Le Cauchemar d'Innsmouth-Vol.-1

Le Cauchemar d’Innsmouth tome 1 : un lieu aux multiples secrets

Une fois de plus, l’héritage de Lovecraft refait surface grâce au manga. En effet, si vous le savez, Ki-oon propose depuis un certain temps une collection spécifique pour remettre en avant les Chefs-d’œuvre de ce célèbre auteur. Ses histoires prennent ainsi vie sous la plume d’un mangaka dont le talent n’est plus à faire qui est Gou Tanabe. On a donc pu découvrir tout un tas de titres fantastiques et terrifiants grâce à ces adaptations. Cependant, on est très loin d’avoir fait le tour de tous les titres de ce maître de l’horreur. Cette fois, on peut découvrir la version manga du Cauchemar d’Innsmouth. Ce récit est déjà bien connu des amateurs du genre et il est donc intéressant de voir comment l’artiste japonais a su s’approprier cette fiction pour donner sa propre vision de cette prison que l’on va découvrir au fil des pages. Un ouvrage de qualité et qui parvient à se démarquer des autres sagas de la collection en de nombreux points. Une virée qui prend son temps avant de nous plonger dans un abîme infernal. On espère donc que vous êtes prêts pour visiter un lieu chargé d’histoires et de terreurs.

La curiosité d’un homme

Cauchemar d'Innsmouth - visionLe Cauchemar D’innsmouth, dessiné par Gou Tanabe et adapté de l’œuvre de Lovecraft, nous plonge en 1927. C’est cette année que le jeune Robert Olmstead débarque à Newburyport. Amateur d’antiquités et cherchant à faire la lumière sur ses origines, il décide de profiter de sa majorité pour partir en voyage. Voulant se rendre à Arkham, cet adolescent va faire face à un obstacle de taille. En effet, l’argent vient à manquer pour pouvoir prendre le chemin le plus direct vers sa destination. On lui suggère alors que le seul moyen pour y arriver avec cette somme est d’attendre un bus particulier qui passe par la ville d’Innsmouth. Robert semble satisfait de cette proposition, mais est interpellé par la réaction des gens autour de lui en entendant ce nom. Il apprend que tout le monde fait de son mieux pour éviter ce lieu considéré comme maudit et qui tombe en morceaux. Les rumeurs vont ainsi bon train concernant cette cité abandonnée. Il est dit que les habitants auraient pactisé avec les démons. D’autres disent que certains d’entre eux ont une apparence difforme terrifiante rappelant celle de créatures marines. Il paraît aussi qu’un culte ésotérique d’un étrange dieu marin se serait établi dans ces ruines et mènerait de funestes cérémonies. Tout laisse présager qu’il vaut mieux éviter cet endroit ou au moins ne pas s’y attarder sous peine de connaître un sinistre destin. La peur est palpable chez ceux qui parlent de cet ancien port en décrépitude qui font de leur mieux pour prévenir ce garçon de ce qu’il risque.

Si Olmstead écoute attentivement les paroles du chef de gare, ces avertissements ont un tout autre effet. Ne donnant que peu de crédit à ces dires, le jeune homme voit tout de même sa curiosité être piquée à vif. Son désir d’en apprendre plus sur cette zone soi-disant terrifiante ne fait que grandir au fur et à mesure qu’on lui dit de s’en éloigner. Comme s’il était appelé par Innsmouth, il finit par braver ces recommandations. Il veut découvrir ce qui se cache derrière les façades de ses maisons délabrées et prend le fameux bus en direction de cette escale. Dans son esprit, il se dit qu’il restera juste une journée de quoi satisfaire sa soif de savoir avant de repartir vers Arkham. Robert est alors très loin de s’imaginer que mettre un pied sur ces terres pestiférées pourrait l’amener dans une descente aux enfers dont il est impossible de s’extirper. Explorer les méandres de cette cité maudite est synonyme de voyage sans retour où le seul terminus est la folie. Innsmouth ne laisse jamais une proie s’échapper et le regard des quelques habitants se tourne déjà vers cette âme égarée dont la curiosité maladive pourrait bien l’avoir conduit dans l’antre du diable. Un périple dont il risque de se souvenir très longtemps et qui pourrait bien le marquer à tout jamais dans sa chair et dans son esprit. Il est parfois prudent de suivre les avertissements des autres, car cela peut sauver une vie. A présent, Robert Olmstead avance sans se douter une seconde des ombres qui le guettent au loin.

Si l’on est habitué maintenant à l’ambiance si spécifique qui plane dans les Chefs-d’œuvre de Lovecraft, Le Cauchemar d’Innsmouth parvient à créer un sentiment assez différent. A la fois hypnotique et angoissant, notre périple au sein de cette ville abandonnée. Jouant beaucoup avec des codes connus de l’horreur, ce voyage va pourtant réussir à créer en nous une véritable frayeur par rapport à ce sentiment d’être piégé et qu’il est trop tard pour s’en échapper. Le manga va ainsi nous faire basculer du déni à une angoisse bien palpable où chaque élément de cette cité fait grandir ce poids sur nos épaules.

Entre fascination et effroi

La première chose à noter concernant ce premier volume du Cauchemar d’Innsmouth est le fait qu’elle s’inscrit dans une continuité des autres titres de la collection. On parle surtout ici de la manière dont le récit va nous happer et surtout instaurer sa sinistre ambiance. Une atmosphère qui se forge sur le long terme et va ainsi créer un sentiment de malaise grandissant au fur et à mesure que l’on explore cette ville maudite. Ce qui est fascinant dans cette série, c’est surtout la manière dont celle-ci va se construire. Le fait de suivre Robert va grandement jouer sur l’impact que l’on ressent au cours de cette épopée. Il est très facile de s’identifier à ce dernier, car il représente l’être humain qui refuse ce qui dépasse sa logique, mais qui pourtant va être guidé par sa curiosité afin de confirmer que tout ça ne sont que des histoires à dormir debout. Il y a donc cette formidable opposition entre ce qu’il pense être juste et ce qu’il va finalement comprendre. C’est souvent ce qui fait l’une des forces des titres de Lovecraft qui veut justement briser cette logique humaine pour le mettre face à une horreur inimaginable. Cette introduction le fait à merveille et va justement prendre un malin plaisir à punir cette trop grande curiosité qui va piéger notre protagoniste. De plus, le trait de Gou Tanabe ne fait qu’ajouter encore plus d’effroi à cette région. La différence entre nos premiers pas dans cette histoire et notre arrivée à Innsmouth est flagrante et contribue à nourrir nos craintes. Cela ne s’exprime pas uniquement à travers les habitants monstrueux.

Rien que par les décors, le mangaka parvient à nous transposer dans un univers qui semble détaché de la réalité. Les magnifiques panoramas du début s’effacent pour laisser place à de sinistres rues où l’on ne se sent pas en sécurité. Au même titre que Robert, plus l’on passe de temps dans cette ville et plus on a cette sensation d’étouffer. Une transposition efficace et qui nous amène à être grandement impliqués dans ce qui se passe. Comme si tout ce que pouvait subir ce garçon avait des répercussions sur nous. D’ailleurs, on a beau avoir cette inquiétude qui ne cesse de gonfler, on ne peut s’empêcher de tourner les pages comme si on était hypnotisé par ce mystère qui dévoile déjà des surprises de taille. Un très bel exploit qui montre que l’effroi est maîtrisé tout au long de ce premier acte, car il s’installe de manière progressive afin de nous faire prendre conscience qu’il existe peut-être des menaces qui dépassent la compréhension humaine. C’est toujours cette frontière entre ce qui est vrai et non qui forme l’âme de ces contes où l’on ne cesse de se questionner. Il suffit alors d’y croire un seul instant pour que l’on se retrouve justement captif de ce cauchemar qui prend vie autour de nous. Au moment où l’on arrive à la dernière partie de cet ouvrage, on comprend à quel point tout ce que l’on a vécu n’est que le début de ce terrible songe où la mer se confond avec la terre. Une remarquable démonstration d’écriture et de mise en scène pour insuffler un sentiment aussi complexe que la peur.

Le Cauchemar d’Innsmouth porte bien son nom et pose ici des bases solides pour la suite de notre périple. Au même titre que notre protagoniste qui est venu en ces lieux par simple curiosité, on se retrouve comme emprisonné par cette ville qui ne souhaite plus que l’on puisse s’échapper. Un conte horrifique qui nous fait constamment réfléchir sur ce qui peut bien être réel ou pas. C’est justement ce conflit entre la raison et la peur qui rend cette expérience littéraire aussi fascinante, car on se retrouve ainsi totalement immergé. Une virée qui sait comment nous donner des sueurs froides.

Le Cauchemar d’Innsmouth ne fait que débuter

Cauchemar d'Innsmouth - fatalitéUne fois de plus, la collection des Chefs-d’œuvre de Lovecraft s’enrichit d’une épopée littéraire fantastique. Sublime, étrange, malsain et angoissant sont autant de termes pouvant qualifier Le Cauchemar d’Innsmouth. Une expérience hors du commun qui ne peut nous laisser de marbre tant elle combine parfaitement angoisse et émerveillement. Gou Tanabe démontre tout son talent pour donner vie au travers de ses dessins à l’imagination débordante de ce maître de l’horreur. Un tableau qui nous fascine dans un premier temps par sa beauté avant que l’on ne comprenne finalement l’enfer dans lequel celui-ci souhaite nous amener. Rien que dans sa construction progressive du scénario, ce titre est fantastique étant donné qu’elle joue à merveille sur cette angoisse que l’on ressent. De même, on est constamment tiraillé entre ce désir d’en savoir plus et cette volonté de fuir à toutes jambes cette cité qui n’a plus rien de naturel. En seulement quelques plans, on bascule d’une virée paisible à une chute sans fin au plus profond des ténèbres qui peuvent habiter ce monde. Un véritable travail d’orfèvre que l’on admire sous tous les angles tant ce manga regorge de détails. On peut facilement passer plusieurs minutes à contempler chaque case au vu de ce qu’elles peuvent nous raconter. Nous voilà maintenant pris au piège de cette sombre cité où la folie guette tous ceux qui osent rester trop longtemps sur ce rivage.

Il est facile de comprendre, en lisant ces quelques lignes, de l’attrait que l’on a pour cet ouvrage. Au même titre que les autres titres de Lovecraft, Le Cauchemar d’Innsmouth parvient à créer une fascination terrifiante pour les secrets qui hantent cet endroit. On ne peut détourner les yeux de tous ces regards qui nous guettent même en sachant pertinemment que fuir serait sans doute la meilleure solution. Sans même nous en rendre compte, ce premier volume a su ensorceler son lectorat et le conduire à un périple dépassant le cadre de la pensée humaine. Beau et profond, on ressort totalement conquis par cette invitation au sein de cette ville qui n’a pas encore dévoilé tous ses secrets. Si vous êtes fan des autres titres de la collection ou que vous souhaitez découvrir un récit horrifique qui mise sur la peur de l’inconnu. En tournant la dernière page de ce volume, on ne peut s’empêcher de se poser des questions que notre jeune ami peut aussi se poser. Quel destin l’attend maintenant que ses investigations l’ont mené au point de non-retour ? Qu’est-ce qui se cache réellement tout au long de ce récif faisant face à Innsmouth ? Tout ceci est-il bien réel ou le produit d’un esprit qui sombre peu à peu dans le désordre ? On sera au rendez-vous quoi qu’il arrive pour la suite même si on sait que cela signifie plonger un peu plus dans cet abysse sans fin.

N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant ce premier volume du Cauchemar d’Innsmouth. Trouvez-vous que l’auteur a parfaitement su capter ce qui faisait la force de l’œuvre originale ? Est-ce que vous avez aussi ce sentiment d’oppression en lisant cet ouvrage ? Avez-vous été bluffé par la capacité du mangaka à retranscrire toute cette folie et cette virée en enfer au sein de ce lieu maudit ? Pensez-vous que l’on continuera à s’enfoncer un peu plus dans les ténèbres de cet endroit ? Qu’attendez-vous pour la suite de la licence ? On reste à votre disposition pour échanger, discuter et débattre autour de ce sujet.

©Tanabe Gou 2021 / KADOKAWA CORPORATION

2 Comments

  • Julien dit :

    Les dessins sont d’une toute beauté, j’adore cette reprise de Lovecraft par Gô Tanabe, cela rend l’univers de Lovecraft facilement abordable.
    Puis, le suspens est bien mené, on a hâte d’en savoir plus tout en ayant peur de ce qui se cache dans la page suivante.
    vite, le tome 2 !
    De plus, l’édition est superbe.

    J’ai aimé aussi les autres récits comme « la couleur tombée du ciel », ou « les montagnes hallucinées », sans oublier « Cthulhu ».

    • EspritOtaku dit :

      La collection des chefs-d’oeuvre de Lovecraft est fantastique et on apprécié l’ensemble des titres tant le mangaka parvient à sublimer le matériau de base pour nous plonger dans la peur la plus palpable.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *