Le Mashima Universe
Comme c’est l’été et que l’on ne peut pas forcément s’adonner à de nouvelles découvertes en matière de lecture, on continue de réfléchir à des rendez-vous inédits à vous proposer. C’est au détour d’un échange que l’on a finalement eu l’idée de l’article d’aujourd’hui et qui pourrait tout à fait se répéter dans le futur si cela vous intéresse. En fait, on a souvent parlé des mangas, des premiers tomes, de personnages et bien d’autres sujets tournant autour de ces licences. Cependant, on s’est dit qu’il pourrait être pertinent de voir des œuvres du même auteur au sein de la même chronique. De ce fait, on peut poser un regard complet sur tout ce qu’un mangaka a voulu raconter sur chacun de ses titres, mais aussi ce qui peut réunir, mais aussi différencier toutes ces sagas. Pour ce premier essai, on s’est dit que l’on allait s’attaquer au registre d’un mangaka qui fait souvent parler de lui au sein des discussions de fans. Il s’agit de Hiro Mashima et plus particulièrement des trois grands titres qu’il a réalisés à savoir Rave, Fairy Tail et Edens Zero. On va donc essayer de voir ce qui se cache derrière chacun d’entre eux, mais aussi noter l’évolution du style de l’artiste au fil du temps. Il est donc grand temps pour plusieurs petites escales qui ont toutes quelque chose à nous raconter.
Rave – l’aventure de l’enfance
Il fallait bien commencer quelque part et l’on ne pouvait pas parler de Mashima sans évoquer sa première œuvre. Rave fait partie de ces séries qui nous ont accompagnés pendant très longtemps au début de notre découverte du monde du manga. Les péripéties de Haru, simple adolescent, qui se retrouvent à devoir préserver le monde de nombreux dangers ont su grandement parler à l’enfant que l’on était à cette époque. Il faut dire que le mangaka prouvait à chaque tome qu’il était capable de créer un univers grandiose et fantastique. Possédant sa propre mythologie et culture, cette épopée n’en était que plus grisante étant donné qu’on avait réellement cette sensation d’être plongé sur ces terres gorgées de magie. Toutes les rencontres que l’on a pu faire, les combats observés, les amitiés qui se sont tissées et les rires déployés ont permis de façonner cette fresque gigantesque. En fait, Rave était ce que l’on pouvait appeler une aventure avec un grand A. Pourtant, en l’observant maintenant on se rend compte que la structure narrative est classique au vu de tous les titres qui ont suivi la même route et même ceux qui étaient là avant. Alors pourquoi cette première série était aussi plaisante à suivre et qu’elle a marqué tant de lecteurs ? La réponse est simplement un parfait équilibre entre tous les éléments proposés. A aucun moment on avait une sensation de ralentissement au sein de l’intrigue. Même quand on était en dehors de l’action, on trouvait toujours de nouveaux éléments qui venaient capter notre attention. On était donc autant sous le charme de l’aspect épique de cette œuvre que par la richesse de son univers. Même le simple fait de voir ce groupe se constituer et vivre des aventures folles et délirantes suffisait à notre bonheur.
Tout ceci fait donc que l’on n’a jamais eu la moindre pensée sur le fait que la saga faiblissait. Le plaisir était présent et ne nous lâchait à aucun moment même s’il prenait des formes diverses. On peut facilement citer de nombreux aspects du récit qui aujourd’hui peuvent paraître banals, mais cela fonctionnait parfaitement. Ainsi, Rave a servi de fondations solides au style qu’allait prendre Mashima par la suite et aiguisé au fil des tomes et des années. Un coup de crayon qui s’affine et qui va aussi symboliser quelque chose de bien plus fort pour l’ensemble de son œuvre. En fait, quand on se penche sur cette première licence et sur les suivantes, on se rend compte qu’il y a un passage de flambeau qui s’organise entre les personnages. Le mangaka joue exprès là-dessus, car il ne veut pas que l’on oublie tous ces gens qu’il a créés et dont l’influence va impacter les péripéties de ceux qui vont suivre. Rave est donc autant une lettre d’amour de sa part au genre du récit de fantasy que les prémices de cet univers qu’il allait façonner à sa sauce et qui est autant source d’émerveillement que de discorde. Une première série plus que réussie et qui va avoir bercé bon nombre de lecteurs qui n’attendaient plus que de découvrir les futurs voyages qui allaient naître dans l’esprit de celui qui les avait tant fait rêver. Un second contact qui n’a rien a envié au périple d’Haru, mais qui a juste malheureusement subi le contrecoup du chemin pris volontairement par l’auteur. Pour nous qui avons grandi avec ces personnages fantastiques, on garde cet amour pour eux qui va avoir soit un effet positif sur la suite ou au contraire un revirement de situation. Une appréciation propre à chacun et qui va souligner l’importance de Rave dans le parcours de Mashima et dans son évolution.
Fairy Tail – le classique qui fait débat
C’est au tour maintenant de la licence phare de l’auteur. Fairy Tail a marqué le paysage du manga tout au long de son existence. L’aventure de Natsu et de ses comparses mages au sein de la célèbre guilde a mis des étoiles dans les yeux de nombreux lecteurs. Ce qui est remarquable avec cette saga, c’est que l’univers dépeint nous semble encore plus grandiose que celui qui nous était proposé dans Rave. On sent les ambitions de Mashima qui voit les choses encore plus grand afin de dessiner un immense terrain de jeu pour sa créativité. Cela fonctionne très bien et l’on a pris un immense plaisir à l’époque à découvrir le récit de tous ces gens qui semblent innombrables et qui ont tous leur moment de gloire. Au vu de la grandeur de cette œuvre, il est même presque difficile de limiter Fairy Tail à seulement Natsu et Lucy. Dès les premiers pas, on sent qu’il y a une multitude d’intrigues à nous raconter et qui vont donner encore plus de vie à ce monde fictif. On apprécie alors de se perdre dans cet environnement qui est propice à l’imagination, à l’amusement et à la rêverie. Pourtant, cette licence est aussi celle qui a mis le feu aux poudres concernant les avis de chacun. Pour certains, ils avaient l’impression de voir un copier-coller de ce qu’il avait fait sur Rave notamment au niveau des protagonistes. De plus, c’est aussi avec la notoriété grandissante de Fairy Tail que sont arrivés les premiers clichés autour du style de Mashima. Qu’il s’agisse justement de son habitude à jouer sur l’érotisme de ses personnages féminins, du fameux pouvoir de l’amitié ou simplement du schéma narratif qui semble toujours le même, les remarques sont nombreuses. Elles suscitent par moments le débat, mais vont aussi surtout être l’occasion de taper sur le travail de l’auteur qui a un style dont il ne veut pas se détacher au final. Cependant, est-ce vraiment grave ?
Selon nous, absolument pas. Ce n’est pas parce que l’on retrouve certaines similitudes plus ou moins présentes que cela dénature totalement l’expérience. Cela peut étonner bien sûr au premier abord, mais il faut aussi voir ce qui est au-delà de cette simple apparence. Fairy Tail est un excellent nekketsu qui a su faire rêver et accompagner un nombre incalculable de lecteurs au même titre que certains ont grandi avec Dragon Ball ou Naruto. Bien sûr, il ne faut pas oublier toute l’importance qu’a eue Rave pour Mashima étant donné que cela fut son premier gros succès. C’est justement en apprenant de tout ce qu’il avait fait précédemment que l’auteur a su dégager une série qui a atteint la renommée qu’elle a aujourd’hui. Elle n’est pas exempte de défauts, mais cela n’est au final que peu de chose par rapport à la grandeur de l’aventure qui nous est proposée. En dehors de ça, il faut aussi observer à quel point Fairy Tail a su repousser certaines limites de son grand frère. Qu’il s’agisse de la densité en termes de personnages, la mythologie propre à cet univers enchanteur, l’action présentée et même l’amélioration au niveau du dessin, tout se veut plus imposant. Pourtant, on ne peut s’empêcher de comparer les œuvres de l’auteur entre elles, car elles affichent ce lien très fort qui les unit. Plus que chez certains autres mangakas, Hiro Mashima joue là-dessus, car cela fait partie intégrante de son identité. Il se fie à une structure qu’il a perfectionnée au fil du temps afin de garder cette nostalgie tout en continuant d’avancer. Rave et Fairy Tail se ressemblent autant qu’ils sont différents dans l’univers proposé. Il s’agit finalement d’une question d’appréciation personnelle, mais aussi de souvenirs par rapport à la première saga que l’on découvre de cet artiste.
Edens Zero – le futur aux multiples promesses
On finit donc ce petit tour d’horizon des œuvres de Hiro Mashima avec le dernier en date et qui est toujours en cours. Edens Zero, au même titre que Fairy Tail, a rapidement fait parler de lui-même par rapport à tout ce que les gens peuvent reprocher au style de l’auteur. Il est vrai que l’on retrouve tout ce qui avait déjà constitué ses précédentes épopées, mais encore une fois il ne s’agit absolument pas d’un défaut en soi. Mashima, à travers cette licence, montre qu’il est toujours resté fidèle à ce qui l’animait sans pour autant stagner. Il suffit de voir l’évolution de son trait, mais aussi la manière dont il donne vie à cet univers inédit. Si celui de son précédent titre était déjà remarquable, cette aventure galactique offre encore plus de possibilités pour le futur. Dès les premiers chapitres, on sent que l’on souhaite nous inviter à une épopée pouvant dépasser tout ce que l’on a connu par le passé chez le mangaka. Il y a donc constamment cette volonté de se surpasser qui s’exprime à travers chaque virée inédite et qui montre l’homme derrière ces dessins cherche constamment à se perfectionner dans ce qu’il maîtrise déjà très bien. Il n’est pas obligé d’y avoir de changements drastiques d’une saga à l’autre pour que l’on puisse ressentir tous les efforts mis par le créateur de ces mondes. C’est même remarquable de voir un individu rester autant ancré dans un domaine et qui cherche non pas à en ressortir, mais plutôt à repousser les frontières de cette zone. On éprouve tout à fait ça quand on passe de Rave à Fairy Tail et ensuite à Edens Zero. On grandit avec l’une de ces histoires et l’on s’y raccroche tant on passe un bon moment dessus. Cela joue bien sûr sur notre ressenti par rapport à la suite et qui fait que certains préféreront leur première découverte de Mashima, car elle est vierge de tout ce que l’on peut voir ailleurs.
Il est donc tout à fait possible que l’on évolue aussi au même titre que les récits de cet auteur ou bien que l’on préfère conserver ces souvenirs que l’on a eus en parcourant pour la première fois ces terres qu’il n’a cessé d’étendre par la suite. Edens Zero a un énorme potentiel sur le long terme, comme ce fut le cas pour ses prédécesseurs, mais va aussi porter leur héritage. Il ne faut donc pas voir cette licence comme un clone de ses grands frères se déroulant dans l’espace, mais comme une nouvelle itération reprenant l’âme de ses derniers et en y ajoutant des améliorations et une petite touche personnelle. Encore une fois, il est tout à fait normal de ne pas forcément être réceptif à certaines sagas, mais il est aussi important d’observer l’évolution d’une personne au fil de ses ouvrages. On ne peut savoir si Edens Zero sera le point culminant de la carrière de Mashima en matière de travail sur l’écriture et le développement d’un univers. Cependant, il est évident que cette série marquera une nouvelle étape dans sa perfection de cette voie qu’il a choisie et dont il ne s’est jamais réellement détourné. Trois œuvres qui ont cette particularité de partager un vrai lien entre elles sans pour autant être de pâles copies du récit original. Des épopées qui nous font vivre des moments inoubliables et qui nous ramènent un peu à cette enfance que l’on avait quand on explorait pour la première fois le genre du nekketsu. Un ou une artiste a toujours ce petit quelque chose qui va se transmettre d’une œuvre d’art à l’autre et c’est pareil dans le monde du manga. Que cela soit dans le style graphique, l’écriture et le développement de chaque élément d’un scénario ou bien l’ambiance proposée, il y a toujours cette petite marque de fabrique qui va faire l’originalité d’un auteur et à laquelle on va s’attacher. Rave, Fairy Tail et Edens Zero symbolisent à merveille le parcours d’un homme qui se concentre sur ce qui l’a toujours animé, mais en y ajoutant toujours quelques couches en plus.
Et voilà qui conclut ce premier chapitre de ce nouveau rendez-vous. N’hésitez pas à nous dire en commentaire ce que vous pensez de ces trois mangas, mais aussi du travail de Hiro Mashima de manière générale. On vous écoute pour savoir si vous souhaitez un autre article dédié à un prochain artiste.