BEM-Vol.-1-2

BEM tome 1 : le rêve de trois monstres

Ce n’est pas rare dans l’univers du manga qu’une œuvre ait le droit à une nouvelle version. Une forme de renaissance ou une autre approche permettant à une histoire de traverser les années. On est toujours intrigué et captivé de voir comment un artiste peut traiter d’un récit n’ayant pas vu le jour sous sa plume, mais qui peut réussir à y insuffler sa propre vision. C’est pour ça qu’aujourd’hui, on va aborder une sortie toute récente qui répond à ça et qui n’est autre que BEM, édité chez Panini. Si l’on n’a pas eu la chance de connaître l’œuvre originale dont s’inspire justement ce manga, on a tout de même pu constater à quel point cette licence est présente depuis longtemps dans la culture japonaise. D’ailleurs, le sujet d’aujourd’hui est aussi l’adaptation au format papier de l’anime qui fut diffusé en 2019. C’est donc avec curiosité que l’on s’est penché sur ce premier volume qui a laissé paraître pas mal d’éléments pertinents pour le futur. A travers son trio de personnages, cette aventure va nous amener à réfléchir sur ce qui fait de quelqu’un un être humain. Le temps est donc venu de nous rendre dans un lieu où les monstres existent.

Les trois protecteurs

BEM Vol. 1BEM, d’après l’œuvre originale d’ADK Emotions, est réalisé par Mosae Nohara et le chara-design est de Range Murata. Le manga nous plonge dans le quotidien de Sonia Summers. Cette policière a toujours connu l’Upper, le quartier supérieur de la ville de Libra-City. C’est ici que se réunissent l’élite ainsi que les privilégiés qui profitent de toutes les richesses. Personne sain d’esprit ne voudrait quitter ce lieu huppé surtout si c’est pour rejoindre la face sombre de cette cité. En effet, dans l’ombre de ces bâtiments luxueux se cache l’Outside, le quartier inférieur où se regroupent la pègre et autres criminels. La corruption règne en ce lieu et la peur habite tous ceux qui tentent de vivre normalement ici. Une réputation qui n’est plus à faire et qui repousse fortement tous ceux qui auraient la curiosité de s’y rendre. Contre toute attente, la jeune femme va demander sa mutation pour travailler dans cette partie malfamée. Si les questions fusent dans son entourage pour comprendre une telle décision, elle seule sait pertinemment ce qui la pousse à faire une telle folie. Désireuse de poursuivre un criminel en particulier, Sonia intègre donc les forces de l’ordre de cette section de la ville. Elle ignore encore totalement où elle a mis les pieds et ce n’est qu’une fois face à la réalité qu’elle ouvre les yeux sur cet enfer. Meurtre, extorsion, menaces et crime organisé ne sont qu’une petite parcelle de ce qui se dissimule au coeur de ces inquiétantes ruelles.

Des menaces bien plus obscures sont présentes et n’hésitent pas à faire un carnage dès qu’une âme innocente s’approche de leur tanière. Summers va très vite le comprendre peu de temps après son arrivée. Appelée sur une scène de crime, l’état de la victime suscite l’incompréhension étant donné qu’elle fut noyée dans un lieu dénué d’eau. En menant l’enquête, elle va alors faire la connaissance de trois individus pour le moins suspects. Cependant, ces êtres étranges vont dévoiler leur vrai visage non pas pour attaquer, mais pour défendre ceux qui sont dans le besoin. La jeune femme va devoir se faire une raison. Les monstres existent bel et bien sur ces terres. Ce que les gens pensent n’être que des fables idéales pour faire peur aux enfants sont en réalité bien réelles. Peu importe que la nuit tombe ou que le soleil soit à son paroxysme, l’Outside est un terrain de chasse pour eux. Que peut alors faire une humaine face à tant de violence et surtout des créatures aux capacités extraordinaires. L’effroi a beau s’emparer d’elle devant ce trio, il se pourrait que ce soit le meilleur atout pour contrer le raz-de-marée qui se rapproche. Mais une question reste en suspens. Pourquoi ces trois inconnus ont-ils décidé de venir en aide à l’Humanité plutôt que de la chasser ? Seuls les principaux concernés connaissent la réponse et celle-ci pourrait bien en étonner plus d’un. Trois entités gardiennes qui n’ont qu’un seul objectif et sont déterminées à obtenir ce qu’ils convoitent depuis tant d’années.

Ce qui va avant tout marquer notre lecture de BEM vient autant de l’environnement que l’on nous dépeint que du trio qui va rythmer l’intrigue de ce tome. A la fois porté sur le mystère et les secrets, ce terrain de jeu va aussi être propice à amener un sujet captivant autour de nos protagonistes. Alors que l’on constate la présence de monstres au sein des rangs humains, une question va venir façonner le cœur de ce manga. La frontière entre les deux mondes s’estompe petit à petit tandis que la seule protection qui existe pour les innocents face à cette nouvelle menace repose sur les épaules de trois êtres surnaturels.

La frontière entre démons et humains

Tout d’abord, il faut souligner l’ambiance qui se dégage de cette introduction de BEM. Il ne faut pas longtemps pour que l’on s’imprègne de cette atmosphère à la fois oppressante et envoûtante qui règne au sein de ce quartier. Dès les premières cases, on sent que l’aventure que l’on va vivre n’a rien de naturel et se teinte d’une bonne dose de mysticisme. C’est en partie grâce à ça que l’on s’immerge rapidement dans ce qui nous est proposé. D’ailleurs, il est important de noter que ce volume affiche un rythme plus que soutenu. On a le sentiment que tout va vite et cela accentue ce sentiment de précipitation qui est présent dans beaucoup de personnages de cette histoire. Une lecture fluide, intense et qui va mettre avant tout l’accent sur notre trio de protagonistes. C’est réellement à travers eux que le scénario va le plus se développer et qui vont attirer toute l’attention du lecteur. Si leur apparence peut sembler humaine au premier abord, on se rend vite compte de ce qui se cache derrière cette peau. On bascule ainsi dans une forme d’horreur, mais qui ne va durer qu’un temps à l’image de cette policière. En effet, leur apparence, pouvant être repoussante, nous conduit à avoir ce sentiment de frayeur qui nous pousserait à nous éloigner au plus vite. Malgré cela, l’auteur veut justement que l’on puisse entrevoir au-delà du physique pour discerner ce qui constitue la personnalité de ces créatures. L’habit ne fait pas le moine et c’est ce qui est représenté parfaitement tout au long de ces pages.

A force de côtoyer ces individus, on peut mieux cerner les raisons de leurs agissements et surtout le fait qu’ils ne sont en rien malfaisants. Au contraire, le lecteur va même avoir une profonde empathie au fur et à mesure que l’on voit à quel point leur quotidien peut être difficile. Leur condition de monstre les pousse à rentrer dans une case de cette société faisant d’eux des ennemis naturels alors que la vérité est tout autre. Quand on s’attarde plus en détails sur leurs agissements et surtout leurs échanges, on ouvre les yeux sur la souffrance qu’ils ressentent constamment. Effrayant sans le vouloir ces humains à qui ils voudraient ressembler, l’extraordinaire nous est présenté dans ce manga comme une malédiction. La puissance, la résistance, mais aussi les capacités hors du commun ne sont rien face au souhait de mener une vie banale. Il y a donc un très bon parallèle qui est fait entre les hommes que l’on peut voir se balader dans l’Outside et qui sont pour la plupart des criminels et ces gardiens silencieux qui ne désirent que connaître ce sentiment d’être vivant. Ce qui est captivant dans leur recherche de l’humanité, c’est qu’ils font justement preuve de plus de compassion et de grandeur d’âme que la plupart des gens à qui ils veulent ressembler. On est donc tenu en haleine concernant le destin de ces trois personnages qui éveillent en nous une certaine peine en les voyant se démener pour défendre les innocents et n’être accueilli que par des cris et de la haine.

BEM est une œuvre qui ne perd pas de temps pour installer son décor ainsi que nous plonger dans le quotidien de ces trois individus. Ce qui est captivant avec ce premier volume, c’est justement toute l’intrigue qui se tisse autour de nos protagonistes. On est à la fois intrigué par leurs origines, mais aussi par ce désir qui les anime de quitter leur statut. Le lecteur est interloqué par cette quête qui nous amène aussi à nous poser bien des questions sur le futur de cette ville et ses occupants. Un récit qui possède beaucoup de potentiel et qui peut nous amener des événements prometteurs pour le prochain acte.

BEM laisse présager de bonnes choses

En se lançant dans BEM, on ne savait pas vraiment où l’intrigue allait nous amener. Même s’il reste encore bien des zones d’ombre, le manga a su nous séduire par le message qui est transmis par les actes de nos trois nouveaux amis. Une œuvre qui, comme dit précédemment, se lit vite grâce à une narration à la fois fluide et rythmée et va mettre l’accent sur les protagonistes. C’est justement en focalisant notre regard sur ces derniers que l’on entrevoit tout le potentiel de la série. Il est vrai que l’on part sur une licence courte avec seulement trois volumes, mais il va justement être intéressant de voir jusqu’où va nous amener cette mission personnelle à ces êtres surnaturels. En plus de ça, le mangaka a fait un fabuleux travail pour que l’ambiance soit noire et colle très bien à l’apparition de ces monstres. La terreur accompagne chacun de leur pas, mais sans que cela soit voulu. On est donc face à un premier acte qui symbolise la lutte de ces acteurs contre le regard de la société, mais surtout face à leur propre statut. Le fantastique n’est plus source d’émerveillement, mais de frayeur et l’on nous expose les bienfaits d’une vie simple et rangée. A cela s’ajoutent aussi des chapitres qui vont grandement renforcer notre compréhension de ces individus et de la peine qui ronge leur cœur. On a beau nous faire croire qu’ils sont néfastes et dangereux, il suffit de certaines scènes ou d’une case pour que nos doutes sur leur humanité soient totalement balayés.

On a été conquis par ce premier volume pour ce qu’il promet, mais aussi ce qu’il nous fait ressentir en seulement quelques pages. BEM a beau ne pas s’étendre en dialogues complexes ou riches afin de nourrir l’écriture des personnages, il n’en a pas besoin. Le manga se veut avant tout comme une histoire qui mise sur la situation pour nous faire éprouver toutes les émotions désirées par l’artiste. Une expérience littéraire qui pourra plaire à tous ceux cherchant une série courte où le folklore se mélange à l’horreur et où les monstres ne sont pas forcément ceux que l’on pense. Il va alors falloir attendre les deux prochains volumes pour pleinement cerner vers où la saga veut nous mener. Quoi qu’il en soit, voilà des premiers pas très prometteurs et qui laissent entrevoir plusieurs possibilités captivantes pour la suite. Bien évidemment, on ne peut refermer la dernière page d’un tome sans évoquer les multiples questions qui nous trottent dans la tête. Est-ce que nos compagnons de route vont finir par atteindre leur but ? Quel est donc cet ennemi qui se cache dans la pénombre ? Les humains pourront-ils accepter parmi eux des êtres si différents ? Qu’en est-il de notre policière et de son objectif fans l’Outside ? Quels seront les prochains dangers qui feront leur apparition ? Il nous tarde de mettre les mains sur le futur de la saga afin d’avoir les réponses à tout ça.

N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant ce premier volume de BEM. Avez-vous trouvé le combat de nos trois protagonistes intéressant et propice à raconter des sujets pertinents ? Est-ce que vous avez été interpellé par le monde dans lequel on évolue ? Pensez-vous que la série parviendra à aller au bout de ses propos en trois volumes ? Trouvez-vous que le dessin parvient à retranscrire ce mélange entre humanité et horreur ? Le manga est-il parvenu à traiter habilement, selon vous, de cette quête pour devenir mortel ? Qu’attendez-vous pour la suite du récit ? On reste à votre disposition pour échanger, discuter et débattre autour de ce sujet.

© 2019 Nohara Mosae, Hakusensha

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