Les Carnets de l’Apothicaire tome 1 : un remède à tous les maux
Il y a des mangas qui réussissent à capter notre attention avant même que l’on s’élance dans l’aventure proposée. Par une simple couverture ou juste un synopsis, il est facile de se laisser envoûter par un titre. Cela ne fait que renforcer notre envie de découvrir ce qui nous attend et force est de reconnaître que ça peut donner lieu à de belles surprises. Ce sentiment nous a récemment envahi dès lors que l’on a vu l’annonce entourant l’une des nouvelles licences de Ki-oon. Vous l’aurez donc aisément compris, on va parler aujourd’hui du premier volume de Les Carnets de l’Apothicaire qui est arrivé chez nous il y a quelques jours. Avec sa première page à la fois douce et sublime et son résumé intrigant, il ne fallut pas longtemps pour que l’on se jette dessus. Après avoir lu attentivement cette introduction, on a été agréablement étonné par ce que l’histoire souhaitait nous raconter. En plus de nous faire suivre le parcours d’une jeune apothicaire, le récit va se permettre d’utiliser ce concept de base pour aborder des sujets pertinents à la fois propres au contexte de l’œuvre que plus personnel. L’heure est donc venue d’assister à une petite leçon de pharmacologie de la part d’une jeune femme particulièrement impressionnante.
Une embauche surprenante
Les Carnets de l’Apothicaire, dont le story-board a été fait par Itsuki Nanao et dessiné par Nekokurage, nous plonge dans une aventure atypique où l’on fait la connaissance de la jeune Mao Mao. Cette demoiselle de dix-sept ans a une vie particulièrement compliquée. Élevée dans le quartier des plaisirs et formée pour depuis son plus jeune âge afin d’être apothicaire, cette adolescente a dû se confronter à de nombreuses épreuves. Toujours en soif de nouvelles connaissances, elle prenait un malin plaisir à tester divers poisons, remèdes et autres ingrédients inconnus sur elle-même. Si cette vie loin d’être aisée lui suffisait amplement, elle ne s’attendait pas à être kidnappée un beau jour afin d’être vendue comme servante. Sa nouvelle place était maintenant au sein du quartier des femmes du palais impérial où se trouvaient toutes les épouses de l’empereur. Un harem qui lui servait à concevoir les futurs héritiers qui viendraient s’asseoir à ses côtés et prendre sa relève un beau jour. Consternée par cette situation qui ne la regarde en rien et surtout frustrée de devoir partager une partie de son salaire à ses ravisseurs, Mao Mao se demande bien comment se sortir de tout ça. Une question difficile à répondre au vu de ce lieu entouré de hauts murs qui est tout bonnement coupé du monde extérieur. Les femmes présentes ici n’ont comme interaction que certains échanges entre elles, leurs dames de compagnie et leur souverain quand celui-ci daigne se présenter.
La première chose qu’elle comprend, c’est qu’il va lui falloir faire profil bas afin de ne pas attirer l’attention sur elle. Pour cela, cette demoiselle décide de cacher ses connaissances et ainsi ne pas être impliquée dans ces luttes de pouvoir et complots qui rythment la vie des habitantes de cet endroit. Malheureusement, il s’avère que les nombreuses concubines du suzerain sont en proie à un terrible fléau qui s’en prend autant à elles qu’à leurs enfants. Un véritable ravage pour celles dont l’unique but est de pouvoir concevoir une progéniture digne de ce nom. C’est en voyant tous ces malheurs et cette souffrance que Mao Mao va finalement décider d’agir. Sa passion pour les poisons va s’éveiller et prendre le pas sur sa raison. C’est donc après une enquête minutieuse et de nombreuses observations que la solution va lui apparaître comme une évidence. Décidant d’agir, mais sans se montrer physiquement, elle espère ainsi soulager la détresse de ces jeunes femmes tout en restant inconnue. Elle était alors loin de se douter que son geste allait avoir de nombreuses conséquences. Son existence dans l’ombre pourrait bien se terminer plus vite que prévue à son grand dam. Repérée par Jinshi, haut fonctionnaire narcissique et calculateur, la voilà promue en tant que goûteuse personnelle d’une des favorites de l’empereur. Il va maintenant falloir redoubler de vigilance pour cette apothicaire pour ne pas se retrouver victime du poison des serpents rôdant ici.
Derrière Les Carnets de l’Apothicaire se cache avant tout l’histoire d’une demoiselle devant s’habituer à son nouvel environnement tout en essayant de retrouver ce qu’elle aimait tant faire. Si l’on a le droit à quelques doses d’humour tout au long de ce premier acte, ce n’est pas ce qui a retenu en premier notre attention. La véritable force de cette série repose sur ce savant mélange entre concoctions de remèdes, potions et autres produits tout en utilisant chaque cas présenté pour traiter de sujets variés. Un équilibre qui semble parfaitement maîtrisé et qui va donc permettre d’amener quelques propos très pertinents pour les personnages et leur environnement.
Entre apprentissage et problèmes humains
Il est impossible d’évoquer Les Carnets de l’Apothicaire sans parler bien sûr de la conception de ces fameux remèdes ou autres substances. Cependant, si l’on s’attendait à ce que ces compositions soient au cœur du récit, on ne s’attendait pas forcément à ce qu’elles servent autant à raconter des sujets différents. Pour débuter, il faut reconnaître que Mao Mao est une héroïne que l’on apprécie énormément suivre par son caractère fort et qui a un petit brin de folie dès lors que l’on parle de potions ou de poisons. Une jeune femme qui se donne corps et âme pour son travail et le fait d’avoir une profonde sympathie pour elle va avoir son importance. En effet, on a envie d’en apprendre plus sur ce personnage et surtout ce qui la pousse à aimer autant son métier. La voir donc en action a un petit côté grisant où l’on va beaucoup apprendre sur la conception de ces remèdes et aussi à quel point tout est une question de minutie et de patience. Chaque fabrication est le résultat de nombreux efforts et cela s’exprime à merveille au sein de ces pages où l’on est comme un témoin silencieux ne voulant pas déranger cette demoiselle dans chacune de ses concoctions. Cependant, là où ce premier volume va être encore plus intéressant est la manière dont le travail d’apothicaire va être utilisé au sein de ce quartier luxueux et pourtant d’une profonde noirceur. Un milieu où les sourires cachent en réalité une grande ambition, mais aussi une jalousie pouvant conduire à l’irréparable.
En fait, son rôle va avoir une plus grande importance encore par rapport au contexte dans lequel on se retrouve plongé. Si un apothicaire est là pour soigner les maux de ces patients, ici c’est totalement différent. Les connaissances de Mao Mao peuvent être utilisées non pas pour sauver une vie, mais pour en arracher une. La série va alors prendre une dimension politique captivante où l’on se demande alors si elle va finir par commettre l’irréparable afin de préserver sa propre existence. Une inquiétude qui va nous ronger peu à peu tout au long de cette lecture malgré le fait que l’on puisse avoir confiance en cette demoiselle pour rester fidèle à ses principes. C’est alors que l’on prend conscience des enjeux propres à cette cour intérieure où la beauté des murs et des ornements n’est qu’une façade. En réalité, on est constamment aux prises avec toutes ces intrigues qui se déroulent dans l’ombre. Une menace invisible plane alors constamment autour de notre héroïne et surtout de la favorite qui l’a prise sous son aile. On est donc happé par cette situation qui fait que l’on doit constamment être sur le qui-vive et qui va entrer en résonance avec de nombreux problèmes qui rongent les pensionnaires de ce harem. Si tout semble luxueux et enviable au premier abord, la mangaka souhaite aussi nous montrer que derrière ces fioritures n’empêchent pas ces femmes d’être malheureuses en ce lieu. Les Carnets de l’Apothicaire est aussi un manga souhaitant mettre en lumière le combat quotidien de ces prétendantes qui essaient soit de se faire une place au sommet ou tout simplement de survivre et quitter cet endroit qui ne leur laisse aucune liberté. Un message poignant et fort qui va être magistralement retranscrit à travers les yeux de cette héroïne qui sait très bien ce que cela fait d’être privé de ce que l’on aime.
En réalité, Les Carnets de l’Apothicaire a su frapper fort, et cela, d’entrée de jeu. Si l’on peut souligner la douceur des dessins et la sympathie que l’on a pour la majorité des personnages, c’est surtout dans les thématiques abordées que ce manga parvient à se distinguer. On a vraiment pris un malin plaisir à observer chacune de ses préparations et surtout les échanges entre notre héroïne et son nouvel entourage. Des gens qui font au mieux pour survivre dans cette cage dorée qui est loin d’être aussi éblouissante que peut le laisser penser son architecture. Une fable à la fois belle et dure où la moindre erreur peut être fatale dans ce lieu où la jalousie et la peur sont monnaie courante.
Les Carnets de l’Apothicaire réussi son mélange
Si l’on attendait énormément ce premier volume de Les Carnets de l’Apothicaire, force est de constater que l’on n’a pas été déçu. Au contraire, la surprise fut encore plus captivante en voyant à quel point le mélange entre toutes ces connaissances en pharmacie s’intègrent à merveille dans un environnement où tout n’est que question de complots et autres jeux de dupes. L’écriture des quelques personnages que l’on a pu voir est intéressante et on a surtout une profonde sympathie pour Mao Mao qui se retrouve dans cette cage dorée contre son gré. Le fait de suivre cette jeune femme au fort caractère est palpitant, car on se demande sans cesse comment elle va réagir face aux affres de cette vie enfermée entre ces murs dorés. A cela s’ajoute aussi une certaine poésie et tendresse qui va venir contrebalancer cette obscurité afin de nous montrer que même ici, l’amour peut exister même si cela engendre souvent de nombreuses peines. Un récit qui souhaite autant faire l’éloge de cette liberté que l’on souhaite tous et qui a été arraché à toutes ces femmes. En réalité, même si le manga ne le laisse pas paraître au premier abord, il parvient rapidement à nous présenter un combat de tous les jours pour pouvoir survivre dans ce nid de vipères. Une fable dont la beauté n’a d’égale que la profondeur de ses mots et qui peut aisément proposer quelque chose d’intéressant sur le long terme. Entre toutes ces manigances et ce désir de concevoir toujours plus de remèdes, on est intrigué concernant le futur de cette héroïne qui n’avait rien demandé à personne.
C’est donc un immense coup de cœur que l’on a eu pour ce premier acte qui pose les bases d’une histoire solide et au fort potentiel. Ce qui est remarquable, c’est que l’on est autant captivé par toutes ces luttes qui se déroulent en coulisse que la gentillesse qui peut tout de même émaner de la plupart des personnages entourant Mao Mao. Le lecteur est alors totalement tiraillé entre son désir d’en apprendre plus et son souhait de voir toutes ces actrices se libérer de leurs chaînes. Les Carnets de l’Apothicaire est une série que l’on recommande chaudement et qui plaira autant à ceux qui souhaitent avoir un titre instructif et en même temps capable de concevoir des intrigues bien ficelées. Tout est encore incertain tandis que l’on fait nos premiers pas dans cette cour intérieure. La seule branche à laquelle on peut se raccrocher est celle où se tient cette demoiselle qui ne vit que pour sa passion et qui est maintenant au cœur de nombreuses discussions. Bien évidemment, on ne peut quitter une lecture sans évoquer les multiples questions qui envahissent notre esprit. Est-ce qu’il est encore possible pour les occupantes de ce harem de retrouver un semblant de liberté ? Mao Mao devra-t-elle accomplir une tâche morbide dans un futur proche ? Son savoir ne se retournera-t-il pas un beau jour contre elle ? Peut-on vraiment faire confiance aux gens qui l’entourent ? Il va maintenant falloir prendre son mal en patience en attendant de pouvoir se projeter dans la suite de cette licence.
N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant ce premier volume des Carnets de l’Apothicaire. Pensez-vous que notre jeune héroïne parviendra à s’habituer à son nouveau quotidien ? Croyez-vous que les sourires qu’on lui adresse ne sont qu’une façade ? Est-ce que vous avez apprécié la façon dont la fabrication de remèdes est incrustée à la trame narrative ? Avez-vous peur que l’on finisse par demander l’irréparable à cette apothicaire de talent ? Qu’attendez-vous pour la suite de la licence ? On reste à votre disposition pour pouvoir échanger, discuter et débattre autour de ce sujet 🙂
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© Nekokurage, Itsuki Nanao / SQUARE ENIX