Under Ninja tome 1 : ils sont parmi nous !
On le sait très bien, le mot ninja évoque beaucoup de choses dans l’univers manga et dans la culture japonaise dans sa globalité. Ces individus ayant existé il y a bien longtemps ont toujours été représentés comme des ombres sachant frapper là où il faut. On a ainsi pu découvrir de très nombreuses séries qui s’approprient tout ce qui fut construit autour de la figure du shinobi. Cela a donné lieu à des licences cultes et à des titres plus petits, mais captivants. Si j’aborde ce sujet, c’est parce que le manga dont je vais parler aujourd’hui a décidé d’aborder ce thème par une approche aussi étrange que réussie. Il s’agit de Under Ninja qui a fait ses débuts la semaine dernière dans le catalogue de Pika. Quand j’ai vu l’annonce pour la première fois, je me suis interrogé sur ce que pourrait donner un tel récit mettant en scène ces individus de l’ombre dans une société contemporaine. Finalement, après lecture de ce premier tome, je peux dire que j’ai été grandement étonné par ce premier acte qui donne à sourire tout en faisant preuve d’une écriture ayant beaucoup de potentiel. Il est grand temps d’observer un genin dans ses préparations pour sa future mission !
Des ninjas plus si secrets
Under Ninja, imaginé par Kengo Hanazawa, nous emmène dans un monde contemporain où les ninjas sont encore parmi nous. Alors qu’autrefois, ces assassins étaient avant tout engagés pour se débarrasser des chefs ennemis et autres cibles d’importance, ils ont maintenant évolué pour s’adapter à ce nouveau monde. Ces combattants émérites avaient été d’une grande aide pour chaque camp pendant la grande guerre qui a frappé l’ensemble du globe. Cependant, ils semblaient avoir disparu après que le conflit se soit calmé et qu’une paix fut installée entre les diverses nations. Il a été dit que leur organisation fut prétendument démantelée par les Forces Alliées et que tous les anciens ninjas avaient raccroché leur devoir. Mais la réalité est tout autre. Dans une époque où la quiétude des gens semble imperturbable, de nombreux combats se jouent dans l’ombre. C’est là que ces shinobis ont trouvé leur nouveau terrain de jeu. Infiltration, espionnage ou bien assassinat sont autant de tâches qu’ils effectuent tandis que leurs rangs ne cessent de grossir. En effet, il est dit qu’il y aurait près de 200 000 personnes qui seraient des ninjas. Un nombre impressionnant et qui laisse penser qu’il y a toujours un ninja pour observer ce qui se passe dans le monde. Mais avec tant de membres au sein de ce groupe, il est évident qu’une hiérarchie s’est installée afin de différencier l’élite de ceux qui ne sont que de simples apprentis.
Tandis que les shinobis les plus expérimentés sont appelés pour intervenir sur la scène mondiale et des missions à hauts risques, les autres doivent se contenter des miettes. Ces derniers ont même beaucoup de mal à joindre les deux bouts avec des offres peu alléchantes et surtout très rares. C’est pourquoi ces individus finissent souvent par se mêler à la population pour simplement pouvoir vivre et ne se comportent en ninja que comme s’il s’agissait d’un petit boulot. C’est malheureusement le cas pour Kurô Kumogakure, jeune shinobi faisant pourtant preuve d’une redoutable maîtrise des arts de son clan. Mais le travail n’étant pas là, il se retrouve désœuvré et obligé de vivre dans un petit appartement minable. Sa chambre se limite à un placard et malgré cette situation critique, cela ne semble pas l’inquiéter outre mesure. Cependant, il ne serait pas contre une mission de temps en temps afin de montrer de quoi il est capable. Son vœu est sur le point d’être exaucé quand l’un de ses supérieurs vient lui rendre visite avec un contrat. Il lui demande de stopper un tueur d’origine russe bien décidé à commettre les pires atrocités si cela lui permet d’infiltrer leurs rangs. Peu importe la difficulté de cette mission, Kurô est bien décidé à l’accomplir comme il se doit. Après tout, c’est une chance unique pour lui de montrer qu’il a totalement sa place en tant que shinobi dans ce monde qui a bien évolué depuis les origines de leur organisation. Considéré comme un loser par ses pairs, le voilà pourtant prêt à se frotter à un défi de taille pour faire taire tous leurs dires.
Rien qu’avec son synopsis, ce premier volume de Under Ninja nous laisse déjà présager d’une aventure qui se veut assez délirante. Pourtant, quand on s’attarde plus en détail sur cette introduction, plus on se rend compte que derrière ce qui semble être un délire assez étrange se trouve des idées particulièrement prometteuses. Le lecteur va rapidement se laisser absorber par cette société où les ninjas existent et sont connus de tous sans pour autant être directement visibles. Une réinterprétation plus que fascinante de ces shinobis qui se retrouvent pris entre l’ombre et la lumière.
Un récit flirtant entre le burlesque et l’ingéniosité
Quand je parle de burlesque, il faut comprendre que Under Ninja propose un premier volume qui part dans une direction totalement inattendue avec un récit qui n’hésite pas à proposer un humour pouvant être aussi graveleux que déroutant. Un constat qui se fait très rapidement quand on regarde Kurô et son mode de vie qui semble tellement loin de ce que l’on pouvait imaginer quand on entendait parler de ninja. On a vraiment ce sentiment d’avoir devant nous un gars lambda cherchant simplement à se faire un peu d’argent et qui doit se contenter d’un placard comme lit. Cette approche, qui nous semble totalement barrée, va continuer à se construire au fur et à mesure des répliques, des situations et introduction d’autres personnages. Il y a constamment un élément qui va venir nous ramener à cet aspect comique qui entre en collision avec le sinistre travail de ces assassins. Mais c’est justement là que l’auteur fait un travail remarquable selon moi. En effet, on a très souvent pu voir le mythe du ninja qui est interprété de manière souvent sérieuse ou bien exagérée par l’utilisation de techniques invraisemblables. Ici, le mangaka veut nous présenter une autre vision de ce statut qui a tant fait rêver de lecteurs afin de le ramener à une certaine réalité plus concrète à ce que l’on peut connaître. Voilà pourquoi on nous présente des shinobis qui connaissent la crise, sont en concurrence les uns les autres et sont maintenant des tueurs ou des espions.
Le mot ninja perd de son aura pour devenir un métier comme beaucoup d’autres notamment quand on apprend le chiffre délirant de personnes ayant pris cette voie. Malgré tout, on garde quand même ce côté mystérieux et caché de cette organisation. Mais cela résonne bien plus comme des services secrets que comme un ancien ordre de shinobis. Ce sont des mercenaires se mettant au profit des plus riches ou bien des nettoyeurs chargés de se débarrasser de la vermine. Il y a ainsi un contraste très intéressant qui se forme entre cette destruction de ce que l’on imagine en entendant le mot ninja et ce que nous présente le manga. Même les techniques laissent finalement place à des gadgets high-tech ou bien une agilité façonnée au fil des entraînements. Il n’est donc plus question d’exagération, mais de nous présenter des hommes et des femmes qui pourraient totalement réhabiliter le ninja dans une société plus moderne. Voilà aussi pourquoi on a le droit à des situations qui nous paraissent surréalistes alors qu’elles sont juste le reflet de ce contexte dans lequel ces gens ont dû s’adapter. D’ailleurs, j’ai été grandement marqué par un personnage qui veut rejoindre le rang des ninjas et qui est obnubilé par ces stéréotypes que l’on peut avoir sur eux. Cet individu est un peu le reflet de ce que le lecteur pense initialement avant que le mangaka ne finisse par montrer un autre visage de ce statut qui diffère pleinement de cette image nourrie à travers la pop culture.
Under Ninja se présente vraiment comme une expérience assez unique dans son genre. En réalité, on ne sait pas vraiment sur quel pied danser avec cette série qui pourtant arrive à retenir notre attention. Cela est dû à cette réflexion intéressante autour du ninja si celui-ci venait à devenir courant dans le monde d’aujourd’hui. De même, si le récit peut se montrer farfelu à de nombreuses reprises, il s’en dégage pourtant une sincérité troublante dans les réactions de ces personnages. Loin de l’idée que l’on peut se faire de ces shinobis des temps modernes, on découvre des êtres pouvant être totalement fous ou bien en adéquation avec les besoins de leur vie dans cette société.
Under Ninja est prêt pour sa mission
Il est sûr que beaucoup de gens peuvent être déroutés par ce que propose ce premier volume d’Under Ninja. Il faut dire que son humour souvent en dessous de la ceinture ou bien le comportement de certains personnages peuvent donner lieu à des situations particulièrement étranges. Malgré tout, il faut aussi voir l’intention du mangaka derrière tout ça. Quand on prend du recul, on se rend compte à quel point cette lecture est loin d’être uniquement un enchaînement de moments où l’humour est constant. Rien que dans le traitement du ninja par rapport à la société et surtout à cette époque contemporaine, le titre réussit à se démarquer de bon nombre de ses congénères. Un récit qui assume ce délire initial parce que cela colle parfaitement à ce qu’un shinobi dans le monde actuel pourrait devenir. Un simple mercenaire proposant ses services au plus offrant. Le talent est là et on est épaté par les capacités physiques de ces individus, mais on est aussi décontenancé par ce mode de vie qui rapproche ces individus de ce que le commun des mortels peut connaître. Mais voilà ce qui rend ce titre aussi brillant dans son écriture. Kengo Hanazawa s’approprie cette figure du ninja que l’on a mis sur un piédestal pendant tant d’années et à travers de multiples œuvres pour finalement les ramener à notre propre condition d’être humain. Une désacralisation de ce qui était à la base un ordre ayant vu le jour pour servir d’assassins et d’espions à certains seigneurs. Il reprend cette origine pour la transposer dans un contexte bien différent de ce passé historique.
C’est pour toutes ces raisons que j’ai aimé la découverte de ce premier volume de Under Ninja. Une expérience littéraire qui a su sortir des codes que l’on connaît autour de ce thème pour nous offrir une histoire qui a tout du récit d’espionnage macabre. Il est clair que c’est une série qui ne parlera pas forcément à tout le monde notamment au vu de cet humour qui ponctue très souvent les chapitres. Mais cette facette de l’œuvre fait partie intégrante de son identité et contribue à détruire l’image du ninja que l’on a tous en grande partie afin d’en concevoir une autre. De plus, il y a aussi des intrigues qui arrivent à attirer notre attention et qui nous donnent envie de voir ce que peut donner cette aventure sur les prochains tomes. Nous voilà donc face à une œuvre qui sort des sentiers battus et qui pourra plaire à ceux voulant une autre approche du ninja et qui soit capable de les surprendre par son ton mêlant humour et bas-fond de la société. Ce qui est sûr, c’est que j’ai énormément de questions qui me viennent en tête suite à cette lecture. Est-ce que Kurô sera à la hauteur de la tâche qu’on lui confie ? Ne cache-t-il pas tout le potentiel qui sommeille en lui au vu de ses capacités ? Qui est donc cet individu cherchant à s’infiltrer au sein de leur organisation ? Comment va réagir cette dernière au vu des derniers événements ? On risque d’être fortement surpris par la suite de cette oeuvre.
N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant ce premier volume de Under Ninja. Trouvez-vous que l’on a devant nous une œuvre qui arrive autant à être savoureusement idiote et convaincante sur son parti-pris ? Est-ce que vous trouvez que ce manga puisse proposer quelque chose de pertinent sur le long terme ? Appréciez-vous cette revisite du mythe du ninja qui est maintenant connu du monde entier ? Est-ce que notre protagoniste a su éveiller votre intérêt par rapport à ses aptitudes et sa personnalité singulière ? Qu’attendez-vous pour la suite ? On reste à votre disposition pour échanger, discuter et débattre autour de ce sujet.