Beate

Le dilemme de Beate

Il n’y a pas à dire, Final Fantasy IX a toujours beaucoup de choses à nous raconter et surtout de sujets à traiter. Pour aujourd’hui, on va retourner au sein de cet univers pour ce nouveau numéro de notre “Vague Gaming” dédié aux antagonistes de cet opus. Après avoir parlé de Branet ainsi que de Pile et Face, on s’est dit que l’on allait s’attaquer à un personnage qui était à la fois proche d’eux et aux antipodes de leur écriture. Il s’agit bien évidemment de Beate, la redoutable commandante qui a fait souffrir plus d’un joueur. Décidément, Alexandrie a vraiment été le lieu ayant donné vie à beaucoup d’adversaires pour nos héros durant notre aventure. Mais là où nos précédentes chroniques s’attardaient sur des individus assez loufoques et absurdes dans leur comportement et leur physique, ici on aborde le cas d’une guerrière qui n’a absolument rien de délirant dans son attitude. Au contraire, elle va venir apporter énormément de sérieux à cette menace initiale tout en menant son propre combat pour savoir ce qui est réellement juste ou non. L’heure est donc venue de retrouver celle qui n’a eu de cesse de nous mettre des raclées !

Un idéal à atteindre

Quand on parle d’idéal concernant le personnage de Beate, c’est qu’elle est justement présentée comme étant une personne exceptionnelle. A la tête des Amazones, charismatique et nous laissant présager d’une force hors du commun, elle marque rapidement l’attention du joueur. Sans oublier bien sûr son thème principal qui va parfaitement accompagner l’élégance et la prestance de cette rose. D’ailleurs, la ressemblance avec cette fleur est très bien pensée, car la beauté de cette femme n’a d’égale que ses dangereuses épines pouvant piéger ses opposants. Comme on a pu le dire dans les deux précédentes chroniques, on a fait face à des ennemis qui étaient assez décalés autant dans le ton que dans la forme. Beate va réellement se présenter comme une figure d’autorité, de puissance et de loyauté qui va rapidement s’installer comme une adversaire remarquable. Cela est encore plus appuyé au départ quand on constate la différence entre elle et Steiner. Encore loin de savoir la relation qu’il y aura entre les deux, le chef des Brutos est presque traité comme un élément comique et agaçant là où sa camarade est l’exacte opposée. Tout est pensé pour qu’elle soit la commandante modèle qui ne semble pas avoir le moindre défaut. N’ayant jamais le besoin d’élever la voix, son leadership suffit amplement à unir les gens autour d’elle. Cela se ressent même dans le caractère de sa troupe qui est bien loin d’agir comme les Brutos. On est devant la parfaite représentation du chevalier pour qui honneur, loyauté et courage sont les principales valeurs. Mais le plus remarquable, c’est justement le fait que Beate est un personnage qui se veut tout de même assez effacé tout au long de la première partie de l’aventure. 

Elle reste toujours derrière sa reine comme un véritable garde du corps sans jamais faire étalage de ses capacités. Pourtant, même sans faire la démonstration de son talent à l’épée, il y a cette aura qui se dégage d’elle qui fait que l’on est interpellé par cette inconnue qui reste dans son coin. Cela est encore plus appuyé par les caractères barrés qui l’entourent et qui sont en totale contradiction avec le côté stoïque de la jeune femme. Entre les idioties de Pile et Face, la colère presque enfantine de Branet et le surplus d’énergie de Steiner, on a même le sentiment que Beate est presque une personne normale au sein de ce casting haut en couleur. Dans un sens, c’est son sérieux et cette nature classique qui lui permet de retenir notre attention. On se questionne sur ce qui se cache réellement derrière cette commandante des armées d’Alexandrie. En plus de ça, on peut aussi remarquer à quel point la renommée de cette épéiste se ressent au sein de cette patrie. Une guerrière qui a déjà réalisé bien des exploits et n’a plus rien à prouver. D’ailleurs, on s’en rend encore plus compte quand on quitte la sphère du royaume pour entendre parler d’elle notamment quand on attaque le passage à Bloumécia. Avant même que n’arrive le premier combat contre elle, cette dame a déjà su s’implanter dans l’esprit du joueur comme une adversaire redoutable. Un travail d’écriture plus que réussi qui va nous conduire jusqu’à cet instant fatidique où cet antagoniste va finalement dégainer son arme pour la première fois du jeu. Une rencontre qui va, comme pour beaucoup d’événements importants, avoir lieu dans un lieu battu par la pluie dont les gouttes résonnent des larmes de tous ceux qui ont disparu dans cette cité maintenant silencieuse.

Beate - combat

Une puissance impressionnante

C’est au moment où l’on cherche à mettre un terme à l’attaque des mages noirs envers le peuple de Bloumécia que l’on va tomber sur cette escorte royale. Un moment très important de cette aventure où l’on fait la connaissance de Kuja et que l’on se retrouve face à Branet et son général le plus fidèle. Et oui, Beate se tient devant nous et c’est en voulant sauver un soldat de la ville que l’on doit se confronter à elle. Ce qui est intéressant, c’est qu’elle est loin d’avoir le même regard que sa dirigeante à l’égard de ce peuple. En voyant cet individu désespéré et prêt à se jeter à corps perdu dans la bataille, elle ne le dénigre pas. Au contraire, elle montre un respect à l’égard de celui qui est décidé à se battre jusqu’au bout de sa détermination. Des propos qui viennent appuyer le contraste entre l’horreur commise par cette armée et les valeurs de cette guerrière. On comprend que si elle se retrouve sur ce champ de bataille, c’est avant tout parce que Beate est une combattante exemplaire au service de cette reine rongée par les ambitions. Elle est en réalité coincée par son statut où elle obéit aux ordres sans broncher tout en voulant préserver ces principes en tant qu’épéiste. Il va alors se passer quelque chose de très important qui découle directement de la confrontation qui va se jouer entre elle et le joueur. Il ne faut que quelques secondes pour ouvrir les yeux sur le fait qu’il est impossible de la vaincre. Même en sortant nos meilleures attaques, rien n’y fait et la commandante des Amazones reste inébranlable. On doit ainsi subir au mieux ses assauts dévastateurs jusqu’à ce qu’elle décide finalement de mettre un terme à cette plaisanterie pour elle. Une seule attaque suffira alors à mettre toute l’équipe à terre et à nous donner le rôle du perdant comme une fatalité impossible à éviter.

Rien que le fait d’avoir pris cette décision est une excellente idée pour justement symboliser l’écart qu’il y a entre Beate et nos protagonistes. Pour la première fois, le joueur est totalement à la merci de son adversaire et doit se contenter d’observer cette scène où Djidane et ses amis se retrouvent allongés au sol sous cette averse diluvienne. Ce qui choque en premier lieu, c’est l’impuissance du joueur qui a toujours l’habitude de se débarrasser de ses ennemis. Cette défaite incontestable va autant être un moment fort pour celui-ci qu’avoir un rôle majeur dans l’écriture de Beate. Alors que l’on se confronte à elle pour la première fois, on n’a aucune chance de l’emporter. On se confronte à cette légende dont on entendait juste parler jusqu’ici. Si l’on pouvait se douter de sa puissance et de son talent au vu de l’aura qui se dégageait d’elle au début, cette fois on fait face à quelque chose de concret. Pour ne rien arranger, cette situation ne va jamais changer par la suite. Trois duels vont avoir lieu contre Beate et à chaque fois, c’est elle qui finit par écraser ses opposants. Même si nos héros résistent de mieux en mieux, le fossé semble encore si grand à chaque fois que l’on pense prendre notre vengeance. Jusqu’au bout, cette épéiste sera restée invaincue sans que l’on ne puisse rien y faire. Cela crée forcément une frustration chez le joueur qui ressort sans avoir la moindre possibilité d’une revanche. Le score est de trois à zéro et l’on doit accepter le fait que dans ce monde il existe un être qui nous a mis en péril à chaque rencontre. On rêverait alors de l’avoir définitivement dans l’équipe et finalement ce ne sera que pour de brefs instants qu’elle rejoindra le groupe. De quoi juste accentuer cette frustration de ne pouvoir mettre la main sur cette rose mortelle. Un antagoniste qui va alors entamer un revirement qui entre en totale adéquation avec ce qu’elle est au plus profond d’elle.

Au service de la famille royale

Beate fait partie de ces adversaires qui vont grandement évoluer au cours de notre épopée. Plus le temps passe et plus on sent l’hésitation s’emparer de son cœur en voyant ce que devient sa reine pour qui elle a dédié sa vie. Un peu comme pour Steiner, elle va être tiraillée entre son devoir auprès de la couronne et ce qui lui pèse au plus profond d’elle. Mais là où le capitaine des Brutos va mettre du temps et jouer la carte de l’aveuglement à outrance, sa camarade va être bien plus subtile. En réalité, elle est bien consciente que ces guerres qu’elle doit mener ne sont qu’un moyen pour Branet d’assouvir sa soif de conquête. Elle ne reconnaît plus celle qu’elle a juré de servir, mais ne peut déroger à ce statut qui est le sien. Dans un sens, elle accepte d’endurer toute la haine de ces peuples détruits même si cela s’avère éprouvant sur sa conscience. Il faudra un événement pour qu’elle ouvre les yeux sur ce que son honneur lui dicte. Il s’agit de la cérémonie qui est faite pour extraire les chimères de Grenat. Pensant au départ que la dirigeante d’Alexandrie voulait juste retrouver sa fille, elle découvre finalement qu’elle est prête à la tuer si cela peut lui procurer encore plus de puissance. En tant que chevalier, elle a juré de protéger cette famille royale et cela implique aussi la princesse. C’est alors l’occasion pour Beate de se rebeller contre cette suzeraine qui est prête à sacrifier sa propre héritière pour des ambitions stupides. Bien sûr, il y a une part de responsabilité qui fait qu’elle décide enfin d’agir en ne pouvant plus supporter cette escalade de violence et de mort. Pour la première fois de sa vie, elle dégaine son épée contre sa souveraine, mais dans le but d’assurer un meilleur avenir à sa patrie. 

Beate va ainsi montrer une autre facette de sa personnalité qui revêt beaucoup d’importance concernant l’appréciation générale du joueur à son égard. En plus d’être une commandante exemplaire et redoutable, c’est aussi une femme qui ne peut tolérer de voir ses concitoyens souffrir. Sa loyauté va autant à l’égard de la cour que du peuple. Jusqu’à cet instant, on nous présentait une demoiselle qui pensait agir pour le bien de sa patrie. Un sentiment exacerbé par cette loyauté sans faille qu’elle a eu pour Branet depuis toutes ces années. Mais c’est en confrontant ses principes et cette loyauté aveugle qu’elle va finalement découvrir la voie qu’elle doit prendre. Une sorte de rédemption à ses yeux qui, elle le sait, n’effacera pas tout le mal qu’elle a pu faire. Un chemin qui diffère énormément des autres ennemis que l’on peut connaître, mais qui raconte quelque chose de tout aussi fort. Si Steiner n’a jamais eu à se salir les mains dans ce conflit, Beate doit endurer ce qu’elle a infligé. On peut ainsi dire que son fardeau est encore plus prononcé de n’avoir pu arrêter ces massacres avant et d’avoir fait la sourde oreille tout ce temps. A partir de cet instant, on ne voit plus uniquement la guerrière de légende, mais aussi la personne qui se cache derrière ce statut. Un être humain comme les autres qui, rongé par les remords et l’envie de corriger ses erreurs, va prendre une décision qui changera à jamais sa vie. Ainsi, on se rapproche bien plus de cet adversaire qui devient une alliée et qui désire maintenant voir l’avenir que peut construire Grenat. La combattante que l’on pouvait qualifier de glaciale va dévoiler ses sentiments, se rapprocher de l’être qu’elle aime, mais aussi cerner ce que c’est que d’être au service des autres.

Beate - final

Beate a compris son devoir

Jusqu’ici, on avait abordé des antagonistes qui ont connu un tragique destin et surtout sont restés cantonnés dans leur rôle d’ennemi à stopper. Avec Beate, c’est une autre proposition que l’on nous fait concernant l’écriture d’un tel personnage. Considérée initialement comme une ennemie à vaincre comme les autres, elle avance progressivement vers un chemin la ramenant vers ce qu’elle a toujours souhaité au plus profond d’elle. Il est vrai que c’est un schéma pouvant être assez récurrent de voir un opposant aux héros finir par rejoindre leur camp. Pourtant, notre cheffe des Amazones va aussi réussir à conter d’autres choses que cette quête de rédemption. En fait, cette jeune femme symbolise le sens du devoir qui peut à la fois être un honneur pour un guerrier qu’une chaîne pouvant amener celui-ci à perdre de vue ce qu’il souhaitait initialement. Dans un sens, le message qu’elle nous transmet va de pair avec celui de Steiner. Deux êtres très complémentaires tant au niveau de leurs sentiments que de ce qu’ils doivent accomplir pour changer. Mais là où notre épéiste a toujours été, malgré lui, du côté de Djidane et de Grenat, Beate a été amenée à participer personnellement au chaos qui a ravagé ces terres. Une commandante inflexible qui pourtant va vaciller en voyant que même les liens familiaux n’avaient plus le moindre intérêt pour Branet. Une demoiselle qui doit maintenant vivre avec le poids de ses actes et surtout se tourner vers l’avenir tout en sachant que ce passé sanglant sera à jamais en elle.

J’avais très à cœur de parler de ce personnage, car elle a vraiment su se faire une place toute particulière dans le cœur des joueurs. Une guerrière que l’on admire malgré tout ce qu’elle doit faire et dont la légende reflète parfaitement ses aptitudes au combat. On se confronte à elle à plusieurs reprises et à chaque fois on doit accepter le fait que l’on ne peut égaler sa force. Un objectif à atteindre qui ne sera jamais réalisable de par son changement de camp, mais aussi cet enchaînement de duels qui s’arrêtera sur une victoire totale de sa part. En faisant ça, les développeurs ont su faire de Beate un être à part dans la mythologie FFIX et même de toute la saga. Une combattante qui sera toujours invaincue et dont la légende va laisser entrevoir la réelle personne derrière cette aura divine. Celle qui a fait son apparition en étant un mythe du champ de bataille a fini par montrer l’être humain derrière tout ça et à transformer notre admiration en une sympathie pour elle. Une très belle preuve qu’un antagoniste n’est pas forcément cantonné à jouer le rôle du méchant et qu’il peut aussi apporter beaucoup de choses à un récit tout en ayant une écriture soignée lui permettant d’évoluer. J’espère en tout cas que ce nouveau numéro vous aura plu et qu’il aura su montrer tout ce qui fait l’intérêt de cette redoutable escrimeuse. N’hésitez pas à nous partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant Beate durant votre propre expérience dans le jeu.

2 Comments

  • Nana Coubo dit :

    Encore une très bel article et en plus sur Beate ! Un personnage très nuancé et complexe qu’elle occupe la place d’anta ou de soutient aux persos. J’ai souvent été frustrée de ne pas pouvoir la battre mais bon c’est ainsi. J’aime beaucoup sa relation avec Steiner (au fond, il y avait déjà un petit truc entre eux depuis le début aha)

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