L’Éden des sorcières tome 1 : la nature s’éloigne de l’Homme
On a souvent eu l’occasion, dans pas mal de mangas, de voir le sujet concernant l’Homme et son impact sur la nature. Une thématique importante et qui est toujours autant d’actualité. C’est donc toujours intéressant de se pencher sur ces œuvres qui récupèrent cette relation pour nous pousser à la réflexion tout en proposant une histoire qui se veut divertissante. On a eu ça très récemment du côté de chez Ki-oon avec l’arrivée de L’Éden des sorcières. Cette nouvelle licence a débuté il y a seulement quelques jours et s’annonçait comme un titre à surveiller. En tout cas, on s’est dit que cette histoire pouvait donner quelque chose de pertinent et fascinant à lire. On peut clairement dire que ce fut le cas maintenant qu’on a terminé cette première escapade. Voilà un récit intelligent dans ce qu’il montre, mais aussi dans ce qu’il apporte comme vision du monde. On se retrouve plongé dans une quête mystérieuse qui va nous pousser à ouvrir les yeux sur l’impact de l’être humain sur son environnement et ce qu’il est capable de faire pour simplement acquérir plus de ressources. Le temps est donc venu de partir à la recherche d’un lieu mystique que beaucoup convoitent.
Des oasis verdoyantes
L’Éden des sorcières, imaginée par Yumeji, nous plonge dans un monde fantastique où autrefois les plantes et les animaux vivaient en parfaite harmonie. Rien ne semblait pouvoir briser cet équilibre qui régnait au sein de cet environnement majestueux. Enfin ça, ce fut vrai jusqu’à l’arrivée d’un prédateur qui allait tout changer. Il s’agit ni plus ni moins que de l’Homme qui a fait son apparition un beau jour et à rapidement imposer sa suprématie. Ne pouvant comprendre ni échanger avec la nature et ses représentants, les êtres humains s’accaparèrent les ressources jusqu’à ce qu’ils ne restent quasiment plus rien. Les plantes et les animaux ne purent accepter un tel sort et ils décidèrent de se retirer du monde pour se cacher du regard de ces monstres. Cela fait maintenant des centaines d’années que ces terres ne sont plus qu’une vaste étendue désolée. Plus rien ne pousse et les gens qui se sont installés ici font de leur mieux pour survivre sous le regard des quelques puissants qui profitent de bienfaits hors du commun. Si tout semble être désespéré au sein de ces contrées, il existe pourtant quelques lieux qui servent d’enclos de verdure. Cependant, pour ne pas éveiller la cupidité humaine, ces oasis sont dissimulées aux yeux du commun des mortels. Seuls certains élus peuvent y trouver refuge. Il s’agit des femmes qui peuvent entendre la voix de la faune et de la flore. Elles sont appelées des sorcières et vivent donc recluses loin des autres peuples qui seraient prêts à profiter de leurs connaissances pour mettre la main sur leur petit paradis.
C’est dans ce contexte bien singulier que l’on fait la connaissance de Pilly. Cette demoiselle a grandi dans un de ces sanctuaires depuis aussi longtemps qu’elle s’en souvient. Elle vit en compagnie de Toura, une puissante et ancienne sorcière dont le poids de l’âge se fait de plus en plus sentir. Souhaitant à tout prix suivre le même chemin que sa tutrice, Pilly désire absolument développer ses pouvoirs, mais cela est un échec total. Elle a beau faire de nombreux efforts, rien n’y fait et ses compétences sont toujours bien limitées par rapport à ses congénères. C’est alors que la vieille femme décide de l’encourager en lui confiant une graine qui la mènera un jour vers l’Eden. Ce lieu mystique serait un jardin luxueux réservé à l’élite de leur communauté. Toutes les sorcières rêvent un jour de pouvoir atteindre cet endroit qui symboliserait leur réussite, mais aussi les protégerait des personnes lambdas. Cependant, la jeune femme n’a aucune envie de quitter ce foyer qui est le sien. Elle ne veut pas s’exposer au regard des autres et préfère rester cachée dans cette cachette qui est sa demeure maintenant. Malheureusement pour elle, son paisible quotidien va s’effondrer le jour où des hommes vont finalement trouver ce repère et s’en prendre à elle. C’est alors que tout semble perdu que la graine de Pilly va éclore et donner naissance à un énorme loup à la fois mi-animal et mi-végétal. Un événement qui va lancer ce voyage en direction de ce sanctuaire que peu de personnes ont eu l’occasion de voir. Cette créature, qui l’accompagne maintenant, pourrait bien être la pièce manquante pour atteindre sa destination.
L’Éden des sorcières se veut, à travers ce premier volume, une prise de conscience sur ce que les humains peuvent provoquer comme désastre dès l’instant qu’ils désirent quelque chose. On nous dépeint alors un tableau bien sombre de l’âme humaine qui reste sourd à tout ce qui l’entoure pour simplement satisfaire son propre profit. Une lecture qui souhaite pousser à la réflexion et surtout nous faire la démonstration par le fantastique de ce qui pourrait vraiment arriver. La magie n’est alors pas source d’émerveillement, mais de protection à l’égard de cette nature trop souvent malmenée.
Un récit au message très important
Il ne faut pas longtemps à L’Éden des sorcières pour nous faire comprendre où le récit veut en venir. La principale force de ce premier volume va être dans l’exposition de cette thématique qui est d’une importance capitale. En effet, en présentant un monde dépourvu de faune et de flore à cause de l’être humain, il s’agit tout simplement d’une critique de la société où l’homme prend le pas sur la nature sans penser aux conséquences. Cela s’exprime à de nombreuses reprises tout au long de cette lecture et de manière brillante. On nous présente vraiment toute la noirceur de l’âme humaine, mais aussi le désespoir qui peut animer certaines personnes qui ont du mal à survivre dans cet environnement. On peut alors rapidement observer le contraste qu’il y a entre ces terres ternes et cette oasis que l’on nous présente comme un havre de paix. On a donc envie que ce lieu soit préservé de la souillure extérieure et l’enchaînement que l’on va vivre ne va faire que nous serrer le cœur, mais aussi nous marquer profondément pour la suite de l’aventure au même titre que Pilly. On est même ulcéré de voir de quoi sont capables certains pour simplement satisfaire leurs propres ambitions ou simplement acquérir plus de pouvoir. Un triste constat qui nous motive à suivre le parcours de notre jeune héroïne et qui représente un peu une source d’espoir dans ce monde obscur. D’ailleurs, le fait qu’elle soit assez sévère envers elle-même montre sa volonté de bien faire, mais aussi de faire perdurer cette magie ainsi que cet esprit que lui a transmis la femme qui l’a recueillie.
Finalement, on est encore plus happé par ce qui nous est montré que par les quelques propos tenus. Le trait de la mangaka ne sert pas uniquement à embellir cette histoire, mais aussi à participer au contenu. Le monde humain est très sombre et d’une grande brutalité. En totale opposition, on a ces refuges qui resplendissent par rapport à cette végétation qui est devenue un luxe. Deux faces d’une même pièce et où les interactions d’un côté peuvent influencer l’autre partie. De même, il est très intéressant de voir comment sont perçus les sorcières à l’égard de la société. Toutes celles que l’on croise dans ce volume apportent une dose de douceur et de bienveillance qui permettent de contrebalancer la corruption des hommes lambdas. Pourtant, la mangaka prend un malin plaisir à les faire souffrir de la main de ces derniers et ainsi contribuer à cette oppression que l’on ressent. On ne comprend aucunement pourquoi il y a tant de haine envers ces femmes. En fait, cette rage et ce désespoir, qui animent la population, concernent avant tout cette jalousie de savoir que ces magiciennes ont le droit de profiter d’un peu de verdure alors que leur existence est terne. Après avoir détruit leurs terres, ils cherchent juste à s’accaparer ce qu’ils n’ont plus et donc contribuer à nourrir cette roue de la destruction qui annihile tout sur son passage. C’est le premier acte d’un long et périlleux voyage qui nous est conté avec brio tant on est pris aux tripes par ce qui se dessine devant nous.
On est réellement captivé par la manière dont L’Éden des sorcières expose la problématique des dégâts de l’Homme sur la nature. Ne s’attardant jamais dans de nombreux détails, ce récit parvient à exprimer bien plus de choses par son visuel que de simples mots. On éprouve alors une profonde haine à l’égard de ces gens qui cherchent juste à mettre la main sur cette végétation sans comprendre ce que cela signifie. On aborde alors une aventure qui nous épate par sa patte graphique et nous marque par la profondeur de son message. Un très bon compromis qui fonctionne très bien concernant un problème sur lequel il faut travailler.
L’Éden des sorcières se met à fleurir
L’Éden des sorcières fut une lecture plus que satisfaisante à travers ce premier volume. Posant assez rapidement les bases de son récit et du voyage que l’on va entreprendre, la mangaka va surtout faire un formidable travail par ses dessins. Chaque planche nous émerveille par le soin apporté à chaque détail, mais aussi par tout ce que ces dessins transmettent. On pourrait facilement mettre de côté les quelques paroles que l’on peut lire tant l’image parle d’elle-même. On a devant nous une fresque sinistre où la beauté de la nature s’efface pour laisser place à la cruauté et à la noirceur qui peuvent se cacher derrière chaque être humain. On est totalement happé par cette intrigue qui, derrière son aspect fantastique et spectaculaire, porte surtout un message de la plus haute importance. Un manga qui arrive très bien à faire cohabiter le divertissement avec une volonté de faire réfléchir. On prend conscience de beaucoup de choses tout au long de ces pages et c’est ce qui fait en grande partie la force de cette saga. Une introduction qui décrit à merveille une situation qui pourrait tout à fait arriver et surtout montrer l’importance de savoir cohabiter avec cette nature qui a toujours été présente sur ces terres bien avant que l’être humain ne débarque. Une fable écologique et magique où l’entraide n’est pas forcément récompensée et où souvent cela entraîne de nombreux déboires pour ceux qui s’ouvrent aux autres.
C’est donc un beau coup de cœur que l’on a eu pour ce premier volume de L’Éden des sorcières qui a su nous évoquer beaucoup de choses en seulement quelques pages. Un récit qui ne peut nous laisser de marbre et où la majesté de cette faune n’a d’égale que sa rareté. L’émerveillement se fait alors de plus en plus rare jusqu’à ce qu’un beau jour tout ceci finisse par disparaître juste à cause de l’homme. Si vous cherchez une série porteuse de sujets forts et qui est aussi un formidable spectacle visuel alors cette série peut tout à fait vous convenir. On suit avec attention le parcours de cette jeune fille qui ne sait absolument pas si elle sera capable d’atteindre sa destination, mais dont le courage nous donne une petite lueur d’espoir. Elle symbolise parfaitement ce rapprochement et cette douceur qui devrait exister entre les deux faces de ce monde. Une très belle écriture de la part de l’autrice qui a su poser un décor prometteur. A présent, on ne peut quitter un tome sans évoquer les multiples questions que l’on a suite à notre périple. Est-ce que Pilly va découvrir ce lieu que beaucoup considèrent comme une légende ? Comment va se développer sa relation avec ce loup si étrange ? Pourra-t-elle faire confiance aux humains qui croiseront sa route ? Est-il encore possible que la nature et l’homme se réconcilient ? On va suivre attentivement le futur de cette épopée qui peut parler à beaucoup de monde.
N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant ce premier volume de L’Éden des sorcières. Trouvez-vous que le sujet abordé est bien traité et propice à une aventure incroyable ? Avez-vous été touché par ce qui est raconté et surtout par la prise de conscience qui se cache derrière ces cases ? Pensez-vous que l’on aura le droit à un développement intéressant de ces différents points de vue que l’on aborde dans cette introduction ? Trouvez-vous que l’opposition entre nature et être humain est bien amenée ? Qu’attendez-vous pour la suite de cette licence ? On reste à votre disposition pour échanger, discuter et débattre autour de ce sujet.