Mighty Mothers-Vol.1-

Mighty Mothers tome 1 : savoir mener une double vie

Il n’est pas rare dans le monde du manga que de voir des protagonistes semblant totalement lambdas faire preuve d’un autre visage une fois loin des regards. Des individus qui cachent bien leur jeu afin de mieux nous surprendre et ainsi d’aller en totale opposition avec ce que l’on pouvait imaginer à leur égard. Mais il est toujours intéressant de voir comment est amené un tel changement au sein d’une œuvre. C’est pour ça qu’aujourd’hui, je vais vous parler de la dernière licence en date des éditions Mangetsu. Il s’agit de Mighty Mothers dont le premier volume est sorti la semaine dernière. J’étais assez intrigué de voir ce qui pouvait se cacher derrière ce titre dont le pitch de base nous préparait déjà à ce qui nous attendait. Cependant, en lisant cette introduction, j’ai été surpris par plusieurs éléments qui ajoutent encore plus de piments à cette épopée. Une œuvre qui va beaucoup miser sur son action effrénée pour nous en mettre plein les yeux. On est alors propulsé dans un divertissement à la fois sombre et épique. L’heure est donc venue d’observer le quotidien de ces femmes qui luttent de deux manières bien différentes.

Mère de famille et tueuse

Mighty Mothers Vol.1Mighty Mothers, imaginé par Eiji Karasuyama, nous emmène au cœur d’une société qui se présente comme gangrénée par la pauvreté et le crime. Sans même s’en rendre compte, les drames humains ne cessent de se multiplier sans que personne ne lève le petit doigt pour arrêter ça. Au contraire, ce monde est devenu une aubaine pour les ordures de la pire espèce qui désirent assouvir leurs bas instincts ou bien développer leurs sordides affaires. C’est dans un tel contexte que l’on fait la connaissance d’Akane Honjô, une jeune femme élevant seule son fils de quatre ans. Chaque journée est un défi en soi pour elle alors qu’elle doit jongler entre son rôle de mère et son travail dans une petite épicerie de quartier. Elle redouble d’efforts pour que leur petite famille ne manque de rien et elle peut compter sur le soutien d’un jardin d’enfants qui s’occupe en journée de son bambin. Mais derrière ce quotidien semblant banal pour une mère cache en réalité une toute autre réalité. Derrière ce fameux établissement qui s’occupe de ces gamins se trouve une organisation faisant appel à certains agents pour venir en aide aux opprimés. Akane fait partie de ces membres et elle accepte sans sourciller de nombreuses missions périlleuses afin de nettoyer les rues de la vermine qui s’est installée depuis bien trop longtemps. Elle est une véritable tueuse qui ne laisse derrière elle que des corps sans vie et fait des dommages considérables dans les rangs adverses.

Mais elle n’est pas la seule pour se frotter aux pires malfrats et organisations qui règnent sur cette société. Elle peut compter sur la présence de deux autres collègues qui ont aussi leurs propres atouts pour éliminer ceux qui osent s’en prendre aux personnes innocentes. Sans compter la gérante du jardin d’enfants qui semble avoir une grande expérience dans le domaine. Tout ce petit monde se réunit dans l’ombre pour frapper là où ça fait mal, mais cela peut aussi avoir de graves répercussions. En effet, si elles viennent en aide à bon nombre de victimes, il ne faudrait pas que leurs adversaires apprennent qui se trouvent réellement derrière ces assauts. Après tout, ce ne serait pas uniquement leur vie qui serait menacée, mais aussi celle de leur progéniture qui n’a rien demandé. C’est donc un équilibre fragile qui se dégage de cette voie choisie par ces femmes. Malgré les dangers inhérents à leur autre métier, elles sont bien décidées à engager les hostilités pour mettre un terme à toutes ces souffrances. Un combat de chaque instant qui peut se montrer éprouvant surtout quand toute la journée il a fallu s’occuper d’un enfant. Ainsi débute l’histoire de ces femmes qui doivent alterner entre leur devoir en tant que mère et leurs contrats quand elles décident d’endosser leur tenue de tueuse. Combien de temps ce mode de vie peut-il perdurer avec cette criminalité qui n’apprécie pas que l’on fourre son nez dans ses affaires ? Dans l’ombre, une impressionnante et sanglante bataille se joue pour l’avenir de tous ces démunis.

Avec Mighty Mothers, la série veut clairement nous emmener vers le récit qui semble totalement surréaliste dans cette approche de la mère de famille devenant tueuse une fois la nuit tombée. Cependant, on va rapidement remarquer que derrière cette idée imaginée pour nous délivrer de l’action à foison se cache aussi des thématiques finalement importantes. En centrant son récit sur ces jeunes femmes, l’artiste souhaite autant mettre la lumière sur elles, leur quotidien, mais aussi sur leur lutte pour protéger d’autres personnes comme elles. Un premier volume qui arrive à proposer des idées prometteuses en matière d’écriture.

De l’action frénétique

Comme j’ai pu le dire un peu plus tôt, Mighty Mothers est une œuvre qui va grandement axer son attrait dans sa mise en scène lors des combats et l’impact de ces derniers. En effet, il ne faut pas longtemps au manga pour nous montrer de quoi sont réellement ces mères qui alternent entre leurs diverses facettes. C’est un bon point, car cela permet autant de s’imprégner rapidement du ton assez sombre de la série que de profiter d’un divertissement efficace et presque immédiat. Il faut donc voir en premier lieu ce titre comme un show assez impressionnant et réservé avant tout à un public averti au vu des diverses scènes sanglantes dont on peut être témoin. De plus, le fait d’avoir comme protagonistes des mamans est très intéressant. En effet, tout est pensé pour que l’on soit surpris en découvrant l’autre visage de nos héroïnes. On a beau savoir ce qui nous attend, il y a toujours un petit effet à voir le basculement qui s’opère entre cette vie tout à fait lambda et ayant ses propres problèmes avec cette existence de l’ombre où tout se règle par la force et le sang. Un contraste qui fonctionne très bien et permet de sublimer le caractère déjà très affirmé de nos protagonistes. Mais s’arrêter uniquement à ça serait passé à côté de tout ce que ce premier tome peut offrir. Il est vrai que quand on pose les yeux sur ce premier volume, on retient énormément les phases d’action où tout peut se régler en seulement quelques secondes avec de telles expertes du meurtre. 

Pourtant, il y a aussi des éléments qui vont venir se greffer à ça et offrir un récit bien plus profond qu’il n’y paraît. Tout d’abord, l’auteur veut mettre à l’honneur ces femmes qui sont seules à devoir élever leurs enfants et tout ce qu’elles doivent faire pour que leur quotidien se passe au mieux. Il y a un rapport très fort entre cette relation entre un enfant et sa maman et ce qu’elles doivent mener comme défi pour maintenir cet équilibre. On pourrait croire que combattre des criminels serait le plus dur, mais le mangaka réussit à montrer que l’autre facette de son récit est loin d’être aussi rose. Si la présence du jardin d’enfants comme “QG” pour nos jeunes femmes leur permet de souffler un peu, on prend aussi le temps de nous montrer leur quotidien dans leur boulot de tous les jours. Travail à la supérette ou bien dans un petit restaurant de quartier sont des tâches qui nous sont présentées avec leur lot de problèmes. C’est en ça que cette série réussit son pari. Il n’est pas uniquement question d’action, mais aussi de ces épreuves constantes que la vie peut mettre sur la route de ces personnes qui font simplement de leur mieux. Cela s’exprime même quand elles entrent en mode tueuse, car leur combat est aussi important que dangereux pour elles. Il suffit d’une erreur pour qu’elles soient visées, mais aussi leurs proches. Sans oublier que la majorité des gens qu’elles protègent sont aussi des femmes qui sont abusées ou bien détruites par cette société. Une boucle se forme alors entre ces deux aspects de leur existence et ce qu’elles apportent à ces victimes dans le besoin.

Autant le dire tout de suite, Mighty Mothers marque avant tout les esprits par sa maîtrise des scènes de combat et le spectacle qui en découle. On est fixé à l’action quand les armes supplantent les paroles afin d’admirer le trait de l’auteur pour donner vie à d’excellentes chorégraphies martiales. Mais il ne faut pas limiter cette lecture à ce seul élément. Il y a aussi des choix pertinents en matière d’écriture notamment autour de ce double rôle qui rythme la vie de nos protagonistes et les aléas qui en découlent. On est alors autant interpellé par son côté spectaculaire que par ces moments plus intimes.

Mighty Mothers lance son assaut

En conclusion, Mighty Mothers est une œuvre qui cherche à jouer sur deux tableaux et qui y arrive de manière plutôt brillante. Si l’on soulignera tout le talent de l’auteur pour ce qui est de mettre en scène ses combattantes dans des ballets sanglants envoûtants, il faut aussi reconnaître la subtilité dont il peut faire preuve en dehors de ces moments. On se met même à apprécier très fortement ces quelques instants où la mère prend la place de la tueuse à gages, car cela ajoute énormément de développement et d’enjeux autour de nos principaux personnages. A cela s’ajoute la capacité du mangaka à nous délivrer des planches qui sont à la fois spectaculaires et lisibles. On ne rate rien de ce qui se passe dans la mêlée et cela ne fait que renforcer l’attrait que l’on a pour ces affrontements. Mais il y a aussi un sous-texte intéressant qui se construit au fil des chapitres en mettant en scène toutes ces femmes qui luttent autant pour s’aider les unes des autres que pour mener une vie banale. On veut nous montrer l’adversité qu’elles vivent autant quand elles s’engagent à la poursuite de criminels que dans leur devoir maternel. Tout ça donne un mélange qui nous séduit et nous donne envie de voir si cette fusion des deux univers peut perdurer ou bien si elle va s’effondrer au premier échec. Un début de réponse que l’on pourrait avoir très vite au vu de ce que laisse planer le dernier acte de cet ouvrage.

Avant de lire Mighty Mothers, j’étais intrigué de voir comment Eiji Karasuyama allait réussir à faire cohabiter ces deux parties de manière conjointe. Le résultat est plus que probant et donne surtout très envie de voir comment cela va évoluer par la suite. Restant à la fois simple et efficace, autant dans son action que dans son écriture, on savoure chaque moment que l’on passe en compagnie de ces trois femmes qui n’hésitent pas à se salir les mains. De même, la mise en place d’une société aussi sinistre et encline à propager du désespoir offre un cadre idéal pour la lutte de ce trio. Elles symbolisent une lueur d’espoir pour tous ceux qui ne peuvent pas se battre ou n’ont pas la force de résister à des adversaires aussi puissants. Une série prometteuse et courte qui est à réserver à un public averti désireux d’avoir un mélange de combats grandioses et de tranche de vie pouvant parler à beaucoup de gens. Il faut maintenant voir comment se prépare le second acte au vu de ce que l’on peut lire ici. Bien évidemment, on a quelques questions qui nous viennent en tête maintenant que la lecture est finie. Est-ce que nos nouvelles amies vont réussir à mettre un terme aux agissements de cette organisation ? Vont-elles se retrouver en mauvaise posture et leur secret dévoilé ? Quels rôles vont avoir les enfants dans toute cette histoire ? Je suis très curieux d’avoir la réponse à ces interrogations.

N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant ce premier volume de Mighty Mothers. Appréciez-vous ce double jeu qui s’opère entre le visage de ces mères en journée et une fois la nuit tombée ? Trouvez-vous que le titre parvient à proposer une action à la fois frénétique et lisible tout au long de ses chapitres ? Croyez-vous que l’on va avoir le droit à une évolution intéressante du combat mené par nos protagonistes ? Trouvez-vous intéressant de voir toute cette organisation qui se forme et qui se cache derrière cet établissement ? Qu’attendez-vous pour la suite de la licence ? On reste à votre disposition pour échanger, débattre et discuter autour de ce sujet.

© 2021 Karasuyama Eiji, Nihon Bungeisha

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