Kingdom-Vol.-51-1

Kingdom tome 51 et 52 : Le combat du peuple des montagnes

Vous le savez très bien à présent, on vous présente chaque mois une rubrique spécifique concernant une des grandes licences du monde du manga. On veut bien sûr parler de Kingdom, édité chez Meian, que l’on suit depuis le premier volume. A présent, nous nous rapprochons de la parution japonaise tandis que l’on observe fébrilement le déroulement d’une guerre incroyable comme jamais nous n’en avons vu dans cette licence. Ayant déjà commencé depuis maintenant plusieurs tomes, on était intrigué de voir ce qui allait bien se passer à travers ces deux nouvelles escapades. On peut clairement dire que le résultat est toujours incroyable, mais d’une façon innovante et surtout spectaculaire. Alors que l’on pensait avoir déjà tout vu sur ces champs de batailles, le mangaka montre qu’il a encore de la suite dans les idées en nous délivrant deux facettes bien singulières de ce conflit. A travers cette lutte, des hommes s’élèvent tandis que d’autres décident enfin de prendre la place qui leur est dû sur cette gigantesque scène. On espère donc que vous êtes prêts à plonger au cœur de la mêlée en compagnie de tous ces guerriers qui se battent pour un rêve semblant impossible.

Assaut sur tous les fronts

Kingdom - poids

Le poids de chaque coup.

Kingdom, imaginé par Yasuhisa Hara, s’était arrêté alors que la guerre entre Qin et Zhao redoublait d’intensité. Cette lutte pour la sauvegarde des deux royaumes s’était étendue à trois champs de batailles bien distincts. Tout cela faisait partie du plan d’Ousen qui avait pris les commandes de cette invasion en s’adaptant aux mouvements de l’ennemi. Ainsi, Kanki se retrouva à assiéger la deuxième plus grande cité de l’adversaire pendant que Yôtanwa et ses hommes occupaient un contingent pouvant détruire cette stratégie. De son côté, le général en chef de cette expédition devait retenir les troupes de Riboku. Cela était loin d’être une mince affaire au vu du génie de cet homme qui avait tant fait trembler la Chine. Heureusement, Ousen était bien loin d’être dénué de talent et l’opposition entre les deux commandants semblait équilibré. Il faut aussi dire que les rangs de Qin pouvaient compter sur la présence de Shin, Mouten et Ouhon qui, avec leur unité respective, parvenaient à contenir les assauts adverses. Malheureusement, de nombreux déboires survinrent au fil des jours et les jeunes pousses du royaume devaient maintenant prendre les choses en main. Malgré leur inexpérience en tant que général, il leur fallait grandir sur ce champ de bataille dans l’espoir de survivre et de décrocher la victoire. C’est d’ailleurs le fils de Moubu qui fut le premier à se démarquer en reprenant le flambeau d’un des confidents d’Ousen mort au combat afin de contrer la stratégie de l’ennemi.

Si le statu quo semblait ne pas vouloir se briser, il en était autrement sur l’autre front où régnait un terrible chaos. C’est à Ryôyô que le peuple des montagnes et les troupes d’Heki se frottèrent au talentueux Shunsuiju et à son alliance avec Rozo, le roi des Quanrong. Sauvages contre sauvages, cette bataille se transforma très vite en un immense charnier où tombaient les corps de tous ces valeureux guerriers. Malgré leur infériorité numérique, Yôtanwa et ses hommes ne laissèrent aucune faille à l’adversaire. C’est finalement du côté de l’officier de Qin que l’erreur fut commise quand les vivres de ce dernier furent brûlés. Accablé par cette effroyable déconvenue, Heki ne savait plus du tout quoi faire pour pouvoir soutenir ses guerriers et retrouver son honneur. C’est finalement la souveraine de ce regroupement de tribus qui vint à lui afin de confier à son détachement une mission capitale. Le temps presse et il faut maintenant tout donner afin de débloquer une situation aussi dangereuse qui pourrait finir par causer l’échec de cette campagne. C’est donc un pari audacieux qui va avoir lieu afin de pouvoir échapper au funeste destin qui se tient au-dessus d’eux. Attention cependant à Riboku dont le regard acéré se porte bien plus loin que sur la mêlée qui se dresse devant lui. Cette course contre la montre pourrait bien se retourner contre ceux qui avaient prévu à la base d’en profiter. Les terres de Zhao s’apprêtent une fois de plus à se gorger du sang de ceux qui n’auront plus la force de se tenir debout.

On le sait très bien, Kingdom est en train de nous délivrer son plus gros arc narratif depuis celui de la coalition. Cela fait maintenant plusieurs tomes que l’on peut admirer à quel point l’auteur maîtrise son sujet et agit tel un véritable chef d’orchestre guidant chaque soldat là où il pourra le mieux briller. En tant que lecteur, on peut donc se demander quel va être le point crucial de ces deux nouvelles lectures. Là encore, on va pouvoir découvrir une très grande leçon d’écriture, mais aussi de stratégies et de mise en scène. L’art de la guerre peut prendre de multiples formes et les deux camps qui s’affrontent en sont bien conscients.

La passation de pouvoir

En plus du rêve de conquête et de grandeur qui animent les protagonistes de Kingdom, il y a un autre élément qui n’a eu de cesse d’être nourri au fil des tomes. On en a d’ailleurs souvent parlé, mais la confrontation entre l’ancienne et la nouvelle génération d’officiers va ici prendre une toute autre ampleur. Shin, Ouhon et Mouten sont ceux qui représentent au mieux cette vague inarrêtable qui semble s’abattre sur ce vieux monde. C’est à travers chacun de leur combat que l’on a pu observer cette confrontation atteindre les sommets. Pourtant, ces deux lectures vont permettre de souligner quelque chose d’important, et même de capital pour le développement du chef de l’unité Hi Shin. Cela ne dure pas longtemps, mais pendant quelques minutes le jeune homme que l’on connaissait a totalement changé. S’il a bien sûr mûri depuis le début de son épopée, c’est bel et bien la première fois que l’on n’a pas devant nous Shin le meneur implacable, mais Shin le grand général. Ce bref instant nous donne l’impression que plus rien ne peut arrêter ce soldat qui a gravi les échelons une à une. Même s’il est encore loin d’atteindre son objectif, il n’a jamais été aussi proche de faire trembler un champ de bataille par sa simple présence. De plus, il n’est pas question ici de briller afin d’éclipser les vieux briscards qui se trouvent devant lui. Bien au contraire, on ressent presque un hommage à tous ces hommes qui ont permis à notre héros de guerre d’être là où il est aujourd’hui. On a presque l’impression qu’Ouki s’est réincarné en lui afin de faire de nouveaux ravages dans les rangs adverses.

On est donc autant dans l’opposition que dans l’acceptation et le remerciement de toutes ces leçons que Shin a pu apprendre au fil des combats. Que ce soit chez les siens ou parmi les adversaires, tous ces gradés expérimentés lui ont permis de trouver son chemin sur une route sinueuse et semé d’embûches. Il suffit alors d’un coup de sa part pour que le temps semble s’arrêter et que l’on puisse entrevoir le futur de ce jeune homme. Une légende revit à travers lui et va lui permettre de forger sa propre destinée. En fait, ce simple passage semble être présent pour créer une césure avec tout le reste. Le mythe de Shin était ce que l’on souhaitait voir se réaliser et à présent on frissonne d’excitation en assistant à son élévation. Même s’il affiche toujours une propension à s’emporter, il n’est clairement plus ce garçon inexpérimenté qui ne savait rien du monde qui l’entourait. C’est donc à travers ce tome 51 que Shin va balayer tous les doutes qu’il pouvait y avoir autour de lui et ainsi déblayer la voie vers son rêve. Un jeune porteur d’un puissant et pesant héritage qu’il respecte et qu’il va s’accaparer afin de devancer tous ceux qui ont marché sur ces terres. Une preuve parfaite afin de démontrer que l’auteur sait pertinemment où il veut conduire son personnage principal et qui sublime chaque étape que l’on franchit à ses côtés. La violence et le chaos ont beau s’emparer de ces plaines, on reste figé sur place en admirant ce cavalier que rien ne peut arrêter.

Quand on évoque Kingdom, il y a de nombreux personnages qui nous viennent en tête. Pourtant, il y a toujours eu un groupe qui a toujours su se faire discret malgré le fait qu’il ait grandement contribué à des victoires importantes. On parle bien sûr du peuple des montagnes qui va enfin avoir une occasion de briller au sein de cette campagne. Menée par leur reine Yôtanwa, cette armée que rien ne semblait pouvoir arrêter va se heurter à un adversaire terrifiant. Un duel qui va autant souligner certaines failles chez ces guerriers nés que sublimer la force de chacun de ces hommes et femmes qui valent clairement plusieurs soldats.

Yotanwa mène la danse

Kingdom - Heki

L’heure de se racheter.

Si Shin a largement eu l’occasion de faire son effet sur le lecteur que l’on est, la majorité de l’action va se passer bien plus loin. En effet, nos regards vont rapidement se porter sur l’autre conflit qui a lieu afin de permettre à Kanki d’assiéger la cité. On retrouve donc l’ensemble des peuples des montagnes pour un affrontement absolument grandiose. Comme on l’a dit un peu plus haut, ces alliés de Qin ont déjà su renverser la vapeur par le passé. Malgré tout, on a tout de même eu que peu de moments pour contempler la véritable puissante de cette armée considérée par beaucoup comme un ramassis de barbares. C’est maintenant chose faite avec cette confrontation qui va avoir un déroulement bien différent des autres combats. En effet, la culture propre à ses hommes et femmes ainsi que leur manière de lutter est bien plus axé sur l’étalage de force. C’est donc un déferlement de puissance et de techniques impressionnantes qui vont avoir lieu sur ce terrain qui va pourtant prendre une tournure très stratégique. C’est là que chacun des grands officiers sous les ordres de Yôtanwa va pouvoir s’exprimer pleinement. On est alors contemplatif des prouesses de chacun alors que tout semble être contre eux. Même à dix contre cent, ils parviennent à démontrer que la supériorité numérique ne fait pas tout. Entre un Bajio qui taillade ses adversaires comme du beurre, un roi qui se moque des coups reçus et une tribu ressemblant plus à une immense famille, tout est amené afin que l’on pose un regard différent sur la manière qu’il y a de se battre.

Ce qui est fascinant, au cours de ces deux volumes, c’est à quel point on va être emporté par ce qui se passe devant nous. La tension va arriver à son paroxysme alors que la faim assaille nos amis. C’est dans cette situation risquée que l’on va pouvoir contempler les talents de commandante de Yôtanwa et surtout sa sagesse. Alors que l’on ne pensait pas être autant emporté par cette lutte entre les deux groupes, notre cœur va finalement se serrer en voyant chaque retournement de situation. Ce n’est alors qu’à la fin de ce qui nous semble avoir été une éternité de combats que l’on va être estomaqué par toute l’ingéniosité de ce passage. Un acte qui nous démontre encore une fois que rien n’est acquis et que même une victoire certaine peut se transformer en une redoutable défaite si chaque pièce est sagement jouée sur l’échiquier. Sur ce point-là, Yôtanwa n’a rien à envié à ses homologues de Qin et prouve qu’elle a aussi sa propre façon de concevoir l’art de la guerre. Le lecteur va aussi être ébahi par les prouesses d’Heki qui est sûrement l’un des personnages qui va le plus ressortir grandi de ces chapitres. Celui qui paraissait banal et effacé est parvenu à montrer sa valeur, son courage, mais aussi le fait que n’importe qui peut devenir un héros. Un homme banal et appliqué qui sait mieux que quiconque ce que c’est que de grandir dans l’ombre de géants. C’est donc une bataille grandiose qui s’organise devant nous et l’on reste bouche bée en voyant à quel point l’auteur parvient à représenter le chaos ambiant en ne laissant absolument aucun répit à ses soldats et au spectateur. Une épreuve nécessaire pour dévoiler tout le potentiel de ce peuple qui n’a rien à envié aux habitants des steppes.

Kingdom parvient à trouver une toute nouvelle approche pour raconter une bataille d’une intensité incroyable. Si l’on a déjà eu notre lot d’affrontements grandioses, on sent vraiment que tout pourrait basculer d’un moment à l’autre. Chaque page que l’on tourne nous prépare alors mentalement à subir plusieurs surprises de taille. Une fois de plus, cet arc nous montre toute l’étendue de sa puissance et l’ingéniosité de l’auteur pour renouveler constamment notre intérêt pour celui-ci. Un conflit qui ne se contente pas de mettre en valeur un ou deux individus, mais bel et bien des milliers d’hommes qui luttent bec et ongles pour survivre et réaliser un rêve qui leur permettrait de ne plus jamais se battre.

Kingdom tranche dans le vif du sujet

Kingdom nous dépeint une toute nouvelle facette de cette guerre. Le conflit entre Qin et Zhao redouble d’intensité et l’on est pleinement plongé dans cette querelle aux nombreuses victimes. Le fait d’avoir décidé de s’axer principalement sur le combat du peuple des montagnes est bien loin d’être anodin, car il permet de renforcer l’aura qui se dégage d’eux. Alors qu’on les avait vu principalement combattre il y a de cela plusieurs tomes, on est cette fois pleinement plongé dans leur vision de ce que c’est qu’une bataille. Yôtanwa nous est alors présentée comme une souveraine à la fois redoutable et rusée qui n’a pas peur de se salir les mains si cela permet de l’emporter. En mettant en avant des guerriers qui n’avaient pas eu l’occasion jusqu’ici de prouver leurs compétences, l’auteur démontre une fois de plus tout son talent dans l’écriture de ses personnages. On pourrait même dire aisément qu’il n’y a pas de figurants dans cette immense fresque qui nous a déjà tant fait vibrer. Chaque acteur et actrice a son rôle à jouer et parvient à capter notre attention. Comme on l’a souvent dit, Kingdom n’est pas une œuvre reposant uniquement sur un seul héros ou un petit groupe. C’est donc autant un plaisir de suivre l’évolution du jeune homme par qui tout a commencé que tous les individus qui gravitent autour de lui. Nous sommes les témoins privilégiés de la naissance de non pas une légende, mais un florilège de grands combattants qui écrivent leur histoire en lettres de sang.

Le plaisir est donc toujours intact et le récit continue de repousser ses limites afin que l’on n’ait jamais l’impression de voir deux fois le même affrontement. Cette guerre, à laquelle on assiste, est sûrement ce qui se fait de mieux en matière de batailles dantesques et qui ne s’arrêtent pas uniquement à un simple concours de force. Bien au contraire, on est totalement immergé dans le quotidien de tous ces individus qui ont leur propre façon de lutter. C’est donc un équilibre parfait qui se forge entre les duels grandioses, les stratégies pouvant tout faire basculer et surtout cette formidable démonstration d’acharnement qui fait que l’on a toujours envie d’être derrière ces officiers. Si l’on pourrait simplement décrire Kingdom comme une succession de batailles, cela serait passé à côté de tout ce qui fait la puissance du manga. Rien que dans ces deux tomes, on a le droit à un remarquable travail d’écriture afin d’enrichir une grande majorité des acteurs de ce conflit. C’est alors que l’on voit les coups portés par tous ces frères d’armes que l’on comprend alors à quel point cette œuvre est incroyable. Maintenant, on ne peut s’empêcher de penser à tout un tas de questions en observant ce champ de bataille. Est-ce que Shin et ses rivaux parviendront à embraser ces plaines par leur simple volonté et le courage qui les pousse à se surpasser ? Qui ressortira vainqueur entre l’énigmatique Ousen et Riboku le génie ? Est-ce que le temps jouera en défaveur de nos amis ? Pourra-t-on compter sur un nouveau retournement de situation ? On va très rapidement se pencher sur la suite !

N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant ces deux volumes de Kingdom. Appréciez-vous la manière dont le cours de la guerre est en train de basculer ? Pensez-vous que les soldats de Qin ont une chance face à leur adversaire ? Quel est, selon vous, le personnage qui ressort le plus fort de ces lectures ? Avez-vous trouvé intéressant de voir le peuple des montagnes au centre de ce passage ? Trouvez-vous que les stratégies abordées sont pertinentes et représentatives de la façon de combattre de ces deux camps ? Qu’attendez-vous pour la suite de cette licence ? On reste à votre disposition pour pouvoir échanger, discuter et débattre autour de ce sujet 🙂

© 2006 Hara Yasuhisa, Shueisha