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Le rideau se baisse : Baki the Grappler

C’est un gros événement qui a eu lieu récemment avec la conclusion d’une série qui avait été très attendue. En effet, les éditions Meian ont sorti récemment les quatre derniers volumes de Baki the Grappler, la première partie de cette impressionnante saga. Dès son annonce, cette série avait su frapper un grand coup tant on n’espérait plus de la voir faire son retour en France. En plus de ça, l’éditeur a su proposer une remarquable Perfect Edition qui rend honneur au spectacle proposé dans ce manga. Et comme j’ai suivi avec attention chaque nouvelle vague de tomes, il était impensable que je ne parle pas de cette conclusion qui a su apporter un final de haute volée. Que ce soit autant dans le spectacle proposé que dans les symboles liés à ce dernier acte, il y a énormément à dire sur cette série qui n’est pas uniquement un pur défouloir. Alors qu’il ne reste plus que quelques participants dans cette folle compétition, on s’apprête à vivre un grand moment pour les arts-martiaux et surtout pour ce garçon qui a forgé sa voie à la force de ses poings. Le gamin désireux de se venger finit par se transformer pour devenir un petit ogre capable de faire trembler les plus grands.

La conclusion du plus grand tournoi

Baki the Grappler T1Le manga culte de Keisuke Itagaki s’était arrêté alors que l’on arrivait à la dernière partie du tournoi. Après avoir enchaîné tant de combats et versé beaucoup de sang, quatre guerriers s’étaient hissés jusqu’en demi-finale. Parmi eux, le jeune Baki continue de faire des étincelles même si son ascension ne fut pas sans heurt. Le voilà maintenant devant faire face à ce qui pourrait bien être le pire adversaire possible depuis le début de cette compétition. Face à plusieurs millénaires d’histoire des arts martiaux, cet adolescent semble bien petit et peu enclin à la victoire. D’ailleurs, son opposant est bien le seul de tout cet événement à n’avoir reçu aucun dommage de la part de ses adversaires. Un homme qui semble intouchable et dont les techniques provoquent de terribles dommages corporels. Mais alors que tout le monde attend impatiemment la venue de ces deux maîtres au centre de l’arène, la surprise va être de taille pour tous à l’entrée du jeune champion. Baki débarque et affiche de multiples blessures sévères comme s’il avait dû se battre en coulisses. Mais même son opposant semble étonner de son état. Malgré tout, le fils de l’ogre ne semble pas du tout épuisé ou même angoissé à l’idée du combat à venir. Au contraire, il montre un visage particulièrement serein comme si le résultat semblait déjà dans sa poche. Personne ne semble comprendre ce qui se passe mis à part un homme qui découvre ce qui a bien pu causer ces blessures.

Alors que tout le monde pensait que cette rencontre serait à l’avantage d’un d’entre eux, l’incertitude s’apprête à les frapper. Mais cela est loin d’être le seul événement qui retient l’attention du public. Dans les coulisses, l’autre demi-finale se prépare entre le vieux sage et cette montagne de muscles qui n’hésite pas à se doper pour arriver à ses fins. La force brute contre la sagesse, une affiche qui n’a eu de cesse d’exister au fil des ans et qui, cette fois, est organisée par le meilleur représentant de chaque camp. Mais tandis que le plus ancien encore en lice se prépare pour la suite, son instinct de survie résonne fortement. Lui qui a passé toute son existence à parfaire son art afin de pouvoir éviter n’importe quelle attaque ressent quelque chose d’unique pour la première fois. Tout ce savoir emmagasiné lui crie de ne pas se rendre dans cette arène, car c’est le meilleur moyen d’échapper à la mort. Mais si cela serait normal pour un maître que de se fier à ce sentiment, en tant que combattant il ne peut qu’aller à l’encontre de sa raison. Cette attitude est ce qui définit au mieux les quatre participants restants. Des hommes qui ont totalement dédié leur vie au combat peu importe la finalité de cette route et les coups pris en chemin. Pour devenir le plus fort, il leur faut passer par la douleur et se surpasser, mais aussi faire preuve d’une certaine folie se rapprochant de la bêtise. Des idiots qui donnent tout pour accomplir un rêve simple et aussi vieux que le monde.

C’est un événement marquant qui a lieu ici, car après nous avoir accompagné pendant ces nombreux mois, il est temps de faire nos adieux à la première partie de Baki the Grappler. Avec ses quatre derniers tomes, la série va nous délivrer une partie très importante et qui est le reflet de tout ce qui s’est construit tout au long de cette licence. C’est donc un moment crucial pour cette histoire qui s’apprête à mettre un terme à ce premier chapitre de la légende de ce garçon qui n’a été élevé que pour combattre. Et cela passe tout d’abord par un dernier combat lourd de sens.

Une finale symbolique

Si l’on peut faire un petit arrêt sur le spectacle que nous offrent les deux demi-finales, ces quatre tomes de Baki vont surtout être l’occasion d’assister à la finale tant attendue. Et en fait, pour bien cerner à quel point celle-ci revêt un rôle capital en dehors du fait de désigner le grand vainqueur du tournoi, il faut justement s’attarder sur ce qui s’est passé avant. Avant toute chose, il faut savoir que je vais être obligé de spoiler pour pleinement aborder ce combat donc n’hésitez pas à arrêter votre lecture ici si vous n’avez pas encore lu. D’un côté, on va avoir Baki que l’on pouvait imaginer atteindre ce stade au vu de son statut de protagoniste, mais aussi de sa capacité à surmonter chaque épreuve. Pourtant, la demi-finale qu’il va mener va révéler quelque chose de nouveau en lui. Une autre facette qui peut être terrifiante, mais qui est aussi l’un des seuls moyens qu’il a pour dépasser ses limites. Ainsi, c’est un tout nouveau Baki que l’on a devant nous et qui est prêt à en découdre face à ce géant qu’est Jack Hammer. Concernant ce dernier, son précédent duel va amener un rebondissement de taille dans son histoire et la raison pour laquelle il est prêt à aller à de tels choix pour gagner quitte à meurtrir à jamais son corps. Deux êtres qui nous ont largement prouvé leur détermination et surtout les sacrifices qu’ils sont prêts à accepter pour gagner même si ce ne serait que de courte durée. Si l’on est à un point culminant dans le développement de ces deux guerriers, cet affrontement va être encore plus important pour eux qu’on l’aurait imaginé.

En effet, on comprend rapidement que cette dualité qui va nous être proposée est bien plus importante qu’on pourrait le croire. Deux combattants que l’on pensait totalement opposés et qui finalement s’avèrent bien plus proches. Un lien qu’il ne connaissait même pas a fini par se dévoiler et faire de cet affrontement une bataille fratricide. On va alors, pour la première fois, découvrir un autre visage de ce manga à travers son action. Il s’agit de son côté émouvant et même tragique que l’on avait pu avoir un aperçu avant à travers certains flash-back. Cependant, cette fois tout va s’exprimer à travers les coups que vont s’échanger nos deux derniers participants et l’on va alors être témoin à quel point leur duel est autant un déchirement pour eux qu’une manière de se rapprocher à travers leur objectif commun. Cela va servir à développer grandement leur écriture, mais aussi un autre personnage de taille dont l’ombre n’est jamais loin. Il s’agit bien sûr de Yujirô, l’homme à abattre et que rien ne semble arrêter malgré l’effort de tous ceux qui se sont opposés à lui. On voit que ce monstre à allure humaine a causé tellement de souffrances dans son sillage sans forcément que cela soit en combattant directement. Un être qui n’hésite pas à détruire la vie des gens qui ont marqué sa vie dans le seul but de créer l’adversaire qui pourra le faire vibrer. Un dernier combat qui a les allures d’un rapprochement familial entre ces trois individus tout en faisant résonner toute la rage et la tristesse de ces artistes martiaux à l’égard de celui qui a détruit leur existence dès leur naissance.

Si cette finale est très importante autant sur son côté spectaculaire que par l’histoire commune des deux combattants, un autre élément de taille va renforcer l’attrait de cette dernière partie. Un point qui a été travaillé tout au long de la série pour finalement atteindre un tournant majeur au sein de ces quatre derniers volumes. Il s’agit tout bonnement de l’évolution de Baki qui doit faire face au pire adversaire qui soit et qui ne se trouve pas face à lui. Une lutte interne entre ce sang maudit qui est le sien et son envie de dépasser celui qui a toujours été devant ses yeux. L’ogre n’est plus seul à faire des ravages.

L’éveil d’un ogre

Baki the Grappler Vol.24 FINL’autre élément de Baki qui va prendre tout son essor dans cette dernière partie du manga est le développement de ce dernier. Après tout, il est le protagoniste de cette histoire et on peut forcément se dire qu’il va grandement évoluer au fur et à mesure des chapitres et combats. Cependant, son écriture ne va pas s’arrêter à simplement observer ses progrès au cœur de l’arène. De ce côté, on a déjà pu admirer ses efforts pour se surpasser et surtout découvrir que chacun de ses adversaires va être une manière pour lui de perfectionner ses techniques et sa maîtrise des arts martiaux. Mais avec ces quatre derniers volumes, on va assister à une confrontation bien plus personnelle pour le jeune champion et qui fait écho à tout ce qu’il a pu combattre jusqu’ici à chaque seconde. Comme on le sait, son objectif final est de faire tomber de son piédestal son père qui a fait tant de ravages dans son existence. C’est autant une forme de vengeance contre lui que le désir de devenir le plus fort au monde. Mais rien que dans cette affirmation, on sent la dualité qui s’opère entre le gamin qui a tout perdu il y a déjà quelques années et l’héritier de cet ogre suivant le même chemin que ce dernier. Pour enfin mettre un terme à cette traque qui semble si difficile, il est obligé de suivre les traces de son géniteur qui ne désire que ça. Et donc, si l’on comprend et que l’on partage son envie de vaincre ce monstre au visage humain, on est aussi conscient que tout ça est aussi un véritable piège de ce dernier pour que son vœu s’exauce.

Après tout, l’unique moyen pour terrasser l’ogre semble d’en devenir un afin de rivaliser avec sa puissance hors du commun. Mais cela signifie aussi qu’il est nécessaire de perdre tout ce qui fait son humanité pour se hisser à son niveau. Il n’est alors plus question que de se battre et de dédier toute son existence à ce but sans fin sans espérer un seul instant d’autre chose. Et cela se reflète à merveille avec le parcours de Baki jusqu’à cette conclusion. Alors qu’il paraissait redoutable, il gardait pourtant une part humaine. Un adolescent qui aime lutter, mais qui semble aussi avoir une chance d’obtenir une autre forme de bonheur. Et pourtant, c’est dans la demi-finale qu’il va faire que l’on va assister à un changement important. Pour la première fois, il fait appel à cet héritage maudit qui est le sien et qui coule dans ses veines. Il cherche à le dompter pour en faire une arme qui soit sous ses ordres et non qu’elle le transforme en une bête comme son père. Et pourtant, quand on le voit dans cet état, on ne peut s’empêcher de voir le reflet de Yujirô. Il avait beau se démener pour gagner, il gardait toujours cette personnalité rayonnante et même espiègle. Mais cette fois, on entrevoit le monstre qu’il pourrait devenir et les frissons que l’on ressent à cet instant ne sont pas les mêmes que lorsqu’il gagne habituellement. On comprend alors que le véritable combat n’est pas celui qui s’opère devant nos yeux, mais qui se passe au plus profond de Baki. Une lutte constante pour dompter cette puissance ou bien devenir un être constamment rongé par le désir de vaincre et d’exterminer ceux qui se trouvent sur son chemin. Voilà pourquoi Yujirô, s’il a passé beaucoup de temps en tant que simple spectateur, se présente pourtant comme l’antagoniste de cette histoire. Il est celui contre qui notre protagoniste se bat même si ce n’est pas directement.

Et l’on se met donc à refermer cette première et intense partie du mythe Baki. On peut clairement dire que ce classique du genre sait toujours autant faire forte impression même après tant d’années. Avec son édition exemplaire rendant parfaitement honneur à l’intensité de ces affrontements spectaculaires, cette aventure nous aura fait vibrer de bout en bout. Un récit qui est très loin de se limiter uniquement à de la baston et qui utilise ces combats pour raconter bon nombre de choses intéressantes. Si l’on a pu assister à la naissance du fils de l’ogre et à son ascension, le chemin pour viser le sommet est encore bien long.

Baki the Grappler a fini son échauffement

Après tant de temps en compagnie de ces impressionnants combattants, il était impensable de ne pas se focaliser sur ce que cette série avait pu offrir au fil des tomes. Si j’ai traité ici de la finale de cette compétition qui s’inscrit comme un classique du genre ou bien de l’évolution de Baki, il y a encore bien d’autres facettes de cette histoire que l’on peut traiter. Car si le manga de Keisuke Itagaki nous conte la quête d’un garçon cherchant à rattraper et battre son père, son récit va aussi bien au-delà. Rien que dans la réflexion apportée sur ce désir d’être le meilleur, cette histoire arrive à dépasser le cadre de la fiction. Comme le dit si bien l’organisateur de cette compétition, on fait face ici à de grands idiots qui sont prêts à subir de terribles blessures pour exaucer un rêve qui pourrait facilement s’éteindre dès lors qu’une personne plus forte fasse son apparition. Un souhait qui, justement, peut nous paraître bête au vu du prix à payer et c’est justement ce que le mangaka souhaite nous montrer. Il s’agit avant tout ici d’une représentation d’un vœu bestial que chacun peut avoir un jour, mais traité de manière exacerbée par le prisme de ces participants. On nous fait donc réfléchir avec brio sur la nature humaine et surtout ce qui peut animer l’homme depuis la nuit des temps. Une façon intéressante de travailler la psychologie de ces personnages et de comprendre la raison pour laquelle ils se jettent à corps perdu dans cette intense bataille pour un moment de gloire qui ne durera jamais.

Finalement, Baki the Grappler aura autant été un remarquable divertissement de bout en bout qu’une série bien plus surprenante qu’on pourrait l’imaginer. Derrière cette escalade de puissance, de coups et de brutalité se trouve aussi une épopée où l’on nous expose un instinct primaire qui n’a jamais quitté ces personnages. Là où la majorité du monde finit par faire taire cette petite voix qui leur demande d’être le plus fort, ces quelques individus ont continué de la suivre et de lutter pour dépasser leurs propres limites. Un récit qui est donc autant un show grisant pour le spectateur que l’on est qu’un dramatique conflit familial qui a déjà fait verser beaucoup trop de sang. Évidemment, il est clair que l’on est très loin d’avoir tout vu étant donné que le mangaka ne délivre ici que la première pierre de cette légende qu’est Baki. Mais on peut déjà dire que ses débuts sont palpitants à suivre et que l’on est interpellé de savoir si oui ou non il deviendra un monstre où celui qui abattra ce dernier. Que vous ayez apprécié l’aventure jusqu’ici ou que vous hésitiez encore, cette saga a largement de quoi vous séduire tout en offrant un divertissement à la fois simple et maîtrisé. Il n’est alors plus tellement sujet à y avoir de questions autour de cette partie, mais sur l’avenir de ce cher Baki. Est-ce que son combat, qui dure déjà depuis des années, contre son père trouvera-t-il sa conclusion prochainement ? Quels seront les prochains adversaires qui se dresseront sur sa route ? Je vais prendre mon mal en patience en attendant d’avoir plus d’informations sur la possible parution de la suite.

N’hésitez pas à partager dans les commentaires votre propre avis ainsi que votre ressenti concernant cette première partie de la légende de Baki. Trouvez-vous que ces 24 tomes ont su proposer quelque chose de fort et dépassant le simple cadre de l’action ? Avez-vous été emporté tout au long de cette compétition qui aura fait couler beaucoup de sang et de sueur ? Est-ce que l’évolution de notre jeune protagoniste a su vous captiver au fil de ses confrontations et de sa lutte contre son sinistre héritage ? Pensez-vous qu’il pourra faire face à son père ? Qu’espérez-vous pour de possibles futures parties ? Je reste à votre disposition pour échanger, discuter et débattre autour de ce sujet.

©2008 KEISUKE ITAGAKI (AKITASHOTEN)