Kingdom tome 57 et 58 : Un conflit presque divin
Peu de séries peuvent se targuer de réussir à tenir pendant des dizaines et des dizaines de tomes sans jamais vraiment s’essouffler. Des mangas qui réussissent à garder une constante efficacité, et même à se réinventer plus d’une fois. Vous le savez maintenant, chaque mois on vous fait un retour sur deux volumes de Kingdom et cela nous fait bizarre de nous dire que l’on a presque rattrapé la parution japonaise. C’est donc aujourd’hui que l’on va aborder le tome 57 et 58 de cette formidable série ayant fait son apparition dans le catalogue de Meian. Alors que l’on a vécu tellement de péripéties en compagnie de Shin et de ses frères d’armes, voilà que l’on se rapproche de cette conclusion que l’on attendait et que l’on redoutait aussi concernant le conflit entre Zhao et Qin. Cette guerre, dans laquelle on a été plongée pendant de nombreux chapitres, a fait ressortir ce qui faisait toute la force du titre. Il ne fallait donc surtout pas que la dernière partie puisse nous décevoir surtout au vu de ce qu’elle promettait. Après lecture de ces deux ouvrages, on peut dire que l’on a beaucoup de choses à analyser. L’heure est donc venue de replonger une fois de plus au cœur du champ de bataille.
L’heure du verdict approche
Kingdom, imaginé par Hara Yasuhisa, nous avait laissés alors que l’impensable s’était produit. En effet, Shin et l’ensemble de l’aile droite étaient venu à bout des derniers grands généraux se trouvant entre eux et l’armée centrale. Une aubaine permettant à l’ensemble des soldats encore en état de combattre d’apporter leur soutien au reste des troupes. Il faut dire que Ousen et Riboku semblaient lutter à armes égales au cœur de ce champ de bataille où leur ingéniosité rivalisait. La bataille des plaines de Shukai s’apprête alors à connaître son dénouement tandis que le temps est compté pour chacun des deux camps. Si le général en chef de Zhao savait qu’il était en mauvaise posture, son regard ne laissait tout de même paraître aucune inquiétude. Après tout, son ennemi était dans la même situation que lui et tout allait maintenant se jouer sur celui qui aurait la tête du chef en premier. Que cela soit Shin ou bien Futei, ces deux soldats se lancent à présent dans une course effrénée pour faire une percée dans le quartier général adverse. Peu importe le résultat, celui-ci sera connu de tous d’ici peu. Malgré leur possible victoire, Qin devra toujours faire face à leur plus gros problème qui est le manque de vivres. De leur côté, les défenseurs ne peuvent se permettre de voir la cité assiégée par Kanki finir entre les mains des envahisseurs. Chacun redouble alors de courage, de persévérance et de détermination pour en finir une bonne fois pour toutes.
Cependant, le regard de Riboku ne se porte pas uniquement sur la mêlée se trouvant devant lui. Ses yeux regardent au-delà en direction de ce jeune homme qui se dirige actuellement pour réclamer sa tête. Shin et ces deux rivaux sont ceux qui ont perturbé le plan bien huilé qu’il avait confectionné. Selon lui, cette nouvelle génération d’officiers est maintenant le plus grand danger qui menace l’unité du pays et il faut absolument que celle-ci soit éradiquée pour conclure définitivement les rêves d’unification d’Ei Sei. Le stratège de génie a beau se douter que le chef de l’unité Hi Shin est dans un piteux état, il sait pertinemment que ce n’est pas ça qui va le faire reculer. Le seul obstacle pouvant se dresser entre lui et sa proie pourrait bien changer à tout jamais le cours de cette bataille. Alors que les hommes luttent bec et ongles pour gagner ne serait-ce que quelques parcelles de terrain, un être supérieur s’apprête à faire son apparition. Le sol s’apprête à trembler et ces plaines à s’embraser à l’approche de ce duel qui a déjà débuté depuis maintenant plusieurs années. L’heure est donc venue pour Shin de régler ses comptes avec ceux qui ont marqué à jamais son existence, mais aussi ébranler la puissance de son foyer. Le soldat face au monstre, le dieu contre le feu… Ce lieu si bruyant jusqu’ici s’apprête à rentrer dans un silence glacial.
Après tant d’épreuves surmontées, de morts et de doutes, Kingdom se rapproche de la conclusion de son plus gros arc actuellement. La guerre entre Qin et Zhao a atteint de telles proportions que l’on n’a eu de cesse de rester sans voix en se demandant qui pourrait bien l’emporter. Un conflit où chaque adversaire a rendu coup pour coup dans l’espoir de chasser les envahisseurs ou bien de conquérir ces terres. Le rideau se lève alors sur ces deux volumes qui va permettre à certaines personnes de graver à jamais leur nom dans le marbre. Un dernier acte qui va d’abord grandement reposer sur la ruse et l’intelligence de deux hommes.
Stratégie contre stratégie
On en avait parlé dans la précédente chronique, mais nos deux généraux avaient eu l’occasion de se faire face directement. Cela avait permis d’exacerber leur vision diamétralement différente de ce qu’était la loyauté, mais aussi l’ambition. Deux êtres ayant quasiment la même intelligence, mais totalement à l’opposé l’un de l’autre dans la voie qu’ils ont choisi. Cette fois, on peut vraiment assister à leur confrontation non pas avec des mots, mais avec les hommes sous leur commandement. C’est ainsi qu’il va se passer une chose remarquable qui va rapidement attirer notre regard. Riboku n’a eu de cesse, depuis qu’on l’a vue la première fois, de tirer la couverture à lui tout seul. Ayant réalisé des exploits considérables en abattant de grands officiers et en remportant de multiples victoires, cet homme semblait presque intouchable. Un génie comme il n’en existe peu et qui faisait frissonner rien qu’à l’idée de l’avoir comme adversaire. Pourtant, cet acte va faire voler en éclats cette situation grâce à son opposant. Si on peut tout de même entrevoir toute l’ingéniosité du général de Zhao, celui qui a su retenir toute notre attention ici n’est autre qu’Ousen. Celui qui a toujours su montrer un visage impassible jusque-là va encore une fois prouver qu’il n’est pas du genre à se faire avoir par les plans de son adversaire. Pour la première fois depuis le début de cette épopée, on sent que Riboku a trouvé un égal sur le plan intellectuel. C’est là qu’est toute la force de ce passage qui va totalement chambouler l’équilibre que l’on connaissait.
En parvenant à être à armes égales avec ce redoutable opposant, Ousen va briser totalement tout ce que l’on pensait de Riboku. En réalité, on était presque persuadé que s’il y avait un homme qui pouvait contrer les plans de Qin ce serait lui. A présent l’incertitude nous guette et le simple fait de voir cet individu chanceler dans sa façon de combattre sonne comme le début du glas pour son royaume. Lui qui ne pense qu’au bien-être de ses concitoyens et n’a jamais eu le soutien de son souverain se voit acculé. Alors qu’il avait tout prévu pour que le temps joue contre Qin, il se retrouve finalement dans la même posture que ce dernier. En faisant cela, l’auteur nous prouve que rien n’est jamais joué lors d’une bataille et que chaque petite victoire peut porter l’ensemble d’une armée vers leur objectif final. La confrontation entre Riboku et Ousen est avant tout celle de tous les soldats sous leur commandement dont certains ont réussi à aller contre les prédictions du génie pour provoquer ce qui semblait improbable. Peu à peu, on entrevoit alors la conclusion de cette lutte et si l’on est heureux de ce que cela semble indiquer, force est de reconnaître que cela nous fait bizarre de voir cet incroyable stratège tombant de son piédestal. Une manière très habile de montrer que même le plus intelligent des guerriers reste avant tout un homme qui ne peut tout prédire à l’avance. On tombe toujours sur plus fort que soi et c’est encore plus remarquable de voir que même Riboku va finalement porter son attention sur un tout autre combat que le sien. Comme si tous ses espoirs reposaient à présent sur un autre que lui.
Kingdom nous délivre donc une fois de plus une confrontation psychologique et intellectuelle d’envergure. Un moment-clé pour l’ensemble de l’œuvre, car celui-ci va briser l’aura d’invulnérabilité qui semblait entourer Riboku. Lui qui avait causé tant de dommages depuis tout ce temps trouve quelqu’un parvenant à lire dans son jeu. Cependant, ces deux volumes vont aussi être marqués par un autre duel qui va être l’exact opposé de celui-ci. La brutalité et la détermination se font littéralement face pour ce qui est sûrement l’un des affrontements les plus attendus de tout le manga. Le divin face à l’homme pour un face-à-face d’anthologie.
La force pure contre le brasier
Depuis son entrée fracassante il y a de cela plusieurs tomes, Houken n’a jamais vraiment quitté notre esprit. En fait, il est intéressant de voir que tout comme Riboku, son apparition fut marquante étant donné qu’il n’a eu de cesse de paraître invincible. Si le premier brille par son cerveau, celui-ci montre une puissance brute pouvant tout déjouer. Deux faces d’une même pièce qui sont les meilleurs atouts de Zhao pour espérer l’emporter. Depuis son duel contre Ouki, le lecteur que l’on est a toujours rêvé de voir la fameuse confrontation entre cet individu se rapprochant d’un dieu à Shin. C’est maintenant chose faite comme le montre la couverture du tome 58. Si chaque échange de coups entre les deux hommes nous fait vibrer, il est avant tout crucial de s’attarder sur la symbolique que représentent ces derniers. En effet, cet acte va nous permettre d’en apprendre plus sur ce monstre errant de champ de bataille en champ de bataille et de voir quel est son véritable objectif. A ses yeux, tout repose sur la maîtrise de son art et tout le reste n’a que peu d’importance. Un ermite ayant dédié son existence au combat et qui attendait le bon moment pour apparaître afin d’empêcher ce monde de sombrer dans le chaos. De son côté, Shin est bien loin de toutes ces considérations. Son seul et unique but a toujours été de concrétiser son rêve et ainsi contribuer à celui d’Ei Sei par la même occasion. Son expérience, il l’a forgée au fil de ses affrontements contre des ennemis toujours plus puissants. Chaque guerre était l’occasion pour lui de se renforcer et surtout d’apprendre autant auprès de ses camarades que de ses opposants.
Là où Houken a construit sa force prodigieuse seul à l’écart du monde, Shin quant à lui est devenu ce qu’il est grâce à tous ceux qui lui ont légué leur héritage. Peu importe qu’ils aient été amis ou ennemis, le jeune homme a su porter ce fardeau afin de faire perdurer leur mémoire à travers son propre combat. Encore une fois, le mangaka réussit à merveille à prouver, à travers son personnage central, que la notion de bien ou de mal ici n’existe pas. Le chef de l’unité Hi Shin a beau avoir tué bon nombre d’opposants, la majorité se battait pour leurs propres convictions, peines et quêtes personnelles. En survivant à chaque confrontation, il était donc de son devoir de porter la flamme laissée par ceux qui périssaient afin qu’elle puisse servir à l’unification du pays. Le choc entre ce géant et cet officier est donc autant une opposition épique et spectaculaire que la représentation de cette force étouffée par la solitude face à la détermination acquise au fil des épreuves. Peu importe les muscles, la terreur insufflée ou l’aura que l’on dégage face à un brasier qui n’a eu de cesse de se nourrir de toutes ces braises acquises à chaque victoire. C’est en cela que le face-à-face entre Houken et Shin est aussi impressionnant. Une façon intelligente et même touchante de nous remémorer tout ce que l’on a traversé au contact de cet esclave devenu maintenant un commandant digne de ce rang. A l’image de toutes ces âmes qui observent ces deux êtres se battre, on passe l’ensemble du duel silencieux à se demander qui finira par l’emporter. Un suspens insoutenable sublimé par des années d’écriture.
Kingdom va aborder ici un passage qui était particulièrement compliqué à gérer. En plus de devoir nous proposer un conflit de grande ampleur s’apprêtant à se conclure, il fallait aussi que la confrontation entre Houken et Shin soit à la hauteur de nos attentes. L’un comme l’autre, l’auteur réussit brillamment à s’en sortir à travers certains rebondissements inattendus, mais qui collent avec la dimension presque mystique qui entoure ces individus. Un exploit qui ne pourra plus être réitéré et qui va surtout symboliser à quel point la force ne se constitue pas uniquement par une maîtrise exacerbée du combat. La véritable puissance réside dans tous les affrontements menés auparavant où le vaincu lègue son héritage au gagnant.
Kingdom assène le coup fatal
En lisant ces deux volumes de Kingdom, on a eu un sentiment très étrange que l’on n’a rarement eu en lisant un manga. Il s’agit de cette sensation d’avoir vécu un immense bouleversement qui va totalement redéfinir la série. En effet, la lecture de ces deux actes nous prépare à ce que l’on aurait peut-être jamais imaginé arriver un jour. On savait pertinemment que cela arriverait, mais notre inconscient semblait vouloir retarder cela. C’est finalement en posant les yeux sur ce qui s’annonce comme la dernière partie de cette guerre que l’on ouvre enfin les yeux sur ce nombre que l’on peut voir sur la couverture. Ce simple chiffre nous indiquant le tome dans lequel on est prend ici tout son sens en nous faisant revenir au tout début de cette aventure. Un rappel formidable et assez émouvant de tout ce que l’on a traversé et surtout de cette nouvelle ère que s’apprête à connaître Kingdom. Avant même que les hostilités aient commencé entre les deux pays, on était pas dupe sur le fait que l’un des deux camps s’apprêtait à connaître ses derniers instants. Cependant, l’arc a tellement été bien construit et a su durer dans le temps que l’on avait presque cette impression qu’on ne voulait pas que ça se termine. On a tellement passé d’heures en compagnie de tous ces gens, pleurer à leur côté, être ébloui par eux que chaque chapitre devenait une véritable ode à tous ce que la série représente. Deux lectures qui vont autant nous mettre des étoiles plein les yeux que nous offrir un sacré pincement au cœur.
Dire que l’on est maintenant sur le point de rattraper la parution japonaise de Kingdom nous fait très drôle. On a encore le sentiment que c’était hier que l’on suivait les premiers pas de Shin vers son rêve et le voilà maintenant à jouer un rôle crucial dans chaque bataille. Les deux tomes sont donc autant là pour préparer la fin de cet arc que pour provoquer un immense tournant à l’histoire. De nouvelles personnes s’élèvent tandis que d’autres chutent inlassablement, mais leurs noms restent à jamais gravés dans l’esprit du lecteur. Il est fou de voir à quel point Kingdom est parvenu à donner des arcs portant sur le même sujet à savoir l’art de la guerre, mais sans jamais tomber dans la redondance. Il y a constamment quelque chose d’inédit qui se dégage de tous ces conflits qui parlent autant de succession entre les générations, de passage de flambeau, d’entraide, de fragilité et surtout d’humanité. En fait, ces deux volumes nous montrent que même ceux que l’on pensait intouchable ne sont en réalité que des individus ordinaires qui finissent toujours par être rattrapé par la grande Faucheuse. A présent, on a une multitude de questions qui nous trottent dans la tête. Est-ce que Zhao va avoir un dernier as dans sa manche pour tout renverser ? Ousen a-t-il prévu ce qu’il comptait faire ensuite ? Que va devenir Shin après ce conflit ? Quand est-il des autres pays ? On a vraiment hâte de découvrir la suite de cette incroyable et monumentale fresque.
N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant ces deux volumes de Kingdom. Avez-vous apprécié ce duel que l’on attendait tous ? Trouvez-vous que la conclusion qui semble se dessiner soit celle que vous aviez imaginé ? Pensez-vous que cette guerre aura changé à tout jamais l’équilibre des forces concernant l’ensemble du pays ? Croyez-vous que Shin et ses deux rivaux vont pouvoir tirer une récompense à la juste valeur de leurs prouesses sur ce champ de bataille ? Est-ce que Riboku peut encore avoir un atout dans sa manche ? Qu’attendez-vous pour la suite de la licence ? On reste à votre disposition pour pouvoir échanger, discuter et débattre autour de ce sujet 🙂