World War Demons

World War Demons tome 1 & 2 : le monde derrière le miroir

L’œuvre que l’on va traiter aujourd’hui possède quelque chose d’assez déroutant. Il s’agit de World War Demons, édité chez Akata, qui nous arrive à travers ses deux premiers tomes. Ce shônen propose de nous faire voyager dans un monde surprenant et traumatisant. Mélangeant monde réel et dimension fantastique, le titre dégage une aura singulière qui captive le lecteur. Malgré quelques défauts, cette série a de quoi attirer l’attention de par l’histoire de ses personnages et son univers assez singulier. En dehors de l’aspect action du titre, il s’agit avant tout d’une immersion dans l’esprit dérangé de ces protagonistes. Préparez-vous à faire travailler votre imagination, car elle sera votre seule arme de l’autre côté du miroir !

Un sacrifice pour sauver l’humanité

World War Demons - miroir

Bienvenu au pays des merveilles !

World War Demons, imaginé par Urû Okabe, nous plonge dans le quotidien de la jeune Azuma. Suite à la disparition de ses parents, elle a dû aller vivre chez son oncle. Malheureusement, c’est un enfer sans nom qui l’attend dans cette demeure. Se retrouvant dans une chambre miteuse, elle doit faire face aux coups de son cousin ainsi qu’à la violence des autres membres de la famille. De plus, le soir venu Azuma reçoit la visite de son oncle qui n’hésite pas à prendre du plaisir avec sa nièce. Au travers de tous ces traumatismes, cette jeune fille va développer une étrange maladie psychologique. Il s’agit du syndrome d’Alice de l’autre côté du miroir. Elle perçoit alors d’étranges formes et créatures à travers tous les types de vitres qui jonchent sa vie. À cela s’ajoute de nombreuses catastrophes qui ne cessent d’apparaître sur Terre. Complètement brisée et terrifiée, Azuma va voir sa vie bouleversée.

Alors que son oncle s’apprête à lui faire subir de nouveaux sévices, elle va se retrouver propulser dans un tout nouveau monde. Plongée dans un univers parallèle, elle va faire la connaissance de six autres individus. Rien ne semble les lier si ce n’est leur existence pleine de traumatismes et le trouble qui les ronge. Alors qu’ils sont totalement déboussolés par leur situation, une étrange créature va faire son apparition. Se faisant appelé le démon de Cheshire, il va être leur guide dans ce monde qui s’avère très dangereux. Celui-ci explique alors la raison pour laquelle il les a fait venir en ce lieu. Il souhaite que le groupe affronte six “Démons de l’univers” qui sont à l’origine de bon nombre de maux. Malheureusement, éliminer un de ces monstres nécessitera un sacrifice en échange. Nos protagonistes sauront-ils payer le prix nécessaire pour sauver l’humanité ?

La première chose qui choque lorsque l’on commence la lecture de World War Demons est la violence du récit au niveau psychologique. Une bonne partie de l’histoire tourne autour des traumas qui assaillent les personnages.

Une œuvre pleine de traumas

World War Demons est, en plus d’un shônen d’action, une aventure dans l’esprit de nos héros. Si Azuma est bien le personnage principal du récit, les autres protagonistes sont loin d’être en reste. L’œuvre se permet ainsi, par moment, de nous faire découvrir le passé et les origines des traumatismes de certains membres du groupe. On se rend compte que chacun possède ses propres démons qui sont plus ou moins dû au syndrome d’Alice. Drogue, sexe, dépression et frayeur dictent la vie de nos “héros” qui tentent de vivre malgré tout. Le lecteur se retrouve ainsi dérouté, car le monde de World War Demons ne semble proposer aucun espoir ou presque. Je reviendrais sur ce point un peu plus tard. Cependant, le personnage d’Azuma se retrouve à part dans l’équipe. Elle est la seule qui ne voit pas un réel problème dans sa maladie.

Subissant tellement de sévices, elle ne porte que peu d’intérêt aux formes qu’elle peut croiser dans le miroir. Une fois qu’elle va être transportée dans l’autre monde, cela va lui paraître comme une échappatoire. On peut ainsi observer en tant que lecteur deux opposés. Azuma finit par voir sa maladie comme quelque chose de bénéfique. De l’autre côté, la plupart des membres restant ne voient en leur syndrome qu’un fardeau. On peut par exemple citer le cas d’Adachi qui n’arrive plus à se défaire des illusions que sa maladie lui fait voir. Il devient prisonnier de ce qu’il contemple à travers le miroir et affiche une dépendance à ses visions. Le récit prend le temps de nous faire nous attacher aux personnages pour qui ont fini par ressentir de la pitié et une certaine tristesse. Ce ne sont que des êtres ordinaires ayant eu la malchance de développer une pathologie rare.

L’autre point qui démarque World War Demons est l’opposition entre le réel et l’illusion. Jouant habilement sur les deux tableaux, on se rend compte à quel point ces deux mondes offre une dualité intéressante.

La réalité et l’illusion s’affrontent

World War Demons - démons

Battre ces démons ne sera pas chose facile

Comme je l’ai évoqué plus tôt, l’univers du manga est très noir et ne laisse que peu de place à l’espoir. Le monde réel ne nous est conté qu’à travers le quotidien traumatisant des personnages et on ne voit aucune lumière briller sur cette Terre en proie aux catastrophes. De l’autre côté, l’univers derrière le miroir est un lieu tout autant dangereux où notre groupe doit faire face à de puissants démons. Pourtant, ce monde représente un moment de liberté pour le lecteur et Azuma. Il nous permet d’oublier l’horreur du monde réel. Le côté fantastique de ce lieu ajoute aussi une certaine sécurité durant les affrontements. Ils ne courent aucun véritables dangers, car ils ne sont ici que sous la forme d’esprit. Ainsi, les combats ont beau être difficile et périlleux, le lecteur ressent un certain apaisement dans ces instants.

L’auteur parvient à jouer parfaitement le contraste entre ces deux mondes. Le vrai danger ne vient pas forcément des démons, mais des humains qui peuplent la réalité. Lorsque l’on apprend le prix à payer pour la personne qui assène le coup de grâce à l’ennemi, on ressent une hésitation tout comme les personnages. Cependant, cela est désamorcé par Azuma qui voit dans ce sacrifice un espoir de retrouver une existence paisible. Pour la première fois de toute la lecture, cette jeune fille affiche un sourire radieux. On se retrouve alors bouleversé par ce revirement de situation et, malgré le prix de chaque victoire, on comprend le désir d’Azuma. Ce monde d’illusion lui permet d’utiliser tout le désespoir qu’elle a accumulé et de s’en servir pour changer son avenir. En tant que lecteur, on éprouve alors un certain plaisir malsain à voir jusqu’où notre anti-héroïne va aller.

En conclusion, cette série affiche une maturité surprenante et une profonde noirceur. Peu importe le point de vue qu’on aborde, il est obligé que des personnes souffrent. Même l’espoir d’Azuma devra se forger dans le sang et la mort.

World War Demons marque les esprits

Au final, World War Demons est un titre dérangeant, mais dont je n’ai pas pu détacher le regard. Le titre ne marque pas les esprits à travers ses dessins ou ses scènes de combats mais par l’aspect psychologique de son histoire. On est choqué et dégoûté par l’horreur que vit Azuma au quotidien. Outre les blessures physiques, le lecteur observe la destruction de son esprit. Cependant, le monde de l’autre côté du miroir lui offre la possibilité de prendre sa revanche et d’utiliser pleinement la force découlant de son désespoir. On reste captivé devant cette histoire qui fait se rencontrer des gens totalement différents possédant pour seul point commun d’avoir vu leur vie changer par leur syndrome. L’histoire prend le temps de nous conter la dure réalité pour ces pauvres âmes qui essayent de vivre malgré leur maladie.

Je ne le nierais pas, World War Demons possède certaines longueurs. Malgré tout, cela n’a pas impacté plus que cela ma lecture. Le malaise que nous fait vivre le manga sert à immerger davantage le lecteur. On se retrouve à avoir peur de tourner la page et de découvrir qu’un autre malheur s’est abattu sur les membres du groupe. Cependant, on ne peut s’empêcher de continuer ce voyage déroutant car l’histoire nous prend aux tripes. L’affrontement contre les démons est le seul moment pour nos protagonistes et le lecteur d’oublier l’horrible vérité dans le monde réel. Une œuvre qui s’avère très classique dans sa forme, mais doté d’un fond de qualité. C’est une aventure avant tout psychologique qui attend tous ceux qui oseront tenter l’expérience. Je recommande donc World War Demons qui possède des qualités indéniables et qui nous offre un périple troublant et pourtant captivant. Malgré tout, le manga n’est pas à mettre entre toutes les mains du fait qu’il traite de sujets difficiles et violents. Jusqu’où le désespoir d’Azuma la poussera-t-elle ? Le bonheur peut-il voir le jour dans la tristesse des autres ?

N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre avis concernant World War Demons. Qu’avez vous ressenti en lisant ces deux tomes ? 🙂

© OKABE Urû / Shôgakukan

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