Dai Dark tome 1 : une nouvelle danse pour l’étrange et le gore
Dans le monde du manga, il y a des noms qui évoquent tout de suite de nombreux souvenirs. Des artistes dont les œuvres résonnent inlassablement dans l’esprit des lecteurs par leur côté étrange et ne semblant conforme à aucune règle connue. Des récits qui n’ont de limites que l’imagination de leur créateur. Dans ce domaine, il y a une mangaka qui a toujours su faire forte impression. Il s’agit de Q Hayashida qui revient en France à travers son dernier projet en date : Dai Dark. Ayant fait récemment son entrée dans le catalogue de Soleil Manga, on avait très hâte de se plonger dans cet ouvrage qui n’est clairement pas à destination de tout le monde. Que ce soit par rapport au contenu souvent macabre ou bien tout ce qui englobe la parution de ce manga, les facteurs sont multiples pour centrer cette saga en direction d’un lectorat précis. Pourtant, il était important de se pencher sur ce premier volume par rapport à tout ce qu’il nous raconte. On fait face à une porte ouverte vers la créativité débordante d’une autrice dont le talent n’est plus à prouver. Il va donc falloir prendre son courage à deux mains pour explorer cette galaxie où la mort est omniprésente.
Des os pour les gouverner tous
Dai Dark, imaginée par Q Hayashida, nous emmène aux confins de l’espace où tout semble possible. Pirates galactiques, mutations génétiques et cybernétiques, mort épouvantable et autres secrets rendent la vie sur toutes ces planètes aussi dangereuses que pleines de surprises. C’est là que l’on fait la connaissance de Sanko Zaha, un ado qui raffole des spaghettis, dont les pas le guident aux quatre coins de la galaxie. En le regardant, il est difficile d’imaginer qu’il puisse survivre face aux nombreux dangers qui résident dans cet espace infini. Ce serait le cas s’il était comme tout le monde et c’est loin d’être vrai. Son nom s’est rapidement répandu pour se transformer en une légende particulièrement attrayante. Il est dit que ses os peuvent exaucer le moindre vœu. Une idée pouvant sembler folle, mais qui éveille naturellement l’intérêt des pires raclures de ces zones sans foi ni loi. De même, il est considéré comme une menace de grande envergure pour les grandes puissances ayant la mainmise sur une bonne partie de ces mondes. Pendant que tout le monde s’affronte dans l’espoir de le trouver, ce garçon mène une vie insouciante sans la moindre contrainte. Il est au courant de ce mythe qui l’entoure et de la cible qui est peinte sur son dos. Mais cela ne l’effraie nullement. Après tout, il est bien loin d’être sans défense. Ceux qui croisent sa route feraient mieux de fuir, car peu de gens peuvent se targuer de l’avoir rencontré et d’en être ressorti vivant. Un monstre à visage d’enfant !
Accompagné d’Avakian, son fidèle compère et sac à dos, ce binôme sillonne l’espace en profitant simplement de chaque jour qui passe. S’ils ne cherchent aucunement à faire de mal, ils n’hésitent pas à s’en prendre à ceux qui oseraient s’attaquer au jeune homme. Armé de sa hache des ténèbres, il ne lui faut alors que quelques instants pour arracher la chair de ses ennemis et désosser leur carcasse. Ce macabre spectacle ne suffit pas pour autant à repousser ceux qui en sont témoins. L’appât du gain est souvent plus fort chez l’être humain que l’instinct de survie. Une grave erreur qui précipite ceux qui y succombent dans leur tombe. Voilà le quotidien d’un jeune homme au don incroyable et d’un sac squelette qui finissent toujours par laisser leur marque là où ils passent. Mais est-ce seulement la chose la plus étrange qui sillonne la galaxie ? Dans cette infinité de mondes qui s’offrent à l’humanité, les horreurs sont innombrables et les prédateurs toujours plus voraces. Attention alors à ne pas croiser un monstre humanoïde bien décidé à faire de vous son repas. Le courage et la force ne servent pas à grand-chose lorsque l’on fait face à un pouvoir qui dépasse la compréhension humaine. C’est la triste vérité de ce quotidien qui attend tous ceux voulant parcourir cet espace à la fois si hypnotique et sinistre. Tout est à présent possible et la peur peut prendre bien des formes pour les égarés qui espèrent juste faire fortune. L’ambition peut être une bonne chose, mais elle est inutile si la vie s’arrête prématurément.
Il est évident en lisant le synopsis que l’on peut clairement se demander où veut nous emmener Dai Dark. A l’image de son autre œuvre célèbre, la mangaka souhaite nous plonger en plein cœur de son imagination à la fois tordue, déjantée et violente. Un titre qui nous montre d’entrée de jeu ce qu’il est capable de produire tout en restant bien mystérieux concernant l’avenir qui nous attend. On pourrait alors qualifier ces premiers pas comme d’un entraînement pour s’adapter à cet univers qui fourmille d’idées incroyables et où l’artiste trouve une cohésion dans le désordre.
Un univers aussi macabre que florissant
Autant le dire tout de suite, Dai Dark est une œuvre qui ne répond à aucune règle que l’on peut avoir vu auparavant. La mangaka, à l’image de son titre le plus connu, veut s’affranchir des convenances pour laisser libre cours à son imagination à la fois morbide et fantastique. C’est ainsi que l’on tombe sur ce premier volume qui symbolise totalement le style si atypique de sa créatrice. La première chose qui va frapper tout au long de la lecture est l’absence de réel fil rouge. On avance en compagnie de ce jeune garçon sans vraiment savoir ce qui nous attend et c’est justement ce qui est formidable. L’incertitude et les surprises constantes rendent la lecture palpitante tant on est jamais paré à ce qui va nous être présenté. Une sorte de folie ambiante et de patchwork de tout ce qui a pu germer dans l’esprit de l’artiste afin de donner vie à cette fresque chaotique et pourtant hypnotique. C’est d’ailleurs pour ça aussi que l’aspect comique grossier et absurde dont fait preuve cette introduction est aussi efficace. Il s’inscrit dans l’identité de ce monde où tout est plausible et va renforcer l’aura si singulière de cette virée. C’est pour ça que l’on rit en voyant le comportement enfantin de notre protagoniste qui va en totale contradiction avec la violence dont il fait preuve. De même le gore ou le macabre sont amenés ici, mais d’une manière toujours détournée qui donne à sourire. On se doit d’être autant mal à l’aise que captivé par ce qui se passe devant nous. Un pari réussi rien que dans ce premier acte avec ce gamin fan de spaghettis, ce sac à dos squelette prenant vie et toutes les rencontres que l’on fait ensuite.
Cependant, il serait dommage de ne résumer Dai Dark qu’à son côté chaotique et totalement barré. En effet, derrière tout ce délire se cache une logique qui nous apparaît dès l’instant que l’on prend le temps d’analyser en détail ces cases. On est alors totalement subjugué par la créativité de l’artiste qui parvient à créer une mythologie unique en son genre. De sinistres légendes qui prennent vie devant nous et apportent une dimension encore plus funeste à ce voyage galactique. Il suffit de s’attarder quelques instants sur les personnages récurrents de ce premier tome pour comprendre ça. On fait face à des êtres qui n’ont plus rien d’humain, même si leur apparence peut le faire croire. La richesse de cet univers est absolument fabuleuse et l’on progresse en se demandant juste comment l’auteure va réussir à développer tout ça. Dans un sens, c’est aussi ça qui fait toute l’histoire de Dai Dark. Une escapade où les règles se font et se défont pour poser les fondations d’un monde où les mythes prennent vie. Des êtres qui nous paraissent grandioses de par leur puissance, mais en même temps presque humain par leur comportement allant en contradiction avec leur stature. C’est notamment le cas lorsque l’on observe le lien unissant notre protagoniste et son compère. On pourrait tout à fait imaginer à la place deux amis de longue date qui se lancent dans une épopée grandiose. Une familiarité bienvenue qui se brise et se reconstruit à chaque nouvel acte pour une expérience littéraire qui sait marquer l’esprit de son lectorat. Une invitation pour un périple dangereux, violent et où la seule limite n’est que l’imagination de l’être humain ayant dessiné ces quelques planches.
Dai Dark fait partie de ces mangas où l’on ne peut s’empêcher de se questionner sur ce que l’on a vu. Des pages qui défilent à toute allure tellement on est emporté dans cet espace morbide et pourtant animé. Ce n’est qu’une fois que l’on referme le tome que l’on prend conscience de cette expérience unique en son genre que l’on vient de vivre. Des personnages n’obéissant à aucune règle habituelle, un environnement où tout peut arriver et un récit qui se développe tout en nous donnant le sentiment de ne rien dévoiler. Voilà le chaos attrayant proposé par cette aventure qui débute.
Dai Dark est un voyage hors du commun
Comme dit en introduction, Dai Dark ne s’adresse pas à tout le monde. Il est important de savoir si l’on adhère ou non au style si propre à la mangaka tant celui-ci est aux antipodes de ce que l’on peut connaître ailleurs. Malgré tout, ce récit a su rapidement montrer qu’il peut offrir une aventure captivante tant elle sort des sentiers battus. Personnellement, on a été totalement sous le charme de ce conte macabre qui arrive pourtant à désamorcer toute cette brutalité et ce sang par une forme d’autodérision d’une incroyable efficacité. Une combinaison que maîtrise parfaitement l’artiste et qui nous montre une fois de plus tout son savoir-faire en matière d’écriture d’un univers ne se basant sur rien de plus que sur ses propres idées. Un témoignage de cette faculté qu’a l’être humain de donner vie à des histoires surréalistes, mais auxquelles on arrive à s’intéresser tant chaque élément est pensé pour renforcer notre immersion. Il est vrai que l’on peut qualifier ce titre d’ovni au vu de ses personnages, mais aussi de cet environnement qui se tord au bon vouloir de sa créatrice. Mais c’est ça qui est formidable avec cette œuvre qui reflète une autre facette du milieu du manga où l’imaginaire prend le pas sur tout le reste. Dai Dark est une lecture qui se veut autant sanglante et sinistre qu’elle se présente aussi comme une comédie déjantée à l’humour noir et aux êtres alternant entre l’entité surpuissante et l’enfant capricieux. Un premier acte qui aura rempli son objectif qui est de mettre en place des bases solides et pourtant malléables afin de répondre au mieux à l’imagination foisonnante de cette auteure. Elle nous invite à entrer en contact avec cet univers qu’elle a façonné de ses propres mains et que personne d’autre n’aurait pu imaginer.
En lisant ces quelques lignes, vous l’aurez compris, mais on a été totalement fan de ce prélude. Si l’on retrouve cette ambiance qui nous avait tant marqués dans Dorohedoro, Dai Dark parvient à s’affranchir de l’ombre de son aîné pour partir dans une autre direction. On ressort de cette lecture avec bien plus de questions que l’on n’aurait pu croire et c’est ce qui est voulu. Cette fable obscure est là pour nous étonner et surtout nous amener sur un terrain que l’on n’a jamais parcouru auparavant. Ne répondant à aucun genre précis, l’œuvre de Q Hayashida s’affranchit de ces barrières pour exprimer une valeur précieuse qui est l’importance de l’imaginaire. Ce récit a beau ne pas être à destination de tout le monde de par ses thèmes, mais aussi par la nature absurde et morbide de ses personnages, il est un magnifique porte-étendard de ce que ce médium peut raconter. Si vous êtes fans de la mangaka ou que vous souhaitez connaître une aventure littéraire qui ne ressemble à aucune autre alors cette série peut sûrement répondre à vos attentes. Bien évidemment, il est impossible de ne pas conclure cette chronique sans évoquer les nombreuses interrogations qui nous viennent à l’esprit suite à cette découverte. Est-ce que l’on va voir se dessiner un fil conducteur derrière toutes ces péripéties ? Qu’est-ce qui attend nos deux compagnons de route au sein de cet espace où tout peut partir en cacahuète en une fraction de seconde ? Quelqu’un finira-t-il par prouver si oui ou non les os de notre protagoniste peuvent réellement concrétiser les souhaits ? Quels autres secrets nous réserve ce monde en constante évolution ? On a juste hâte de se replonger dans cet environnement à la fois hostile, drôle et grisant.
N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant ce premier volume de Dai Dark. Trouvez-vous que l’on tient devant nous un véritable ovni comme sait si bien le faire la mangaka ? Avez-vous adhéré à l’univers totalement barré et gore servant de décor à cette histoire ? Appréciez-vous toute la sorte de mythologie qui se forme autour de ces personnages ainsi que de leur environnement galactique ? L’absurde mêlé à un récit particulièrement sombre est-il parvenu à vous convaincre tout au long de cette introduction ? Qu’attendez-vous pour la suite de la licence ? On reste à votre disposition pour échanger, discuter et débattre autour de ce sujet.