détails, des apparitions et surtout une atmosphère qui s’épaissit un peu plus à chaque fois que l’on avance. Pendant un long moment, on se transpose à la place de ce policier qui se retrouve embringué dans une histoire le dépassant totalement. L’inquiétude est alors palpable et l’on ne peut alors qu’éprouver une boule au ventre tant les doutes finissent par se transformer en une paranoïa constante. Une pure maîtrise de l’effroi.

Gannibal fait partie de ces oeuvres qui parviennent à capter l’attention du lecteur dès leur premier volume. On a beau se poser mille et une questions sur tout ce qui nous entoure, on ne peut détacher les yeux de ces planches d’où se dégage une angoisse attrayante. Rien que par son rythme, sa montée en puissance et surtout tout ce qui est amené comme thématiques, cette introduction s’avère d’une redoutable efficacité. Une virée marquante qui nous laisse sur un suspens insoutenable tandis que l’on frissonne encore à l’idée de devoir parcourir de nouveau ce village si étrange.

Gannibal sait nous faire frissonner

Gannibal-inquiétude

Une bien étrange blague.

C’est en lisant des titres comme Gannibal que l’on prend conscience à quel point le monde du manga peut être d’une richesse incroyable. On a constamment le droit à une multitude d’aventures à découvrir et à vivre qui nous offrent des expériences aussi uniques qu’inoubliables. Avec ce premier volume, cette licence frappe déjà un grand coup de par l’impact qu’il a sur nous. Sans même s’en rendre compte, les pages défilent à une vitesse folle tandis que l’on sent notre coeur se serrer en voyant que la chaleur des premières cases laisse place à une noirceur abyssale. Un ouvrage sublimé par de somptueux dessins et qui surtout parvient à greffer de nombreux éléments intéressants à sa trame principale. Outre le mystère autour de ce village, bien d’autres détails viennent titiller notre curiosité. On est ainsi interpellé par la famille Agawa, le précédent policier et bien d’autres sujets qui apportent encore plus de richesse à ce début déjà prometteur. Cependant, ce qui fait vraiment l’âme de cette aventure littéraire provient de cette peur grandissante qui s’éveille en nous et finit par nous retenir prisonnier de ce qui se déroule devant nos yeux. On a beau craindre d’entrevoir la vérité, l’intrigue finit par l’emporter sur notre capacité à vouloir fuir. Nos doigts déroulent alors lentement chaque page de peur d’assister à un spectacle que l’on ne peut même pas imaginer.

A aucun moment ce premier tome ne tombe dans la violence gratuite et la surenchère. Un énorme coup de coeur pour cette série qui fait un début tonitruant et qui mérite grandement que l’on s’attarde dessus. Si vous appréciez les récits horrifiques qui misent avant tout leur puissance de par leur capacité à poser un décor captivant et effrayant alors vous serez comblé avec Gannibal. On finit par clore ce premier acte en ne cessant de se demander comment cela va se passer par la suite. Un scénario qui nous prend aux tripes et nous donne envie de continuer en se jetant sur le second volume. Bien sûr, on ne peut quitter une oeuvre sans évoquer les multiples questions qui prennent forme dans notre esprit. Quel est le véritable secret du village de Kuge ? Qui est donc cet individu qui erre dans cette région ? La mort de cette vieille dame est-elle vraiment due à un ours ? Quelle est la raison qui a poussé Daigo a accepté ce poste ? Rien que le fait de ressasser toutes ces interrogations et de revoir certains passages nous donnent une furieuse envie de connaître l’avenir de cette licence. Une belle petite pépite dont on espère que la qualité sera toujours au rendez-vous pour la suite.

N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant ce premier volume de Gannibal. Avez-vous apprécié la manière dont l’auteur parvient à installer son ambiance ? Trouvez-vous que le village de Kuge et ses habitants ont quelque chose d’hypnotisant ? Croyez-vous que Daigo pourra s’en sortir et faire la lumière sur toute cette affaire ? Quel est, selon vous, la vérité derrière cette histoire et cette apparente tranquillité ? Qu’attendez-vous pour la suite de cette licence ? On reste à votre disposition pour pouvoir échanger, discuter et débattre autour de ce sujet. 🙂

© 2018 Ninomiya Masaki, Nihon Bungeisha

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